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C'est par cette citation heureuse que Me Lescaut prépara les esprits à entendre lecture de l'article que nous allons retracer en entier, et tel qu'il a été produit.

Extrait de la protestation des honnêtes citoyennes compromises dans le procèsverbal de l'ordre le plus nombreux du

royaume.

Sa Majesté sera très-humblement suppliée, disent-elles, d'ordonner à son parlement de faire brûler, par la main du bourreau, le libelle infame qui avoit allumé la discorde dans le royaume, et divisé les familles.... et supposé que leurs chers époux se fussent assemblés dans la plaine des Sablons, comme l'annonce le libelle, de dissoudre une assemblée dont les membres étoient dans l'impossibilité de justifier de leurs titres.

N'est il pas souverainement absurde, s'est écrié Me Lescaut, de nous supposer l'intention d'avoir voulu semer la discorde dans le royaume, et de vouloir diviser les familles? Quelles seroient donc les premières victimes de cette division, et sur qui frapperoit

est

elle si ce n'est sur nous-mêmes? La tolérance,
dont nous avons toujours fait preuve
trop connue pour que nous soyons réduits
à répondre à cette inculpation injurieuse, et
ce seroit l'accréditer, si on s'attachoit à la
combattre. Examinons actuellement si c'est
avec plus de raison qu'on a demandé la dis-
solution de notre assemblée sous le prétexte
les membres étoient dans l'impossibi-
lité de justifier de leurs titres.

que

Nous, dans l'impossibilité de justifier de nos titres ! En la supposant vraie, cette assertion mensongère, je soutiens que nul n'a jamais pu en provoquer légitimement la dissolution, étant de principe reconnu par l'article IV, de la déclaration des droits que chacun peut faire ce qu'il veut, pourvu que sa volonté ne porte aucun préjudice à autrui. Assurément il seroit supperflu de commenter cet article pour faire connoitre qu'il s'identifie parfaitement à l'espèce actuelle. C'est donc sans désobéir à là loi qu'ils se sont assemblés dans la plaine des Sablons : la liberté est pour-tout le monde, l'assemblée nationale le veut ainsi : si vsut l'assemblée nationale, si veut la loi.

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En poussant plus loin les conséquences de ce principe, je dis plus encore ; puisque la liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit point à autrui, et que l'article V de la déclaration déja citée dit expressément que la loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société, il doit être libre à une femme de faire son mari cocu sans que celui-ci puisse y apporter aucun trouble; car ce que défend la loi comprend incontestablement une autorisation tacite de faire tout ce qui peut être agréable à autrui, et utile à la société, et quoi de plus utile à la société que l'accroissement de population? On nous accuse d'intolérance, et cependant voilà de ces principes auxquels nous navons cessé de rendre hommage!

pour

Or, je le demande à tout homme impartial; en prêtant à notre demande originaire les apparences d'un libelle la faire proscrire comme telle; en la supposant injurieuse pour nos épouses, et propre à troubler leur tranquillité en révoquant en doute jusqu'à l'existence même de notre assemblée; n'est-il pas naturel de conclure que cet enchaînement de calomnies avoit pour objet.

d'obscurcir nos droits et par là nous contraindre au silence?

Je ne crains pas de le dire, cet attentat est véritablement un crime de lèze-cocuage, et s'il n'étoit de l'escence des cocus d'être toujours bons, nous pourrions livrer les coupables à toute l'animadversion des loix : mais écartons tout esprit de vengeance et n'opposons à nos détracteurs que la modération et la douceur qui nous caractérisent.

Il est encore une objection qu'on ne manquera pas de nous faire et qu'il est important de prévenir. MM. d'Eprémesnil, Virieux, ect. ect. sont des plus célèbres de votre ordre, nous dira-ton, et vous vous plaignez de n'avoir point de représentans à l'assemblée nationale. En ce cas la réponse est facile et la voici : MM. de Virieux, ect. sont de notre ordre et nous nous empressons de les reconnoître, euxmêmes ne l'ont jamais nié, puisqu'ils viennent aujourd'hui parmi nous, nous aider de leur lumières ; à l'égard de d'Eprémesnil, qui a lachement apostasié la cause qui nous réunit, il en est bien autrement. D'ailleurs, par qui a-t-il été institué? Par le parlement, c'est tout dire.

Les cocus ne pouvant être représentés que que par des personnages d'une probité intacte et digne de confiance, on ne peut pas leur supposer la volonté d'avoir choisi M. d'Eprémesnil. D'après ces puissantes considérations, il est de toute justice de les autoriser à élire incessamment, ceux d'entre eux qu'ils jugeront dignes de les représenter à l'assemblée nationale, et attendu que les pouvoirs d'un député sont révocables, ad nutum, c'est-à-dire, du jour au lendemain les notables se réservent de rappeller de l'assemblée nationale ceux qui n'ont pas bien mérité de leur confiance.

Là, M. le président s'étant levé, a observé que la discussion étoit terminée, ensuite adressant la parole à touS LES FAVORIS: « Vous venez d'entendre, messieurs, la réfutation énergique que vient de faire Me. Lescaut; on vous l'a dit, toute notre ambition se borne à être comptés au nombre des régénérateurs de la France; des méchants nous en ont éliminés, cependant il est en votre pouvoir de satisfaire notre ambition. On nous demande nos titres, ils sont entre vos mains. Votre témoignage est

le

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