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sous-entendue; sous ce rapport, ce jugement viole de nouveau les articles déjà invoqués, qui ordonnent de motiver les décisions judiciaires.

Enfin il terminait en tenant pour reproduits et invoqués sur ce second chef de demande les mêmes arguments et les mêmes violations, en matière de prescription, qu'il avait fait valoir sur le premier chef.

Quant au troisième chef, celui relatif au double droit exigé en vertu de l'article 38 de la loi de frimaire, à défaut d'enregistrement en Belgique du jugement de Diekirch, du 28 octobre 1840, le demandeur faisait observer que le jugement attaqué ne s'est pas occupé de ce point, et faisant encore ici application de l'adage qui non adjudicat abjudicat, il soutenait que le jugement avait repoussé à cet égard l'opposition à la contrainte, et que par suite, en ne lui adjugeant point la somme réclamée, il avait violé l'article 38 combiné avec l'article 22 de la loi de frimaire.

Le défendeur n'a pas fourni de réponse.

Le ministère public a conclu au rejet du pourvoi, d'abord parce que le jugement altaqué se bornait à constater une dissimulation de prix dans l'acte de vente de 1809, el n'avait raisonné de l'existence d'une contrelettre qu'hypothétiquement et sans reconnaître qu'une contre-lettre eût en effet existé, ensuite parce que le jugement du tribunal de Diekirch, du 28 octobre 1840, en vertu duquel le fisc prétendait au droit de rétrocession, avait été mis à néant par la Cour d'appel de Luxembourg; enfin parce que le jugement du 28 octobre 1840, qui avait prononcé la résolution du contrat de vente de 1809, n'ayant fait que remettre les choses au même état qu'avant cette vente, n'avait opéré aucune transmission de propriété, et partant n'était pas soumis à la formalité de l'enregistrement en Belgique, aux termes de l'art. 22 de la loi du 22 frimaire an vir.

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jugements de Diekirck invoqués par l'administration se bornent à constater qu'outre le prix de 3,600 fr. stipulé dans l'acte de vente passé devant le notaire Urbain, de Faux-Villers, le 26 nov. 1809, le vendeur a reçu une somme de 2,950 fr. 50 cent., non déclarée dans cet acte;

Attendu que ce fait ne suppose pas nécessairement l'existence d'une contre-lettre, d'où il suit que le moyen de cassation manque de base.

Sur le deuxième moyen tiré de la violation de l'art. 67, § 7, no 1 de la loi du 22 frimaire précitée, en ce que le jugement attaqué refuse à l'administration le droit qu'elle réclame par sa contrainte, du chef de la rétrocession des biens qui ont fait l'objet de la vente de 1809 :

Attendu que c'est le jugement de Diekirck, du 28 oct. 1840, que la demanderesse invoque comme fondement de sa prétention;

Attendu que ce jugement qui prononçait la résolution de la vente de 1809, ayant été déféré à la Cour d'appel de Luxembourg par le notaire Berg qui figurait au procès comme cessionnaire des droits de Chrisostôme Marteling, a été réformé par l'arrêt de cette Cour du 17 mai 1844, qui par son dispositif le déclare en termes exprès;

D'où résulte que la résolution de la vente de 1809 venant à disparaître, le second moyen de cassation n'est pas mieux fondé que le premier.

Sur le troisième moyen tiré de la violation des art. 58 et 22 de ladite loi de frimaire, en ce que le jugement attaqué n'a pas adjugé à l'administration le double droit qu'elle exige pour défaut d'enregistrement en Belgique du jugement de Diekirck, du 28 oct. 1840:

Attendu que parmi les actes passés en pays étrangers il n'y a que ceux qui contiennent transmissions de propriété d'usafruit ou de jouissance de biens immeubles situés en Belgique qui soient, aux termes de l'article 22 de la loi de frimaire, soumis à l'enregistrement dans le délai que cette disposition détermine;

Attendu que les résolutions opérées par l'effet d'une condition expresse ou tacite inhérente au contrat n'opèrent point une mutation soumise au droit proportionnel;

Que dès lors le moyen tiré de ce que le jugement du tribunal de Diekirck, qui prononce la résolution de la vente dont s'agit pour défaut de payement du prix, n'a pas

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DEGRÉS DE JURIDICTION.

Une créance ne se transforme pas en plusieurs créances par la division qui s'en opère entre les représentants ou les ayants cause du créancier.

Est en premier ressort le jugement rendu par un tribunal de première instance' sur une assignation, faite à la requête de plusieurs personnes, en payement d'une créance supérieure à 2,000 francs résultant de l'article 1733 du Code civil et appartenant aux demandeurs à titre d'une cession que leur en ont faite les héritiers du bailleur, quoique les parts de chacun d'eux et celles des cessionnaires eux-mêmes soient inférieures à cette somme. (Loi du 1er mai 1790; loi du 25 mars 1841, art. 14; C. civ., articles 1319 el 1322.)

(COMPAGNIES D'ASSURANCES L'ESCAUT ET
SECURITAS, C. CUYLITS-LATOUR.

-

Les faits de cette cause, et le premier arrêt de cassation par suite duquel la Cour de Gand avait été saisie de l'affaire, sont rapportés dans ce recueil, année 1850, 1 part., p. 173.

La Cour de Gand ayant adopté la doctrine de la Cour de Bruxelles dont l'arrêt avait été annulé, le débat a été reporté devant les chambres réunies de la Cour de cassation.

Le second arrêt dénoncé était ainsi conçu : Vu le jugement dont est appel rendu par le tribunal d'Anvers, le 20 fév. 1847;

« Vu l'arrêt rendu par la Cour de cassation, en date du 2 nov. 1849, qui renvoie la cause à la Cour de Gand;

«Attendu que les compagnies d'assurances l'Escaut el Securitas ont, par des polices séparées, portant des dates et des stipula tions différentes, et signalant chacune à l'un

des assureurs l'assurance contractée par l'autre assuré, pour une somme de 12,500 francs chacune, assuré la propriété du sieur Van Immerseel, dont l'intimé était locataire;

«Attendu qu'un incendie ayant éclaté en mars 1846, dans la propriété assurée, et le dommage ayant été, par une expertise contradictoire, fixé à 3,760 francs 72 cent., les deux compagnies ont, aux termes d'une quittance portant le date du 5 mai 1846, envoyé payer à cette date, et chacune pour moitié, à Auguste Van Immerseel la susdite somme, lequel moyennant ce payement a subrogé, sans garantie jusqu'à concurrence de la somme payée, ces compagnies dans tous ses droits et actions résultant de l'incendie contre le locataire;

<«< Attendu que ladite propriété appartenant, au moment du sinistre, pour moitié à M. Auguste Van Immerseel et pour une autre moitié à la dame E. Van Immerseel, épouse Simon, la dette née de l'incendie se divisait entre les deux propriétaires à qui elle appartenait divisément à chacun pour unc moitié, qu'en supposant valable là cession du 3 mai, faite par Auguste Van Immerseel, tant pour lui que pour sa sœur, toujours est-il vrai que ce n'est point une créance unique jusqu'à concurrence de 3,760 fr. 72 cent, qui a été cédée aux deux compagnies, mais deux créances divisées et distinctes ne s'élevant chacune qu'à la somme de 1,880 fr. 36 c.;

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Que si elles ont porté devant le tribunal d'Anvers une demande de l'importance de 3,760 fr. 72 c., ce n'est qu'en cumulant les deux créances distinctes et divisées qu'elles avaient acquises, inférieures chacune au taux du dernier ressort; que lorsque plusieurs demandeurs se réunissent pour former par un seul exploit, contre un défendeur unique des demandes ayant pour objet des créances distinctes, indépendantes l'une de l'autre, on doit dans ce cas diviser la demande et sa valeur, pour fixer l'importance de la contestation sur chacune des créances distinctes et déterminer par cette importance les limites du dernier ressort;

«Par ces motifs, la Cour, ouï M. le premier avoc. gén. Donny en son avis, déclare l'appel non recevable avec condamnation des parties appelantes à l'amende et aux dépens, ces mêmes dépens taxés à la somme de 343 fr. 63 cent., non compris le coût de l'arrêt ni la signification. »

A l'appui de leur nouveau pourvoi, les compagnies demanderesses invoquaient un seul moyen de cassation, tiré de la fausse

application et de la violation de l'article 14 de la loi du 25 mars 1841 qui porte: « Les << tribunaux de première instance connais<< sent en dernier ressort des actions per<«<sonnelles et mobilières jusqu'à la valeur « de 2,000 francs en principal, » de la violation de la loi du 1er mai 1790 qui proclame qu'il y a en matière civile deux degrés de juridiction; et enfin de la violation des articles 1319 et 1522 du Code civil relatifs à la foi due aux actes.

A l'appui de ce moyen qui, sauf l'invocation des deux derniers textes, était identiquement le même que celui qu'on avait fait valoir contre l'arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles, les compagnies demanderesses invoquaient les considérations de l'arrêt de cassation du 2 nov. 1849.

Elles ajoutaient en résumé qu'il importait peu que par suite de la subrogation elles ne se fussent trouvées créancières chacune que d'une somme de 1,880 francs 36 c., l'import total du dommage éprouvé par Van Immerseel n'en formant pas moins une dette unique née du fait de l'incendie et de la responsabilité imposée au locataire par l'article 1735 du Code civil; que cette dette, une et identique, avait été réclaméc simultanément par les deux compagnies représentant ensemble le bailleur, créancier primitif, en vertu de leur subrogation, titre unique et commun qui avait servi de base à la poursuite; que cela résultait des actes de la procédure et de l'acte de subrogation; que l'arrêt dénoncé ne le contestait pas et n'aurait pu le contester sans méconnaitre la foi due à ces actes et sans contrevenir aux articles 1319 et 1522 du Code civil; que la Cour d'appel, pour juger la recevabilité de l'appel, devait se renfermer dans l'examen de l'exploit d'assignation; qu'elle ne pouvait apprécier aucun moyen du fond qu'en proclamant sa compétence; que la demande formée par un seul exploit et poursuivie en une seule instance ne constitue qu'une seule action, quoiqu'il y ait deux demandeurs, intéressés chacun pour moitié dans l'issue du litige; qu'en effet la loi ne fait pas dépendre le dernier ressort du nombre des demandeurs, mais de l'importance de l'objet en litige; que dans l'espèce cet objet était une somme de 3,760 fr. 72 cent., comme l'établissait l'exploit introductif d'instance et l'acte de subrogation qui lui sert de base; que si le défendeur avait été condamné à payer ladite somme, on n'eût pu lui refuser le droit d'appel, et qu'il est impossible que ce droit ne soit pas réciproque; que la Cour de Gand, en repoussant l'appel, avait donc

fait une fausse application de l'article 14 de la loi du 25 mars 1841, et y avait expressément contrevenu en violant la règle fondamentale des deux degrés de juridiction.

Le défendeur répondait :

Les deux compagnies demanderesses, en se réunissant après l'incendie de la maison Van Immerseel, pour réclamer à ma charge, en ma qualité de locataire, le montant total du dommage qu'elles avaient payé aux propriétaires, se sont fondées uniquement dans leur exploit introductif d'instance sur le payement fait par elles et la subrogation qui en était la suite; plus tard et dans leurs conclusions prises devant le tribunal d'Anvers, elles ont ajouté que cette subrogation leur était acquise par une conséquence naturelle du contrat d'assurance; elles n'ont point invoqué la subrogation conventionnelle résultant de la quittance du 5 mai 1846, quitlance qui n'a été enregistrée que le 21 nov. 1848 et n'a été invoquée comme fondement de la prétention des demanderesses qu'à l'audience de la Cour d'appel de Bruxelles du 22 nov. 1848.

Aussi l'arrêt dénoncé ne dit pas que cette quittance aurait servi de base à l'action; le jugement du tribunal d'Anvers fait au contraire foi qu'en première instance le débat s'est concentré sur la subrogation légale proprement dite et sur celle qui pourrait résulter éventuellement des contrats d'assurance.

C'est à tort que les demanderesses disent que les faits sont demeurés les mêmes que lors du premier arrêt de cassation, car l'arrét de la Cour de Gand ne constate pas seulement, comme l'avait déjà fait l'arrêt de la Cour de Bruxelles, que les deux compagnies avaient assuré la maison dont s'agit par des polices séparées, portant des dates et des stipulations différentes, chacune pour moitié seulement, et qu'elles n'avaient payé chacune que la moitié du sinistre, mais il constate en outre qu'au moment de l'incendie cette maison appartenait pour moitié à Auguste Van Immerseel et pour l'autre moitié à sa sœur Eulalie, épouse Simon, d'où il a tiré avec raison cette conséquence qu'en supposant la cession du 5 mai 1846 valable pour la part des deux propriétaires, quoique consentie par Auguste Van Immerseel seul, ce n'est pas une créance unique qui a été cédée, mais deux créances divisées et distinctes, inférieures chacune au taux du dernier ressort et que dès lors l'appel n'était pas recevable.

Par cette décision, la Cour de Gand n'a point violé l'article 14 de la loi du 25 mars 1841, ni la loi du 1er mai 1790, car il est généralement admis que lorsqu'il y a plusieurs demandeurs les demandes ne doivent être cumulées que quand leur intérêt est commun et qu'en même temps la dette qu'ils réclament est solidaire et indivisible; mais qu'il ne faut pas les cumuler lorsque l'intérêt des demandeurs est distinct, ni même lorsque cet intérêt étant commun, la dette n'est ni solidaire ni indivisible. Le défendeur citait à l'appui de ces principes les arrêts rapportés au Répertoire du journal du Palais, vo Degrés de juridiction, no 238 et suiv.; Jousse, Traité des présidiaux, partie 1re, ch. I, § 2, no 2; Carré, Compétence, t. 4, p. 276, 11o 295; Boitard, t. 3, p. 24, el Merlin, Rép., vo Premier ressort.

L'arrêt dénoncé, disait-il, après avoir décidé en fait qu'il s'agissait de créances distinctes, a donc fait une juste application de ces principes, en décidant en droit qu'on devait diviser les demandes, pour déterminer, d'après l'importance de chacune, les limites du dernier ressort.

Quant à la prétendue violation des articles 1519 et 1522 du Code civil, si les demanderesses ont voulu dire que la Cour de Gand a violé la foi due aux actes en ne décidant pas que la quittance du 5 mai 1846 a été le titre unique et commun qui a servi de base à l'action, c'est une erreur, puisque la Cour n'aurait pu porter une pareille décision sans méconnaitre tous les actes de la procédure en première instance, qui prouvent que cette quittance, qui n'a eu d'existence légale à l'égard des tiers que du jour de son enregistrement, 21 nov. 1848, n'a point servi de base à l'action.

La Cour de cassation, en rejetant le pourvoi, ne contrarierait d'ailleurs pas son arrêt du 2 nov. 1849, parce que les faits consta tés par la Cour de Gand sont autres que ceux sur lesquels cet arrêt est appuyé.

En effet, l'arrêt de cassation se fonde principalement sur ce que l'import total du dommage éprouvé par Van Immerseel formait une dette unique née du fait de l'incendie et de la responsabilité imposée au locataire et sur ce que les deux compagnies représentaient ensemble, en vertu de leur subrogation, le bailleur créancier primitif. Et l'arrêt de Gand constate en fait que la . maison incendiée appartenait, au moment du sinistre, aux deux enfants Van Immerseel, à chacun pour moitié, d'où il suit, comme le dit le même arrêt, que la dette née

de l'incendie se divisait de plein droit dans la même proportion entre les deux bailleurs. Il s'agit donc dans l'espèce, d'après les faits constatés, non pas d'une dette unique de 5,760 fr. 72 cent. originairement due à un seul, mais de deux dettes distinctes de 1,880 fr. 56 cent. chacune dans le chef du locataire, et par conséquent de deux créances corrélatives distinctes au profit des deux bailleurs. Ces créances étaient tellement distinctes que chacun des bailleurs, agissant en son nom particulier, aurait été non recevable à exiger du locataire la totalité du sinistre et que le locataire, s'il avait succombé sur l'action intentée simultanément par ses deux bailleurs, n'aurait pas eu le droit d'appel, parce qu'il ne pouvait appartenir à ces derniers d'intervertir par leur fait les degrés de juridiction qui sont d'ordre public. Or, ce que ne pouvaient pas les bailleurs, créanciers primitifs, les compagnies, en supposant qu'elles avaient été valablement subrogées en leurs droits, ne le pouvaient pas davantage.

M. le proc. gén. Leclercq a conclu à la cassation dans les termes suivants :

Le défendeur a été assigné par les deux demanderesses devant le tribunal d'Anvers en payement d'une somme de 3,760 francs 72 centimes, divisible entre elles deux par moitié.

Les Cours d'appel de Bruxelles et de Gand voyant dans cette affaire des intérêts distincts, des créances distinctes propres à diverses personnes et respectivement d'une valeur inférieure au taux de l'appel, ont décidé que le tribunal avait dù prononcer en dernier ressort, et qu'en conséquence l'appel de son jugement n'était pas recevable.

Votre première chambre, au contraire, y voyant une seule action d'une valeur supérieure au taux de l'appel, a décidé qu'il n'avait pu prononcer qu'en premier ressort et qu'en conséquence l'appel de son jugement était recevable.

Le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour de Gand, devant laquelle vous aviez renvoyé les parties après avoir annulé l'arrêt de la Cour de Bruxelles, ramène devant vous le mème débat; la loi du 25 mars 1841 nous trace les termes de la question que vous avez à résoudre pour le vider. Elle porte, art. 14: « Les tribunaux de première instance con"naissent en dernier ressort des actions personnelles et mobilières, jusqu'à la va« leur de 2,000 francs en principal, et des actions réelles iminobilières jusqu'à 75 fr.

་་

<< de revenu, soit en rente, soit par prix de « bail. »

Suivant cette disposition, la valeur de l'action détermine le degré d'autorité du tribunal de première instance pour y statuer; si une seule action personnelle est intentée, elle doit être jugée en premier ou en dernier ressort selon que sa valeur excède ou non 2,000 francs; si plusieurs actions sont intentées en même temps par un seul exploit, chacune doit être jugée en premier ou en dernier ressort selon que sa valeur propre excède ou non 2,000 francs, quoique toutes ensemble elles aient une valeur supérieure à cette somme, et qu'un seul jugement en décide.

. Telle est donc la question à résoudre.

Le tribunal d'Anvers a-t-il prononcé sur plusieurs actions réunies dans un seul exploit, ou bien a-t-il, comme l'a dit votre première chambre, prononcé sur une seule action?

S'il a prononcé sur une seule action, la valeur en embrassant la somme de 3,760 fr. 72 centimes toute entière excède le taux du dernier ressort, l'appel de son jugement est recevable, et pour l'avoir repoussé la Cour de Gand a contrevenu à l'art. 14 de la loi du 25 mars 1841; son arrêt doit être annulé.

S'il a prononcé sur plusieurs actions, la valeur de chacune n'embrassant qu'une partie de la somme de 3,760 francs 72 centimes, nécessairement inférieure à 2,000 francs, n'excède pas le taux du dernier ressort; l'appel de son jugement n'est pas recevable, et aucune contravention n'a été commise; le pourvoi doit être rejeté.

La solution de cette question dépend avant tout de la nature des droits, à raison desquels le défendeur a été attrait en justice par les demanderesses, car les actions tirent leur existence et reçoivent leur caractère des droits prétendus par ceux qui les intentent; nous devons donc commencer par préciser ces droits dans l'espèce :

Preneur à bail d'une maison assurée par les demanderesses, le défendeur se trouvait, aux termes de l'art. 1733 du C. civ., et à partir du jour du bail, tenu, envers le propriétaire bailleur, de l'obligation conditionnelle de payer en cas d'incendie les dégâts qui en seraient résultés, et à cette obligation conditionnelle correspondait contre lui une créance également conditionnelle sur le chef de ce propriétaire.

La condition s'est accomplie par l'incendie de la maison et par des dégâts évalués à la somme de 3,760 francs 72 centimes.

Les demanderesses les ont payés à titre d'assureurs et se sont fait céder la créance à charge du défendeur.

A cette époque l'assuré était décédé et représenté par ses deux enfants.

Ce sont eux qui ont reçu le payement de l'assurance et ont fait la cession de la créance passée du chef de leur père sur le leur.

Le défendeur a été altrait en justice par les demanderesses à raison de cette créance ainsi cédée.

Les circonstances que nous venons de résumer et qui en forment la cause, en déterminent également la nature, mais avant de l'y rechercher nous devons résoudre deux difficultés de fait élevées à ce sujet, l'une par le défendeur, l'autre par les demanderesses. Le défendeur prétend que l'action a été intentée à titre d'une subrogation légale dérivant des polices d'assurance, et non à titre d'une cession ou subrogation conventionnelle, ce qui en change tout à fait le caractère; les demanderesses de leur côté prétendent qu'elles ont agi à titre d'une cession à elles faite par un sieur Immerseel seul d'une créance à lui seul également appartenante, et non à titre d'une cession faite par un sieur Immerseel et par sa sœur, ainsi que l'a dit la Cour d'appel de Gand dans l'arrêt attaqué, contrairement à l'exploit introductif d'instance, auquel foi est due de son contenu, et elles en concluent que le point de départ de cet arrêt n'est pas exact.

La première de ces difficultés ne peut tenir devant les termes de l'arrêt attaqué : il a été rendu dans l'hypothèse d'une cession conventionnelle de toute la créance, il n'est pas attaqué de ce chef, et par conséquent nous devons le prendre avec les faits propres à cette hypothèse, tels qu'il les constate.

Il résulte du reste de toute la procédure, telle qu'elle est constatée par les actes auxquels se réfère l'arrêt attaqué, que l'action reposait sur une cession conventionnelle de toute la créance et que c'est sur une semblable cession qu'il a été prononcé en première instance comme en appel :

L'exploit introductif d'instance parle, il est vrai, d'une subrogation des demanderesses dans la créance de l'assuré sur le défendeur, sans dire si cette subrogation est conventionnelle ou légale, mais sur la réponse qu'y fait le défendeur, et qu'il applique d'ailleurs à la subrogation conventiounelle aussi bien qu'à la subrogation légale, les demanderesses prennent des conclusions formellement fondées sur une subrogation conventionnelle et sur la validité

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