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ADDITION au mot Enterrement

La Chartreufe d'Abbeville, ainfi que toutes les autres maifons de cet ordre, a deux chapelles différentes. L'une eft uniquement deftinée à raffembler les religieux pour y vaquer à la célébration des faints myfteres & de l'office divin. L'autre eft établie pour y réunir les domeftiques de la maifon, leur y faire remplir tous les devoir de la religion, leur donner la communion pafchale & faire la cérémonie de leur enterrement, foit que ces domeftiques aient fait vœu de clôture perpétuelle ou

non.

Cette derniere chapelle avoit en 1782 une ouverture en dehors donnant fur une des rues de la ville.

Le fieur Daullé, curé de la paroiffe dans laquelle la Chartreufe d'Abbeville eft fituée, a penfé que les ufages des Chartreux dont nous venons de parler étoient contraires à fes droits. L'inhumation que les Chartreux firent le 3 avril 1782 d'Antoine Rimbault, leur domeftique, lui donna lieu de faire éclater fes plaintes.

Le 17 juin fuivant, il fait aligner les Chartreux en la fénéchauffée d'Abbeville, pour voir dire qu'il aura acte de ce qu'il prend pour trouble à l'exercice de fes fonctions curiales, l'inhumation qu'ils avoient faite du corps d'Antoine Rimbault, qu'il feroit maintenu dans l'exercice de fes fonctions dans toute l'étendue de fa paroiffe; en conféquence que défenfes feroient faites aux Chartreux 1° d'avoir une chapelle diftincte de celle où ils font leur office particulier avec ouverture en dehors, d'y faire l'eau-bénite, & diftribuer le pain béni le dimanche; 2° d'adminiftrer les facremens, notamment la communion pafchale, & la premiere communion aux domeftiques qui habitent dans l'intérieur de eur monaftere, ainfi que de leur donner la fépulture après leur mort, & que pour l'avoir fait ils feroient condamnés en 3000 livres de dommages & intérêts & aux dé

pens.

Les Chartreux ont fait renvoyer cette

§ II, no 4, pag. 687.

demande aux requêtes du palais en vertu de leur committimus.

Le 23 mai 1784, il a été rendu aux requêtes du palais une fentence contradictoire, par laquelle le fieur Daullé a été débouté de fes demandes.

Sur l'appel il a eu un meilleur fuccès. Par arrêt rendu le 13 juillet 1785, conformément aux conclufions de M. l'avocat-général Séguier, « La cour en infirmant la fentence, & faifant droit fur les conclufions du procureur-général du roi, maintient le fieur Daullé & fes fucceffeurs, curé de la chapelle d'Abbeville, dans l'exercice de leurs fonctions dans toute l'étendue de la paroiffe; en conféquence fait détenfes aux Chartreux d'Abbeville d'adminiftrer, fans le confentement dudit curé ou de fes fucceffeurs, les facremens, & notamment la communion pafchale & la premiere communion à ceux de leurs domeftiques qui habitent dans leur monaftere, hors des lieux réguliers, ainfi que de leur donner la fépulture après leur mort fans le confentement dudit curé; ordonne que dans un mois, à compter du jour de la fignification du préfent arrêt, les Chartreux feront tenus de faire murer, fi fait n'a été, l'ouverture de la chapelle destinée pour leurs domeftiques donnant fur la rue; fur le furplus des demandes. . . . hors de cour; condamne les Chartreux aux dépens: Plaidoyeries, vu la feuille, pag.

22.

Les Chartreux d'Abbeville fe font conformés à la difpofition de cet arrêt en ce qu'il leur ordonnoit de murer la porte de leur chapelle donnant fur la rue. Ils fe font pourvus au confeil contre les autres difpofitions du même jugement. Voici comment ils les ont attaquées.

. Au fond, il eft reconnu & par l'arrêt du parlement, & par le fieur Daullé lui-même, que les Chartreux ont le droit d'adminiftrer les facremens à leurs domestiques La conteftation ne roule que fur le point de favoir fur queis domeftiques ce droit doit s'étendre.

L'arrêt du parlement en exclut ceux qui habitent dans le monaftere hors des lieux réguliers; & cette difpofition eft contradictoire en elle-même. Car comment concevoir qu'un domeftique qui habite dans un monaftere de Chartreux foit hors des lieux réguliers. La diftinction entre le monaftere & les lieux réguliers eft chimérique.

Si l'on entendoit par lieux réguliers uniquement le cloître intérieur, où font les habitations des religieux qui forment la communauté, alors le privilége que l'on reconnoît appartenir aux Chartreux feroit anéanti. Car aucun domeftique n'habite dans cette clôture intérieure. Cependant on convient qu'il y a des domeftiques auxquels le privilége s'applique.

Quels font donc ces domestiques? ce font ceux qui habitent dans la clôture de la Chartreufe; dans les mêmes lieux où habitent les procureurs & les freres, qui très-certainement habitent les lieux réguliers. C'eft donc à ceux-là que le privilége s'applique, puifqu'il ne peut s'appliquer à d'autres.

Sur la requête des Chartreux, l'arrêt du parlement a été caffé par arrêt rendu au confeil des dépêches le 23 feptembre 1785.

Par cet arrêt, « Le roi maintient l'ordre des Chartreux dans le droit & poffeffion d'adminiftrer la communion pafchale, & les derniers facremens aux domestiques qui réfident dans la clôture des maifons de l'ordre, comme auffi de leur faire faire la premiere communion & de les inhu

mer >>.

Le fieur Daulié a formé oppofition à cette derniere décifion.

Dans le cours de l'inftance au confeil, le prieur de la grande Chartreufe, fupérieur général de l'ordre des Chartreux eft intervenu, & a adhéré aux conclufions prifes par les Chartreux d'Abbeville.

Le 27 février 1787, acte fignifié par les Chartreux d'Abbeville au fieur Daullé, par lequel ils offrent de renoncer expreffément à faire l'eau-bénite dans la chapelle de leur maison deftinée à leurs domeftiques, ainfi qu'à y diftribuer du pain béní, & conviennent même que cet ufage n'eft peint

pratiqué dans les différentes maisons des Chartreux.

Par une requête poftérieure, le fieur Daullé a demandé a&e de ces offres ; & il paroît que les Chartreux auroient pu fe difpenfer de les faire.

Par arrêt définitif rendu au confeil des dépêches le 19 janvier 1788 « Le roi en fon confeil, fa majefté y étant, en présence, & de l'avis des fieurs..... commiffaires, faifant droit fur l'inftance & fur l'intervention, déboute le fieur Daullé de fon oppofition, ordonne que l'arrêt du conseil du 23 feptembre 1785 fera exécuté; ordonne néanmoins que la porte de la chapelle extérieure donnant fur la rue demeurera murée, fur le furplus des demandes des parties les met hors de cour » : Vu une copie collationnée de l'arrét.

Il y a eu dans cette affaire au parlement des mémoires imprimés pour les Chartreux par Me Courtin, & pour le fieur Daullé par Me Camus.

Le moyen le plus fort qu'on ait fait valoir pour appuyer le privilége des Chartreux eft, felon nous, celui-ci.

Obliger les Chartreux d'envoyer leurs domeftiques à la paroiffe, ce feroit mettre ces domeftiques dans le cas de fe diffiper, de manquer même aux exercices de piété qui ferviroient de prétextes à leurs forties fréquentes. Cet abus feroit presque fans remede, la loi de la clôture empêchant qu'aucun Chartreux puiffe veiller au-dehors fur la conduite de leurs domeftiques.

Il y a plus ce feroit rendre le fervice de ces domestiques inutile. Tout change dans le fiecle les heures des repas, du travail & des autres exercices de la journée ont varié. L'ordre des Chartreux, entiérement féparé du monde, ne s'eft point plié à ces ufages. Toujours femblable à lui-même, cet ordre eft demeuré tel qu'il fut établi par fon faint fondateur. Déja un Chartreux a pris fa modefte réfection; déja il se livre à un sommeil acheté par de rigoureufes auftérités lorfque l'office paroiffial n'eft pas encore fini. Comment veut-on que le fervice de ces pieux Cénobites put fe faire, s'ils étoient obligés d'envoyer leurs domeftiques à la paroiffe?

De-là Me Courtin tiroit la conféquence,

que quand on pourroit contefter le privilége des autres religieux, celui des Chartreux eft néceffaire. Il tient, difoit-il, au bon ordre & à la régularité.

Pour autorifer le privilége des Chartreux, on a invoqué auffi différens titres; entr'autres des bulles des papes Luce III, & d'Alexandre IV des années 1184 & 1257, des lettres-patentes de Louis IX, confir

matives de ces priviléges, enregistrées en
la cour des aides en 1672. Mais nous ne
voyons point que le privilége dont eft
queftion ait été accordé aux Chartreux par
des lettres-patentes enregistrées en parle-
ment. C'eft ce qui feroit à défirer que
Chartreux obtiffent aujourd'hui, afin d'é-
viter toute difficulté
viter toute difficulté pour l'avenir.

ERRAT A.

Pag. 89, col. 2, lig. 43, au lieu de fervir, lifez favoir.

les

Pag. 95, dans le fommaire du § XXV, au lieu de portion congrue, lifez portion

virile.

Pag. 196, col. 1, fecond alinéa, avant derniere ligne, au lieu de premier lit, lifez fecond lit.

Pag. 227, après le mot Double, (Ace double) au lieu de Voyez Ecritures privées, lifez Voyez Ecrit double, pag. 404.

Pag. 261, à la fin de la premiere col., au lieu de ce qui a été découvert avoit la police, lifez ce qui avoit été découvert à la police.

Pag. 323, Seconde col. ligne 27, fupprimez: Ni même pour établir un droit extraordinaire lorfque la loi particuliere du lieu la lui accorde.

Ibid. lig. 33, fupprimez: que la loi ne lui accorde point.

Pag. 337, col. 2, au mot Duché, § I, no 3, l'arrêt du confeil dont la date a été laiffée en blanc eft du 26 août 1783.

Pag. 468, col. 1, lig. 17, au lieu de Famboifard, lifez, Fonboifar.

Pag. 471, col. 2, lig. 19, même correction que la précédente.

Pag. 586, au mot Endoffement, col. 2, lig. 10, retranchez ces mots, en tel temps. Pag. 607, col. 2, lig. 24, au lieu de 1652, lifez 2752.

ΑΙ

APPROBATION.

J'AI lu, par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, le septieme Volume de la Nouvelle Collection de Jurifprudence de Denifart. Je n'y ai trouvé que des motifs d'en accélérer la publication. A Paris ce 22 avril 1788.

Signé BLANCHARD de la Valette.

JEAN-CHARLES DESAINT, IMPRIMEUR DU CHATELET, RUE SAINT-JAcques.

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