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duirait à des transports accidentels, ils n'auraient à produire pour toute justification que leurs papiers de bord. Il serait superflu d'exiger d'eux une patente constatant leur état de navigabilité, car ils offrent par leur destination même de suffisantes garanties de solidité, et ils sont naturellement pourvus de tout le gréement nécessaire. Quant à leurs capitaines, l'on pourrait, dans l'intérêt de la sécurité publique, leur imposer un pilote riverain pendant toute la durée de leur trajet intérieur.

Mais, ainsi que l'observation en a été faite, de telles dispositions, si libérales qu'elles paraissent, ne permettraient aux navires venus de la mer que de courtes incursions qui laisseraient la plus grande partie du domaine fluvial en dehors de l'atteinte étrangère. La solution de la question internationale des fleuves ne serait complète qu'autant que les étrangers absolument assimilés aux indigènes, soumis aux mêmes lois qu'eux et tenus d'ailleurs d'établir le siège de leur entreprise dans l'un ou l'autre des États riverains, pourraient exploiter régulièrement les grands cours d'eau au moyen de bateaux adaptés à la navigation intérieure et portant leurs propres pavillons.

Dans ces conditions spéciales, il y aurait à restreindre les priviléges et immunités des navires étrangers en tant que portions flottantes du territoire dont ils sont autorisés à porter les couleurs. Ce point serait d'un règlement d'autant plus facile, qu'en général, dans les États chrétiens, la juridiction

du pays d'origine ne concerne plus que la discipline intérieure des équipages.

Sans doute dans bien des cas, l'étranger, résolu à pratiquer la navigation sur telle ou telle région fluviale, trouverait plus simple ou plus avantageux de prendre l'indigénat ou s'il s'agissait d'une compagnie, obligée d'ailleurs d'avoir son siège dans l'un des pays limitrophes, il pourrait lui convenir de se transformer en société locale et de renoncer par conséquent au pavillon et à la protection morale ou effective de la nationalité de ses principaux coopérateurs. Mais ces actes d'identification devraient rester entièrement facultatifs et ne point résulter de différences réglementaires ou administratives.

En résumé la convention nouvelle qui déterminerait les conditions de la liberté fluviale pourrait être ainsi conçue:

ARTICLE PREMIER

Les fleuves internationaux sont ouverts à la navigation et au commerce universels.

Les bâtiments des sujets riverains et ceux des sujets étrangers y seront traités sous tous rapports sur le pied d'une parfaite égalité, et il ne sera apporté d'autres entraves à leur circulation que celles résultant des dispositions relatives à la police, aux droits de navigation, aux douanes, aux quarantaines et à l'état de guerre.

ARTICLE 2

En conséquence, tout bâtiment à voiles ou à vapeur, quelle que soit sa nationalité, pourra, soit accidentellement, soit régulièrement, transporter des passagers et des marchandises ou pratiquer le remorquage entre tous les ports situés le long de ces fleuves, sans qu'il soit fait de distinction au préjudice de qui que ce soit, entre la navigation directe de la pleine mer vers ces ports et vice versâ, non plus qu'entre le grand et le petit cabotage fluvial proprement dit.

ARTICLE 3

Les bâtiments de mer se livrant à la navigation fluviale n'auront à produire, pour toute légitimation, que leurs papiers de bord et ils devront être pourvus d'un pilote local dans tout le cours de leur voyage, tant en amont qu'en aval.

Les capitaines ou patrons de bâtiments exclusivement fluviaux devront justifier de leurs aptitudes nautiques et de leur expérience locale au moyen d'une patente délivrée par l'État riverain dont ils sont les sujets ou dans lequel ils ont élu domicile, s'ils sont étrangers.

Ils auront, en outre, à faire préalablement constater par des experts officiels le bon état de navigabilité de leurs bâtiments.

IV

POLICE DE LA NAVIGATION

Les fleuves internationaux font partie intégrante des territoires qu'ils longent ou qu'ils traversent. A ce titre, le droit des autorités riveraines d'en réglementer l'usage est d'autant moins contestable qu'ils sont entretenus par les soins, sinon aux frais exclusifs de ces autorités et que d'ailleurs l'exiguité même de la voie qu'ils offrent à la circulation publique et leurs imperfections naturelles commandent des mesures particulières de surveillance et de précaution.

Le plus souvent les ordonnances qui concernent la police de la navigation intérieure, ne figurent pas dans le règlement qui fixe les bases générales du régime de cette navigation; elles s'y trouvent simplement annexées à titre de règlement supplémentaire et forment un ensemble plus ou moins méthodique.

Obligatoires pour tous les pavillons sans distinction de nationalité, ces dispositions sont et doivent

être aussi uniformes que possible c'est-à-dire, les mêmes sur toute l'étendue des eaux limitrophes. Leur efficacité est à ce prix, et c'est particulièrement dans cette branche de l'administration fluviale qu'il convient de traiter les courants internationaux, comme s'ils ne dépendaient que d'une seule et même souveraineté; il s'agit, en effet, de directions précises destinées à prévenir les sinistres dans les diverses circonstances de la navigation et notamment quand les bâtiments se croisent ou se dépassent, lorsqu'ils sont remorqués ou halés de la rive, lorsqu'ils voyagent de nuit ou par un temps de brouillard, lorsqu'ils échouent ou font naufrage, etc., etc.

En comparant entre eux les règlements de police établis sur les principaux fleuves européens, il serait d'autant plus facile d'en tirer des normes communes, susceptibles d'une application générale, qu'en fait ces actes spéciaux, basés sur une longue pratique, sont ordinairement copiés les uns sur les autres. Mais de pareils extraits conduiraient à des détails que ne comporte pas le cadre de ces études.

Un seul point mérite ici une mention particulière comme intéressant à un haut degré la sécurité de la navigation fluviale.

Les monopoles ont été partout abolis et avec eux les sociétés ou corporations dont le commerce était tributaire. Une seule institution privilégiée est restée debout sous le règne de moins en moins

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