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J'accepte pour la somme de neuf cent cinquante « florins. J. Clenis-Scmitd. »

L'effet avait été endossé au profit du sieur Barbiaux, qui, à défaut de paiement, fit assigner ClenisScmitd, au tribunal de commerce de Bruxelles, sur ajournement notifié à l'hôtel de la Reine de Suède.

Clenis-Scmitd ne comparut pas; jugement par défaut qui le condamne. à payer.

Ce jugement lui fut signifié à l'hôtel de la Reine de Suède, et surabondamment à son domicile réel à Lierre.

Clenis forme opposition: il la fonde sur la nullité de l'assignation donnée à l'hôtel de la Reine de Suède, et soutient qu'il n'a pu être valablement cité qu'à personne on domicile réel.

Barbiaux conclud à ce que l'opposition fût déclarée non recevable comme faite à tard.

Il partait du jour de la signification du jugement, faite à l'hôtel de la Reine de Suède.

Clenis-Scmitd, pour être conséquent dans son systême, voulait que le délai de l'opposition n'eût utilement couru, que depuis la notification faite à son domicile à Lierre, et alors il avait formé son opposition dans le délai.

Jugement qui déclaré l'opposition non recevable.

Ainsi, le tribunal de commerce décidait que F'assignation avait été valablement donnée à l'hôtel de

la Reine de Suède, et, par une conséquence du même principe, que la signification du jugement au mêmė domicile avait fait courir le délai de l'opposition.

Clenis-Scmitd interjette appel.

Il expose que la promesse faite de payer à l'hôtel de la Reine de Suède, n'a d'autre effet que cer lui de l'obliger à y faire trouver des fonds pour acquitter son engagement;

Que la lettre de change a bien pu y être protestée, mais qu'il ne résulte aucunement de-là élection de domicile pour les poursuites judiciaires.

L'article 17, titre 12, de l'ordonnance de 1673, accorde bien la faculté de donner l'assignation devant les juges consulaires du lieu où le paiement doit être fait, ce qui est conforme aux dispositions de plusieurs lois romaines; mais cela ne dispense pas de faire l'ajournement au domicile réel du débiteur, à moins qu'il n'ait spécialement élu domicile pour l'exécution de l'acte.

D'où il concluait que l'assignation à l'hôtel de la Reine de Suède était nulle; qu'il avait formé opposition en temps utile, et que le jugement rendu par défaut devait être annullé, ayant été porté, sans citation valable, à la partie, pour défendre à la demande.

Quel était le point de difficulté? De savoir si l'indication du domicile du paiement emportait l'effet d'une élection de domicile pour les poursuites judiciaires.

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Barbiaux citait l'arrêt rendu par la troisième section de cette Cour, le 24 juin 1806 (*), et un autre rendu à la seconde section, le 3 fructidor an XIII (**), où il supposait la question décidée en sa faveur.

Il s'appuyait d'un arrêt de la cour de cassation du 4 juin 1806, rapporté tome 2 de la jurisprudence du code civil, page 451.

Aucun de ces préjugés ne décide formellement la question.

Lors du premier arrêt, le débiteur ne demandait pas la nullité de l'assignation, sur le fondement qu'elle avait été donnée au domicile indiqué pour le paiement; au contraire, il convenait qu'il y avait été valablement ajourné, mais il soutenait l'ajournement nul parce qu'il n'avait pas eu le délai, eu égard à la distance de son domicile réel.

Dans l'espèce de l'arrêt du 3 fructidor an XIII, les parties avaient fait expressément élection de domil'exécution de leurs engagemens.

cile

pour

L'arrêt du 4 juin 1806 déclare seulement que la cour d'appel de Paris n'a violé aucune loi en accordant au débiteur les délais réglés pour la distance du domicile réel.

Il ne suit pas même de cet arrêt, que la décision de la cour d'appel de Paris eût été improuvée dans

(*) Voyez page 369, dernier cahier, tome III, de l'an XIV - 1806, de ce recueil.

(**) Page 246, tome II de la même année.

le cas où elle aurait jugé que le domicile conventionnel tenait lieu de domicile réel à tous effets " en sorte que la résidence du débiteur n'était plus à considérer sous aucun rapport.

C'est sous ce point de vue que l'arrêt du 24 juin 1806 a été rendu dans la cause d'Ernult et d'Artemberg.

Quoi qu'il en soit, cet arrêt et celui de la cour de cassation supposent que l'assignation peut être régulièrement faite au domicile indiqué pour le paiement d'un effet négociable, car, dans l'un et l'autre cas, les débiteurs avaient été ajournés au domicile du paiement, et les obligations étaient conçues de la même manière que celle de Clenis-Scmitd il n'y eut point de difficulté sur cet objet, d'où l'on conclud qu'il ne fait pas de doute.

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En effet, ce n'est pas seulement dans telle ville, dans telle commune, que le débiteur s'engage à payer, son obligation est plus étroite; elle est spécifique : c'est dans une telle maison qu'elle doit s'accomplir.

Que dirait de plus une élection expresse de domicile?

L'accepteur pourrait même ne pas avoir de domicile réel. Si c'est un marchand roulant, ou étranger, ou un homme de convention difficile, n'est-ce pas une précaution sage que de se faire désigner le domicile particulier où, à défaut de paiement, il sera possible de le poursuivre devant les tribunaux.

Tel est le motif principal de l'indication d'un lieu particulier pour le paiement; le propriétaire de l'effet n'aurait rien gagné à la stipulation, si elle ne pro

duisait que la faculté de faire le protêt au domicile où les fonds doivent être réalisés. Il faut donc tenir que pareille clause a un objet plus étendu, et qu'il emporte véritablement élection de domicile pour l'exécution de l'acte.

Or, si aux termes de l'article 111 du code civil, l'élection de domicile pour l'exécution d'un acte, autorise toutes significations et poursuites à ce domicile, la même règle doit, à plus forte raison, être observée en matière de commerce, qui a besoin de plus de faveur, qui exige toujours plus de célérité dans toutes les négociations, et dans ce qui tend à les faire exécuter.

Sur quoi,

<< Attendu que l'obligation de payer à un domicile « convenu, emporte en matière de lettres de com<<< merce élection de domicile pour tous actes relatifs à l'accomplissement de l'obligation envers le « débiteur, qui a indiqué le lieu du paiement;

«

Que c'est à cette fin, dans la vue de trouver le « débiteur à un lieu certain, que l'indication se fait « dans les effets de commerce.

« D'où il suit, que l'assignation a été valablement « donnée, et que les délais ont utilement couru du << jour de la signification du jugement à l'hôtel de « Suède.

<< La Cour met l'appellation au néant, avec amende · « dépens. >>

Du 30 mars 1807.

MM. Audoor et Pins.

interprétation

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