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ce qu'on attendoit de leur part. L'ufage au refte de ces fignaux n'a rien d'extraordinaire à la Chine, dans les occafions pareilles à celle-ci; & on comprend fan's beaucoup de peine qu'il peut être employé utilement. Soutacheou du moins ne s'y méprit pas: il connut très-bien qu'on demandoit de hui, qu'à la pointe du jour il fortît avec tout fon monde contre les Tartares, tandis que l'armée du fecours attaqueroit vivement un de leurs quartiers: mais le Prince Mancheou rompit toutes ces mefures. A peine les Chinois nou- Défaivellement arrivés fe difpofoient à prendre quelque repos, en atten- Chinoidant l'heure de l'attaque, que fe de Taytfong paroiffant tout à coup te mille à la tête d'environ vingt mille de fes meilleurs foldats, fe jette au sefur le camp ennemi, le met en defordre & le diffipe.

Cependant le Général qui commandoit ce fecours, ne fut pas tellement déconcerté, qu'il ne vint à bout de rallier, à deux lieues

te d'une

Armée

quaran

hōmes

venus

cours

de Ta

lingho.

au-delà, plus de la moitié de fes gens. Ils s'y raffembloient même avec confiance, perfuadés que les Mancheoux contens de l'avantage qu'ils venoient de remporter, ne penfoient pas à le pouffer plus loin: ils fe trompoient, Taytfong leur laiffa tout le temps de fe réunir pour les battre plus à fon aife, & il le fit en effet fi bien, que trèspeu lui échappèrent: Officiers & foldats, prefque tous furent tués ou faits prifonniers.

De ce grand nombre de captifs, un feul refufa de fe couper les cheveux à la façon des Tartares, & de s'enroller gaiement parmi eux: c'étoit le Général. Il s'obftina même durant quelques jours à ne vouloir rien prendre, pour épargner, disoit-il, à fes ennemis la peine & la honte de le mettre à mort.. Mais le bon fens revenant peu à peu, cet homme fe ravisa au quatrième jour; il fouffrit qu'on lui apportât de la nourriture, il la vit fans peine, & il mangea. Taytlong jugeant qu'un acte de

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clémence ne feroit pas de trop, voulut bien lui donner la vie: il, fe contenta de l'enfermer pour toujours dans un monaftère de Bouzes fitué aux environs de Chinyang.

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Quoique le fecours attendu à; Talingho eût eu le fort que nous venons de voir, le grand Mandarin Soutacheou n'en étoit pas moins qu'auparavant dans la ferme réfolution de tenir bon. Deux lettres que le Prince Mancheou lui écrivit coup fur coup après fa, victoire, ne firent fur ce Commandant aucune impreffion. Cependant on fouffroit beaucoup dans la Ville, où rien n'avoit pu pénétrer depuis quatre mois. Taytfong, qui l'apprit par des transfuges, en, parut fincérement affligé. Il envoya au Gouverneur un des plus confidérables de fes prifonniers, pour faire un dernier effort fur cette ame inflexible, qui au jugement des Mancheoux, portoit la fermeté trop loin. Soutacheou vaincu par la néceffité où il fe

!

Prife

lingho.

trouvoit, entra dans les raifons de l'envoyé, & promit de faire fortir fon fils au phitôt, pour régler toutes chofes avec les Tartares. Ce jeune Seigneur fe rendit effectivement dès le même jour au lieu marqué pour la conférence: il y fut maître des conditions, & jura au nom de fon pere de rendre la Place le lendemain.

2

Soutacheou ratifia d'abord ce de Ta- qu'avoit fait fon fils, quoique le parti qu'il alloit prendre dût avoir des fuites bien fâcheufes dont une entr'autres l'inquiétoit beaucoup. En venant fé renfermer dans Talingho, ce Mandarin s'étoit vû obligé de laiffer fon époufe à Kintcheou, Ville affez peu éloignée; & après la défection (31) qu'il méditoit, il n'y avoit aucune apparence, qu'on voulût lui rendre cette Dame. Mais l'amour conjugal n'eft pas

(31) En fe rendant au Roi des Mancheoux, les Commandans Chinois fe livroient à lui fans

moins ingénieux

réferve, par un véritable renoncement au parti de leur Souverain.

que tout autre amour: la faine raifon qui l'autorife, doit le rendre même plus actif. Que d'éloges ne mériteroit pas celui de Soutacheou, fi, zélé pour fon épouse il l'eût toujours été pour fon Souverain!

fe d'un

nois,

femme.

Le foir du même jour que le traité Adrefavoit été conclu, ce fidéle époux Mandafort de la Ville, & fe rend fans rin Chibruit auprès de Taytfong, «Prince, pour ra» lui dit-il après s'être fait con- voir fa »noître, c'eft peu pour vous d'a»voir Talingho en votre pou» voir, fi vos ennemis confervent »Kintcheou. Mon autorité, il weft vrai, s'étend encore fur cette » Place; mais on ceffera de l'y re» connoître, quand on fçaura que »je fuis à vous. Sur cela il m'eft » venu une pensée que j'ai cru de»voir vous communiquer. J'étois » convenu avec le Gouverneur de » Kintcheou, que me voyant rẻréduit à l'extrémité, & contraint d'abandonner Talingho, je ferois un grand bruit d'artillerie afin qu'à ce fignal fortant lui

دو

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