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du 12, ces jeunes patriotes attaquèrent ces réunions en vertu de la liberté des cultes, opposèrent aux cantiques le chant de la Marseillaise et de la Parisienne, et portèrent par leurs provocations le trouble et l'effroi dans plusieurs quartiers d'une ville jusque là si paisible. Le maire et les adjoints se transportèrent sur les lieux; on a arrêté trois des perturbateurs. Le maire a pris un arrêté pour défendre tout rassemblement dans les rues, quel qu'en soit le prétexte. Ainsi les libéraux ont, par le fait, cause gagnée. Les réunions pieuses et les cantiques leur déplaisoient; on les interdit, et on prive le peuple d'actes de religion qui calmoient sa douleur, et lui offroient au moins quelques distractions consolantes; on l'en prive par égard pour l'intolérance de quelques étourdis, auxquels il eût été si facile d'en imposer.

Le 11 septembre au soir, l'ordre arriva à Nantes de faire des recherches dans les couvens de la ville. Dans la nuit, 200 hommes de troupes cernèrent le couvent de la Visitation, et à 4 heures du matin ou enfonça les portes du jardin à coups de hache; on força de même l'entrée ordinaire. Les soldats envahirent tout l'enclos, et pénétrèrent dans leur couvent. Les religieuses et les jeunes pensionnaires furent réunies dans une salle gardée par 12 à 15 hommes. Les chefs, conduits par la supérieure, madame de la Ferronais, commencèrent la visite, qui se fit d'abord avec assez d'ordre, quoique avec beaucoup de sévérité. On fouilloit partout, on sondoit les armoires à coups de crosse de fusil. Mais bientôt vinrent les menaces, les juremens, les propos horribles et dégoûtans. Des chefs mêmes et des officiers donnèrent ce honteux exemple. On vouloit fouiller les religieuses; une femme avoit été amenée pour cela. La supérieure s'y est refusée avec énergie, a demandé à écrire au préfet, et à avoir un ordre par éccit, et on a été obligé de renoncer à ce projet insultant. Cependant, tout le jardin étoit dévasté; on fouilloit les carrés, on pilloit les fruits, on dévoroit les provisions qui se trouvoient à la cuisine. Dans la cave, on a bu 80 bouteilles de vin, dont on faisoit sauter les bouchons avec le sabre. Plusieurs objets ont disparu, des dés, des chaînes de montre des pensionnaires, des plats, etc. La visite a duré jusqu'à 11 heures; après le départ des militaires, il ne s'est plus rien trouvé à manger dans la maison. L'Ami de la Charte se délecte à raconter ces scènes de cosaques; il prétend que les religieuses ont résisté aux sommations, qu'on a trouvé quatre hommes dans cette retraite de la piété féminine. Il y a à là fois impudence, lâcheté et mensonge dans son récit. Les visites ont continué; on est allé chez les Dames Blanches ou du Refuge, chez les Ursulines, au Sanitat, aux Incurables, à la maison de la Providence, aux Carmélites, où on faisoit lever les voiles des Soeurs. On a fait aussi des visites chez des particuliers. On est arrivé à quatre heures et demie du matin chez les filles de la Charité, où on a tout exploré jusqu'aux mar

mites. Dans la chapelle, on a levé la pierre sacrée de l'autel pour voir si une princesse étoit cachée dessous, et on a voulu avoir la clef du tabernacle pour le visiter. Enfin, on a poussé la sottise jusqu'à visiter les bâtimens de la maison de retraite où sont placés les cholériques, comme si celle qu'on cherchoit avoit pu choisir un tef asile.

En province, le diocèse de Limoges est un de ceux qui sont le plus en proie aux invasions de l'esprit de schisme. Outre Reb qui y est installé depuis long-temps, outre Vinot qui y étoit aussi et qui vient de se rétracter, il y a encore un abbé Papon qui s'est introduit dans la paroisse de Lastours, arrondissement de Saint-Yrieix. La Gazette du Limousin ayant inséré le 9 août une lettre où l'on plaisantoit sur le sieur Papon et sur son culte, l'intrus s'est imaginé faire merveille en lui adressant une apologie qu'il a crue victorieuse, et qui n'est qu'une déclamation ampoulée et assez mal écrite. Il parle de Caton, de Socrate, d'Anitus, d'Aristide, du philosophe d'Ephèse, de Pythagore, etc.; le tout, remarquez bien, à propos de la paroisse qu'il a envahie. On ne croyoit peut-être pas qu'il y eut tant d'érudition à Lastours. Il assure qu'il est pur dans toute son existence, que sa vie est pure de tout sentiment honteux, qu'il est faux qu'il ait jamais été interdit. Comme le doyen de Genève, dit-il, persécuté pour mes opinions, j'ai du, quoad nomen, rompre unité avec le Catilina du Vatican, sans me détacher néanmoins de l'Eglise catholique à laquelle je tiens par le fond de mes entrailles. Quel est ce doyen de Genève? nous l'ignorons. Qu'est-ce que rompre l'unité, quoad nomen? et comment peut-on prétendre rester uni à l'Eglise catholique quand on rompt avec le Pape et avec son évêque? Le Catilina du Vatican, quel heureux rapprochement. Le sieur Papon déclare d'ailleurs qu'il ne célèbre point à la façon de Châtel, mais qu'il adoptera au premier jour le français dans l'église, la célébration de l'office divin en idiome étranger étant une infraction aux saintes Ecritures, à la raison méme. Il se plaint du maire qui l'a empêché de célébrer en plein air sur un autel de gazon, et il parle dans des termes grossiers du curé du lieu, qu'il appelle l'imbécille Burguet. C'est un homme de bon ton que M. Papon. Il paroît qu'il a fait dresser un autel dans un local particulier, et que c'est là qu'il exerce, baptise et marie. Il assure qu'il ne prêche que la paix et la concorde, mais sa lettre feroit croire le contraire; car il cherche à flétrir ceux qui lui sont opposés dans la paroisse, comme étant de véritables automates du maire et des hommes antipathiques à nos nouvelles institutions. Il est clair qu'on est ennemi du dès qu'on n'est pas pour M. Papon.

gouvernement

--Les libéraux et les fonctionnaires publics reviendroient-ils de leurs préventions contre les Frères des écoles chrétiennes? On seroit tenté de l'espérer, d'après l'intérêt que, dans plusieurs loca

lités, les autorités elles-mêmes ont montré pour leurs écoles. A Castres, où il y a une école de 6 ou 700 enfans dirigés par sept Frères, M. Alby, maire de la ville, qui est en même temps député, a voulu présider la distribution des prix; il étoit assisté d'un adjoint, du président du tribunal, et de quelques membres du conseil municipal. Beaucoup d'ecclésiastiques et de personnes notables étoient présens. Le maire a adressé aux élèves d'excellens conseils, et a fait l'éloge du zèle et de la charité des Frères, qui n'ont qu'à se louer de sa bienveillance. A Limoges, les Frères ont 700 élèves; la distribution des prix a été présidée aussi par le maire, qui a prononcé un discours non moins sage que celui de M. Alby. Il a parlé des soins des Frères dans les meilleurs termes, et leur a remis une médaille que l'Université leur avoit décernée pour récompense de leur zèle. Le recteur et une commission du conseil municipal assistoient à la séance. A Orléans, la distribution des prix pour les écoles chrétiennes a été faite également avec solennité : M. l'évêque, le maire et d'autres autorités y assistoient. L'Echo de Vézone, journal libéral qui se publie à Périgueux, a fait l'éloge de l'établissement des Frères, à l'occasion de leur distribution des prix, qui a été présidée par M. l'évêque de Périgueux. A Arles, le conseil municipal a décidé, en juin dernier, que l'école des Frères étoit la seule qui convint à la population, et il a refusé des fonds pour l'enseignement mutuel. Le mois suivant, il s'est opposé à une école de ce genre. Grand sujet de scandale pour les patriotes du pays! Ils disent que les membres du conseil municipal d'Arles sont des carlistes, et ils espèrent que le gouvernement ne sanctionnera pas ce vote. Il n'y a de sacré que tous les fontionnaires bien dévoués à la

révolution.

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. La diminution se maintient dans les effets du choléra. Le nombre des décès a été le 13 de 16, dont 8 à domicile et 8 dans les hôpitaux; le 14 de 14, dont 9 à domicile et 5 dans les hôpitaux ; et le 16 de 10, dont 6 à domicile et 4 dans les hôpitaux. La différence sur la veille a été le premier jour de 3 en plus, le second de 2 en moins, et le troisième de 4 en molus. Il a été conduit aux hôpitaux pendant ces trois jours 16, 20 ́et 2 cholériques. Il en est sorti guéris 7, 20 et 8. La mortalité par d'autres maladies a été de 36, 41 et 36.

Des bruits exagérés se répandoient depuis quelque temps sur le nombre des victimes du choléra à Paris, depuis son invasion qui a eu lieu le 26 mars dernier. Les uns portoient le chiffre total à 30 et 40,000, d'autres ne craignoient même pas d'avancer qu'il s'élevoit à 60 ou 70,000. La commission centrale de salubrité a fait une nouvelle vérification avec le plus grand soin; et elle assure, dans une note publiée le ro de ce mois, que la totalité des décès jusqu'à la fin d'août ne va qu'à 18,000 environ, y compris ceux de Bicêtre et des hôpitaux militaires. C'est du 5 au 15 avril que les ravages ont été les plus grands.

Le dernier bulletin du choléra dans les départemens donne les résultats sui

vans: Seine-et-Oise, le 15, 73 nouveaux malades et 53 morts : total, 9931 cas et 4262 décès. Seine-et-Marne, le 15, 43 cas et 23 décès; total, 20,597 cas el 6721 décès. Aisne, le 15, 130 cas et 69 décès: total, 10,894 cas et 5322 décès. Finistère, le 12, 99 cas et 46 décès: total, 5716 cas et 2298 décès, Seine-Inférieure, le 15, 89 cas et 47 décès: total, 4661 cas et 2279 décès. Meuse, le 14, 72 cas et 17 décès: total, 10,904 cas et 4063 dééès. Vendée, le 12, 58 cas et ar décés: total, 533 cas et 317 décès. Marne, le 13, 53 cas et 34 décès: total, 21,897.cas et 6551 décès. Nord, le 14, 54 cas et 31 décès: total, 9229 cas et 4370 décès. Côtes-du-Nord, le 13, 29 cas et 12 décès: total, 872 cas et 408 dé cès. Somme, le 15, 13 cas et. 12 décès: total, 7882 cas et 3123 décès. Gironde (Bordeaux), le 13, 8 cas et 7 décés. Loir-et-Cher, le 14, 6 cas et 4 décès: total, 1201 cas et 611 décès. Mayenue, le 13, 5 cas et 1 décès: total, 199 cas et 88 décès. Oise, le 15, 5 cas et 4 décès : total, 7634 cas et-3316 décès. Loiret, le 15, 4 cas et 3 décès: total 2452 cas et 1373 décès. Ainsi, c'est toujours les départemens de la Marne et de Seine-et-Marne où les ravages ont été les plus grands; viennent ensuite ceux de l'Aisne, de Seine-et-Oise, de la Meuse et du Nood. Inutile d'ajouter que celui de la Seine, c'est-à-dire la banlieue de Paris, n'a pas moins souffert,

← Charles X et sa famille quittent Holy-Rood pour aller habiter en Stirie. Le climat froid de l'Ecosse étoit contraire à la santé de madame la Dauphine, qui en avoit surtout été incommodée l'hiver dernier. La princesse est partie le 4 septembre avec M. le Dauphin et Mademoiselle. Elles sont arrivées le à Londres. Elles ont pris la voie de terre, afin d'être en mer le moins possible, la mer incommodant la Dauphine. Charles X et son petit-fils ont dû s'embarquer le 12 septembre au port de Leith sur la frégate la Reine Charlotte, que le roi d'Angleterre a mise à leur disposition. Ils ont reçu en Ecosse de grands témoignages de respect et de regrets. Les journaux de toutes les couleurs leur ont payé uu tribut d'hommages. Les princes sont accompagnés de M. le cardinal de Latil, grand-aumônier, du duc de Polignac, de M. Capelle, de M. de Barande, et de plusieurs autres officiers. Ils se rendent à Hambourg où ils débarqueront, et traverseront l'Allemagne. Madame la Dauphine prendra son chemin par la Hollande. Charles X doit s'arrêter en Saxe, où le roi, son cousin, l'a prié de passer quelques jours. I rejoindra sa famille à Gratz en Striie. On dit que la Dauphine a des propriétés dans cette province qui est au midi de Vienne, sur les frontières de la Hongrie. Gratz en Basse-Stirie est à 35 lieues de Vienne : cette ville est à peu près sous la même latitude que Bourges, tandis qu'Edimbourg est au cinquantesixième degré de latitude. Gratz a un collége dirigé par des Bénédictins, sortis de l'abbaye de St-Blaise, dans la Forêt-Noire. Cette abbaye a été célèbre dans ces derniers temps par son prince abbé, le savant Gerbert, mort en 1793, et connu par de nombreux ouvrages sur l'histoire, les antiquités et les matières ecclésiastiques. Les religieux furent chassés de St-Blaise en 1803, et les biens furent donnés au duc de Bade. L'abbé se retira en Autriche avec trente religieux, et l'empereur leur confia la direction du collège de Gratz. Ce collége a des professeurs

habiles et une bibliothèque, et offrira des secours pour l'éducation du jeune prince que le sort jette sur cette terre lointaine,

Comment le roi Louis-Philippe ne mettroit-il pas beaucoup de temps à se décider sur le choix de ses ministres ? Depuis deux mois, tous les journaux sont occupés à lui en chercher parmi les hautes capacités de juillet, et ils ne peuvent venir à bout de découvrir ce qu'il lui faut, ni de s'accorder sur aucun. L'esprit suspendu entre M. Dupin et M. Odilon-Barrot, ils en sont encore à disputer sur la nuance d'opinion. Cependant les hommes de progrès commencent à insinuer que la couleur politique de M. Barrot seroit suffisante pour le moment, sauf à choisir une étoffe plus foncée lorsque celle-ci aura fait son temps. Ce dernier avis a l'avantage de modérer un peu l'impatience des patrioles pressés qui voudroient qu'on passât tout de suite au gouvernement à bon marché. Toujours est-il que les journaux, qui consentent à s'arrêter provisoirement à la nuance de M. OdilonBarrot, paroissent considérer le gouvernement de Louis-Philippe comme ces vieillards dont la vue tend à baisser de plus en plus, et auxquels on commence par choisir des lunettes dont le numéro ne soit pas trop fort, pour l'augmenter ensuite tout doucement à mesure que les yeux s'en iront. Pour le moment, c'est le numéro des lunettes de M. Odilon-Barrot qui est proposé. Eucore un ou deux numéros après celui-ci, et nous serons tout près de voir tout trouble ou de n'y plus voir du tout.

- Voici, d'après la confidence d'un journal qui paroît bien informé, quelles sont les intentions bienveillantes de Louis-Philippe pour madame la duchesse de Berrri: « Nous savons très-positivement que des ordres exprès, et de la plus grande sévérité, ont été donnés à toutes les autorités pour poursuivre avec activité la princesse. Ces ordres sont tels, qu'en cas de résistance on doit employer la rigueur et la force....

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Le roi et la reine des Belges sont attendus à la fin du mois à Compiègne. Ils viendront ensuite à Paris.

- M. de Leullion-Thorigny, procureur du Roi à Montbrison, est nommé substitut du procureur-général près la cour royale de Lyon; il est remplacé par M. Guillet, procureur du Koi à Gex.

— M. Orfila, médecin, est nommé membre du conseil-général des hospices, en remplacement de M. Portal, décédé.

M. Marcel, receveur particulier des finances à Latour-du-Pin, vient d'être destitué, et remplacé par M. Ernest Guizot, neveu de l'ex-ministre.

Les préfets de la Seine et de police ont chargé une commission spéciale de statistique de rédiger l'histoire du choléra-morbus dans la capitale et dans les communes rurales du département,

M. Larabit, député, vient, comme M. Garuier-Pagès, d'adresser à ses commettans un compte rendu de sa conduite pendant la dernière session, et un exposé de ses intentions pour la prochaine.

Le collége électoral de Foix est convoqué pour le 10 octobre, à l'effet d'élire un député, en remplacement du général Laffitte, décédé,

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