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nature, vainement invoquerait-on, pour déclarer solidaires contre tous les condamnés, les dommages-intérêts qui en résultent, l'art. 42 du tit. 2 de la loi du 22 juillet 1791; car cet article ne déclare solidaires que les amendes de la police municipale, en même temps que celles de la police correctionnelle; et la preuve que, dans ce texte, la loi entend le mot amendes dans le sens qui lui est rigoureusement propre, la preuve qu'elle n'y comprend pas les restitutions et les dommages-intérêts, c'est que, dans l'article précédent, voulant assimi ler, quant à la contrainte par corps en matière correctionnelle, les restitutions et les domma ges-intérêts aux amendes, elle a soin d'exprimer que telle est son intention: Les dommages » intérêts, ainsi que les restitutions (dit-elle) et » les amendes qui seront prononcés en matière » de police correctionnelle, emporteront la » contrainte par corps ».

On ne pourrait donc déclarer solidaires les dommages-intérêts résultant des contraventions étrangères à la police rurale, qui sont encore punies d'après les anciennes lois, qu'autant que l'on pût également juger tels les dommagesintérêts résultant des contraventions qui ne sont plus passibles que des peines déterminées par le livre 4 du Code pénal. Or, on vient de voir que cela est impossible.

VI. De ce que l'art. 55 du Code penal ne parle que des individus condamnés pour un méme crime ou un même délit, il naît une autre question : c'est de savoir si la disposition en est applicable aux dommages-intérêts que l'accusé d'un crime, ou le prévenu d'un délit, obtient, en cas d'acquittement, contre ses dénonciateurs.

» Cela semblerait être (répond M. Carnot, » à l'endroit cité, no 4) dans les principes d'une » exacte justice; cependant l'art. 55 ne parle que des condamnés pour crimes et délits ; et ce n'est pas pour crimes ou délits que les » dénonciateurs et les parties plaignantes sont ⚫ condamnés à la réparation du dommage qu'ils » ont causé à l'accusé ou au prévenu; à quoi » l'on peut ajouter qu'aux termes de l'art. 1202 » du Code civil, la Solidarité ne se présume pas; que cette règle ne cesse que dans les » cas où la Solidarité a lieu de plein droit,en » vertu d'une disposition de la loi ».

C'est ainsi, en effet, que la question paraît devoir être décidée en these générale; mais n'y aurait-il pas lieu à la Solidarité, dans le cas, prévu par l'art. 358 du Code d'instruction criminelle, où les dénonciateurs seraient condamnés à des dommages-intérêts pour fait de calomnic, et dans celui où la plainte des par

ties civiles serait déclarée calomnieuse par le jugement qui, en acquittant le prévenu ou l'accusé, les condamnerait envers lui à des dommages-intérêts?

Je n'en doute pas; car, de deux choses l'une : ou le jugement qui condamnerait, soit les dénonciateurs, soit les parties civiles, à des dommages-intérêts, prononcerait contre eux la peine de la calomnie; ou il les renverrait, pour l'application de cette peine, devant le tribunal correctionnel (1).

Dans la première hypothèse, ily aurait condamnation pour un même délit, par un jugement qui prononçerait à la fois et sur l'action publique et sur l'action privée. Ainsi, point de prétexte pour soustraire les condamnés à la Solidarité des dommages-intérêts, comme à

celle de l'amende.

Dans la seconde hypothèse, il ne serait, à la vérité, statué par le jugement que sur l'action privée; mais il n'y en aurait pas moins condamnation pour un même délit ; et cela suffirait, d'après ce qui est dit plus haut, no 4, pour qu'il y eût Solidarité, pour les dommages-intérêts, entre tous les condamnés.

§. XI. Y a-t-il entre les co-auteurs et complices de faits de dol et de fraude non qualifiés de délit par la loi, Solidarité pour les restitutions et les domma ges-intérêts auxquels ces faits donnent lieu ?

L'affirmative était universellement reconnue dans l'ancienne jurisprudence. La loi 1, §. 4, D. de eo per quem factum erit, l'avait expressément consacrée, en disant : Si plures dolo fecerint, omnes tenentur; sed si unus præstitit pœnam, cæteri liberantur, cùm nihil intersit. C'est aussi ce que supposait clairement, comme le remarque Voët, dans son commentaire sur les pandectes, liv. 5, tit 3, no 9, la loi 17, D. de dolo malo, lorsqu'elle disait si plures dolo fecerint, et unus restituerit, omnes liberantur ; quod si unus quanti ea res est præstiterit, puto adhuc cæteros libe

rari.

Qu'il en soit encore de même aujourd'hui, lorsque les faits de dol et de fraude qui donnent lieu à des restitutions et des dommages-intérêts, sont qualifiés par la loi, de crimes ou délits, c'est ce qui est écrit en toutes lettres dans l'art. 55 du Code pénal.

Mais de là même ne résulte-t-il pas qu'il n'y

(1) V. les conclusions et l'arrêt du 12 novembre 1813, rapportés dans le Répertoire de jurisprudence, au mot Calomnie, n°7.

a point de Solidarité à l'égard des restitutions et des dommages-intérêts auxquels donnent lieu les faits de dol et de fraude que la loi ne punit d'aucune peine afflictive, infamante ou corrrectionnelle, et pour la réparation desquels elle n'accorde qu'une action civile ?

Telle paraît être, à la première vue, la conséquence du principe général qu'il n'y a point de Solidarité sans convention qui la stipule, ou sans loi qui l'établisse expressément.

Voici cependant deux arrêts de la cour de cassation qui jugent formellement le contraire : Le 20 février 1810, les héritiers Paris ven. dent au sieur Hysseaux une ardoisière, moyennant la somme de 13,000 francs payable en trois termes, savoir, 3,000 francs le premier juillet suivant, 3,000 francs le premier janvier 1811, et 7,000 francs dans trois ans.

A l'échéance du premier terme, le sieur Hysseaux ne paye rien aux héritiers Paris; et cependant, dès le 21 juillet 1810, il revend les trois quarts de l'ardoisière aux sieurs Gosset, Brion et Maquiète, moyennant la somme de 2,475 francs qu'ils s'obligent de payer chacun par tiers, en trois termes, savoir, 675 francs dans le mois, 900 francs le premier février 1811, et le surplus au premier avril de la inême année.

Il est à remarquer que la veille de cette revente, les sieurs Gosset, Brion et Maquiète avaient remis au sieur Hysseaux une promesse sous scing-privé de le garantir de toutes les poursuites qui pourraient être dirigées contre lui par les héritiers Paris.

Dix jours après, le 31 du même mois, les sieurs Gosset, Brion et Maquiète achètent du sieur Hysseaux le quatrième quart de l'ardoisière pour le prix de 150 francs payés comptant. Les deux contrats sont immédiatement transcrits et notifiés aux héritiers Paris.

Ceux-ci forment une sur-enchère sur le prix, mais ils en sont déboutés pour défaut de forme.

Après de longues et inutiles procédures contre le sieur Hysseaux,pour obtenir le paiement des 13,000 francs qui leur sont dus, les héritiers Paris reviennent sur les sieurs Gosset, Brion et Maquiète, et les font assigner devant le tribunal de première instance de Rocroi, pour voir déclarer frauduleux les deux contrats de revente des 21 et 31 juillet 1810, avec con damnation à délaisser l'ardoisière, si mieux ils n'aiment leur payer les 13,000 francs portés dans le premier contrat de vente.

Les sieurs Gosset, Brion et Maquiète répondent que les héritiers Paris sont non-receva. bles et non fondés: non-recevables,parcequ'ils ont sur-cnchéri le prix des deux reventes, et

que, par là, ils ont renoncé à l'action résolutoire qu'ils auraient pu exercer contre les tiers-acquéreurs, à défaut de paiement du prix de leur vente; non-fondés, parceque les faits dont ils se prévalent, ne prouvent pas qu'il y ait eu dol et fraude dans les reventes des 21 et 31 juillet 1810.

Le 6 septembre 1813, jugement qui déclare les deux reventes frauduleuses et nulles, ordonne aux sieurs Gosset, Brion et Maquiète de délaisser l'ardoisière, si mieux ils n'aiment en payer le prix stipulé par le contrat de vente du 20 février 1810, et les condamne solidairement à rendre compte des produits de l'exploitation de l'ardoisière depuis le jour de la demande judiciaire.

Appel de ce jugement à la cour royale de Metz, de la part des sieurs Gosset, Brion et Maquiète.

Le 22 juin 1815, arrêt qui met l'appellation au néant,

« Attendu 10 que tout créancier est admis à attaquer les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, et par conséquent à en poursuivre la nullité ou résolution contre les tiers au profit desquels ils furent consentis, d'après l'art. 1167 du Code civil;

20 Que, quoique cette règle ne doive pas s'appliquer généralement aux actes translatifs de propriété, pour lesquels le gage des créanciers, malgré la transmission à un autre, ne reste pas moins affecté à leur hypothèque, s'il veillent à la conservation et à l'exercice de celleci, dans les formes voulues par la loi, de manière que les créanciers invigilans ne peu. vent, en thèse générale, arguer de fraude un acte de vente qui ne les empêche pas d'exercer leurs droits résultant des priviléges et hypothèques sur les objets vendas; néanmoins, tout acte qui aurait pour but d'enlever au créancier son recours sur la chose vendue comme sur le débiteur, peut être attaqué comme nul et frauduleux en soi, lors même que le créancier aurait exercé, ou pu exercer l'action hypothécaire sur l'objet vendu ;

30 Que la fraude est un vice radical et absolu, dans l'acte qui en est infecté, lequel produit une nullité essentielle que rien ne peut couvrir, à la différence de la simulation simple, qui peut n'être qu'an vice relatif et devenir indifférent à la validité de l'acte,suivant la nature des choses et la qualité des parties;

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4° Qu'il n'est pas possible de se dissimuler que les deux actes de vente consentis par Hysseaux au profit des appelans, les 21 et 31 juillet 1810, moins de six mois après l'acquisition qu'il avait faite, par contrat sous seing-privé,

de l'ardoisière d'Eteiguières, avant d'avoir acquitté la moindre partie du prix, au moment où était échu le premier terme, sans énoncer ces faits, qui, d'ailleurs, ne pouvaient être ignorés des acquéreurs, font naître le soupçon d'un concert frauduleux entre le vendeur et les acquéreurs, pour enlever aux premiers vendeurs le prix et la chose qu'ils avaient précédemment vendue;

» 5° Que cet esprit de fraude se développe d'ailleurs par la vileté du prix de la seconde vente, si différent du premier;

»6 Par la stipulation des termes de paiement extrêmement courts dans le premier contrat, et la déclaration de quittance dans le second; tandis les acquéreurs, qui n'ignoraient ni que d'où provenait à leur vendeur l'ardoisière, ni les conditions de sa vente, ni sa passation avec les premiers vendeurs, se seraient bien gardés de s'exposer à payer deux fois, et même audelà, le prix de leur acquisition, si l'acte qui la renfermait, n'eût été le produit d'un concert frauduleux entre eux et leur vendeur, pour enlever et détruire envers les véritables propriétaires de l'ardoisière, le gage de leur créance privilégiée ;

»7° Que ce concert frauduleux se démontre et acquiert le dernier degré d'évidence par le billet donné par les appelans à Hysseaux, le le 20 juillet 1810, avant les actes de rétrocession qu'ils se sont fait faire par celui-ci ; d'où il suivait qu'ils avaient consenti d'assumer sur leurs têtes les événemens qui résulteraient des actes qu'ils ont obtenus de la faiblesse et de la mauvaise foi d'Hysseaux ».

Les sieurs Gosset, Brion et Maquiète se pourvoient en cassation contre cet arrêt, et l'attaquent, notaniment,sous trois rapports : comme violant les art. 1184 et 1654 du Code civil; comme jugeant frauduleux des actes qui ne présentaient aucun caractère de fraude ni dol; enfin, comme contrevenant, par la condamnation solidaire qu'il prononce contre eux, en ce qui concerne le rapport des produits de l'exploitation de l'ardoisière, au principe consacré par l'art. 1202 du Code civil, que la Solidarité ne peut résulter que d'une convention expresse ou d'une loi spéciale.

Mais par arrêt du 3 juillet 1817, au rapport de M. Brillat de Savarin, et sur les conclusions de M. l'avocat général Lebeau,

• Attendu....., sur le second moyen, que l'art. 1184 n'a pas été violé, puisque les actes dont il s'agit an procès, étaient principalement attaqués, et ont été annulés comme infectés de dol et de fraude, ce qui fait exception à toutes les règles faites pour les cas ordinaires,

» Attendu, sur le troisième moyen, que les

juges de la cour royale ont pu, d'après les principes consignés dans les lois, induire le dol et la fraude des diverses circonstances qu'ils ont consignées dans l'arrêt;

» Attendu, sur le quatrième moyen, que la condamnation solidaire au paiement des fruits ou intérêts, est une conséquence du concert frauduleux entre Hysseaux et les demandeurs ;

>> La cour (section des requêtes) rejette le pourvoi.... (1)».

Le second arrêt a été rendu dans les circonstances suivantes :

Le 8 octobre 1793, le sieur Bisson vend au sieur Couture deux fermes, moyennant une rente viagère de 2,400 francs.

Le 24 germinal an 9 (11 avril 1801), décès du sieur Bisson.

Aussitôt après, le sieur Couture revend les deux fermes aux deux fils du défunt, qui en jouissent paisiblement pendant plusieurs an

nées.

Cependant trois sœurs de ceux-ci recueillent différens indices desquels il résulte que la vente du 8 octobre 1793 et la revente du 24 germinal an 9 ne sont que des actes simulés, et qu'ils ont été concertés pour les priver de leurs droits successifs, en fraude de la loi du 7 mars 1793. En conséquence, elles assignent leurs frères devant le tribunal de première instance de Pont-Lévêque, pour les faire condamner à les admettre au partage des deux fermes, et solidairement à leur en rapporter les fruits depuis l'ouverture de la succession.

Le 9 février 1816, jugement qui accueille ces conclusions.

Appel de la part des sieurs Bisson, à la cour royale de Caen.

Le 21 novembre de la même année, arrêt confirmatif.

Les frères Bisson se pourvoient en cassation, et soutiennent qu'en les condamnant solidairement à la restitution des fruits, la cour roya¬ le de Caen a violé l'art. 1202 du Code civil.

Mais par arrêt du 12 février 1818, au rapport de M. Botton de Castellamonte, et sur les conclusions de M. l'avocat général Lebeau,

« Attendu que les demandeurs ayant joui des fruits contentieux, par l'effet du dok et de la fraude dont ils se sont rendus complices, et ayant, par là, causé des dommages à leurs sœurs, l'arrêt s'est conformé aux vrais principes en prononçant une condamnation solidaire;

(1) Journal des audiences de la cour de cassation, année 1818, page 398.

» La cour (section des requêtes ) rejette le pourvoi... (1) ».

Ni cet arrêt ni le précédent n'expliquent sur quoi ils se fondent pour décider que les demandeurs en cassation avaient été légalement condamnés solidairement à la restitution des fruits qu'ils avaient perçus en commun par cela seul que c'était par des fraudes concertées entre eux, qu'ils s'en étaient procuré la perception; et je le repète, il paraît, au premier abord, difficile de concilier cette décision avec le principe général qui est écrit dans l'art. 1202 du Code civil.

Mais remontons au motif de la disposition de l'art. 55 du Code pénal, et nous verrons cette difficulté s'évanouir.

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Pourquoi cet article veut-il qu'il y ait Solidarité, à l'égard des restitutions et des dommages-intérêts, entre les individus condamnés pour un même crime ou pour un même délit? C'est, répond M. Toullier, tome 11, no 151, parceque cela est dans « la nature des choses; car, dans les crimes et délits, il y a toujours malignité et dessein de nuire. Il est donc >> naturel que la volonté commune des délin» quans de nuire à l'offensé, lui donne contre » eux la même Solidarité que lui donnerait, » dans un contrat, la volonté commune des >> obligés de s'engager à une même chose. » C'est dans la volonté commune des délin>> quans que prend sa source la Solidarité »> noncée contre eux »>.

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Or, il y a nécessairement la même malignité, le même dessein de nuire, dans les faits de dol et de fraude pour la réparation desquels la loi n'accorde qu'une action civile, que dans les faits de dol et de fraude que la loi punit, soit de peines afflictives ou infamantes, soit de peines correctionnelles.

Donc c'est par un principe commun aux uns et aux autres, que l'art. 55 du Code pénal déclare solidaires les dommages-intérêts qui sont dus à raison de ceux-ci.

Donc il reconnaît lui-même que la Solidarité doit également avoir lieu pour les dommages-intérêts prononcés à raison de ceux-là.

Donc les deux arrêts de la cour de cassation, des 3 juillet 1817 et 12 février 1818, ont bien jugé.

§. XII. Y a-t-il Solidarité, entre tous les condamnés aux dommages-intérêts résultant d'une imprudence, d'une faute, d'une négligence qui leur est commune ?

(1) Jurisprudence de la cour de cassation, tome 19, page 377.

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SOMMATION. La citation en conciliation sur une demande en paiement, équivaut-elle à une Sommation de payer, et suffit-elle, en conséquence,quoi qu'avant son échéance, elle soit suivie d'offres réelles de la part du débiteur, pour constituer celui-ci en demeure?

V. l'arrêt de la cour de cassation, du 14 juin 1814, rapporté au mot Emphytéose, §. 3, no 2.

SOUSTRACTION DE TITRES. V. l'article Suppression de titres.

SPOLIATION. L'héritier du mari peut-il compenser, jusqu'à due concurrence, la dot qu'il doit rendre à sa veuve, avec la valeur des effets qu'elle a soustraits de la maison maritale? V.le plaidoyer du 2 ventôse an 11, rapporté à l'article Dot, §. 5.

STIPULATION POUR AUTRUI, §. I. 10 Dans quels cas peut-on valablement stipuler pour autrui ?

2o Dans quels cas ces sortes de stipulations, lorsqu'elles sont valables, peuvent-elles être révoquées par les parties qui les ont faites P

30 L'indication de paiement, stipulée dans un contrat de vente au profit d'un créancier du vendeur, pouvait-elle, sous le régime hypothécaire de 1771, étre révoquée par le vendeur lui-même, avant que le créancier l'eût acceptée, et après que l'acquéreur avait pris, sur son contrat, des lettres de ratification au sceau desquelles le créancier indiqué n'avait pas formé opposition?

Les 6 mai 1785, 11 janvier et 24 juin 1787, actes notariés par lesquels la veuve Lorimier constitue, au profit de Jean-François Morand, Isidore Chaillot, François Dinville, Joseph Brulé, Nicolas Hubert et Marie-Cécile Chesnel, des rentes viagères qu'elle affecte spécialement sur sa terre d'Étoges.

Le 21 fructidor an 3, Claude Lorimier, son fils et unique héritier, vend la terre d'Étoges à Camille Pernon, qui l'acquiert pour lui ou son command.

Le 16 brumaire an 4, contrat notarié entre Claude Lorimier et François Labrousse, par lequel celui-ci, moyennant la somme de 270,000 livres que lui compte le premier, se charge 1o de lui payer une rente viagère de 5,143 boiseaux de blé, mesure d'Étoges, en nature ou en valeur, suivant les mercuriales de Montmirail et de Sézanne près Étoges; 2o d'acquitter,à sa décharge, un douaire annuel de 4,000 livres,et les rentes viagères créées par les actes des

5 mai 1783, 11 janvier et 24 juin 1787, au profit des six personnes ci-dessus nommées.

Leiinivôse suivant, Camille Pernon obtient, sur son contrat d'acquisition du 21 fructidor an 3, et toujours tant pour lui que pour son command, des lettres de ratification qui sont scellées sans opposition de la part de ces six personnes.

Le 9 pluviôse de la même année, Camille Pernon déclare pour command François Labrousse.

Le 13 du même mois, acte notarié, par lequel Camille Pernon, « désirant pouvoir dis» poser librement du domaine d'Étoges, sans >> être gêné dans cette disposition, par les droits » et hypothèques acquis au cit. Lorimier, par » l'acte du 16 brumaire dernier, demande que le »cit. Lorimierydonne son consentementformel » pour suppléer à ce qui ne se trouve point ex» primé dans ledit contrat » ;

>>

Et Claude Lorimier, de son côté, «< recon» naissantqu'il a entendu, lors de la passation de »ce contrat,accorder au cit. Labrousse la faculté » de cette libre disposition, et que son consen»tement, quoique non stipulé,a été néanmoins >>>> une condition entendue et convenue entr'eux, » déclare consentir que le domaine d'Étoges ne » soit point frappé des droits, actions et hypothèques acquis au cit. Lorimier par le contrat » du 16 brumaire, à raison des rentes viagères » que Labrousse s'est obligé d'acquitter par » ledit contrat, tant en fonds et capitaux, que » pour les arrérages et autres accessoires et obli»gations qui y sont stipulés; mais qu'au contrai»re, lesdits biens en demeurent affranchis.... ». Le 26 du même mois, François Labrousse vend à Ferdinand Duragond la terre d'Etoges, à l'exception d'un bois de 630 arpens, connu sous le nom de Bois de Rilland.

Ferdinand Duragond prend, sur son contrat, des lettres de ratification qui sont scellées sans opposition.

En floréal an 4, Claude Lorimier et François Labrousse transmettent à chacun des propriétaires des rentes viagères constituées par les actes des 5 mai 1785,11 janvier et 24 juin 1787, un extrait de la convention du 17 brumaire, par laquelle François Labrousse s'est chargé d'acquitter ces rentes; et leur annoncent qu'à l'avenir, ils devront s'adresser à celui-ci pour le paiement des arrérages.

Le 11 messidor an 5, François Labrousse, pour se libérer des sommes considérables qu'il doit à François Lafontaine-Grandcourt, lui vend le bois de Rilland, précédemment distrait du domaine d'Étoges.

François Lafontaine-Grandcourt ne prend point de lettres de ratification sur ce contrat. TOME XIV.

En fructidor an 5, frimaire an 6, germinal, floréal et prairial an 7, Jean-François Morand, Isidore Chaillot, François Dinville, Joseph Brulé, Nicolas Aubert et Marie-Cécile Chesnel prennentdes inscriptions sur le boisde Rilland, pour la conservation des hypothèques de leurs rentes viagères.

Le 28 thermidor an 7, ils citent François Lafontaine au tribunal civil du département de la Seine, pour se voir condamner hypothécairement à payer les arrérages échus de ces rentes, et à en continuer la prestation à l'avenir.

Les 24 brumaire et 24 frimaire an 8, juge. mens par défaut, qui leur adjugent leurs conclusions.

Appel.

François Lafontaine soutient qu'il a été mal jugé, 1o parceque François Labrousse, son vendeur, a purgé les hypothèques des six rentiers, par le défaut d'opposition de ceux-ci aux lettres de ratification prises sur le contrat du21 fructidor an 3; 2o parceque Claude Lorimier, débiteur primitif des six rentes viagères, avait, par l'acte du 15 pluviôse an 4, déchargé le domaine d'Étoges de toute hypothèque à raison de ces rentes, et que, par là, il avait fait cesser l'exception que les six rentiers auraientputirer de la convention du 16 brumaire précédent.

Les rentiers répondent qu'au moyen de la convention du 16 brumaire an 4, François La. brousse, représenté aujourd'hui par François Lafontaine, doit être considéré comme ayant acquis le domaine d'Étoges à la charge d'acquitter leurs rentes ; qu'ils doivent par consé: quent être assimilés à des créanciers délégués par un contrat de vente sur lequel sont ensuite obtenues des lettres de ratification; et que, dèslà, ils n'ont pas besoin, pour conserver leurs hypothèques, de former opposition au sceau des lettres durinivôse an 4; que telle était, par rapport aux créanciers délégués, l'interpréta tion donnée par la jurisprudence des arrêts aux dispositions de l'édit de juin 1771; que l'acte du 13 piuviôse an 4 est, à leur égard, res interim alios acta, et qu'il n'a pas pu leur enlever des hypothèques qui leur étaient légitimement acquises.

Le 9 fructidor an 10, la cour d'appel de Paris confirme les deux jugemens par défaut de tribunal de première instance, « Attendu que >> Labrousse a contracté, par l'acte du16bru» maire an 4, l'obligation personnelle de payer >> les rentes etpensions léguées etdonnées par la » défunte Lorimier, en a fait sa propre dette, >> suivant que lui-même en a donné avis aux dif» férens créanciers,par sa lettre du 29 floréal an » 4, et n'a pas pu purger, par les lettres de rati.

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