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Il y avoit à Annay, près Lens, diocèse d'Arras, un homme qui s'étoit fait rotestant il y a quelques années, et qui avoit entraîné dans sa défection nonseulement sa famille, mais toutes les familles du pays. Cet homme étoit trèsardent pour le culte protestant : il faisoit venir de temps en temps un ministre; ik voit établi un prêche dans sa commune, il vouloit même avoir un temple. Il solicitoit le maire de le seconder dans son projet de présenter une pétition au ministre des cultes, pour obtenir la construction de ce temple. Le maire l'ayant refusé, ce refus excita le ressentiment d'un homme ardent et irascible. Hochin (c'est e nom de cet homme) alla une nuit, avec autant d'imprudence que de méchančeté, ravager un champ du maire, situé au milieu de la commune. Surpris au milieu de cette opération, il essaya d'abord d'arrêter les poursuites. Le maire consentoit, dit-on, à le laisser tranquille, à condition qu'il donneroit une somme aux pauvres, et qu'il le garantiroit de tout dommage à l'avenir. Hochin refusa de souscrire à ces conditions. L'affaire fut donc portée en justice, et il y eut ordre d'arrêter le coupable, qui, voyant venir les gendarmes, fut saisi de frayeur et se donna la mort. Les gendarmes le trouvèrent expirant sur le fumier. Sa fin a fait une profonde impression dans le pays; on l'a regardée comme un châtiment de la Providence envers celui qui avoit mis le trouble et la division dans la commune. Il a été enterré sans aucune cérémonie; le ministre n'a point été appelé.

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— Avant son départ de Paris, M. de Châteaubriand a écrit au ministre de la justice une lettre qu'il croyoit de nature à disculper M. Berryer. Ce député n'avoit pas dissimulé dans son interrogatoire qu'il avoit vu madame la duchesse de Berri, et qu'il lui avoit soumis son opinion et celle d'honorables amis sur la situation actuelle de la France, sur la présence de la princesse dans l'Ouest, et sur le fâcheux moyen d'employer la guerre civile ou la guerre étrangère pour rétablir l'ancien état de choses. M. Berryer avoit ajouté qu'il ne vouloit pas nommer les hommes graves qui avoient manifesté cette opinion. M. de Châteaubriand declare que c'est principalement lui; qu'il a rédigé dans ce sens deux notes pour ètre remises à la princesse, et que la dernière, signée, supplioit l'intrépide mère du petit-fils de Henri IV de quitter une patrie que tant de désordres ont déchirée. Le noble écrivain croit en conséquence que, s'il y a délit dans cette correspondance, malgré sa nature, c'est lui seul qui doit en subir les conséquences..

- Un journal assure que, depuis l'état de siége, M. Laffitte a reçu de près de 130 députés siégeant au centre gauche des adhésions au compte-rendu; on l'anroit prié de ne point les faire connoître avant la séance royale, et dans le cas seulement où le ministère actuel essaieroit d'affronter une session.

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- Le Courrier français disoit, le 28, que rien n'est plus exact que de comparer la violation de la Charte le 6 juin aux ordonnances du 25 juillet 1830, et que l'impunité du coup d'Etat du gouvernement actuel a absous les ministres de Charles X.

- Pendant l'année 1831, il a été déclaré à Paris, par le tribunal de commerce, 413 faillites, sur lesquelles 408 sont terminées. Dans l'année 1830, le nombre des

faillites avoit été double. Le nombre des patentes étant de 55,000 environ, c'est plus de 3 faillites sur 400 patentes.

M. le comte de Kielmansegge, gentilhomme de la chambre et conseiller de légation du roi de Hanôvre, vient d'être accrédité à Paris, en qualité de chargé d'affaires de Hanovre.

On vient de donner un grand nombre de décorations aux régimens qui ont combattu les Vendéens.

M. Massin, chef d'institution, vient d'être nommé chevalier de la Légiond'Honneur. Il est le premier chef d'institution qui ait reçu cette récompense. Le 24, au moment où un peloton de la 4 légion de la garde nationale reconduisoit le drapeau à l'état-major, passant sur la place du Louvre, une femme que l'on croit aliénée s'est jetée violemment sur le drapeau et a voulu l'arracher à celui qui le portoit, en accompagnant son action de cris séditieux. Cette femme a été conduite à la Préfecture de police. Plusieurs gardes nationaux avoient peine à la contenir.

- La caricature est aujourd'hui un moyen de guerre entre les partis. Le Figaro va en publier maintenant deux par mois.

M. Aguado a vendu à M. de Bergue, huissier-priseur, les actions qui for moient sa propriété au Messager des chambres.

Un artilleur de Vincennes, le sieur Pepin, frère de l'épicier qui a été mis en jugement pour sa conduite les 5 et 6 juin, a été traduit le 28 au conseil de guerre, pour attentat à la vie de Louis-Philippe. Il a été acquitté.

M. Viennot, gérant du Corsaire, étoit poursuivi pour excitation à la haine et au mépris du gouvernement et outrage envers la police, dans deux articles portant que l'on avoit organisé, le 5 juin, des brigades d'agens de police, pour jouer le rôle de provocateurs dans les collisions qui eurent lieu à cette époque. Vidocq, mis en jeu dans cet article, a été appelé en témoignage. L'avocat ne s'est pas opposé à ce qu'il prêtât serment. Entre autres témoins, M. Barthélemi, homme de lettres, qui fit une déposition si contradictoire avec celle de M. Gis quet, dans l'affaire de la rue des Prouvaires, et le sieur Wachez, boulanger, ont rendu compte de quelques faits dans le sens de ceux cités par le journal. M. Viennot a été déclaré coupable, et condamné à 6 mois de prison et 1000 fr. d'amende. M. de Nugent, gérant du journal le Revenant, a été condamné par la se conde section de la cour d'assises à 8 mois de prison et 500 fr. d'amende, pour excitation à la haine du gouvernement.

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M. Pardessus, ancien député et ancien conseiller de cassation, a été atteint du choléra; son état ne donne plus actuellement d'inquiétude.

M. Mosselman, attaché à la légation belge à Paris, et beau-frère de M. Le Hon, ministre plénipotentiaire, a succombé le 26 à une attaque de choléra. M. Moussard, accusé d'offense envers Louis-Philippe et d'excitation au mé pris de son gouvernement, a été condamné par la cour d'assises de Melun à dix mois de prison et 500 fr. d'amende.

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- M. Vaillant, gérant de la Gazette d'Anjou, a été condamné par défaut à deux mois de prison et 500 fr, d'amende, pour diffamation envers M. Giraud, député.

La cour d'assises de Rennes a acquitté le sieur Martineau, prévenu d'avoir fait partie de la bande de Diot, et condamné à 3 ans d'emprisonnement le sieur Mercier, ancien garde royal, prévenu d'embaucliage.

Un charivari a été donné à Bordeaux au journaliste M. Fonfrède. Les cris: A bas le traitre! lui ont surtout été adressés.

Le tribunal de Toulon a renvoyé devant la cour d'assises, pour l'affaire qui eut lieu dans cette ville, à la suite de celle de Marseille, MM. Grégoire, ancien député, Gairard père et fils, dits Capot, Bougis fils, Roux - Péré, déjà détenus, et MM. Doudon, avocat, Granet, ancien officier de la garde royale, et de La Lauzière, contumaces.

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Une rixe sanglante a eu lieu le 20 à Toulon, entre des marins et des soldats du 62° de ligne. On assure qu'il n'y a eu personne de tué.

- Un homme âgé de 107 ans vient de mourir à Pont-à-Mousson. Il a joui jusqu'à son décès de toutes ses facultés intellectuelles.

MM. Courty, Picard, Lafage et Tocanier, étoient poursuivis à Lyon comme les auteurs d'un charivari donné au duc d'Orléans à son passage dans cette ville : on les accusoit d'avoir crié : A l'eau le bátard! etc. M. Genton, avócat, a soutenu que, dans l'état de notre législation, il n'y avoit ni crime, ni délit, à faire un charivari, quel que pût être le rang de la personne qui en étoit l'objet. Il a cité, à l'appui de son système, l'opinion de M. Merlin, qui atteste dans son répertoire que les charivaris furent autrefois tellement en usage que les reines n'étoient pas même épargnées. Le charivari, a-t-il ajouté, est aujourd'hui passé dans nos mœurs. M. Margerand, autre avocat, s'est plaint des brutalités de la police envers les prévenus. On a remarqué que les seuls témoins qui déposoient contre eux étoient des agens de police. Le jury n'a pas hésité à acquitter les quatre personnes.

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- Le tribunal de première instance de Lyon a rendu presqu'en même temps un jugement remarquable dans l'affaire relative aux dévastations de novembre dernier. Sur les plaidoieries de MM. Genton et Favre, chargés de la défense des propriétaires spoliés, il a décidé que la loi du 10 vendémiaire an IV n'étoit point abrogée; et que la ville de Lyon, et celles de la Guillotière et de la CroixRousse, étoient responsables des dévastations cominises pendant l'insurrection.

Le gérant de la Gazette du Finistère, poursuivi en diffamation par un particulier devant le tribunal correctionnel de Brest, avoit été acquitté par suite d'un partage égal de voix. Le ministère public ayant seul interjeté appel de ce jugement, de gérant fut ensuite condamné à des peines d'emprisonnement et d'amende. La cour de cassation, statuant le 24 sur le pourvoi de ce journaliste, a décidé que le ministère public ne pouvoit, à l'occasion d'un délit de diffama- ` tion par la voie de la presse, se porter appelant du jugement d'acquittement,

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J.

forsque la partie civile avoit gardé le silence. Elle a, en conséquence, annulle l'arrêt, sans renvoyer l'affaire devant une autre cour.

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- Le choléra augmente ses ravages en Belgique; le 24, on comptoit à Bruxelles 56 cas et 32 décès. Hal, Alost et Auvers sont ensuite les villes les plus infectées.

Le choléra, qui a fait tant de ravages en Autriche l'année dernière, fait de nouvelles victimes à Vienne et dans les environs, ainsi que sur différens points de l'Autriche où il n'avoit pas paru. La Bohême et la Moravie souffrent davantage.

La flotte de don Miguel, après un engagement de peu d'importance avec celle de l'amiral Sartorius, est rentrée le 17 dans le Tage, pour y faire quelques réparations. Ce dernier est retourné de son côté à Oporto, pour prendre du renfort. Don Pedro continue à se fortifier dans cette ville. L'armée portugaise l'y tient en quelque sorte bloquée. Il n'y a pas eu de combat depuis celui du 7.

- Le recrutement clandestin en faveur de don Pédro se poursuit à Londres. Ses partisans espèrent même recruter de la cavalerie. Le marquis de Palmela emmenera au premier jour le peu d'hommes que l'on a déjà enrôlés.

Le roi d'Angleterre a accordé un sursis au nommé Colins, prévenu d'attentat sur sa personne. On croit que la sentence de mort sera commuée en une détention perpétuelle.

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La terreur causée par le choléra, dans quelques parties de la population anglaise, rappelle les scènes épouvantables dont Paris a été le théâtre à l'apparition du fléau. A Birmingham, le bruit s'est répandu dans la classe inférieure du peuple qu'on énterroit les malades encore en vie. La multitude s'est portée dans les cimetières, a brisé des cercueils, déterré des cadavres et attaqué les personnes soupçonnées de ce crime imaginaire. L'une d'elles est morte des suites des violences qu'elle avoit essuyées. Des enquêtes suivies de verdicts pour constater les décès n'ont pas suffit pour dissiper les préventions populaires. Il a fallu employer la force.

Le prince de Castelcicala, fils de l'ambassadeur de Naples mort à Paris, est nommé par le roi de Naples ambassadeur à Paris.

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- La première chambre des Etats de Hanôvre a chargé son président de faire une enquête sur ce propos attribué au docteur Christiani, dans un discours à la seconde chambre : « Qu'un membre de l'ordre équestre qui votoit dans l'intérêt du pays étoit maintenant plus rare qu'un corbeau blanc.

Le gouvernement de Saxe-Meinungen avoit proposé aux chambres une augmentation d'impôts de 30 kreutzers par tête, pour couvrir le déficit de 70,000 florins qui existoit dans les caisses de l'Etat. L'assemblée des Etats a rejeté cette proposition, et s'en est tenue à l'adoption du budget. L'assemblée a été dissoute Je 13 août.

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Un mandat d'amener a été décerné, à Deux-Ponts, contre M. Chrétien Scharpff, candidat de théologie, à l'occasion du discours qu'il a prononcé Hambach. Il a été escorté jusqu'à la prison par les libéraux.

Procès des Saint-Simoniens.

Le 27, les saint-simoniens arrivent de Ménil-Montant en procession à 9 heures et demie. Une foule de curieux s'étoit portée sur leur passage; leur costume, aussi bizarre que leur air, produit un singulier effet.

Les prévenus sont : Enfantin, appelé le Père, comme étant le chef; il est ågé de 36 ans; Chevalier, ex-ingénieur, âgé de moins de 26 ans, et, ainsi que le précédent, ancien élève de l'Ecole polytechnique; Duveyrier, avocat, âgé de 29 ans, et, comme Chevalier, ancien rédacteur du Globe; Barrault, ex-professeur à Sorrèze et à Paris, âgé de 33 ans; enfin Olinde-Rodrigues, qui s'est séparé de la famille dont Enfantin est le chef.

Ces cinq individus n'ont pas d'avocats. Les sieurs Lambert, Bruneau, Hoart, anciens élèves de l'Ecole polytechnique; Simon, d'Eichtal et Rigaud, sont les conseils de Chevalier, Barrault et Duveyrier. Le Père n'en a point pris. Les autres membres de la société de Ménil-Montant les accompagnent.

M. Naudiu, qui préside la première section des assises, procède à l'interrogatoire. Enfantin se déclare chef de la foi nouvelle, et les autres, apôtres. On remarque la répugnance avec laquelle Rodrigues se place auprès d'Enfantin, d'après l'ordre du président. Enfantin avoue qu'il a organisé des associations publiques, et qu'il est l'auteur du discours immoral publié l'année dernière dans le Globe. Les autres prévenus reconnoissent également les faits à eux imputés, notamment les publications de brochures incriminées.

Retouret, l'un des adeptes, cité en témoignage, étant invité à prêter le serment d'usage, consulte Enfantin, qui s'y oppose. Chevalier présente des conclusions pour motiver ce refus sur l'opinion des saint-simoniens. La cour n'admet pas ces conclusions. Plusieurs saint-simoniens appelés successivement en témoignage refusent également le serment, et ne sont point entendus.

Enfantin déclare qu'il avoit demandé que deux femmes fussent admises comme conseils, et se plaint en vain du refus de la cour à cet égard.

M. l'avocat-général Delapalme prononce son réquisitoire. Il fait ressortir principalement l'immoralité qui résulte de plusieurs publications adressées aux femmes. On entend le sieur Bauld, prédicateur saint-simonien, Rodrigues, Chevalier, Doveyrier et Barrault, faire tour à tour, l'apologie de la religion de Saint-Simon, au lieu de se borner à une défense ordinaire. Ces discours dégénérant en inutilités et en déclamations scandaleuses, M. le président déclare à minuit les débats terminés. Les saint-simoniens retournent à leur montagne, escortés de quelques curieux qui avoient eu la patience de les attendre.

Le 28, le Père Enfantin a prononcé à l'ouverture de l'audience un discours interrompu par de longues et fréquentes pauses, et débité avec une extrême lenteur. Plusieurs fois il dit qu'il a besoin de s'inspirer. L'avocat-général, qui ne peut s'empêcher de sourire à ces niaiseries, est interpelé par le prévenu, dont le discours ne présente que des reflexions décousues sur les principes de sa doctrine, et surtout sur l'émancipation des femmes.

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