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manquer, sa saisine s'évanouit. C'est ainsi que, suivant la loi 9, §, 1, D. de jure dotium, les choses que j'ai délivrées à un futur époux pour former la dot de sa femme, en cas d'accomplissement du mariage projeté entre elle et lui, ne laissent pas de devenir dotales de plein droit, par la célébration de ce mariage, quoique je sois mort dans l'intervalle, et sans que mon héritier puisse les revendiquer sous le prétexte qu'elles m'appartenaient encore au moment de mon décès (1).

II. La seconde question n'offre pas plus de difficulté que la première, et c'est également pour la négative qu'elle doit être résolue. Qu'importe, en effet, qu'à toute institution contractuelle soit nécessairement attachée la condition que le mariage en faveur duquel elle est faite, sera célébré? Est-ce à dire pour cela que l'instituant puisse, avant la célébration du mariage, rompre, par sa seule volonté, l'engagement qu'il a pris envers le futur époux de lui laisser sa succession? Non assurément. L'obligation contractée sous une condition, ne lie pas moins celui qui l'a souscrite, que si elle était pure et simple. La condition tient sans doute en suspens l'effet du lien légal qui a été formé par le contrat; mais ce n'est que par son inaccomplissement qu'elle peut amener la dissolution de ce lien; elle n'empêche pas que, de ce lien, il ne résulte, dès-à-présent un droit éventuellement acquis, et par conséquent un droit indépendant de la volonté de l'obligé.

Ainsi, nul doute sur la nullité de la révocation que l'instituant ferait de l'institution contractuelle, dans l'intervalle du contrat de mariage à la cérémonie nuptiale.

Mais n'en serait-il pas autrement, si l'instituant était un ascendant dont le consentement fût nécessaire à la validité du mariage?

Cela dépend de la question de savoir si l'ascendant qui a consenti au mariage, soit de son fils ou petit-fils, soit de sa fille ou petite fille, peut, tant que le mariage n'est pas célébré,

(1) Si res alicui tradidero (dit cette loi), UT NUPTIIS SECUTIS, DOTIS EFFICIANTUR, et antè nuptias decessero an, secutis nuptiis, dotis esse incipiant? Et vereor ne non possint in dominio ejus effici cui datæ sunt,quia post mortem incipiat dominium discedere ab eo qui dedit, quia pendet donatio in diem nuptiarum : et cùm sequitur conditio nuptiarum, jam heredis dominium est, discedere rerum non posse dominium, invito eo fatendum est. Sed benignius est, favore dotium, necessitatem imponi heredi consentire ei quod defunctus fecit: aut si distulerit vel absit, etiam nolente vel absente eo, dominium ad maritum ipso jure transferri, ne mulier maneat indotata.

quo

révoquer le consentement qu'il y a donné.

Qu'il le puisse pour des causes graves qui sont survenues depuis son consentement, ou qui existaient au moment où il l'a donné, mais qu'il prouve avoir ignorées alors, cela ne paraît pas douteux.

Mais, en thèse générale, il ne le peut pas, parcequ'il est résulté de son consentement accordé sur la demande qui lui en était faite, un contrat entre lui et son enfant, et que tout contrat est obligatoire du moment qu'il est formé par le concours des volontés des deux parties.

C'est ce qu'ont jugé deux arrêts du parlement de Paris,des 11 août 1642 et 30 août 1663. Voici dans quels termes le premier est rapporté par Bardet, tome 2, liv. 9, chap. 32:

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« Un père, après avoir fait donation à son fils impubère, par des promesses et en faveur du futur mariage avec une fille de son age, ayant depuis changé de dessein, et signifié à son fils qu'il ne veut plus le mariage, ne peut néanmoins se plaindre de la célébration faite au préjudice de sa déclaration, ni révoquer la donation.

» Michel Nisson, de la ville de Guéret, et Antoine Nesmond, de la même ville, désirant de s'allier, firent promesse de mariage de Pierre Nisson et de Catherine Nesmond, leurs fils et fille, lors encore impubères; et en faveur de ce futur mariage, Michel Nisson fit donation de la plupart de ses biens à Pierre Nisson, son fils, lequel, après avoir achevé ses études, et ayant de l'affection pour Catherine Nesmond, l'épousa contre le gré de Michel Nisson, son père lequel irrité de ce mariage, interjeta appel comme d'abus de la célébration, et obtint des lettres afin de révoquer la donation apposée dans le contrat.

» Pour lui Me Lenoir dit que ce prétendu mariage a été célébré clandestinement, dans une petite Chapelle située près la ville de Guéret. Auparavant cette prétendue célébration, le père appelant avait fait signifier un acte, contenant qu'il ne voulait et n'entendait point prêter son consentement à ce mariage; et au contraire qu'il l'empêchait et s'y opposait, et même révoquait son consentement, comme aussi la donation apposée dans le contrat fait et passé pour ce sujet. Au préjudice de la déclaration portée par cet acte, le fils n'a pû ni dû passer outre à la célébration de ce prétendu mariage; en conséquence il est nul; et ensuite la donation doit être révoquée.

» Mr. Lotier, pour les intimés, dit que l'inconstance et la légèreté du père appelant est blamable. Lui-même a choisi un parti sortable à son fils, l'a engagé dans des affections légitimes, l'y a lié et obligé par un contrat public

et authentique ; ensuite et en exécution duquel les intimés ayant cultivé cette affection, et enfin l'ayant consommée, c'est-à-dire, accompli la foi promise par un mariage, ils ne peuvent en être blâmés; l'inconstance et la légèreté du père appelant est causée par une seconde femme, et ne peut donner atteinte à ce mariage, célébré dans une chapelle, par la permission de l'official, et avec dispense de la publication des bans. Le père appelant n'est pas recevable à improuver et détruire ce qu'il a lui-même fait et approuvé: ainsi,le mariage et la donation faite en faveur d'icelui doivent subsister.

» M. L'avocat-général Bricquet dit que, lors du contrat contenant les promesses du mariage futur des intimés, ils étaient encore impubères; ainsi ces promesses étaient nulles, suivant la disposition du droit canon dont tout le titre de desponsationibus impuberum, et par conséquent elles n'ont pu les obliger ni l'un ni l'autre. Le père appelant a donc pu changer d'avis et de dessein, et révoquer le consentement qu'il avait prêté à ce mariage, en un temps où il ne se pouvait accomplir. Depuis, les choses pouvaient être tellement changées et altérées, que le changement de dessein du père fût juste et légitime, ayant fait signifier l'acte contenant sa déclaration et sa volonté auparavant la célébration du mariage; son fils n'est point excusable : sa désobeissance est formelle, et la clandestinité est certaine et notoire; ainsi, la moindre peine que doivent souffrir les intimés, ou le fils de l'appelant, c'est la révocation de la donation que son père lui avait faite en faveur de ce mariage.

» La cour, tant sur l'appel comme d'abus, que lettres, mit les parties hors de cour et de procès, sans dépens: le lundi 11 août 1642, M. Molé, premier président, prononçant ».

lors

On voit que, dans cette espèce, le ministère public ne méconnaissait pas le principe de l'irrévocabilité du consentement du père au mariage de son enfant, et que seulement il le regardait comme inapplicable à la cause, parceque, du contrat contenant les promesses du mariage futur des intimés, ils étaient encore impubères, et qu'ainsi, ces promesses étaient nulles, suivant la disposition du droit canonique. Mais quelle raison y avait-il de s'en tenir plutôt sur ce point à la disposition du droit canonique qu'à celle du droit romain,qui déclarait valables les promesses de mariage faites entre des impubères âgés de sept ans au moins et par conséquent capables de comprendre ce qu'ils faisaient (1)? Aucune, puisque les décrétales des

(1) In sponsalibus contrahendis ætas contra

papes n'avaient en France aucune autorité législative, et qu'au contraire, les lois romaines y étaient reconnues dans un grand nombre de contrées comme lois proprement dites, et partout comme l'expression de la raison naturelle. Ce qui d'ailleurs, dans cette espèce, était décisif contre l'appelant,c'est que,loin de réclamer contre les promesses de mariage dont il s'agissait, dès le moment où les fiancés s'étaient trouves en âge de se marier, il les avait en quelque sorte ratifiées, en ne s'opposant pas à ce que son fils continuât de fréquenter sa promise. Aussi le parlement de Paris n'hésita-t-il point, en mettant les parties hors de cour, tant sur l'appel comme d'abus que sur les lettres afin de révoquer la donation apposée dans le contrat, décider, non seulement que le mariage était valable, mais encore que la donation devait avoir son plein effet.

à

Quant au second arrêt, voici comment il est rapporté par Soefve, tome 2, centurie 2, chapitre 93:

«Si un aïeul maternel qui a consenti au mariage projeté entre sa petite-fille, mincure, et un gentilhomme, son parent, peut empecher ledit mariage, sous prétexte d'une accusation capitale, depuis intentée contre lui, et dont il a été renvoyé absous?

» Le jeudi 30o jour d'août 1663, en l'audience de la grand'chambre, à huis clos, jugé qu'une jeune demoiselle mineure et en bas âge, qui n'avait ni père ni mere, ayant été recherchée en mariage par un gentilhomme, son parent, égal à elle en naissance et en biens, du consentement de son aïeul maternel, pendant une contestation de savoir à qui des parens de ladite mineure la tutelle serait baillée et déférée, même y ayant des articles de mariage suivis d'un contrat signé de ladite mineure, de l'avis et consentement de la plus grande partie desdits parens, au parloir d'un monastère de religieuses où ladite mineure avait été mise, par arrêt du parlement de Rouen, en attendant la décision de la contestation qui y était pendante pour raison de ladite tutelle; ledit aïeul maternel ne pouvait pas empêcher l'accomplissement dudit mariage, sous prétexte d'une accusation capitale intentée contre ce gentilhomme, depuis ladite recherche, de laquelle néanmoins pardevant lequel le procès criminel avait été il avait été renvoyé absous par sentence du juge instruit sur ladite accusation, quoique son em

hentium definita non est, ut in mutrimoniis : quapropter à primordio ætatis sponsalia effici possunt, si modò id fieri ab utráque persona iutelligatur, id est, si non sint minores quàm septem annis. (loi 14, D. de sponsalibus).

́pêchement fût appuyé de l'intervention de plusieurs parens de ladite mineure. Sans avoir égard à laquelle intervention, la cour, par son arrêt, ordonna qu'il serait passé outre au mariage projeté entre ladite mineure et ledit gentilhomme, son parent; qu'à cet effet dispense serait obtenue en cour de Rome, attendu le degré de consanguinité qui était entre eux, et les conventions du mariage réglées par l'avis de quatre parens paternels de ladite mineure et quatre maternels, en présence de l'un de messieurs, que la cour aurait commis à cet effet. La mineure s'appelait demoiselle Marie Sauvage, et était âgée de quinze à seize ans seulement lors dudit arrêt ».

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§. II. Quelle est, par rapport à l'effet de l'institution contractuelle qui a été faite, soit avant la loi duŋ mars 1793, soit avant celle du 5 brumaire an 2, mais qui n'a été suivie de la célébration du mariage, que postérieurement à la publication de l'une ou de l'autre de ces lois, la conséquence à tirer de l'art. 1er de celle du 18 pluviose an 5, portant que « Les avantages, prélévemens, préciputs, donations entrevifs, INSTITUTIONS CONTRACTUELLES et au>> tres dispositions IRREVOCABLES DE LEUR » NATURE, légitimement stipulés en ligne >> directe avant la publication de la loi du >>7 mars 1793, et en ligne collatérale, ou >> entre individus non parens, antérieu» rement à la publication de la loi du 5 >> brumaire an 2, auront leur plein et en» tier effet, conformément aux anciennes »lois, tant sur les successions ouvertes » jusqu'à ce jour que sur celles qui s'ouvri»raient à l'avenir »?

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On sait que la loi du 7 mars 1793 avait aboli << la faculté de disposer de ses biens, soit à cause » de mort, soit entre-vifs, donation

soit par

» contractuelle, en ligne directe ».

On sait aussi que la loi du 5 brumaire an 2, renouvelée par celle du 7 nivôse de la même année, avait été beaucoup plus loin, et qu'elle avait annulé « les institutions contractuelles » et toutes dispositions à cause de mort dont >> l'auteur était encore vivant, ou n'était décédé » que le 14 juillet 1789 ou depuis, quand même » elles auraient été faites antérieurement ». Cet effet rétroactif était aussi injuste qu'absurde; il fut aboli, le 9 fructidor an 3, par une loi portant que celles des 5 brumaire et 17 nivóse an 2, concernant divers modes de transmission de biens, n'auraient d'effet qu'à compter des époques de leur promulgation; et c'est pour expliquer quels devaient être les effets de ce

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On voit par là quel est l'objet de la question proposée en tête de ce paragraphe : il s'agit de savoir si l'on doit considérer comme faites avant la publication des lois des 7 mars 1793 et 5 brumaire an 2, et par conséquent comme maintenues, les institutions contractuelles dont la date remonte au-delà de la publication de ces lois, mais qui n'ont été stipulées qu'en faveur de mariages célébrés seulement depuis.

Un avocat distingué du barreau de Clermont

Ferrand a soutenu la négative dans une consultation du 13 mars 1824, au sujet de l'institution contractuelle faite par les sieur et dame Ribeyre, le 14 février 1791, en faveur de leur fils ainé, qui ne s'était marié que le 3 floréal an 2 (21 avril 1794).

«Si cette institution (a-t-il dit) était irrévocable et absolue, dès le moment du contrat de mariage, et indépendante de tout événement ultérieur, il faudrait la juger valable, et elle devrait produire tout son effet.

» Si, au contraire, elle n'était qu'un projet au moment où elle a été insérée dans ce contrat, si elle dépendait d'événemens ultérieurs qui seuls lui donnent de la consistance et de la solidité, il faut alors s'en déférer aux événemens et se régler d'après leur époque.

>> L'institution universelle faite en faveur du sieur Ribeyre fils, par son contrat de mariage, n'était rien en elle-même, si elle n'était suivie du mariage.

» Et elle n'était rien, si, à l'époque du mariage, la disposition était prohibée.

» La raison de le décider ainsi, est que toutes nos lois n'ont admis les institutions d'héritiers, qu'en faveur du mariage, et pour les mariés exclusivement à tous autres.

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cessions et par tous les auteurs qui ont traité la matière.

» D'où il résulte que c'est par le mariage seul et par conséquent par la loi existante à l'époque du mariage, qu'il faut se décider pour la validité et invalidité de la disposition ».

L'auteur de cette consultation me l'a adressée le 28 avril de la même année, en m'annonçant qu'elle trouvait des contradicteurs dans son département, et en me priant, si je partageais son avis, de le fortifier par mes propres réflexions.

Je lui ai répondu, peu de temps après, que j'étais d'une opinion tout-à-fait contraire à la sienne.

« Sans doute (ai-je dit ), il n'y a de maintenues par la loi du 18 pluviôse an 5, que les institutions contractuelles qui étaient devenues irrévocables, en ligne directe, avant la loi du 7 mars 1793, et en ligne collatérale ou entre étrangers, avant la loi du 5 brumaire

an 2.

» Mais pour qu'une disposition à titre gratuit, et notamment une institution contractuelle, soit réputée avoir été irrévocable à ces deux époques, faut-il qu'elle ait été dès-lors à l'abri de toute espèce d'événement qui eût pu la rendre caduque? Non certainement; car, dans cette hypothèse, on ne pourrait pas regarder comme irrévocable une institution contrac

tuelle qui eût été suivie, avant l'une ou l'autre loi, de la célébration effective du mariage, mais dont l'auteur ne serait mort qu'après; puisqu'il aurait pu arriver que l'institué mourût avant l'instituant, événement qui aurait emporté de plein droit la caducité de l'institution.

» On ne peut donc entendre par une institution contractuelle irrévocable, dans le sens de la loi du 18 pluviôse an 5, que celle l'instique tuant n'aurait pas pu révoquer, quoique d'ailleurs elle dépendît d'événemens qui, étrangers à la volonté de celui-ci, auraient pu ne pas se réaliser.

»

Or, dans l'espèce, les instituans auraient. ils pu, avant la célébration du mariage, non seulement révoquer leur consentement au mariage même, mais encore révoquer l'institution contractuelle? Je ne le crois pas ; et mon opinion est justifiée par deux arrêts du parlement de Paris, des 11 août 1642 et 30 août 1663, et par ce que dit M. Grenier, dans son Traité des donations, no 428, où il cite Chabrol, tome 2, page 327, et Auroux, sur l'art. 219 de la coutume de Bourbonnais, nos 55, 56 et 57.

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coutumiers

30 Le révoquait-il dans les pay's où le droit romain n'avait que l'autorité de raison écrite ?

4o Le révoque-t-il aujourd'hui ?

I. La première question s'est présentée au parlement d'Aix en 1779

Jean-Baptiste Roux fait un testament le 4 septembre 1754. Il lègue la jouissance d'une partie de ses biens à Mathieu Roux, son frère, et institue pour son héritière Thérèse Roux, sa sœur, en lui substituant Jean-Baptiste Bayon, son cousin, ou, à son défaut, la demoiselle Bayon, sa fille, épouse de Louis Paul.

Plus de dix ans après, il fait un autre testament que le notaire omet de dater. Par cet acte, il lègue la jouissance de sa succession à son frère et à sa sœur; quant à la propriété, il en laisse la plus grande partie à l'épouse de Louis Paul,et affecte le surplus à des fondations pieuses dont il veut néanmoins que l'effet demeure suspendu jusqu'à la cessation de l'usufruit. Enfin, il révoque son premier testament.

Mathieu Roux survit à sa sœur ; il réunit la jouissance de toute la succession, et décède après avoir institué pour son héritier Jean Antoine Richelme, qui n'était point son pa

rent.

A sa mort, l'administrateur des fondations faites par le second testament, demande la délivrance des fonds que le testateur y avait affectés. Richelme oppose le défaut de la date du testament, et d'après la nullité qui en

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résulte, soutient que Mathieu et Thérèse Roux ont recueilli la succession ab intestat.

Louis Paul, de son côté, intervient au nom de son épouse, pour demander l'exécution du premier testament et l'ouverture de la substitution qu'il contenait.

notariés ordinaires, du moins quant à ceux qui les avaient souscrits et à leurs héritiers (1)? Aurait-on pu dire alors que le second testament de Jean-Baptiste Roux, quoique nul comme tel, suffisait pour faire foi du changement de volonté du testateur, et que par con

Le lieutenant de Brignolle lui adjuge sa de-séquent la clause révocatoire qu'il contenait, mande par sentence du 11 août 1777.

Richelme en interjette appel, et soutient que, d'après la loi 27, C. de testamentis, un testament nul dans la forme doit suffire pour en révoquer un parfait, lorsqu'il s'est écoulé dix ans de l'un à l'autre.

Louis Paul convient que cette loi est observée en Provence; mais il ajoute qu'elle ne peut être appliquée à l'espèce sur laquelle il s'agit de prononcer.

Un testament (dit-il) dans lequel le testateur a omis la date, est nul, même comme acte de révocation, et ne peut anéantir le premier. Ce qui est nul, ne peut produire aucun effet. La loi 27, C. de testamentis, ne donne point à un testament nul la force de révoquer un testament antérieur, quoiqu'il y ait entre l'un et l'autre un intervalle de dix ans; elle parle seulement d'un acte moins solennel qui contient la révocation ou la preuve d'une volonté contraire ; elle veut que cet acte, soutenu par le temps, puisse opérer la Révocation du testament antérieur parfait: tunc irritum est testamentum tam ex contrariá voluntate, quàm ex cursu temporali.

» Il est d'ailleurs certain que Jean-Baptiste Roux n'a pas voulu mourir intestat; son intention a toujours été d'instituer tout autre héritier que son frère ; il faut donc recourir au principe qui nous apprend que la révocation attachée à un testament, est conditionnelle et entièrement dépendante du sort de l'acte. Le testateur n'entend révoquer ses premières dispositions, qu'autant que les nouvelles seront exécutées; si elles ne peuvent l'être, ses intentions primitives doivent être remplies. Or, dans l'espèce, le testament sans date ne peut avoir aucun effet ; il faut donc que le premier ait son exécution>>.

Ces moyens ont triomphé. Par arrêt du 20 mars 1779, rendu au rapport de M. de FabryBorilly, la sentence du lieutenant de Brignolle a été confirmée avec amende et dépens (1).

Aurait-on pu juger de même si, à l'époque de cet arrêt, il eût été généralement reconnu que le défaut de date ne formait un moyen de nullité que contre les testamens, et qu'il ne portait aucune atteinte à la validité des actes.

(1) Journal du parlement de Provence, par Janety, année 1779, page 68.

devait avoir tout son effet? C'est ce que j'examinerai ci-après, no 4, en discutant la loi 18, D. de legatis 30.

II. La seconde question s'est présentée à l'audience de la cour de cassation, section des requêtes, le 14 floréal an 11; voici de quelle manière je l'ai discutée:

« Le tribunal d'appel de Douai a-t-il violé quelque loi, en décidant, par son jugement du 22 ventôse an Io, que le testament solennel de Philippe-Joseph Oudart, du 24 octobre 1792, n'avait pas révoqué ses testamens et codicilles olographes des 29 novembre 1788, 14 octobre 1789 et 11 avril 1792?

» Les demandeurs soutiennent l'affirmative, et il s'agit de comparer leurs raisons avec celles qui ont, ou motivé, ou dû motiver le jugement qu'ils vous dénoncent.

» Ce jugement, vous le savez, commence par déclarer nul, pour un défaut de forme dont il est, quant à présent, inutile de vous entretenir, le testament solennel du 22 octobre 1792.

» Il considère ensuite qu'à la vérité, il contient une clause révocatoire de toutes les dispositions antérieures de dernière volonté que le testateur avait pu faire; mais que cette clause est nulle elle-même par le vice de forme du testament qui la contient; et qu'en supposant que, de droit commun, la nullité d'un testament dans lequel se trouve écrite une pareille clause, ne puisse pas empêcher l'effet de la révocation qu'elle prononce, du moins cette jurisprudence ne peut pas être admise dans les ci-devant provinces belgiques, où fait loi une déclaration du roi d'Espagne, du 17 novembre 1631, portant que, sous l'ordonnance de l'art. 12 de l'édit perpétuel de 1611, est aussi comprise la révocation des légats qui seraient paravant laissés par testament, c'està-dire, qu'un testament ou codicille ne peut étre révoqué que par un testament ou codicille en bonne forme.

» Le tribunal d'appel ajoute que PhilippeJoseph Oudard était domicilié à Cambray; qu'il a fait ses divers testamens et codicilles à Cambray ; qu'il est décédé à Cambray ; qu'il

(1) C'était, à cette époque, une question fort controversée. V. le Répertoire de jurisprudence, au mot Date, no 4.

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