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CHAP. VI.» principautez & les puiffances, les a ere fées en fpectacle avec une pleine autorité en aiant triomphé par fa croix. » Le for armé, qui regnoit en paix dans fon empire, eft lui-même mis aux fers: & en fa préfence, celui qu'il a voulu s'affujettir, & qu'il a d peré de retenir dans fes prifons, lui enkere fes captifs, fes armes, & toutes les choses on il avoit mis fa confiance. Il eft enfuite lui-même montré à l'univers qu'il avoit féduit, comme un ufurpateurde la gloire de Dieu, comme le pere du menfonge, comme l'ennemi de l'homme & fon perfécuteur, comme un ef prit de tenebres, de malice & d'envie, comme ne regnant que par l'iniquité & par la concupifcence, comme étant homicide des le commencement, & comme n'étant le prince que de la mort & de ceux qui y font condamnez.

2. C'est ainfi que J. C. a montré en spee tacle le diable & fes anges, après les avoir dépouillez. C'eft ainfi qu'il les a fait connoître aux nations détrompées, & qu'il les à expofez à une publique & éternelle igno minie. C'eft ainfi que par la foiblefse d'une chair femblable à la nôtre il a triomphé de toute la puiffance des tenebres; qu'il a fait fervir fa mort d'inftrument à fa victoire, qu'il a repouffé contre le démon le trait même dont celui-ci avoit prétendu le percer; & que du haut de fa croix il a foudroié & mis en fuite les principautez & les puiffances qui avoient voulu, en lui ôtant la vie, éteindre S. Lea, ferm. fa mémoire, ou la couvrir d'ignominie.. Exal10. de Paff. tatus Chriftus Jefus in ligno, retorfit mortem in mortis autorem, & omnes principatus adverfafque virtutes, per objectionem paffbilis carnis elifit.

7.132.

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3. Les mêmes cloux qui ont percé les pieds CHAP. VE & les mains de J. C. ont cloué le diable aux pieds de la croix, comme un captif aux pieds du trophée de fon vainqueur. Toutes les bleffures que J. C. a reçues pour nous guérir, ont été des plaies mortelles contre le démon. Les ouvertures des plaies qu'il a confervées en reffufcitant, font des monumens & dès. preuves que celles de fes ennemis feront éternelles, & ne fe fermeront jamais. Et fa chair glorieufe, mais qui retient encore l'image & les veftiges d'une chair crucifiée, nous apprend que la victoire qu'il a remportée fur les puiffances des tenebres aura un effet éternel :

Clavi illi qui manus Domini pedefque trans- S. Leo. ferm foderunt, perpetuis diabolum fixêre vulneri. 10. de Paffa bus & fanctorum pœna membrorum ini- P. 132, micarum fuit interfectio poteftatum.

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4. Le diable fut ainfi attaché au même bois auquel il avoit attaché le premier homme. Il perdit la vie, comme il l'avoit fait perdre à Adam. Hly fut fufpendu, comme il l'y avoit fait fufpendre; & au lieu que la croix eft devenue pour nous la fource de nos benedictions, elle à rendu la malédiction prononcée contre le ferpent irrévocable & éternelle : cette parole, maledictus qui pendet in ligno, n'aiant deformais d'effet que contre lui.

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§. 8. Le démon revétu de l'exterieur du fer-
pent, n'avoit pas compris le fens de ce que
Dieu lui dit, quand il lui declara que
fa tête feroit écrasée par celui dont il écra-
feroit le talon. Explication de cette pro-
phetie.

1. CE ferpent, quoique le plus fin de tous

Genef. 3.15..

כג

CHAP. VI. les animaux, & le plus profond en malice, n'avoit rien compris dans cette celebre prophétie qui nous promettoit un Liberateur qui écraferoit la tête du ferpent, pendant que le ferpent ne penferoit qu'à lui écraser le taIon. Je mettrai, lui avoit dit le Seigneur, » une inimitié entre toi & la femine, entre » ta femence & la fienne; & celui qui naitra » d'elle t'écrafera la tête, & toi tu lui * écra » feras le talon. » Mais il étoit digne de la fageffe de Dieu que la fineffe même & la malice du ferpent le portaffent à executer une prophétie dont le myftere lui étoit caché, & qu'en regardant la mort de J. C. comme fon propre triomphe, il vint lui-même mettre fa tête fous le talon qui la devoit écrafer. Car cette partie qui dans le corps humain est la. plus baffe & la plus voifine de la terre, marquoit dans J. C. fon humanité foible & paffible, voifine de la terre, & femblable à la chair des pecheurs. Le ferpent trompé par cette reffemblance, & par la mortalité d'une chair fur laquelle il lui étoir permis d'exercer tout fon pouvoir, ne penfa qu'à l'écra fer, & crut avoir tout fait en l'écrasant.

2. Mais il ne fçavoit pas que de toutes les parties de l'homme la plus redoutable à la tête du ferpent eft le talon, & que plus ce talon eft voifin de la terre, plus le ferpent en approche plus il a la temerité de fe mettre immédiatement entre ce talon & la terre, plus fa perte eft affurée. Il crut avoir brifé ce.ta-lon, parce qu'il avoit caufé la mort à une

Le terme hebreu qui | le-même fens, comme fignifie conteret caput, eft l'oppofition même entie repeté pour fignifier, con- la terre & le talon le detexet.calcaneum,. 8 ila mande,

Dieu;

CHAP. VI

chair morteile. Mais cette chair mortelle étoit unie à la réfurrection & à la vie. Elle étoit l'hoftie qui reconcilioit les hommes avec elle étoit le facrifice d'expiation qui effaçoit leurs pechez par fon fang, elle étoit le prix de leur rançon & de leur liberté ; elle aboliffoit l'ancien titre qui les avoit affervis au démon, & le honteux contrat par lequel il les avoit achetez, en les détachant par une indigne fourberie de leur veritable maître, & elle les faifoit rentrer fous l'aimable & glorieux empire de celui qui étoit en même-tems leur créateur & leur liberateur : Evacuatum eft, dit faint Leon, generale Serm. 10. de illud venditionis noftra & lethale chirogra- Paff. p. 1355 phum, & pactum captivitatis injus tranfiit

redemptoris.

9. Quoique le démon ait eu la tête écra fée par JESUS-CHRIST mort fur la croix, il vit toujours pour s'affujettir ceux qui n'ont pas de foi, ou qui n'ont qu'une foi fterile en la vertu de la croix. Pour fe défendre contre cette ennemi, il faut fe fervir des mêmes armes avec lesquels JESUSCHRIST l'a vaincu..

1. MAIS prenons garde à ne nous pas laif fer tromper nous-mêmes par l'artifice du ferpent, qui nous laiffe croire, autant que nous le voulons, que J. C. lui a écrasé la tête en mourant, pour nous endormir par une fauffe Lecurité, & pour nous ôter la penfée qu'il foit encore plein de vie, après qu il a été foulé aux pieds par celui qui l'a vaincu. Car il n'en eft pas de cet ancien ferpent, comme de Ceux qui ne font que fa figure, qui n'ont plus

CHAP. VI. de vie quand on leur a écrasé la tête, & dont

on peut s'approcher impunément, quand ils ont été réduits à cet état. Le dragon qui nous avoit dévorez, n'a perdu fa vie & fa force que par rapport à J. C. & à ceux qui lui font unis. Il demeure le maître de tout ce qui eft incredule & & impénitent. Il craint la croix de J. C. mais non ceux qui en font les ennemis, ou qui n'en retiennent que le figne exterieur, pendant qu'ils renoncent en fecret à fon efficace & à fa vertu. Il a été vaincu par l'obéiffance, par l'humilité, par la patience, & par la charité de J. C. mus il triomphe de tous ceux qui efperent le vaincre par d'autres armes. Il vit, en un mot, dans tous ceux qui confervent fon efprit, & qui fe reglent par fes maximes; & quoiqu'il foit chaffe de l'empire de J. C. il demeure encore le tyran de ceux qui ne croient pas, ou qui n'ont qu'une foi fterile, ou qui retournent à lui comme des déferteurs & des transfuges.

2. Tout cela eft une fuite naturelle & neceffaire de la victoire de J. C. car elle ne devroit pas lui être uniquement attribuée, fi l'on pouvoit fans lui vaincre le démon, & fi l'on pouvoit le furmonter fans emploier les mêmes armes que lui. Dès que nous lui fommes unis, toutes puiffances des tenebres fuient devant nous, & nous cedent: mais dés que nous nous en féparons, & que nous fortons de cet afyle, elles nous environnent & nous affiegent. Et lors même que nous fommes attentifs à ne pas quitter le puiffant protecteur qui nous couvre, nous ne pouvons pas éviter que nos ennemis ne lancent beaucoup de traits contre nous, dont il eft dif

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