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CHAPITRE VIII.

Chambre des pairs; adoption des lois dont il est traité dans le chapitre précédent. - Budget des dépenses pour 1832. Budget des recettes pour 1832. Clôture de la session. Coup d'œil général sur

ses résultats.

Lorsque les divers projets de loi dont nous venons de parler arrivèrent à l'ordre du jour de la Chambre des pairs, pour être discutés, la Chambre des députés était dissoute de fait. Il en résultait une impossibilité matérielle d'y introduire des changements qui auraient eu l'effet d'un rejet absolu, cette dernière Chambre n'étant plus là pour les sanctionner. Force était done à la pairie d'accueillir ces lois, presque toutes d'une urgence généralement reconnue, dans l'état où le gouvernement les lui avait apportées. Il est vrai que, pour la plupart, elles ne renfermaient pas de questions susceptibles d'être de nouveau débattues et ne demandaient pas non plus de modifications essentielles. On comprend dès lors que la discussion de ces lois dans la Chambre inamovible a dû souvent être aussi rapide que dépourvue de faits véritablement historiques, et que notre tâche se borne à indiquer la date de leur adoption, qui a eu lieu très souvent sans aucune espèce de débat préalable.

C'est ainsi que, sur les conclusions favorables des commissions de la Chambre, se trouvèrent successivement adoptés, et chaque fois à une majorité considérable, le 14 avril, le projet de loi accordant 2 millions pour mesures sanitaires ; le 16, 1o les deux projets sur la pêche de la morue et de la baleine, 2o le projet portant règlement de la navigation du Rhin, 3o le projet relatif à la suspension des élections municipales; le 19, après quelques réflexions de MM. le général Excelmans, duc de Choiseul, duc de Broglie et comte de Ségur, 1o le projet relatif à la résidence des étrangers réfugiés en France, 2o les

deux projets accordant des crédits pour secours à ces mêmes réfugiés, 3o le projet accordant un crédit de 1,500,000 francs au ministre de l'intérieur pour complément des dépenses secrètes en 1832, 4° le projet relatif aux droits du sceau, 5o enfin le projet qui autorise l'exécution du canal de la Garonne.

Le vote de la Chambre sur le budget des dépenses et sur celui des recettes ne différa pas des précédents, quant au résultat; mais il n'eut lieu qu'après une manifestation d'opinions où l'on peut voir un grave et dernier symptôme de ce dissentiment entre les deux Chambres qui s'était plus d'une fois révélé dans le cours de la session.

17 avril. M. le comte Roy, en communiquant à la Chambre le rapport de la commission du budget des dépenses, fit d'abord remarquer qu'elle était encore condamnée à adopter tous les articles du projet, quels qu'ils fussent. Dans cette situation, l'orateur annonçait qu'il se bornerait à présenter le tableau des résultats du projet, à les accompagner des observations qu'il croirait utiles et à appeler l'attention de la Chambre sur quelques dispositions législatives et permanentes introduites par la Chambre élective.

Arrivé aux réductions opérées dans le budget, M. Roy observait que ces réductions, en tant qu'elles affectaient les traitements, ne devaient avoir leur effet qu'à partir du 1er mai 1832.

Ainsi le crédit total serait augmenté par suite de cette disposition d'une somme qui irait au moins à

Mais, en outre, il fallait y ajouter plusieurs autres sommes accordées implicitement ou explicitement, et qui montaient, suivant le rapport, à............

Ces sommes venaient en accroissement de celle de.....

2,000,000 fr.

7,670,000

1,106,618,270

qui apparaissait seule au budget et en élevait par conséquent le chiffre à...... 1,116,288,270 fr. sans compter les sommes qui seraient consacrées au paiement

des pensions de la caisse de vétérance de l'ancienne liste civile.

Après avoir dit que, parmi les réductions faites par les députés, il en était beaucoup que la commission ne proposerait pas d'adopter si la Chambre pouvait délibérer avec liberté, M. Roy passait en revue les diverses dispositions législatives rattachées au budget par voie d'amendement. Toutes ces dispositions avaient le caractère de lois permanentes et statuaient pour l'avenir. Plusieurs modifiaient la législation existante. Les unes étaient déplacées dans le budget, qui avait pour unique objet de fixer les dépenses ordinaires et extraordinaires de l'exercice 1832; les autres faisaient descendre dans les Chambres les derniers détails de l'administration. L'article 5 brisait un contrat formé par la loi et portait atteinte à des droits qu'elle avait garantis. L'article 13 soulevait une haute question constitutionnelle : celle de savoir si ce n'est pas au roi seul qu'il appartient d'apprécier les circonstances dans lesquelles l'intérêt de l'État et les changements qu'il croirait nécessaire d'apporter à la composition de l'armée peuvent exiger des nominations de maréchaux, de lieutenants généraux, de maréchaux de camp. Enfin M. le rapporteur signalait d'une manière plus spéciale à l'attention de la Chambre les inconvénients de la disposition qui ordonnait que le rapport dressé chaque année par la Cour des comptes, en exécution de la loi du 16 septembre 1807, serait imprimé et distribué aux Chambres.

18 avril. C'était à M. le duc de Tarente qu'avait été laissé le soin de traiter dans un rapport particulier les questions relatives à la Légion-d'Honneur. L'orateur s'attacha dans un discours fort étendu à démontrer combien seraient nuisibles les retranchements opérés par la Chambre élective dans cette partie du budget, et à réfuter les attaques que l'administration de l'Ordre avait eues à subir.

« Ces attaques si vives, disait-il, ont répandu l'alarme parmi les membres de l'Ordre et porté la perturbation dans l'administration. Dans une telle circonstance, il est malheureux que nous soyons réduits à ne pouvoir

que signaler les vices d'une loi de finances sans pouvoir y porter remède. Tout amendement vous est impossible; cependant il serait de l'honneur et de la dignité de cette Chambre qu'il n'en fût pas ainsi, et que notre participation à la loi des finances ne continuât pas à être illusoire.

M. le duc de Choiseul protesta avec énergie contre cette obligation de sanctionner des lois de finances légèrement discutées et défectueuses sous un grand nombre de rapports, ne renfermant aucune allégeance réelle pour les contribuables, et n'offrant que des économies mesquines, mal appliquées, peu dignes de législateurs éclairés. C'était donc avec la plus vive douleur qu'il déposerait son vote obligé pour de pareilles mesures; ét, puisque l'action législative avait été suspendue au moment où le pays se trouvait en proie aux ravages d'un' fléau destructeur, au moment où elle pouvait être du plus grand secours, l'orateur demandait la clôture, il désirait que la loi fût votée en silence, et proposait ce considérant qui conservait la dignité de la Chambre :

རཤྩེན

La Chambre, attendu que dans les circonstances actuelles il est urgent de régulariser l'état des finances publiques, et de pourvoir aux besoins des différents services; *

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qui serait introduit dans la loi relative

Attendu que tout amendem aurait nécessairement pour effet de

à la fixation des dépenses de

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retarder, d'une manière nuisible, l'adoption définitive de cette loi; ^ Considérant que la discussion serait sans objet puisqu'elle ne saurait avoir aucun résultat utile, tandis qu'elle aurait l'inconvénient qu'on en pourrait conclure que là Chambre a approuvé, par sa délibération, des dispositions qu'elle n'accepte qu'à raison de l'urgence du vote sur l'ensemble de la loi;

• Arrête que la discussion est fermés. b

Quoiqu'il s'abstint de se prononcer sur le mérite de la proposition, M. le ministre de l'instruction publique ne voulait pas laisser sans observations quelques-unes des paroles qui paraissaient avoir échappé au préopinant.

120 97...

Il nous appartient, disait M. de Montalivet, à nous, qui avons assisté à une si longue session, de repousser ces paroles. ༈:ག་ ་་་

Le budget présenté à la Chambre des députés il y a environ dix mois a été discuté pendant trois mois, et à aucune époque il n'avait été soumis à un aussi profond examen, J'ajoute que toutes les observations présentées par le gouvernement ont été discutées avec sagesse et avec maturité. Je devais cet hommage à la Chambre élective, et je suis convaincu que la

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plupart de ceux qui m'écoutent pensent comme moi. (Marques générales d'assentiment.)

• La Chambre des députés a accordé tous les crédits dont le gouvernement pouvait avoir besoin ; les fonds secrets, demandés par M. le président du conseil, ont été votés à une majorité de plus de cent voix.

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Quant au fléau actuel que le noble duc a prétendu que la Chambre des députés avait fui, je dois protester hautement contre une semblable imputation. La Chambre a accordé, avec le plus vif empressement, toutes les mesures qui lui ont été proposées pour le combattre.

La loi sur la caisse de vétérance n'a pas été votée, il est vrai; mais d'abord les circonstances ont forcé le gouvernement à la présenter fort tard. Il a été bien entendu que, si cela était nécessaire, le gouvernement ouvrirait un crédit, et qu'il trouverait dans les deux Chambres un bill d'indemnité pour de semblables mesures. »

Tout en appuyant la proposition, M. le baron Mounier fit observer que M. le duc de Choiseul n'avait pas entendu reprocher à l'autre Chambre une lâche désertion qui serait aussi contraire à nos mœurs qu'aux devoirs et aux sentiments d'hommes publics. Si la Chambre des députés était en ce móment moins nombreuse que celle des pairs, cela n'était pas nouveau, c'est ce qui arrivait chaque année. C'est aussi ce qui n'arriverait plus lorsqu'une fois la Chambre des pairs aurait voté un amendement au budget. Aujourd'hui il était urgent de l'adopter sans modification :

Mais, pour qu'on ne puisse pas, continuait l'orateur, vous reprocher l'année prochaine ce que vous avez fait cette année, dans le cas où vous adopteriez un amendement, je demande qu'il soit bien établi que la Chambre a voté d'urgence, mais qu'elle n'a pas entendu donner son assentiment à telle ou telle disposition introduite dans la loi,

pro

« C'est ce que je trouve dans la rédaction d'ordre du jour motivé posée par M. de Choiseul, qui, je crois, rencontrera l'assentiment de la

Chambre..

Après un discours de M. le marquis de Barbé-Marbois sur la publicité du rapport de la Cour des comptes et quelques ob servations de M. le comte de Sesmaisons et de M. l'amiral Duperrey qui témoignèrent le désir que l'art. 17 fût revisé dans la session de 1832, M. de Montalivet prit de nouveau la parole pour soutenir qu'il y avait impossibilité d'adopter la proposition. Elle était contraire aux usages de la Chambre et il serait à redouter que l'esprit de parti ne voulût y voir autre chose qu'une sorte de réserve de la part de la Chambre pour la ses

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