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cun digne fruit de pénitence. Ils fe déchar- CHAP. VIII. gent fur l'efficace du facrement de tout ce qu'ils feroient obligez de faire; ils le confiderent comme un fupplément à tout ce qui leur manque,& comme une difpenfe du grand commandement de l'amour. Ils fubftituent à cet amour une crainte d'une mifere éternelle, qui eft inféparable de la perfuafion que cette mifere eft réelle, & qui peut être auffi naturelle que l'amour propte.

8. Ils fe permetrent pendant leur vie tout ce qui leur plaît, parce que le remede exterieur qui expie leurs plus grands excès est tous jours préparé, & que les difpofitions qu'il exige, felon eux, ne font point au-deffus des pecheurs qui ne font pas tombez dans l'incredulité. A la mort même ils fe contentent d'un repentir, dont la convalefcence découvriroit, comme elle le fait fouvent, la fauffeté ou la foibleffe; & ils font Pinjure à J. C. de lui attribuer l'établiffement de cette indigne religion, qui laiffe les hommes dans le crime & dans l'injuftice, qui ne fert qu'à les pallier, qui les augmente même par la eertitude de l'impunité, & qui leur permer d'e'perer une juftice éternelle & une charité parfaite dans le ciel, quoiqu'ils en aient été les ennemis jufqu'au dernier moment de leur

vie.

9. Mais, fi cela étoit, faint Paul, n'auroit-il pas raifon de dire: Numquid Chriftus peccati minifter eft? » Eft-ce donc que J. C.

eft devenu le miniftre du peché? » Quoi ! nous avons efperé en croyant en lui, qu'il nous rendroit purs & faints, & qu'il nous infpireroit la haine du peché & un ardent

Gal. 2.17.

Epb. 4.v. 20.

CHAP. VIII. amour pour la juftice; & nous fommes de puis fa venue affurez, que nous pouvons de meurer pecheurs, & même jufqu'à la mort, fans aimer la juftice, & fans l'aimer lui-même. Il eft donc devenu notre complice, & le miniftre de nos iniquitez, plutôt que notre Sauveur Quod fi quarentes juftificari in Chrifto, inventi fumus & ipfi peccatores. numquid Chriftus peccati minifter eft? Mais à Dieu ne plaife que nous lui faffions cet outrage: abfit. Ce n'eft point ainfi, dit l'Apotre aux Ephefiens, que vous avez été inftruits: Ce n'eft point fous ces idées que vous avez connu J. C. Vos autem non ita didiciftis Chriftum. Il ne reffemble point à cette vaine idole, indifferente pour le vice & pour la vertu, & plus favorable même au vice qu'il excufe toujours, qu'à la vertu dont il difpenfe pendant toute la vie. Vous avez été autrement enfeignez & par lui même & par fes difciples. Sa verité n'a aucun rapport à de tels menfonges, ni à de telles fictions: Sitamen illum audiftis, & in iplo edocti eftis ficut eft veritas in Jefu. Il eft venu vous dépouillier du vieil hommme, de fes defirs, de fes fentimens, de fes actions; & vous revêtir de lui-même, de l'homme nouveau, qui porte l'image & le caractere de Dieu, & qui eft créé par lui dans une juftice & dans une fainteté véritable: Deponere vos.... veterem hominem, qui corrumpitur fecundùm defideria erroris..... Et induite novum hominem, qui fecundùm Deum creatus eft in juftitia & fanctitate veritatis.

บ.21.

2.22.

2.24.

10. Lorfque le faint Archange Gabriel vint de la part de Dieu reveler à Daniel le

tems précis de l'incarnation & de la mort de CHAP. VIII.^
J. C. il lui dit que torfque les foixante & dix
femaines myfterieufes feroient accomplies,
& après que le Saint des Saints auroit été oint
& confacré, les prévarications cefferoient;
que le peché prendroit fin; que les anciennes
iniquitez feroient expiées; & qu'une juftice
éternelle leur fuccederoit: Ut confumme- * Vt confu-
tur pravaricatio, & finem accipiat pecca- matur.
tum, & deleatur iniquitas, & adducatur Dan. 9. 24.
juftitia fempiterna, ungatur Sanctus San-
torum. Cette augufte prophetie, qui eft né-
ceffairement liée avec l'avenement & le facri-
fice de J. C. feroit étrangement obf.urcie,
fi le regne du peché fubfiftoit avec celui de
J. C. fi les prévarications continuoient éga-
lement après qu'il les a expiées, & fila ju-
ftice qu'il nous a méritée, n'étoit que pour
au lieu d'être conftante & per-

des momens, petuelle.

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CHAP. VIII.

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III. CARACTERE

De notre amour pour JESUS-CHRIST..
Il doit être ferme & perfeverant:

§. 1. La juftice peut se perdre par le crime;
mais quand elle eft véritable, elle n'eft
point fujette à de promptes chûtes, & à de.
fréquentes viciffitudes.

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ETTE juftice peut être interrompue par le crime, & elle n'eft pas un bien que nos infidelitez & nos ingratitudes ne puiffent nous enlever. L'Ecriture, la foi de l'Eglife, & une trifte experience ne nous.. permettent pas d'en douter. Mais quand cette juftice eft véritable, elle a des fondemens & des racines, & elle n'eft pas expofée à ces promtes viciffitudes, ni à ces inégalitez, qui' ne conviennent qu'à une fauffe juftice, qui n'eft point établie fur l'amour de J. C. & de fa loi, & qui en eft même fecrettement en nemie. Quoique ce précieux tréfor foit confié à des vaiffeaux de terre, faint Jean ne laiffe pas de dire, que quiconque eft né de Dieu, ne commer point de peché : Omnis qui natus eft ex Deo, peccatum non facit; parce que la femence divine, c'est-à-dire, le principe intime & fecret de la vie nouvelle demeure en lui: Quoniam femen ipfius in ee manet. Il repete la même verité dans un au

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tre lieu, & il en rend la même raison: Sci- CHAP. VIII.

mus quia omnis qui natus eft ex Deo, non peccat, fed generatio Dei confervat eum. Nous fçavons, dit-il, fcimus: nous ne parlons pas avec doute, & nous ne fondons pas fur de fimples conjectures une verité d'une fi grande importance. Quand on eft né de Dieu, on ne tombe pas dans ces fortes de pechez. qui font perdre la vie qu'on a reçûe; & le germe fpirituel qui refide en nous, protege & conferve cette vie en nous portant à la priere, à la feparation du monde, à la fuire des occafions, à l'humilité, à l'action de graces, à toutes les faintes actions capables de nourrir, & de faire croître l'être furnaturel & divin qui nous a été communiqué : Generatio Dei confervat eum.

Ibid. §. 18.

2. Tout le monde fçait ce que dit J. G. Matt. 7. 24. dans l'Evangile, & la comparaifon qu'il fait -27. de la véritable juftice fondée fur la pierres, & de la fauffe ou de l'imparfaite qui n'eft établie que fur le fable. Les rentations repréfentées par les vents impetueux & par les inondations, renverfent l'une, mais n'ébranlent pas l'autre. L'une & l'autre font éprouvées, & il eft inévitable qu'elles le foient. Mais l'une refiite à l'épreuve, & l'au ́tre y fuccombe & ce qui fait que l'une demeure ferme pendant que l'autre est vain cue, c'eft que l'une a des fondemens folides; & que l'autre n'en a pas; que l'une eft établie fur le rocher, & l'autre furla furface de la terre, ou fur le fable.

3. On fe hâte de bâtir. On éleve promte ment un édifice. On l'embellit même, & l'on penfe à lui attirer des admirateurs, pendant qu'il faudroit creufer long-tems, & tâcher

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