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<< 213 du code civil sont fondés sur la vie commune « des conjoints, et n'auraient plus aucun objet, s'il « était loisible à l'un d'eux d'abandonner l'autre, ou « de vivre séparément ;

Que si, suivant l'art. 214, la femme est obligée « d'habiter avec le mari, celui-ci est obligé de la << recevoir, ce qui démontre la nécessité d'une de<< meure commune, ou plutôt d'une existence indivi«<sible;

« Attendu que l'intimé a bien désigné un domicile « à Louvain, mais qu'il ne s'y est pas rendu, et a «< même placé son épouse sous la censure et l'auto« rité d'un étranger;

«Que cette désignation n'a été jusqu'à présent qu'un << acte feint et simulé;

<< Attendu que sa conduite tend à éluder les devoirs « qui lui sont imposés par l'union conjugale, et que « l'intimé invoque inutilement les principes de la puis<< sance maritale, tandis qu'il profane la loi du mariage;

« D'où il suit qu'en demandant que son époux << vienne la rejoindre dans son domicile, l'appelante «< a fondé son action dans les obligations qui sont «< attachées au mariage, et qui sont également ré<< ciproques ;

« Attendu que si l'intimé abandonne son épouse << et son domicile, il ne peut être dispensé de four<< nir aux besoins du ménage, tant qu'il n'ira pas lui« même le gouverner et exercer personnellement l'au«<torité que la loi ne lui accorde qu'à condition d'en « remplir les devoirs ;

«Attendu que les frais ordinaires du ménage peu« vent être évalués, eu égard aux facultés et à l'état «< des parties, à une somme annuelle de cinq mille << francs, outre le prix de loyer ;

« La Cour met l'appellation, et ce dont appel, au néant; émendant, déclare les offres de l'intimé << non satisfactoires, le condamne à aller rejoindre « son épouse, au domicile par lui indiqué, à Lou« vain; sinon, et jusqu'à ce qu'il habite ledit do<«<micile, ou tout autre convenable, dans lequel il «sera tenu de recevoir son épouse, à payer à l'ap« pelante une somme annuelle de cinq mille francs, « à partir du 8 messidor an XII, sur laquelle ladite << appelante déduira ce qu'elle a reçu des mains de « son mari, ou qu'elle a perçu ou pourra percevoir a par elle-même; condamne en outre l'intimé à «payer le prix de loyer de la maison, et aux dépens, << tant de cause principale que d'appel. »

Du 30 août. 1806.

MM. Vanvolxem et Girardin.

COMMANDEMENT. -Serment décisoire.
Code civil.

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1.0 LE fait du mariage peut-il être l'objet d'un serment décisoire ?

2.o Le mandat légal de l'huissier porteur des pièces, dans un commandement, est-il terminé au · moment où il a remis son exploit ?

3.o L'élection de domicile, en tête d'une contrainte, équivaut-elle à un mandat pour recevoir ?

4.o La loi qui veut que le titre de la créance soit notifié, entend-elle le titre primitif, ou toutes les pièces necessaires pour justifier de la demande ?

MONSIEUR Philippe-Jacques Degrégoire, colonel pensionné, devint l'époux de la dame PhilippineJoséphine Dubois après quelques années de mariage, ils eurent la conviction qu'ils ne pouvaient être heureux ensemble; l'épouse aimait le faste et la dépense, le mari était très-économe: ils prirent le parti de recourir au divorce, pour cause d'incompatibilité d'humeur et de caractère; leurs nœuds furent rompus en l'an VI, dans la ville de Bruxelles, où les époux avaient établi leur domicile.

Dans l'acte préliminaire au divorce, du 11 thermidor même année, la dame Dubois stipula une pension annuelle de six cents florins (environ onze cents francs), laquelle viendrait à cesser, si elle passait à de secondes noces.

Deux enfans étaient nés de ce mariage; un garçon et une fille : il fut convenu que la dame Dubois retiendrait sa fille, âgée alors de trois ans et demi, et que le fils, qui était entré dans sa septième année, resterait sous l'administration de son père.

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La dame Dubois quitta bientôt son ancien domicile, emmenant sa fille, et voyagea en divers pays.

Elle avait connu, à Bruxelles, le général Rosto

lant, et comme, dans la correspondance qu'elle entretint avec son ci-devant mari, relativement aux enfans communs, et aussi pour le paiement de la pension, elle datait ses lettres des lieux où le public savait que ce général avait eu successivement des commandemens; que notamment, dans une lettre datée de Turin, elle recommandait qu'on lui écrivit sous le couvert du général Rostolant, commandant la vingt-septieme division militaire, monsieur Degrégoire ne put douter qu'elle n'eût formé de nouvelles liaisons.

La dame Dubois était-elle l'épouse du général, ou bien vivait-elle avec lui sous les auspices d'un lien moins sacré ? Dans la première hypothèse, elle avait perdu, aux termes du contrat de l'an VI, son droit à sa pension dont cependant elle persistait à vouloir jouir dans la seconde, la morale publique s'opposait à ce qu'elle demeurât chargée de l'éducation de sa fille.

Monsieur Degrégoire ne savait sur laquelle de ces deux alternatives il devait se fixer ; son embarras était d'autant plus grand, que quelques-unes des lettres de la dame Dubois étaient signées de ses seuls prénoms: Philippine-Joséphine, et qu'elle n'ajoutait son nom de famille que quand elle demandait sa pension: croyant enfin que la dame Dubois dissiperait elle-même les incertitudes qui environnaient son état civil; il lui fit, en thermidor de l'an XII, offrir réellement, et à deniers découverts, par acte d'huissier, en la personne de son fondé de pouvoirs, à Bruxelles, 1.0 le trimestre de sa pension échu à cette époque ; 2.o la somme nécessaire pour les frais de transport, à Bruxelles, de sa fille,

qui se trouvait alors à Coni, département de la Stura.

Par le même exploit, il réclamait fortement cet enfant, tout en ménageant la délicatesse de la mère, puisqu'il omettait d'indiquer les motifs de la réclamation, mais se bornait à énoncer qu'elle ne les ignorait pas.

On s'écrivit de nouveau monsieur Degrégoire persévéra dans la résolution de ravoir sa fille : en vain la dame Dubois lui représentait-elle qu'elle ne négligeait rien pour son éducation, qui, pendant cinq ans, lui avait coûté plus de dix mille francs; qu'elle avait donné à sa fille les meilleurs maîtres à chanter italiens; qu'enfin sa société était composée des hommes le plus distingués dans les contrées qu'elle avait habitées depuis leur séparation.

Tant d'éclat n'éblouissait pas monsieur Degrégoire qui préférait pour sa fille une éducation moins brillante, mais plus solide, plus propre à former à la suite une épouse économe et attentive, et une bonne mère de famille, dans l'état d'une honnête aisance auquel elle était appelée.

La source des richesses que supposait une éducation aussi dispendieuse était d'ailleurs suspecte à monsieur Degrégoire: les ci-devant époux ne purent s'accorder.

Après deux ans et demi de négociations, et en décembre 1806, la dame Dubois fit faire un commandement de payer tout l'arriéré de la pension qui se composait des termes échus depuis prairial an XII.

Monsieur Degrégoire s'opposa, tant pour le fond

que

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