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On peut voir, sous le mot ABBÉ, les autres qualités exclusives des électeurs, ce qui s'applique également aux dignités ecclésiastiques séculieres.

Ceux qui élisent un sujet qu'ils savent indigne, demeurent privés de leur droit d'élection pour la première qui se fera, et sont suspens à beneficiis pendant trois ans ; et si l'élection a été faite par la plus grande partie, elle est dévolue à la moindre. (Cap. Cùm in cunctis; c. Innotuit; cap. 25, de Elect.; c. Gratum, de Postul.)

A l'égard des qualités que doivent avoir les éligibles, elles sont relatives à la nature du bénéfice ou de la dignité qui fait le sujet de l'élection; on peut seulement dire en général à ce sujet que les raisons odieuses qui privent, suivant le droit, un électeur de la faculté d'élire, le privent aussi de la faculté d'ètre élu.

Ordinairement, avant de procéder à l'élection dans une assemblée, on examine si aucun de ceux qui la composent ne doit en être exclus pour quelque défaut exclusif.

Les canonistes estiment qu'il suffit que l'élu soit capable, au temps de l'élection, encore qu'il ne le fût pas lors de la vacance, mais si, au temps même de l'élection, il se rencontrait un vice dans la personne de l'élu, ou une nullité dans l'élection, la confirmation en forme commune ne la validerait point, mais bien une confirmation en connaissance de cause, suivie d'une nouvelle collation de la part du confirmateur, en supposant toutefois que la nullité dont il s'agit ne soit que respective, et non essentielle ou absolue, et que le confirmateur ne puisse dispenser. (C. de Postul. præl., in 6o.)

L'élection doit être faite d'une telle personne qu'on nomme et que l'on désigne, sans dire qu'on acquiesce au choix d'une autre, à moins qu'il fût réglé par titre ou statut, qu'on élirait qu'après l'avis ou le consentement d'un tiers. Enfin le choix que font les électeurs, doit être certain, pur et sans condition: Vota incerta conditionalia reprobamus. (C. de Elect., in 6°; c. 52, de Elect.) (Voyez SUFFRAGE.)

§ IV. ELECTION, acceptation, confirmation, opposition.

Par le chapitre Quam sit, de Elect., in 6o, il est enjoint aux électeurs d'apprendre, le plus tôt qu'ils pourront, à l'élu le choix qu'on a fait de lui, et celui-ci doit accepter l'élection dans le mois, sous peine d'en être privé, s'il n'a de légitimes excuses de délai, nisi conditio personæ ipsum excuset. (Extravag. Si religiosus, eod. in commun.) Après que l'élu a consenti à l'élection, il doit, sous les mêmes peines, se faire confirmer dans les trois mois. (bid.) Que s'il s'ingère dans l'administration du bénéfice ou de la charge avant cette confirmation, il perd aussi les droits qu'il y avait pour l'élection. (C. Qual.ter, de Elect.; c. Nosti, eod.; c. Avaritiæ, 5, eod., in 6".) Le chapitre Nihil est, eod., fait à cet égard une exception que l'on prétend avoir été abrogée: Per confirmationem acquirit electus

plenam administrationem et vinculum conjugale contractum est. (Glos. in c. Nosti.)

Le second concile général de Lyon, tenu en 1274, sous Grégoire X, d'où a été tire le chapitre Ut circà electiones. de Elect., in 6o, ordonna que ceux qui s'opposent aux élections et en appellent, exprimeront dans l'acte d'appel tous les moyens d'opposition, sans qu ils soient reçus ensuite à en proposer d'autres.

L'on voit, sous le mot SUFFRAGE, l'ordre qui s'observe présentement dans les élections par l'exposition du procès-verbal que l'on en doit dresser; et sous les mots NOMINATION, ABBÉ, on trouve la forme ancienne et nouvelle des élections aux évêchés et abbayes et de leur confirmation que plusieurs croient, à tort, n'avoir été attribuée parmi nous au pape que depuis le concordat de Léon X.

On admet en France le principe que l'élu n'a aucun droit à l'administration qu'après la confirmation, comme il ne peut faire les fonctions de l'ordre qu'apres la consécration. (Voyez CONSECRATION.) § V. ELECTION des évêques.

La question relative à l'élection, la nomination et l'institution canonique des évêques a été fort mal comprise par certains canonistes qui, faute de bien connaître l'antiquité ecclésiastique, ont cru, de la meilleure foi du monde, que le pape y était étranger. Nous faisons voir sous le mot NOMINATION, § II, que les évèques étaient toujours confirmés par le métropolitain, et le métropolitan par le pape. Aux raisons que nous y avons données, nous ajoutons ici ce qu'en dit Nardi.

On voit par la première lettre de saint Clément aux Corinthiens, dit cet auteur (1) que le presbytere choisissait l'évêque, qu'il devait être pris dans ce presbytere, qu'il n'y avait que des prêtres et des diacres du presbytere, et que les laïques n'avaient point de part à l'élection. Les constitutions apostoliques parlent de l'élection du peuple; mais il est clair que ce n'était qu'un témoignage que le clergé et le peuple du lieu rendaient a celui qu'on désirait pour évèque, afin qu'il fut connu que le choix était généralement agréable. Du reste, le consentement ou la sauction des évèques de la province était indispensable, et, dans tous les temps, apres la présentation ou la demande, l'Eglise seule, représentée par les éveques avec le pape ou par le pape, donnait et donne le refus ou la confirmation qui est l'institution canouique, sans laquelle on ne procédait jamais à l'ordination.

On aurait grand tort de croire que la présentation fût un obstacle à l'intervention du Saint-Siége et que les élections n'émanassent pas toujours de lui explicitement ou implicitement, car il y a toujours eu anatheme coutre ceux qui auraient dit que les évêques institués par l'autorité du Souverain Pontife ne sont pas de vrais et

(1) Des Curés, et de leur origine dans l'Église, ch. XXIX.

légitimes évêques: Episcopos qui auctoritate Romani Pontificis assumuntur, non esse legitimos et veros episcopos. (Concile de Trente, Sess. XXV.) On a toujours recounu dans le pape l'autorité de créer les évèques. Noël Alexandre et Juénin, peu favorables à Rome, admettent cependant, avec toute l'antiquité, que le partage des dioceses et la désignation des sujets aux évéchés dépend du pape.

Les patriarches et les métropolitains furent créés par le Siége apostolique ou avec son consentement. Les pouvoirs extraordinaires qu'avaient les apôtres étaient ordinairement dans Pierre seul et dans ses successeurs ; il sont restés en eux seuls. Or, les métropolitains n'ayant par droit divin, aucune prééminence sur les autres évèques, mais l'ayant seulement par le droit qu'ils ont reçu du SaintSiége, la part tres considérable qu'avait le métropolitain dans l'institution des évêques venait du pape, qui pouvait tantôt le laisser instituer les évêques, et tantôt se charger lui-mème de l'élection ou de la connaissance de l'élection. (Voyez ARCHEVÊQUE, MÉTROPOLITAIN.) Tous les évêques d'Occident ont été institués par le Siége ro nain, c'est un fait incontestable; or, celui qui a établi les évèchés a pu fixer des lois pour la succession des évèques, car c'est un dogme que semper apostolicæ cathedræ viguit principatus, dit saint Augustin; il n'est pas moins incontestable que les Églises d'Afrique ont été fondées par des ministres évangéliques envoyés de Rome.

La déposition des évèques était réservée au pape, et outre les jugements canoniques des conciles provinciaux sur ce point, desquels on appelait au Saint-Siége, nous avons dans l'antiquité une foule d'exemples d'évêques et même de patriarches destitués par le pape et d'autres placés par le Saint-Siége dans les évèchés vacants. Le pape, à cause de l'éloignement des lieux, permettait l'institution des évêques; mais il ne s'en suit pas qu'il n'eût point pu la donner par lui-même s'il l'avait voulu, et il la donnait souvent. Tout cela montre évidemment que, soit que le pape ait chargé les métropolitains et les suffragants d'instituer les évèq ies, soit qu'il les ait parfois institués lui-même, ou qu'il ait accordé la présentation aux chapitres, aux monarques, il est vrai de dire qu'il a toujours fallu nécessairement avoir son cousentement expres ou tarite, et que Pierre ayant reçu de Jésus-Christ l'autorité de paitre le troupeau et les pasteurs, et le monde entier, il a toujours dépendu et il dépend encore de lui seul et de ses successeurs de donner des évèques à tous les siéges, en la manière que les papes croient convenable. (Voyez NOMINATION.)

ELIGIBLE.

L'éligible est celui qui peut être élu. (Voyez ci-devant ELECTION.

ÉLU.

On donne ce nom à celui sur qui est tombé le choix d'une élection. (Voyez ELECTION.)

EMINENCE.

C'est la qualité qu'on donne aux cardinaux. (Voyez CARDINAL, § V, QUALITÉ.)

EMPÊCHEMENTS DE MARIAGE.

Un empêchement de mariage est un obstacle qui empêche deux personnes de se marier ensemble, et qui rend le mariage nul ou illicite.

§ I. Origine et établissement des EMPÈCHEMENTS de mariage.

Il ne paraît pas que, dans le commencement de l'Église, on ait connu d'autres empêchements de mariage que ceux que l'Ancien Testament et les lois civiles pouvaient désigner. Cependant dès l'an 305, le concile d'Elvire défendit (canon 13) aux vierges consacrées à Dieu de se marier, et aux autres filles chrétiennes d'épouser des gentils. Plus tard, l'Église, dans un esprit de sagesse, a concouru avec la puissance séculière pour établir, étendre ou restreindre ces empêchements, et cela pour l'honneur du sacrement, le salut des fideles et le bien des États. Mais il ne faut pas conclure, comme l'ont fait certains canonistes, de ce que l'Église, par prudence et par condescendance, s'est entendue avec la puissance civile pour établir des empêchements dirimauts de mariage, qu'elle ne le puisse faire indépendamment de celle-ci. C'est ce qu'a décidé le concile de Trente dans ce canon: « Si quelqu'un dit que l'Eglise n'a pas eu le pouvoir d'établir des empêchements dirimants, ou qu'elle s'est trompée en les établissant, qu'il soit anatheme. » Si quis dixerit Ecclesiam non potuisse constituere impedimenta matrimonium dirimentia, vel in iis constituendis errasse, anathema sit. (Sess. XXIV, can. 4.)

Ce décret a été rédigé contre les erreurs de Luther. Or, Luther enseignait que le mariage était un contrat tout humain, purement civil, sur lequel l'Église n'a aucun pouvoir et qui relevait exclusivement de la puissance temporelle. Le concile de Trente, pour condamner ces erreurs, définit, dans ce canon, que l'Église a sur le contrat de mariage un pouvoir qui lui est propre, qu'elle tient de Dieu et non des princes. (Voyez CONTRAT.)

Cette interprétation du concile de Trente est confirmée par la constitution dogmatique de Pie VI, Auctorem fidei, reçue par toute l'Église et récemment encore d'une manière plus solennelle par plusieurs de nos conciles provinciaux. Le concile de Pistoie, en 1786, adoptant une partie des erreurs de Luther, avait enseigné que le droit d'apposer aux mariages des empêchements dirimants appartenait exclusivement à la puissance temporelle, et que l'Eglise ne pouvait pas eu mettre, à moins qu'elle n'y fût autorisée par une concession expresse ou tacite des princes. Pie VI, du haut de la chaire pontificale et par un jugement solennel, condamna ces er

reurs. Doctrina synodi (est-il dit dans la bulle Auctorem fidei) asserens : Ad supremam civilem potestatem duntaxat originariè spectare contractui matrimonii apponere impedimenta ejus generis, quæ ipsum nullum reddunt dicunturque dirimentia; subjungens supposito dissensu vel conniventia principum, potuisse Ecclesiam justè constituere impedimenta dirimentia ipsum contractum matrimonii;

Quasi Ecclesia non semper potuerit ac possit in christianorum matrimoniis, jure proprio impedimenta constituere, quæ matrimonium non solùm impediant, sed et nullum reddant quoàd vinculum quibus christiani obstrictè teneantur etiam in terris infidelium, in eisdemque dispensare (canonum 3, 4, 9, 12, sess. XXIV, Concil. Trid.) eversiva, hæretica.

Le dernier concile de la province de Reims déclare, d'après la bulle Auctorem fidei, que l'Église peut et a toujours pu, par le droit qui lui est propre, établir des empêchements au mariage des chrétiens, empêchements qui non-seulement mettent obstacle au mariage, mais même qui le rendent nul quant au lien. Ecclesia semper potuit et potest in christianorum matrimoniis jure proprio impedimenta constituere, quæ non solùm impediant, sed et nullum reddant quoad vinculum. Cùm aliundè causæ matrimoniales spectant ad judices ecclesiasticos, docemus ea nulla esse et invalida, non solùm quoad sacramentum, sed etiam quoàd vinculum seu contractum naturalem, matrimonia quæ cum impedimento dirimente canonico contrahuntur.

C'est donc un dogme de foi que l'Église peut, de son autorité propre, apposer au mariage des empêchements qui rendent nul le contrat de mariage. Car les empêchements dirimants mis par l'Église, ne rendent pas seulement incapable de recevoir le sacrement, - comme le prétendent nos adversaires, mais ils rendent le contrat nul, comme le déclare le concile de Trente par ces paroles: Hujusmodi contractus irritos et nullos esse decernit prout eos præsenti decreto irritos facit, et annulat. Benoît XIV est formel sur ce point. Dans la constitution Inter omnigenas, il dit: Tridentina synodus, non sacramentum modò, sed contractum ipsum irritum disertè pronuntiat.

Le concile de la province de Reims enseigne également que les mariages contractés avec un empêchement dirimant sont nuls nonseulement quant au sacrement, mais aussi quant au lien et au contrat naturel. En conséquence il déclare qu'on doit regarder comme valides tous ceux qui sont contractés conformément aux saints canons. Néanmoins il veut que les curés observent exactement ce qui est prescrit par la loi civile, pour que les mariages ne soient pas privés des effets légaux et civils. (Tit. XI, cap. 2.)

Lorsque le concile de Trente a décidé que l'Église pouvait établir des empêchements dirimants, il n'a pas entendu, par le mot Église, les rois, les princes, la puissance séculiere, comme le prétendent de Marca, de Launoy, Durand de Maillane, Dupin et autres canonistes;

T. III.

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