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Nous nous sommes plaint l'année dernière des petits livres que le gouvernement fait distribuer dans les écoles, et qui ne parfent de la religion que si brièvement et si sèchement qu'il n'en pourra rien rester dans l'esprit des enfans. Dans l'Alphabet, on a placé le décalogue, mais en latin, de peur apparemment que les enfans ne l'entendissent. On y a mis aussi le Pater et le Credo et on n'a pas oublié la Charte. On ne pourra pas dire qu'il n'y est pas parlé de Dieu, car il est nommé une fois et sous des titres vagues. Le nom du Sauveur se trouve aussi à la fin. L'Instruction du peuple, que l'on distribue aussi, se compose de maximes, les unes froides, les autres emphatiques, celles-ci fausses, celles-là dangereuses. Voilà ce que nous disions il y a près d'un an, no 1884, tome LXX. Le Journal de la Normandie vient aussi de réclamer contre la distribution de ces petits livres, qui ne seroient propres qu'à introduire parmi le peuple une entière indifférence pour la religion, et un journal religieux de la capitale a reproduit cette réclamation. Tous les amis de la jeunesse et de la saine morale devroient joindre leurs efforts pour signaler ces erreurs du pouvoir, qui conspire contre lui-même en affoiblissant le ressort de la religion et en ôtant à la génération naissante le seul frein qui puisse la retenir au milieu des orages et des passions de ce monde.

M. Frémine, curé de Carquebut, canton de Sainte-MèreEglise, diocèse de Coutances, avoit refusé d'inhumer deux enfans jumeaux morts sans avoir reçu le baptême; il n'avoit fait en cela que se conformer aux règles de l'Eglise tracées dans les Rituels. Le maire fit l'enterrement. Le curé bénit le cimetière comme ayant été profané par la présence du corps d'un individu mort dans l'état d'infidélité, et il expliqua ses raisons à ses paroissiens et leur fit connoître ce que les canons prescrivent sur le respect dû aux cimetières et sur les peines portées contre les profanateurs. Il y eut plainte rendue contre lui, et il fut traduit devant la cour d'assises de la Manche. La cause fut appelée le 19 septembre, et, après le plaidoyer de M. Hervieu, les jurés délibérèrent pendant un quart d'heure et acquittèrent M. Frémine. Ce fut, dit-on, un désapointement pour bien des gens qui s'étoient flattés de l'espoir de voir condamner un prêtre; spectacle réjouissant pour ces esprits tolérans et impartiaux.

- Un sieur Mantelin, ancien officier d'artillerie, a succombé dernièrement à Strasbourg, à la suite d'une longue maladie. Le vicaire et le curé de la Madeleine sont allés successivement le visiter sur son lit de douleurs et l'ont engagé à se réconcilier avec Dieu. Le malade, dont la conscience, dit un journal, étoit sans reproche, a répondu qu'il ne craignoit pas de paroitre devant Dieu, que son ame étoit tranquille. Il refusa le ministère des deux ecclésiastiques. M. le curé, en se retirant, annonça qu'il ne pourroit, après ce qui

venoit de se passer, admettre le mourant à la sépulture chrétienne. La famille s'est décidée en conséquence, après la mort de M. Mantelin, à faire porter le corps directement au cimetière. C'est un exemple que le journaliste propose à suivre. Il avoit déjà insinué plusieurs fois qu'il ne falloit recourir au ministère des prêtres ni avant ni après la mort. Il trouvé tout simple que M. Mantelin n'eût aucun reproche à se faire après cinquante ans de vie. Ces gens-là ont donc le privilége de l'impeccabilité?

Il a paru dans la Tribune catholique une lettre sur la situation du collège de Quimper. Ce collége prospéra jusqu'en 1830; il ne coûtoit rien à la ville, il remplissoit les voeux des familles. Le principal, M. R., étoit prêtre, ainsi que plusieurs des maîtres. Mais, après la révolution de juillet, on dit aux jeunes gens que leur principal étoit un congréganiste. Ils se révoltèrent, et obtinrent que M. R. fût renvoyé. On leur donna pour principal celui qu'ils demandoient, et à cette condition ils voulurent bien reprendre leurs études. Il est aisé de penser que la discipline dut souffrir beaucoup de cette révolution, image en petit d'une plus grande. Le college déclina; l'année dernière, le déficit étoit de 10,000 francs. Cette année, on dit qu'il sera de 14,000 francs. Le conseil municipal, alarmé de cette décadence, chargea une commission d'en chercher les causes. Cette commission vient de faire son rapport, qui a été inséré dans le Journal Brestois, du 24 septembre. La commission a voulu se dissimuler la véritable cause du mal, qui est l'esprit de révolte encouragé dans la maison, le renvoi des maîtres, et le relâchement de la discipline, qui en est la suite. Elle dit que la décadence du collège de Quimper tient à des causes extérieures, et paroît en vouloir particulièrement au petit séminaire de Pont-Croix, qui est plein, et qui prospère. Elle demande qu'on y fasse observer les lois, principalement sur le costume ecclésiastique, quoiqu'il n'y ait aucune loi qui statue à cet égard; et ce qu'il y a de plaisant, c'est qu'avec ce vou la commission émet celui de voir consacrer la liberté de l'enseignement. En vertu de cette même liberté, là commission dénonce le projet d'établir deux nouvelles pensions à Lesneven et à Châteaulin, deux villes du même département, projet qui seroit encore funeste au college de Quimper. Ainsi ces amis des lumières ne veulent pas qu'on multiplie les établissemens d'instruction publique; ces amis de la liberté de l'enseignement veulent qu'en attendant qu'elle soit réglée par une loi, on vexe par des règlemens minutieux un établissement existant et nécessaire au diocèse. Ces libéraux-là ne se piquent guère d'être conséquens.

Un journal cherche à amuser ses lecteurs aux dépens d'un prêtre du diocèse de Cambrai, M. Chédeville, précédemment vicaire de Saint-Maurice, à Lille, qui a quitté son état, et qu'on

pourroit croire atteint de folie. Ce prêtre s'est engagé dans un régiment de ligne ; il porte la moustache et affecte toutes les habitudes militaires. Depuis, dit-on, il se livra au plus violent dépit quand il apprit qu'il ne faisoit pas partie des bataillons de guerre. Enfin il tint en dernier lieu des propos qui le firent soupçonner de carlisme. On voulut croire qu'il ne s'étoit engagé que pour embaucher les soldats de son régiment. On l'a donc traduit devant un conseil de guerre à Lille, et il y a comparu le 2 octobre. Son interrogatoire et les dépositions des témoins n'ont fourni contre lui aucune charge, et, quoique le capitaine-rapporteur ait soutenu la prévention, le sieur Chédeville a été acquitté et renvoyé à son corps. Les gens de bien, à Lille, déplorent les écarts de cet ecclésiastique, et nous n'en aurions pas parlé, si son nom n'avoit pas retenti dans les tribunaux et dans les feuilles publiques.

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Quand nous faisons des sottises en France, il y a toujours chez nos voisins des gens tout prêts à les imiter. Des insolens donnèrent, il y a quelques mois, un charivari à un de nos plus respectables prelats; la même insulte vient de se répéter à Liège. Le 11 de ce mois, des groupes se formèrent à l'issue du spectacle et on donna une sérénade au gouverneur, M. Tielmans. Ensuite, on se porta devant la maison qu'occupoit à Liége M. Raikem, aujourd'hui ministre, devant celles de M. de Theux et de M. Libeau; on témoigna par des cris, des huées et des sifflets que l'on n'approuvoit pas leur conduite politique. La foule, s'augmentant toujours, se porta vers l'évêché. M. l'évêque, M. Van Bommel, prélat sage et éclairé, n'a d'autre tort que d'être d'origine hollandaise. Les cris de à bas la calotte! à bas les Jésuites! etc., se firent entendre. On secoua violemment la sonnette de la porte, on jeta dans le jardin des tuyaux de gouttières. La multitude répondit dignement au signal qu'avoit donné le matin même un journal de Liége qui avoit pour suivi M. l'évêque de ses invectives. Il faut dire pourtant que coup de curieux témoignoient leur mécontentement de ces insultes brutales. Enfin les groupes s'arrêtèrent devant le bureau du Courrier de la Meuse, et des cris injurieux furent proférés contre l'éḍiteur, M. Stas, et contre M. Kersten, à qui on paroissoit reprocher leur attachement à la religion. Ces grossières facéties n'ont moins recommencé le lendemain.

NOUVELLES POLITIQUES.

beau

pas

du

PARIS. Les journaux de M. Thiers sont chargés d'annoncer à ceux qui ont peur des doctrinaires, que le ministère du 11 octobre ne fera ni plus ni moins de bien qne celui du 13 mars, et que nous allons revoir les beaux jours de M. Casimir Périer. La stricte justice, la guerre aux chouans, aux carlistes, àu parti-prêtre et à Madame la duchesse de Berry; tel est le programe qu'on nous promet de suivre de point en pont. Enfin, il suffit de se rappeler le bon temps que nous avons passé

depuis deux ans, pour savoir à quoi s'en tenir sur celui qui nous vient. Même régime, mêmes règles de gouvernement, même budget; en un mot, on nous annonce que la France ne s'apercevra de rien, et que la conduite des ministres du 11 octobre ne sera qu'un fac simile de celle de leurs prédécesseurs. Voilà qui est heureux pour les carlistes, les prêtres et les suspects, sans compter les contribuables. Quant aux ouvriers sans travail et aux marchands sans pratiques, leur compte n'est pas trop bon non plus; car nous ne voyons de bien assuré dans tout cela que le sort des geoliers et des sergens de ville.

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On remarque que les feuilles royalistes ne se font aucun scrupule d'emprunter aux journaux révolutionnaires tout ce qu'il y a de plus remarquable dans leurs opinions. Ces derniers au contraire évitent avec soin de s'emparer d'aucun fragment qui n'est pas de leur crû, et de montrer autre chose que ce qui vient de leur école. Quand par hasard il leur arrive de sortir de leur système pour faire quelques citations, c'est pour les falsifier et les défigurer. Il nous semble que cela indique de leur part la crainte de rendre le public juge des questions religieuses ou politiques sur lesquelles la polémique s'exerce des deux côtés, et de mettre ainsi les pauvres dupes dont ils ont la direction dans le cas de réfléchir et de s'éclairer. En agissant différemment, les journaux royalistes prouvent qu'ils n'ont pas peur que les doctrines et les raisons de leurs adversaires soient connues; tandis que leurs opinions à eux ne risquent rien à être mises au grand jour à côté des autres. Ceuxci ont raison, sans doute, de ne pas craindre l'effet des citations qu'ils empruntent aux feuilles révolutionnaires; mais ces dernières ont tort de croire qu'il y auroit de l'inconvénient à ce que leurs lecteurs connussent le fort et le foible des deux causes. L'espèce d'hommes à laquelle ils ont à faire n'est point susceptible de conversion. Habituée à se nourrir de son Constitutionnel, par exemple, ce seroit inutilement qu'il lui offriroit un peu de bon grain; elle s'en tient à la mauvaise herbe, et jamais vous ne la décideriez à changer de pâture.

Dans la nuit du mercredi 26 au jeudi 27 septembre, des voleurs se sont introduits dans le presbytère de Cayeux, canton de Moreuil, diocèse d'Amiens. Après avoir pratiqué, dans le plus grand silence, une large ouverture au bas du mur d'un cabinet qui donne sur le jardin, ils ont pénétré dans l'intérieur, et se sont présentés au lit du curé, M. Talaminy. Cet ecclésiastique, qui étoit enseveli dans un profond sommeil, se sentant violemment pressé à la gorge, s'éveilla en sursaut, et vit plusieurs brigands, plus ou moins déguisés, dont un masqué, qui lui présentèrent le pistolet, le menacèrent d'un assommoir, etc., s'il proféroit le moindre cri. Ils l'arrachèrent de son lit, le conduisirent à ses armoires, pour y enlever tout ce qui étoit à leur convenance. Une somme de 50 écus environ fut volée; de plus, deux montres, du linge, etc., en tout pour la valeur de 500 fr. La domestique fut violemment jetée dans la cave, avec menace de l'assassiner, si elle tentoit le moindre effort pour sortir ou pour appeler du secours. La perquisition de tout le presbytère dura plus d'une heure. L'attente du dénoûment étoit terrible! Des propositions homicides frapperent souvent les oreilles de M. le curé,

qui eut la présence d'esprit d'ouvrir la porte de la cave, où sa domestique étoit enfermée, sous le prétexte d'aller chercher de quoi rafraîchir les voleurs. La porte de la cave entr'ouverte, la domestique sortit. Arrivée à la porte de la rue, elle la trouva gardée par un voleur. Une lutte s'établit entre elle et le brigand, et fut à l'avantage de la domestique, qui le désarma d'un assommoir. Une fois dans la rue, elle appela du secours; les voleurs s'enfuirent, et M. le curé se trouva débarrassé. Le secours ne se fit pas attendre ; on courut vainement sur les traces des voleurs. Depuis, l'on a dit que des indices très-graves avoient mis la justice sur leurs traces.

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Des journaux de la Belgique se pl aignent que les catholiques aient remporté une victoire complète dans la nouvelle organisation judiciaire. Quand cette assertion seroit vraie, il n'y auroit pas trop de quoi s'étonner que dans un pays où la majorité est catholique, la majorité des places fût donnée à des catholiques. Mais il n'en est pas ainsi, dit le Courrier de la Meuse; ce qu'on appelle le parti catholique n'a pas triomphé dans les nominations de la magistrature. Ceux qui connoissent bien la Belgique seront forcés de convenir que le nombre des catholiques nommés est de beaucoup inférieur à celui des hommes auxquels l'opinion publique ne donne pas ce nom. Mais il y a des gens qui crieront au triomphe du catholicisme tant que les catholiques ne seront pas formellement exclus de toutes les places. C'est là tout le secret de leur politique.

Charles X, son fils et son petit-fils, ont reçu un brillant accueil à Berlin. Un aide-de-camp du roi de Prusse, le major de Massow, accompagnoit depuis la frontière M. le duc de Bordeaux, qui précédoit ses augustes parens. A son arrivée dans la capitale, le 5, une garde d'honneur a été placée à la porte de l'hôtel où il est descendu. On lui a fait visiter la citadelle, où une compagnie a manœuvré en sa présence. Les plus grands honneurs ont été rendus à Charles X et à M. le duc d'Angoulême, qui ont traversé Berlin le lendemain. Le duc Ch. de Mecklembourg, général de la garde royale, le prince Adalbert de Prusse, l'ambassadeur d'Espagne et d'autres personnages, sont venus leur rendre visite. Le prince royal et la famille royale ayant manifesté le désir d'avoir une entrevue avec eux, se rendirent le 7 au château de Bellevue, où ils déjeûnèrent avec les princes et princesses de Prusse. Les trois voyageurs doivent se trouver réunis à Francfort sur-l'Oder, où ils recevront leurs passeports pour l'Autriche.

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Madame la duchesse d'Angoulême et Mademoiselle de Berri sont arrivées à Vienne le 5 octobre. Les princesses sont descendues au palais impérial. Elles ont été reçues avec la plus grande distinction par LL. MM. et par la famille impériale. On croit que le comte Pozzo di Borgo, ambassadeur en France, qui est encore dans cette capitale, leur a rendu visite.

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MM, Larribe et Aumassip sont nommés sous-préfets à Sémur et à Pontivy; M. Hausmann, sous-préfet d'Issengeaux, passe à Nérac, en remplace ment de M. Bermond, qui est transféré à Gaillac; M. Boucheron est nomme sous-préfet d'Issengeaux.

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