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Le concile de Trente, session XIII, ch. 6, de Reform., défend de citer ou assigner un évéque à comparoir personnellement, si ce n'est dans les causes où il s'agit de le déposer et de le priver de ses fonctions. Les canons recommandent d'user d'une grande circonspection dans les jugements qu'on doit prononcer contre des évêques, de ne pas admettre toutes sortes d'accusations, et surtout de ne jamais les traduire pour être jugés devant des juges séculiers, mais seulement devant le pape, pour les causes majeures, et aux conciles provinciaux pour les moindres causes. (Caus. 11, quæst. 1; c. Accusatio episcoporum, caus. 2, quæst. 7; concile de Trente, sess. XXIV, cap. 5, de Reform.) (Voyez CAUSES MAJEURES.)

Les canons prononcent de grandes peines contre ceux qui se rendent persécuteurs des évêques. (C. Clericus, et seq. 3, quæst. 4; c. Ad aures, de Pœnis; Clem. 1, eod. tit.; c. Ità nos, 26, quæst. 2.) Ge dernier canon condamne une ville qui a osé faire mourir son évêque, à n'avoir jamais de pasteur. (Voyez CONSPIRATION.)

14° Les évêques n'encourent jamais la suspense ou l'interdit, dont la sentence est prononcée de droit, qu'il ne soit fait d'eux une expresse mention: Quia periculosum est episcopis et eorum superioribus, propter executionem pontificalis officii, quod frequenter incumbit, ut in aliquo casu interdicti vel suspensionis incurrant sententiam ipso facto, nos deliberatione providâ duximus statuendum, ut episcopi, et alii superiores prælati nullius constitutionis occasione, sententiæ, sive mandati, prædictam incurrant sententiam nullatenùs ipso jure, nisi in ipsis expressa de episcopis mentio habeatur. (Cap. 4, de Sent. excom. in 6°.)

Quelque étendus que soient les droits des évêques, ils ont leurs limitations: 1o ils ne peuvent, en plusieurs choses, exercer leur juridiction sur les exempts, au préjudice des titres et priviléges. (Voyez EXEMPTION.) 2o Ils ne peuvent absoudre des cas réservés au pape, ni entreprendre sur ce que l'usage a attribué exclusivement à Sa Sainteté. (Voyez CAS RÉSERVÉS, PAPE, DISPENSES, EMPÊCHEMENT, etc.) 3o Ils ne peuvent non plus exercer certains droits particuliers aux patriarches, aux archevêques. (Voyez ARCHEVEQUE, PRIMAT.) 4° Ils ne peuvent exercer leur juridiction épiscopale au delà des bornes de leur diocèse. (C. 2, de Excess. prælat.; c. Ad audientiam, de Eccles. ædific., J. G.; c. Episcopus, 7, qu. 1; concile de Trente, session VI, chapitre dernier, de Reform.) (Voyez DIOCÈSE.) 5o Ils ne peuvent défendre à leurs diocésains d'exposer à leurs supérieurs l'état de leurs églises. (Cap. Quia plerumque, de Officio ordin., in 6°.) 6o Ils ne peuvent excommunier personne pour leur intérêt personnel. (C. Inter quærelas; c. Guilisarius, 23, qu. 4; c. Dilecto, de Sent. excom., in 6°.) 7° Ils ne peuvent imposer aucun tribut sur les clercs et les religieux de leur diocese, encore moins sur les laïques. (C. Nulli episcoporum et seq., 16, q. 1; c. Diaconi sunt, vers. Nunc autem, dist. 93; c. 1, de Excess. præl.; c. Cum apostolus, § Prohibemus, de Censib.; c. Quia cognovimus, 10, q. 3.) (Voyez IMMUNITÉ.) 8o Ils ne

peuvent ordonner les sujets d'un autre évêque sans lettres dimissoires. (C. Eos, de Temporib., ordin. in 6°; concile de Trente, sess. XXIII, ch. 8, de Reform.) (Voyez DIMISSOIRES.) 9° Ils ne peuvent se choisir des successeurs. (Voyez COADJUTEUR.) 10° Ils ne peuvent se démettre de leur siége, le transférer à un autre, sans permission de qui de droit. (Voyez NOMINATION, TRANSLATION, PRÉSIDENCE.) 11° Ils ne sont point curés primitifs des paroisses du diocèse, quoiqu'ils puissent y exercer toutes les fonctions pastorales. (Voyez PAROISSE.) 12° Un évêque ne peut administrer son diocèse avant sa confirmation, et il ne peut exercer les fonctions spirituelles avant sa consécration. (Cap Nostri; c. Transmissam; c. Nihil etiam, in fin., de Elect.; c. Avaritiæ, eod, tit., in 6°.) (Voyez NOMINATION, CONSECRATION.) 13° Enfin, quelque grande que soit la puissance de l'évêque, par rapport au gouvernement et à la discipline de son diocèse, il doit toujours se conformer aux lois générales de l'Église universelle, et il ne lui serait pas permis de changer sans nécessité les usages établis dans sa propre église. (Voyez USAGE.)

Nous avons presque toujours suivi Barbosa dans tout ce que nous venons d'exposer, touchant les droits dus aux évêques, respectivement à l'ordre, la juridiction et la dignité de l'épiscopat; nous terminerons ce paragraphe par le résumé suivant que le dernier concile de Lyon fait des droits des évêques. « Les évêques, dit-il, gouvernent par l'autorité qui leur est propre et ordinaire, le diocèse qui leur est confié; ils portent des lois et font des statuts qui obligent tous ceux qui sont soumis à leur juridiction; ils rendent la justice tant par eux-mêmes que par d'autres dans le for intérieur, en liant ou déliant les consciences, et dans le for extérieur en exerçant la juridiction volontaire et contentieuse et en punissant des peines canoniques les délinquants obstinés.

« Il entre dans leurs attributions, dans les limites posées par les saints canons et sauf un recours légitime, de juger dans leur diocèse les causes de la foi, de la discipline et des mœurs, de se réserver des cas, d'approuver et de condamner les livres, de permettre ou de défendre, sous les peines de droit, l'impression, la vente ou l'achat des livres relatifs à la sainte Écriture et à la liturgie; d'approuver les prédicateurs et de veiller, en vertu de leur autorité pastorale, sur le clergé tant séculier que régulier et sur le ministère ecclésiastique.» (Titul. X, n. 5 et 6.)

§ V. Devoirs, obligations, vie et mœurs des ÉVÊQUES.

L'évêque est la colonne du temple. Suivant la belle et mystique expression du moyen-âge, il est le trône de Dieu. En effet, Dieu se repose sur lui de ses intérêts sur la terre. La virginité de la foi de l'Église et la sainteté de ses mœurs lui ont été remises en dépôt, ont été confiées à sa garde; il déclare et prêche la doctrine, il règle la discipline; il élève, il choisit, il consacre, il institue les pasteurs; il les surveille, il les dirige, il les anime, il les modère, il les con

sole, il les réprime, il les récompense; il voit par leurs yeux, il parle par leur bouche, il agit par l'intermédiaire de leur personne. Ils sont ses vicaires, c'est lui qui est le pasteur; ils sont ses fils aînés, c'est lui qui est le père; ils sont ses membres, c'est lui qui est la tête et le cœur; pour eux, il répand dans tout le cœur la chaleur et le mouvement: il est le principe ou du bien ou du mal, et nous serions tenté de dire que c'est lui qui perd ou sanctifie. Voilà l'évêque. Voyons donc quels sont ses devoirs et ses obligations.

On peut les réduire à deux objets principaux, le culte divin et le soin des âmes. Le culte divin se rapporte 1° à la foi et au respect dû à Dieu et à ses saints; 2o à la célébration des offices divins; 3° à l'adn.inistration des sacrements; 4° aux ministres, aux choses et aux lieux ecclésiastiques.

1o Pour ce qui regarde la foi, c'est le premier devoir d'un évêque de l'étendre autant qu'il lui est possible, s'il se trouve parmi des infidèles et si son diocèse est tout composé de fidèles, il doit veiller à ce qu'elle soit enseignée et expliquée à tous dans les termes et suivant les règles prescrites. Nous n'avons rien à ajouter à ce qui est dit à ce sujet sous le mot PRÉDICATION; l'on y voit les décrets du concile de Trente sur cette importante matière. L'évêque doit veiller à ce que les vœux soient acquittés. (Voyez VOU.) Il doit aussi avoir soin que les fêtes soient observées saintement (voyez FETES); que l'on n'enseigne rien que de bon et de conforme à la doctrine de l'Église. (Voyez HÉRÉTIQUE.)

2o Quant aux offices divins, le concile de Trente a fait un règlement touchant la célébration de la messe dont nous parlons sous le mot MESSE. L'on y voit ce à quoi l'évêque doit veiller par rapport à ce saint mystère. A l'égard des autres offices divins et des heures canoniales, il doit avoir soin qu'on les célèbre suivant les règles prescrites par les canons, et qu'il ne s'y introduise rien d'abusif, ni de contraire au rituel du diocèse, c'est à dire au rituel romain. (Voyez OFFICE DIVIN.)

3o A l'égard de l'administration des sacrements, l'évêque doit se faire un devoir de les administrer tous quand il le peut, comme il paraît que c'était le premier usage de l'Église; mais, dans l'état présent de la discipline, il n'a exclusivement que l'administration. des sacrements de confirmation et de l'ordre; les canons lui recommandent de les conférer autant que le besoin de son église et de ses diocésains peut le requérir. (Voyez CONFIRMATION, ORDRE.) A l'égard des autres sacrements, il doit veiller à ce qu'ils soient également administrés suivant les règles prescrites, et aussi à ce que la vertu et les grâces des sacrements soient enseignées aux peuples. (Voyez DOCTRINE, SACREMENTS.) Rien n'empêche que l'évêque n'administre lui-même, quand il le veut, les sacrements, autres que ceux de la confirmation et de l'ordre, même par délégués, parce qu'il conserve toujours une juridiction immédiate dans toutes les paroisses de son diocèse. (Voyez SACREMENT, PAROISSE.)

40 Quant aux personnes, aux lieux et aux choses ecclésiastiques, les devoirs des évêques à cet égard sont devenus, comme nous l'avons observé, des droits qu'ils sont ordinairement soigneux d'exercer, pour que la coutume et la prescription ne leur en fasse pas partager la possession avec d'autres. Ainsi, comme c'est à l'évêque seul à veiller sur son clergé, il ne manque pas de corriger et de punir les clercs séculiers et réguliers quand ils faillissent. (C. Refragabili, de Officio ordin.; Clem. 1, eod. tit. et simil.) Il a soin que chacun soit dans son état et dans ses fonctions, que les paroisses et les églises soient desservies par des gens capables, et qu'elles ne soient possédées que par les plus dignes. Il est encore tenu de veiller aux établissements qui ont pour objet l'instruction des clercs. (Voyez SÉMINAIRE.)

Il en faut dire autant des lieux et des choses saintes nécessaires au culte divin : l'évêque est obligé de prendre garde à ce que le service de Dieu ne se fasse que dans des églises décentes, et qu'on n'y emploie dans les cérémonies que les choses prescrites par les canons et dans l'état que ces mêmes canons exigent; ce doit être là un des principaux soins d'un évêque en visite. (Voyez VISITE.)

Dans une acception plus étendue, nous pourrions entendre ici par les mots de lieux et choses ecclésiastiques, toutes les différentes espèces de biens que l'Église possède, et sur la possession et administration desquels l'évêque a une inspection qui l'oblige à en prévenir et empêcher la dissipation. (Voyez FABRIQUE.)

Le second objet des devoirs d'un évêque est le soin des âmes. A cet égard on doit diviser ses obligations en celles qui regardent les autres, et en celles qui le regardent lui-même : les unes et les autres sont corrélatives; mais on distingue particulièrement les obligations de l'évêque par rapport à lui-même sous l'expression vie et mœurs des évêques ; et dans cette acception nous parlons ci-dessous des qualités et des vertus dont un évêque doit être personnellement doué; c'est-à-dire, de ce qu'il se doit à lui-même, après avoir parlé de ce qu'il doit à Dieu et aux hommes. Nous venons de voir en quoi consistent ses obligations par rapport au culte divin: nous dirons donc à présent qu'il doit à ses diocésains: 1° le soin de les instruire de la religion et de leur rompre sans cesse le pain de la parole divine. (Voyez DOCTRINE.)

2o L'évêque doit avoir soin que les paroisses soient pourvues de bons curés, et de tout autant de prêtres que les besoins des paroissiens peuvent l'exiger. (C. Nullus 16, c. 7.) (Voyez COADJUTEUR.) L'évêque est tenu d'y suppléer quelquefois par lui-même, si necesse sit. (Arg. c. Illud, dist. 95.) Il ne doit pas oublier qu'il est le premier pasteur, et que les autres, qui lui sont subordonnés, peuvent n'être que des mercenaires qui laissent sans souci entrer le loup dans le bercail. C'est aussi pour cette raison que l'on dit qu'un évéque est le curé de son diocèse, qui à son égard n'est qu'une pa

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roisse (1). (C. Omnes basilica, caus. 16, qu. 7; c. Cùm contingat, de Foro competenti.)

3o L'évêque doit empêcher la fréquentation des excommuniés en les faisant connaître. (C. Curæ, 11, qu. 3; Clem. 1, de Consanguinitate et affin.) Il doit ramener les errants, fortifier les faibles et exciter les tièdes pour les faire tous marcher dans la voie de leur salut; la crosse dont on a fait un ornement épiscopal, n'a pas un autre sens mystique :

Curva trahit, quæ recta regit, pars ultima pungit.

(Voyez BATON PASTORAL.) Il doit mettre la paix dans les familles où elle est troublée, et prévenir ou empêcher les discordes dans son diocèse, surtout parmi les ecclésiastiques: Studendum est episcopis ut dissidentes fratres, sive clericos, sive laïcos, ad pacem magis quàm ad judicium coerceant. (C. 7, dist. 90)

4° L'évêque ne doit pas perdre de vue la misère des pauvres et les secours qu'il est tenu d'y apporter selon ses moyens; la charité doit toujours le rendre attentif aux besoins des malheureux; les prisonniers, les enfants exposés sont, comme les pauvres, des objets dignes de ses regards et de ses soins. (L. Judices: 1. Nemini dicere, cod. de episcop. Audient.) L'évêque doit prier et offrir sans cesse des sacrifices pour son peuple; il doit l'édifier par ses bons exemples: Cùm præcepto divino mandatum sit omnibus quibus animarum cura commissa est, oves suas agnoscere, pro his sacrificium offerre verbique divini prædicatione, sacramentorum administratione, ac bonorum omnium operum exemplo pascere, pauperum, aliarumque miserabilium personarum curam paternam gerere, et in cætera munia pastoralia incumbere. Le dernier.concile de la province de Tours dit à cet égard, en rappelant le concile de Rouen de l'an 1581, qu'il ne faut point oublier qu'il appartient aux évêques de prendre un soin paternel des pauvres et des malheureux: Meminerint ad episcopos spectare pauperum et miserabilium personarum paternam curam gerere.

5o Pour qu'un évêque connaisse le diocèse qui lui est si fort recommandé par les canons et les saints conciles de gouverner avec charité, il doit le visiter souvent en personne. (C. Legitur; cap. Relata; ap. Decernimus, 10, q. 1; concile de Trente, sess. XXIV, ch. 3, de Reform.) (Voyez VISITE.) Il doit convoquer et tenir le synode tous les ans. (C. Quoniam; c. Annis singulis, dist. 18.) (Voyez SYNODE.) Enfin, c'est ici le devoir qu'il faut nécessairement remplir, pour pouvoir en quelque sorte s'acquitter de tous les autres: l'évêque est tenu de résider dans son diocèse. (Cap. Si quis in clero; c. Placuit 7, qu. 1; concile de Trente, sess. VI, ch. 1; sess. XXIII, ch. 1, de Reform.) (Voyez RÉSIDENCE.)

Pour ce qui est des devoirs qui se rapportent à l'évêque lui

(1) Barbosa, de Officio et potestate episcop., part. III, alleg. 79.

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