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les deux sentences, annulle la saisie-réelle et tout ce qui s'en est ensuivi, condamme solidairement la veuve Sélys et Michel Sélys, son fils, à restituer à la veuve Champigny tous les fruits perçus et perceptibles des biens de Mainsec et de la Flandrie, depuis 1712, et à lui en payer les intérêts.

La veuve Sélys et son fils se pourvoient en cassation contre cet arrêt.

Le 25 octobre 1783, arrêt du conseil qui rejette leur requête.

De là, de nouveaux arrêts du parlement de Paris, qui liquident les condamnations prononcées par celui du 19 août 1782.

En 1784, la veuve Champigny se présente devant les échevins de Liége, avec des lettres rogatoires du parlement de Paris, et conclud à ce qu'il lui soit accordé un paréatis pour faire exécuter les arrêts de cette cour sur les personnes et les biens de la veuve Sélys et de son fils.

La veuve Sélys et son fils, assignés sur cette demande, soutiennent que les arrêts dont il s'agit, sont marqués au coin de l'injustice la plus criante et frappés de nullités radicales, et que les échevins de Liége ne peuvent pas en ordonner l'exécution, sans au préalable avoir statué sur les moyens qu'ils ont à y opposer. Ils observent d'ailleurs que les lettres rogatoires prétendues expédiées par le parlement de Paris, ne sont pas en forme probante.

Le 9 décembre 1785, décret ou jugement préparatoire, par lequel les échevins de Liége déclarent

1o Qu'il ne leur paraît pas que les jugemens rendus en France, puissent être exécutés de plein saut contre des Liégeois;

2o Qu'ils n'ont pas à s'occuper de la demande qui leur est faite d'un paréatis par la veuve Champigny, tant que le parlement de Paris lui-même ne leur aura pas adressé, à cet effet, des lettres rogatoires en forme probante et légale;

30 Qu'en tout cas, il ne pourrait jamais y avoir lieu d'autoriser l'exécution des arrêts de cette cour, jusqu'à la concurrence de la somme déterminée par les conclusions de la veuve Champigny, tant parceque les prétentions de celle-ci n'étaient pas entièrement liquidées, que parcequ'elle en avait cédé un tiers à JeanBaptiste Cottin, son gendre.

La veuve Champigny dénonce ce jugement au conseil ordinaire de Liége, comme raisonnant beaucoup et ne décidant rien, et par suite comme contenant déni de justice; et elle demande en conséquence l'évocation de la cause devant ce tribunal.

Le 24 septembre 1787, décret du conseil

ordinaire de Liége, qui la déboute de cette demande.

Appel au conseil aulique de vienne.

Le 30 août 1789, arrêt de ce conseil. qui. déclare qu'il a été bien jugé.

Le 18 mars 1790, la veuve Champigny et Cottin, son gendre, retournent devant les échevins de Liége, produisent des lettres rogatoires du parlement de Paris, en bonne forme, ainsi que les pièces nécessaires pour la liquidation de toutes leurs répétitions, et persistent à conclure à ce que les arrêts rendus en France, soient déclarés exécutoires contre la veuve Sélys et son fils.

La cause reste en suspens jusqu'en l'an 7. Alors la veuve Cottin, fille et héritière de la veuve Champigny, fait assigner en reprise d'instance, devant le tribunal civil du département de l'Ourthe, Michel Selys et la dame Fonson, sa sœur, qu'elle suppose, comme celuici, héritière de la veuve Sélys.

Michel Sélys reprend l'instance sans difficulté; mais la dame Fonson, qui n'est autorisée à la reprendre, ni par son mari ni par justice, n'y paraît que pour opposer à la veuve Cottin une exception qu'il est inutile de rappeler ici.

Par jugement du 14 floréal an 8, contradictoire entre la veuve Cottin et Michel Sélys, et dans les qualités duquel il n'est fait aucune mention de la dame Fonson,

« Attendu que le tribunal, remplaçant les échevins de Liége,

» Doit reperndre la cause dans ses derniers erremens, sans avoir égard à la chose jugée invoquée par la veuve Cottin,

» Le tribunal déclare que les exceptions de nullité et d'injustice notoire proposées par Michel Sélys, n'ont pas été rejetées par le décret du 9 décembre 1785, et en conséquence, sans s'arrêter, quant à présent, aux conclusions de la veuve Cottin, à fin d'exécution des arrêts dont il s'agit, ordonne aux parties de plaider au fond ».

La veuve Cottin, remariée à Charles-François-Albert Vertegans, appelle de ce jugement, n'intime que Michel Sélys, et cependant soutient que les premiers juges ont procédé irrégulièrement, en ne statuant rien à l'égard de la dame Fonson.

Le 15 floréal an 10, arrêt de la cour d'appel de Liége, qui déclare qu'il a été bien jugé,

« Attendu que le jugement dont est appel, contient les noms et les qualités des parties qui sont en cause dans l'instance d'appel, et que le tribunal ne peut faire droit qu'entre les par ties présentes et dûment appelées;

» Attendu que c'est un principe de droit public et des gens, que des jugemens rendus par

des juges d'un pays étranger, ne sont pas exécutoires, à moins qu'il ne soit dérogé à cette règle par un concordat ou par une réciprocité etablie par l'usage; que ce principe est consigné dans la loi dernière, D. de jurisdictione, qui porte: Extrà territorium jus dicenti impunè non paretur; que les auteurs français et germains attestent unanimement que la jurisprudence de la France et du pays de Liége, était conforme à ce principe;

`» Attendu que l'intimé avait usé de son droit, en proposant devant les tribunaux liégeois, les exceptions de nullité et d'injustice qu'il se croyait fondé à opposer à la demande d'exécution de l'arrêt du parlement de Paris; que litis-contestation avait eu lieu sur ce point; qu'il s'était formé entre les parties une espèce de novation dont l'effet a été de mettre les droits à l'abri des injures du temps et des événemens, comme il résulte de la loi 29, de novationibus, au digeste, qui porte: Aliam causam esse novationis voluntariam, aliam judicii multa exempla ostendunt; neque enim deteriorem causam facimus actionem exercentes, sed meliorem, ut solet dici in his actionibus quæ tempore vel morte finiri possunt ;

» Attendu que le grand événement qui a réuni les deux peuples, n'ayant pas porté atteinte aux droits acquis entre particuliers des deux États, le cit. Sélys a conservé le droit de faire juger le procès pendant entre les parties, dans l'état où il se trouvait ;

» Attendu que le concordat de 1615, invoqué par l'appelante, n'a été passé qu'entre le cidevant duché de Brabant et le pays de Liége, ainsi qu'il est formellement exprimé dans ledit concordat, dont les parties contractantes sont les archiducs Albert et Isabelle, ducs de Brabant, d'une part, et l'évêque-prince de Liége, d'autre part, dont les députés, y est-il dit, sont entrés en conférence sur plusieurs difficultés et différends, tant de juridiction et limites, qu'autres mus entre les pays de Brabant et de Liége; que les stipulations contenues dans ledit concordat, ne sont relatives qu'aux habitans respectifs du pays de Liége et du Brabant ; qu'il est donc indifférent qu'à cette époque, les archiducs fussent ou ne fussent pas souverains de l'Artois, puisqu'il est certain qu'on ne peut étendre le concordat audelà des limites que les parties contractantes y ont posées;

» Attendu que le concordat confirme la règle et le principe invoqués par l'intimé, à l'égard des autres pays non compris dans ledit concordat, d'après la maxime, exceptio firmat regulam in casibus non exceptis ;

» Attendu que, pour prouver l'établisse

ment d'une réciprocité par l'usage, il faut des actes constans et uniformes; que l'appelante n'a pu citer que deux faits qui ne concernaient pas même des Liégeois, et dont par conséquent elle n'aurait pu tirer avantage dans le cas qu'ils auraient été vérifiés;

>> Attendu qu'il est probable que le prétendu acte de notoriété dont l'appelante a voulu se prévaloir, n'a été entendu que des lettres réquisitoriales demandées et obtenues, relativement à des actes de procédure ou d'instruction, et nullement de celles qui concerneraient l'exécution des jugemens rendus par des juges étrangers; que les exemples de lettres réquisitoriales concernant des pièces à recouvrer ou des actes d'instruction à faire, étaient d'un usage fréquent dans la partie du barreau; mais que les exemples d'une demande d'exécution d'un jugement rendu par des juges étrangers, sont rares et ne pouvaient être attestés par le grand nombre de praticiens qui ont signé ce prétendu acte de notoriété : ce qui prouve que leur re ponse n'est relative qu'au premier de ces cas, et ne concerne aucunement le second;

>> Attendu que Liége, comme partie intégrante de l'empire germanique, était dans le ressort des tribunaux supérieurs de l'empire, dont les attributs étaient de conserver les droits et priviléges de ses membres, conformément au rang et à la prééminence de leur état; qu'ainsi, c'est la jurisprudence de ces tribunaux, et non celle des échevins de Liége, qu'il faut consulter pour décider s'il existait un droit de réciprocité établi par l'usage; vérité que l'appelante a elle-même reconnue dans la cause, par le recours qu'elle a pris du prononcé des échevins et conseil ordinaire de Liége aux tribunaux de l'empire;

» Attendu que les auteurs les plus respectables, entre autres Ludolf et Lauterbach, l'un et l'autre membres de ces tribunaux, attestent que la pratique des suprêmes dicastères de l'empire n'admettait l'exécution des jugemens étrangers qu'après connaissance de cause ».

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pays d'en discuter la forme ni le bien jugé ; 20 Ils devaient l'être encore à bien plus forte raison, d'après le concordat passé en 1615, entre les archiducs Albert et Isabelle et le prince de Liége;

» 30 Ils devaient l'être également, d'après la réciprocité que l'usage avait établie à cet égard entre la France et les Etats liégeois ;

» 40 Ils devaient l'être surtout et sans aucun obstacle, sans même qu'il fût encore besoin de lettres rogatoires, depuis la réunion du pays de Liége à la France;

» 5° Enfin, en jugeant le contraire, le tribunal d'appel a violé l'autorité de la chose ju gée entre les parties, par le décret des échevins de Liége du 9 décembre 1785.

» Pour justifier la première de ces propositions, les demandeurs vous disent que les jugemens tirent toute leur autorité du contrat qui se forme entre les parties par la contestation en cause; que, par ce contrat, elles s'engagent d'exécuter la décision qui interviendra sur leurs différends; que de là résulte entre elles un engagement qui les suit partout, et qui par conséquent est obligatoire pour elles, non seulement dans le ressort du tribunal qui les a jugées, mais même hors de la souveraineté dans l'étendue de laquelle est placé ce tribunal; qu'ainsi, vouloir remettre en question dans un pays ce qui a été jugé dans un autre, c'est porter atteinte à l'autorité des obligations personnelles et au droit des gens qui en est le protecteur et le garant.

» Mais les demandeurs ne font pas attention que ce que l'on appelle en droit le contrat judiciaire formé par la litis contestation, n'est qu'une fiction de la loi civile; car, dans l'exacte vérité, il n'y a de contrats que ceux qui sont formés par le concours libre et spontané des volontés des parties. Et certainement il n'y a rien de libre, il n'y a rien de spontané, dans le fait de deux parties qui se poursuivent mutuellement en justice.

» Or, si c'est par une fiction de la loi civile que se forme le contrat judiciaire dont il s'agit, bien évidemment l'effet de ce contrat ne peut pas s'étendre au-delà des limites qui circonscrivent la puissance de sa cause; l'effet de ce contrat est donc, par sa nature, renfermé dans le territoire de la loi civile qui l'a produit.

» Aussi l'art. 121 de l'ordonnance de Louis XIII du mois de janvier 1629 a-t-il, en consacrant une maxime que la jurisprudence des arrêts avait depuis long-temps élevée audessus de toute espèce de contradiction, déclaré que les jugemens rendus en pays étran ger contre des Français, n'auraient en France aucune exécution, et que les Français condam

nés par ces jugemens, seraient admis à débattre leurs droits comme entiers devant les juges nationaux.

» Et il est à remarquer qu'on ne peut, pour l'application de cet article (ce sont les termes de la section civile, dans son arrêt du 18 pluviôse dernier, portant cassation d'un jugement du tribunal d'appel de Rouen, rendu entre le sieur Spohrer, citoyen francais, et Niels Moë, norwégien), admettre de distinction, soit entre le cas où l'affaire sur laquelle est intervenu un jugement étranger,est commerciale ou purement civile, soit que le Français y ait été demandeur, défendeur ou partie intervenante ; mais que la loi refuse indistinctement toute force exécutoire en France aux jugemens étrangers (1).

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› Comment, d'après cela, un jugement rendu en France contre un Liégeois qui y avait plaidé, soit en demandant, soit en défendant, aurait-il pu être exécutoire dans le pays de Liége? Comment aurait-il pu avoir, dans le pays de Liége, l'autorité de la chose jugée ? il était bien naturel que la nation liégeoise usât, envers la nation française, d'un droit dont celle-ci lui donnait l'exemple : quod quisque juris in alium statuit, ut ipse eodem jure utatur ; voilà ce que lui dictait une des plus célèbres lois de l'ancienne Rome auxquelles on sait qu'elle fut toujours très-attachée; et rien, comme l'observe le jurisconsulte Ulpien, dans la loi 1, D. quod quisque juris, rien n'est plus équita ble ni plus juste: Hoc edictum summam habet æquitatem et sine cujusquam indignatione justá: quis enim aspernabitur idem jus sibi dici quod ipse aliis dicit, vel dici efficit?

» Dans le fait, il est constant que les tribunaux supérieurs de l'empire d'Allemagne, dont le pays de Liége faisait partie avant la révolution, ne reconnaissent pas plus l'autorité des jugemens rendus en France, que les tribunaux francais ne reconnaissent celle des jugemens rendus en Allemagne ; et le jugement attaqué justifie cette assertion par le témoignage de deux célèbres jurisconsultes allemands, Ludolf et Lauterbach, tous deux d'autant plus instruits des maximes reçues à cet égard dans l'empire germanique, qu'ils avaient l'un et l'autre siégé long temps dans la chambre impériale de Wetzlaër.

» Il y a cependant une différence sur ce point entre la jurisprudence française et la jurisprudence allemande ; mais elle ne gît que dans la forme de procéder.

» En France, les jugemens rendus en pays étranger contre les Français, ne peuvent être

(1). Particle Jugement, §. 14.

revêtus d'aucun paréatis; ils sont considérés comme non-existans; les parties qui les ont obtenus, ne peuvent en faire aucun usage: il faut qu'elles viennent par nouvelle action, comme si rien n'eût été décidé dans les juridictions étrangères.

» En Allemagne, le tribunal à qui l'on s'adresse avec des lettres rogatoires, pour l'exécution d'un jugement rendu en pays étranger, peut permettre qu'il soit en effet exécuté dans son ressort; mais il ne peut le faire, qu'après avoir pris counaissance de la justice et de la régularité de ce jugement.

» Et, comme vous le voyez, Messieurs, l'une et l'autre manière de proceder ont nécessairement le même résultat.

» Mais, disent les demandeurs, et c'est leur seconde proposition, si les jugemens ne sont pas exécutoires par eux-mêmes hors de la sou. veraineté dans laquelle ils ont été rendus, au moins ils peuvent le devenir par l'effet d'une convention politique entre deux puissances. C'est ainsi que, par un traité du 21 janvier 1718, le gouvernement français et le duc de Lorraine étaient convenus que les jugemens rendus dans les États lorrains, seraient exécutés dans la généralité de Metz; et que, réciproquement, les jugemens rendus dans la gé néralité de Metz, seraient exécutés dans les Etats lorrains. Or, à l'époque où ont été ren. dus les arrêts de l'exécution desquels il s'agit, il existait un traité semblable entre les pays de Liége et la province d'Artois, c'est-à dire, la partie de la France où le procès avait commencé, où conséquemment ces arrêts doivent être censés avoir été rendus; car le 21 novembre 1515, il avait été signé à Maëstricht, entre les plénipotentiaires du prince de Liége et ceux des archiducs Albert et Isabelle, alors souverains de l'Artois comme du Brabant, un concordat par l'art. 41 duquel il est dit que les juges de l'un desdits pays étant requis de faire mettre à exécution les sentences des juges de l'autre, passées en force de chose jugée, les devront faire exécuter au plutót, selon les lois el coutumes du pays de l'exécution, en vertu des lettres réquisitoriales à eux adressées et délivrées, sans donner lieu à difficulté ou débat que les condamnés voudraient susciter contre lesdites cxécutions, SOUS COULEUR DE L'INJUSTICE ET INIQUITÉ DESDITES SENTENCES, ni d'exceptions de paiement, quittance, compensation ou autres semblables, pour lesquelles ils seront tenus se pourvoir pardevant les juges ayant rendu les sentences; et suffira qu'il apparaisse aux juges requis, qu'il y ait sentence dépêchée en forme due et pro

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bante, selon les lois et coutumes desdits pays...

» Ici, Messieurs, les demandeurs font preuve, ou qu'ils n'ont pas lu bien attentivement le concordat de 1615, ou qu'ils ne le citent pas de bonne foi.

» Ce traité est passé, comme on le voit, dès la première ligne, entre le sérénissime archeveque de Cologne, évêque et prince de Liége, d'une part, et les sérénissimes archiducs, ducs de Brabant, de l'autre. Les archiducs Albert et Isabelle ne stipulent donc pas dans ce traité comme souverains de l'Artois, de la Flandre et du Hainaut, mais seulement comme souverains du Brabant.

» Et dans le fait, ce n'est qu'au Brabant, d'une part, et au pays de Liége, de l'autre, que sont relatifs les divers articles qui composent ce traité. C'est une vérité dont nous nous sommes personnellement convaincus par l'examen que nous avons fait du texte entier du concordat de 1615, dans le Recueil de Louvrex, tome er, pages 234 et suivantes.

» C'est d'ailleurs ce qu'a jugé formellement une sentence de l'official juge ordinaire de Liége, du 29 mai 1656. On a mis en question, dit Méan, tome 2, obs. 339, si le concordat de 1615 s'étendait aux jugemens rendus par d'autres tribunaux de la Belgique que ceux du Brabant: Qositum an lex conventionis seu con. cordati anni 1515 ad aliarum provinciarum Belgii judices et judicata porrigatur, quàm Brabantiæ. L'affirmative fut soutenue à l'occasion d'un arrêt du conseil souverain de Hainaut, , que le duc d'Arschot requérait l'official de Liége de faire exécuter contre le comte de Hozemont: Requisito enim officiali Leodiensi nomine ducis Arschotani adversùs comitem de Hozemont, pro executione rei judicatæ à supremo comitatus Hannoniæ concilio, id teniatum fuit. Mais cette prétention fut repoussée, sed frustrà: et pourquoi le fut elle? Parceque le préambule et les art. 41 et suivans du traité de Maestricht prouvent manifestement que ses stipulations he concernent que le Brabant, et qu'à l'égard des autres provinces belgiques qui sont soumises au roi d'Espagne, on doit s'en rapporter au droit commun: Cùm conventionis istius Mosa Trajecti præfatio disertis verbis factam eum demonstret terminandis jurisdictionis et limitum contentionibus inter Leodiensem et Brabantam provincias, et dictus articulus 41 aliique subsequentes conc. pti per verba relativa ad dictas provincias, manifestum faciant conventionem istam ad alias, licct regi catholico subditas, non extendi, sed standum dispositioni juris communis.

» Et il ne faut pas s'étonner que les archiducs Albert et Isabelle n'aient pas voulu, par le traite

de 1615, étendre au Hainaut, à l'Artois et à la Flandre, le privilége qu'ils accordaient aux jugemens liégeois, en les déclarant exécutoires en Brabant. Ils n'ont fait en cela que ce qu'a fait depuis Louis XV, par le traité du 21 janvier 1718, en restreignant à la généralité de Metz l'exequatur qu'il a alors accordé aux jugemens rendus en Lorraine. C'est (dit d'Héricourt dans ses Quvres posthumes, tome 2, page 150) une matière de négociation entre les deux souve rains: ils doivent balancer les avantages qui peuvent leur revenir de la réciprocité. Quand ils la trouvent égale aux deux peuples, ils l'établissent entre les deux États. Mais quand un État est plus grand que l'autre, ils l'établissent entre l'un des deux, et une partie de l'autre État, proportionnée pour la grandeur.

» Par là, tombe d'avance la troisième proposition des demandeurs, que l'usage avait établi une réciprocité d'exécution pour les jugemens rendus dans le pays de Liége et dans tous les États voisins. Car, d'un côté, si cette réciprocité eût existé de fait, il n'aurait pas été besoin de la stipuler en 1615 pour le Brabant ; et, d'un autre côté, la sentence de l'official de Liége, du 29 mai 1656, démontre assez qu'elle n'existait pas pour le Hainaut.

nonce la Réunion du pays de Liége à la France, peut-elle avoir un effet rétroactif? Non; il en est de cette loi comme de toutes les autres, elle ne dispose que pour l'avenir : le passé est hors de son domaine. Aussi ne s'en occupet-elle pas. Or, ne serait-ce pas la faire rétroagir sur le passé, que d'ôter au sieur Sélys le droit qui lui était acquis, avant la Réunion, de ne pas exécuter dans le pays de Liége, les arrêts rendus précédemment contre lui en France? >> Qu'on dise tant que l'on voudra qu'il est aujourd'hui Français, et que ses biens, par cela seul qu'ils sont situés dans le pays de Liége, sont situés sous la souveraineté française. Oui, sans doute, il est aujourd'hui Français; mais il ne l'est que relativement aux actes postérieurs à l'époque où il a été revêtu de cette qualité; oui, sans doute, ses biens sont aujourd'hui placés sous la souveraineté française; mais ils ne le sont que pour les effets subséquens à cette nouvelle position.

>> En devenant Français, il a conservé toutes ses propriétés particulières; il les a conservées avec tous les droits qui les accompagnaient au moment de la Réunion ; il les a conservés avec toutes les actions qui lui appartenaient alors pour les réclamer; il les a conservés avec toutes les exceptions qui, à cette époque, les défendaient contre les attaques auxquelles

» Inutile, après cela, de discuter les preuves que rapportent les demandeurs de l'usage pré-elles pouvaient être en butte; et dès-là, il est tendu qu'ils articulent. L'arrêt attaqué les réfute d'ailleurs d'une manière qui ne souffre aucane espèce de réplique.

» La quatrième proposition des demandeurs consiste à dire que, par la Réunion du pays de Liége à la France, les arrêts du parlement de Paris, de 1782, 1783 et 1784, sont devenus de plein droit exécutoires dans ce pays.

>> Suivant eux, cette Réunion a fait cesser l'obstacle qu'apportait à l'exécution de ces arrêts, la différence qui primitivement existait entre la domination française et la domination liégeoise; et cet obstacle étant levé, la justice doit reprendre son cours, comme s'il n'eût jamais été suspendu. Supposons d'ailleurs, ajoutent-ils, qu'avant la Réunion, le sieur Sélys eût acquis des biens en France, ou fût venu s'y établir, aurait-il pu alors se refuser à l'exécution des arrêts du parlement de Paris, sous le prétexte qu'au moment où ils avaient été rendus, il n'était ni possessionné ni domicilié en France? Non certainement. Eh bien! Nous le trouvons aujourd'hui en France. Il ne peut donc plus y avoir d'empêchement à l'exécution des arrêts que nous avons obtenus contre lui et sa

mère.

» Mais la loi du 9 vendémiaire an 4, qui pro

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évident qu'elles sont demeurées à l'abri des tentatives que l'on eût pu faire auparavant pour les lui enlever en vertu des arrêts du parlement de Paris.

» Reste la cinquième proposition des deman. deurs, que les échevins de Liége avaient euxmêmes jugé par leur décret du 9 décembre 1785, que les arrêts dont il s'agit, devraient être exécutés dans les États liégeois, du moment que le parlement de Paris aurait expédié des lettres rogatoires.

» Mais cette proposition, nous ne devons, nous ne pouvons la regarder que comme un jeu d'esprit. Il est trop visible que le décret du 9 décembre 1785 n'est qu'un jugement préparatoire, qu'il ne décide rien, qu'il remet seulement à décider quelque chose après que la veuve Champigny aura présenté des lettres rogatoires en bonne forme; et la veuve Champigny elle-même l'a tellement considéré comme ne jugeant rien, quelle l'a déféré comme tel aux tribunaux supérieurs, et qu'elle est partie de là pour accuser les échevins de Liége de déni de justice.

» Par ces considérations, nous estimons qu'il y a lieu de rejeter la requête des demandeurs et de les condamner à l'amende ».

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