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JURIDICTION administrative. — Receveurs: Anciens magistrats.

LES lois relatives à la juridiction administrative ne sont pas applicables aux membres des adminis trations qui ont précédé la publication de ces lois.

La résolution annoncée par la lettre de son èxcellence le grand-juge, ministre de la justice, en date du 15 janvier 1807 (*), nè s'étend pas audelà des dettes contractées par les communes, et pour sûreté desquelles sont intervenues des cautions.

I

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Le sieur Provoost était greffier et receveur des con signations de l'ancien magistrat de la ville de Furnes La nomination de cette place appartenait au magistrat.

En décembre 1793, les circonstances parurent si difficiles et si impérieuses aux membres du magistrat de la ville et châtellenie de Furnes, que, pour se tirer de leur détresse, ils prirent la résolution de disposer des fonds qui se trouvaient dans la caisse du sieur Provoost.

Ils en ordonnèrent le versement dans celle du sieur d'Acquet, receveur général de la châtellenie.

(*) Cette lettre a été rapportéc, 3. cahier de 1807, page 135.

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Ces fonds devaient être rétablis par des moyens que des temps plus favorables permettraient d'employer.

Il est à remarquer que ces anciens magistrats réunissaient le pouvoir administratif et le pouvoir judiciaire.

Quels que soient les obstacles survenus, il est certain que l'argent tiré de la caisse du sieur Provoost n'y a pas été rétabli.

Cependant le sieur Joets et ses cohéritiers intentent action au tribunal de l'arrondissement de Furnes, afin de le faire condamner à leur représenter une certaine somme qui avait été consignée dans sa caisse, par leur auteur.

Ils s'étaient d'abord pourvu au conseil de préfecture qui les avait autorisé à poursuivre leur demande devant l'autorité judiciaire; néanmoins le tribunal de Furnes se déclara incompétent.

Le sieur Joets se trouvant sans juge, s'adressa au conseil d'état, qui, par arrêté du 17 prairial an XH, confirmatif de celui du conseil de préfecture, du 26 nivôse précédent, déclara que les lois relatives à la juridiction administrative n'étant pas obligatoires dans la ci-devant Belgique, à l'époque où le sieur Provoost a été rendu dépositaire de la somme réclamée, et où il s'en est dessaisi, l'action était du ressort de l'autorité judiciaire.

Le sieur Joets retourne au tribunal de Furnes > contre Provoost; celui-ci appelle en garantie, tant le receveur général d'Acquet, dont il avait la décharge,

que les membres de l'ancien magistrat, en exercice à l'époque du 30 novembre 1793, jour de la délibération prise sur la disposition des deniers dont s'agit.

Par jugement du 10 messidor an XIII, Provoost fut renvoyé de la demande formée contre lui, par le motif qu'il était mandataire ou préposé du magistrat, et qu'il n'était comptable qu'à lui des fonds qui lui avaient été mis en dépôt, de sorte que Joets n'avait pas d'action contre lui.

Par là, toutes les parties étaient tirées d'embarras, excepté le demandeur originaire, qui interjeta appel de ce jugement.

La cause ayant été présentée à l'audience de la Cour du 18 février 1807, le ministère public rappela les dispositions de la lettre-du grand-juge, ministre de la justice, du 15 janvier dernier, et proposa de surseoir à l'instruction de l'instance; mais la Cour pensa l'affaire sortait de l'objet de la résolution annoncée par cette lettre, et ordonna, le même jour, aux parties de plaider. Voici les motifs de l'arrêt.

que

«

<< Attendu que la résolution annoncée par lettre « de son excellence le grand-juge, ministre de la jus« tice, en date dn 15 janvier dernier, est relative << aux dettes contractées par les communes et pour « sûreté desquelles sont intervenues des cautions;

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Que, dans le cas présent, il s'agit de la restitu«<tion d'un dépôt particulier dont il a été disposé « et qu'il est encore incertain si l'objet formera << une dette communale, ce qui dépend des comptes, «< circonstances et emplois des deniers, affaire qui

ne concerne que la commune et ses anciens maa gistrats;

«munes

« Que, dans les dettes contractées par les comles créanciers ont aliéné librement et vo«<lontairement leurs capitaux sous caution, et par « là se sont soumis à tous les événemens auxquels «ces dettes seraient assujetties;

«Que d'ailleurs, il y a pour la cause un arrêté particulier du conseil d'état, par lequel il est dé«< cidé qu'elle est de la connaissance des tribunaux ;

«

« La Cour, sans s'arrêter aux réquisitions du subs« titut-procureur général, ordonne aux parties de plai« der. »

Lorsque la cause fut reproduite, les membres de l'ancien magistrat déclinèrent l'autorité des tribunaux.

Ils observaient que l'arrêté du conseil d'état n'avait été pris que relativement au greffier; qu'il ne s'agissait pas encore alors de leur mise en cause, mais la première partie de l'arrêté établit en principe que les lois rendues sur la juridiction administrative ne s'appliquent point aux actes des administrations antérieures à ces lois.

D'ailleurs, avant d'appeler les membres de l'ancien magistrat de la ville et châtellenie de Furnes; le sieur Provoost s'était pourvu au conseil de préfecture qui, par arrêté du 24 floréal an XIII, avait déclaré :

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abres susdits pouvaient êtres traduits en justice ordi«naire à raison de leurs fonctions, sans autorisation << préalable, et que les lois postérieures n'avaient ap« porté aucune dérogation à leur égard, ces lois ne « concernant que les administrations existantes lors «de leur publication dans les départemens réunis. >>>

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Le déclinatoire ne pouvait donc être accueilli, et il ne restait de difficulté que sur le fonds.

La Cour ne s'est point prononcée à cet égard : en rejetant le déclinatoire, elle a voulu s'assurer, avant de statuer sur les moyens et défenses des parties, de plusieurs points qui lui ont parú nécessaires pour éclairer sa religion; il n'est pas moins important de les faire connaître que les motifs qui ont déterminé la compétence; tout étant dans cette affaire du plus haut intérêt, dans ses rapports avec les événemens du temps.

Nous donnerons l'arrêt textuel.

« Attendu qu'il a été reconnu dans l'espèce de << cette cause, par arrêté du conseil d'état, du 17 « prairial an XII, confirmatif de celui du conseil de préfecture du département de la Lys, en date du « 26 nivôse précédent,

Que les lois relatives à la juridiction adminis«<trative n'étaient pas encore obligatoires dans la « ci-devant Belgique à l'époque où le sieur Provoost « a été rendu dépositaire de la somme réclamée << et où il s'en est dessaisi, et qu'ainsi les parties dé<< vaient se pourvoir devant les tribunaux ;

Tome 1, N.o 6.

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