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APPENDICE.

CHAPITRE PREMIER.

Retraite de l'armée française; remercîmens votés par les Chambres belges. Maintien des mesures coërcitives sur mer. - Négociations entre la Hollande, d'une part, la France et la Grande-Bretagne, de l'autre. — État de la navigation de l'Escaut; suspension des négociations; distinction importante: le fleuve libre en principe; actes de représailles contre la France, la GrandeBretagne et la Belgique. Reprise des négociations; principe d'un arrangement provisoire; note du 14 février 1835.

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La question de paix ou de guerre, objet des préoccupations européennes depuis 1830, était restée en suspens jusqu'à la fin de l'année 1832; résolue d'une manière abstraite par la raison politique, il lui manquait cette solution positive et réelle que le fait peut seul donner. La première intervention française en Belgique, au mois d'août 1831, avait été trop rapide, trop spontanée pour pouvoir être considérée comme une épreuve décisive; il fallait une deuxième intervention, mûrement méditée, hautement annoncée à l'avance. L'effet moral du grand et audacieux évènement qui a marqué la fin de l'année 1832, a donc été de faire pénétrer dans les esprits la conviction qu'il n'est ni dans les intentions ni dans les intérêts des gouvernemens réputés hostiles à la cause révolutionnaire, de se précipiter dans une guerre générale; que si, depuis les évènemens de 1830, il existe en Europe une lutte entre deux grands principes politiques, cette lutte peut être pacifique comme celle des deux grands principes religieux sortis des évènemens du XVIe siècle; que la destruction du royaume-uni des Pays

Bas n'est, à côté du maintien de la paix générale, qu'un objet secondaire; que cet évènement n'eût été de nature à troubler cette paix, que s'il eût été impossible de le plier à une combinaison compatible avec le système politique de 1815.

La France avait donné une première preuve de son esprit pacifique en évacuant la Belgique au mois d'août 1831; elle en donna une seconde et plus complète par sa retraite après la prise de la citadelle d'Anvers; en prolongeant le séjour de son armée en Belgique, le gouvernement français eût alarmé l'Europe et compromis son alliance avec l'Angleterre. Avant de s'approprier la Belgique en 1795, la France l'avait deux fois occupée, en la livrant à ses soldats et à ses proconsuls; l'intervention de 1831 et celle de 1832, se rattachent à d'autres idées d'ordre public et de moralité privée, attestent, pour ainsi dire, une autre civilisation: la Belgique reconnaissante a pu oublier d'anciens griefs que la gloire impériale n'avait point effacés.

Un membre de l'opposition proposa à la Chambre des Représentans de voter des remercîmens à l'armée française et d'abattre le lion élevé dans la plaine de Waterloo; cette deuxième partie de la proposition, espèce d'épigramme contre l'indépendance belge, fut écartée; la première fut adoptée à l'unanimité par les deux Chambres, le 29 et le 30 décembre. Par une seconde proposition, émanée du Sénat, une épée d'honneur fut décernée au maréchal Gérard. En votant des remercîmens à l'armée française, la Belgique s'est noblement acquittée envers la France; elle aurait peut-être pu garder le silence, car la France en intervenant, la Belgique en subissant l'intervention, n'avaient fait que remplir leurs engagemens. En acceptant les remercîmens de la Belgique, la France lui a donné quittance des frais de l'expédition; ces

sortes de dettes coûtent trop à l'amour-propre national pour qu'on les paie deux fois. L'Angleterre, qui continuait à concourir sur mer, d'une manière moins brillante et plus onéreuse, aux mesures coërcitives, n'eut aucune part dans cet acte de gratitude.

Dès que les gouvernemens de France et de la GrandeBretagne eurent reçu la nouvelle de la reddition de la citadelle d'Anvers et du refus du cabinet de La Haye d'évacuer les forts de Lillo et de Liefkenshoek, ils résolurent d'ouvrir une négociation avec la Hollande, en y associant secrètement le cabinet belge, et en maintenant le blocus maritime. Un premier projet de convention, daté de Londres, 30 décembre, fut remis, le 2 janvier, à La Haye, au baron Verstolck Van Soelen, par les chargés d'affaires de France et d'Angleterre. L'on avait craint que le roi Guillaume ne refusât de se prêter à des négociations ouvertes avec la France et l'Angleterre seulement, ou du moins qu'il ne demandât, avant tout, la levée des mesures coërcitives; l'acquiescement du cabinet de La Haye à l'ouverture d'une négociation était donc déjà un succès. M. le baron Verstolck Van Soelen présenta un contre-projet, sous la date du 9 janvier, en annonçant que des instructions ultérieures seraient transmises au baron Van Zuylen Van Nyevelt à Londres. Les négociations commencées à La Haye furent donc continuées à Londres, et bientôt suspendues; il est nécessaire de nous arrêter à cet incident, qui a jeté un grand jour sur une question importante.

Par un arrêté, daté du 16 novembre 1832 et publié le 17, le gouvernement hollandais avait prescrit des mesures de représailles contre la France et la Grande-Bretagne; cet arrêté était ainsi conçu :

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