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étroite, & ils vous demanderont un lieu CHAP. VII. plus étendu où ils puiffent habiter : & vousmême vous direz dans votre cœur, qui eft donc celui qui m'a rendue la mere de tant d'enfans, moi qui étois fterile, & qui estce qui les a nourris ? ou étoient-ils donc pendant que je paroiffois feule & abandonnée ? [ Mais] voici ce que dit le Seigneur, J'étendrai ma main vers les Gentils, & je leverai à leurs yeux mon étendart, & ils vous apporteront vos fils dans leurs bras, & vos filles fur leurs épaules. Ainfi cette derniere reAexion ôte toute efperance de pouvoir réi foudre par les conjectures qui ont été propo= fées la difficulté dont il s'agit, & qui confifte à concilier la manifestation de la vocation des Gentils faite aux anciens Prophetes, avec le fecret qui leur étoit inconnu felon faint Paul.

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§. 3. On concilie le fecret de la vocation
des Gentils, avec la manifeftation qui en
a été faite aux Prophetes: cette concilia-
tion eft fondée fur les paroles de l'Apôtre.

1. POUR allier ces deux chofes, la ma-
nifeftation & le fecret, ce qui avoit été re-
velé aux Prophetes, & ce qui leur étoit ca-
ché
par rapport à la vocation des Gentils, il
ne faut point chercher la lumiere hors de
faint Paul, ni confulter un autre endroit que
celui de l'Epître aux Ephefiens, où il expli-
que lui-même, quoiqu'en termes très courts,
en quoi confifte le myftere dont les anciens
Propheres n'avoient pas eu la revelation. Cet
endroit eft celui que j'ai propofé au commen-
cement de ce chapitre, & que je ne puis évi-

Partie 11.

L

CHAP. Vil. ter de repeter ici, puifque c'est le lieu de l'expliquer.

-

Maintenant [ Gentils ] vous êtes en J. C. vous, qui êtiez autrefois éloignez de Dieu, vous êtes devenus proches de lui par le fang de J. C. car c'eft lui qui eft votre paix ; qui des deux peuples n'en a fait qu'un; qui a rompu en fa chair la muraille de féparation; l'inimitié qui les divifoit ; & qui a aboli la loi dont les commandemens consistoient en decrets ou fimples ordonnances) afin de former en foi-même un feul homme nouveau de ces deux peuples, en mettant la paix entr'eux, & que les aiant réunis en un feul corps, il les reconciliat avec Dieu par la croix, aiant détruit par elle l'inimitié qui étoit entr'eux.

2. Dans ce peu de paroles faint Paul nous enfeigne quatre chofes très importantes. La premiere, qu'il y avoit une inimitié entre le Juif & le Gentil, & que tant que cette inimitié auroit fubfifté, le Gentil étoit exclu des promeffes & regardé comme étranger. La feconde, que la loi par fes ordonnances mettoit un nouvel obftacle à la vocation des Gentils, & qu'il falloit que cette loi fût abolie avant qu'ils fuffent admis à l'efperance du falut. La troifiéme, que la chair de J. C. metroit elle-même un obftacle invincible à leur reconciliation avec Dieu avant qu'elle fût facrifiée fur la croix & féparée de fon ame par une violence qui tînt lieu de deftruction & de déchirement. La quatrième, que ce n'éroit qu'après que la chair de J. C. qui étoit la muraille de féparation, auroit été immolée fur la croix, que le nouvel homme pouvoit être formé, & qu'il n'y avoit que le nouvel homme qui pût faire caffer l'inimitié

& l'oppofition entre le Juif & le Gentil, par- CHAP. VII. ce que le nouvel homme n'étoit autre que J. C. reffufcité, qui eft tontes chofes en tous, & qui a réduit à fon unité toutes les diftinctions précedentes.

3. C'eft vifiblement par rapport à cette do&trine fi fublime, mais abregée, que faint Paul dit dans le chapitre fuivant, » que Dieu lui a découvert par révelation, le fecret &

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le mystere dont je viens, dit-il aux Ephe» fiens, de vous écrire en peu de paroles, » & vous pourrez connoître par la lecture » que vous en ferez, quelle eft l'intelligence » que j'ai du myftere de J. C. qui n'a point été découvert aux enfans des hommes dans les autres tems, comme il eft revelé mainle Saint Efprit, à fes faints Apôtres, & aux Prophetes qui eft que les » Gentils font appellez au même heritage » que les Juifs.

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» tenant par

L'Apôtre avoit découvert fon fecret aux Ephefiens, & il efperoit qu'ils connoîtroient par-là quelle étoit fon intelligence dans le myftere de J. C. Or il n'y a que les paroles que j'ai rapportées, & qui font la matiere dont je dois traiter dans ce chapitre, où l'on puiffe trouver la manifeftation du fecret revelé à faint Paul. Il est donc évident que la manifestation de ce fecret y eft contenuë, & & que nous l'y aurions toujours vûe, fi nous avions eu autant de lumiere & d'intelligence que les Ephefiens pour connoître la profonde fageffe de faint Paul dans le mystere de J. C.

CHAP. VII.

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§. 4. L'execution des promeffes que Dieu avoit faites à Abraham & à fa pofterité feule i le choix qu'il avoit fait de cette pofterité préferablement à tous les autres peuples, pour lui rendre le culte qui lui eft dû, metto ent entre le fuif & le Gentil une efpece d'appofition fondée fur les decrets libres de Dieu.

1. MAIS il eft pardonnable à des hommes plus éloignez de la fource, & moins fpirituels que les Ephefiens, de ne pas voir tout d'un coup ce que l'Apôtre a renfermé dans des paroles vives & ferrées, où les veritez parciffent confondues parce qu'elles font fort unies, & où elles font obfcurcies à notre égard par un abregé trop court pour notre lenteur. Il faut les diftinguer pour remedier au danger de les confondre, & les traiter avec un peu d'étendue pour éviter l'obscurité. Je commence par la premiere des quatre chofes propofées qui eft l'inimitié entre le Juif & le

Gentil.

2. Si cette inimitié n'avoit eu de fondement que dans l'injufte haine des Juifs contre les Gentils & dans une jaloufie criminelle, qui auroit porté les uns à envier aux autres la connoiffance du falut, une telle inimitié bien loin d'être un obftacle à l égard des nations, n'auroit fervi qu'à éloigner le Juif, & à rapprocher le Gentil. Mais il s'agit d'une inimitié indépendante des paffions des hom& fondée fur les decrets libres de Dieu, qui mettoient une espece d'oppofition entre le peuple Juif & les autres peuples, & qui en appellant le premier excluoient tous les au

mes,

tres,

3. Il faut pour le bien entendre, remonter jufqu'à la vocation d'Abraham; non jusqu'à la premiere, où Dieu fe contenta de lui commander de fortir de fon pays, fans lui marquer le lieu qu'il lui deftinoit, & où Abraham lui obéit, fans fçavoir précisément où il devoit aller: Nefciens quo iret: mais à Heb. 11.8. la feconde vocation où Dieu lui marque

d'une

maniere diftincte, que c'étoit dans la terre

de Chanaan qu'il avoit deffein de l'établir. Genef. 12. 5. Quand il y fut arrivé, Dieu lui dit qu'il la donneroit à fa pofterité: Semini tuo dabo ter- Genef. 12. 7. ram hanc : Dans une autre apparition Dicu ajouta qu'il la lui donneroit à lui même, auffi-bien qu'à fa pofterité, & que ce feroit pour toujours Terram quam confpicis tibi Genef. 13.17. dabo & femini tuo ufque in fempiternum: & il lui commanda d'en prendre poffeffion en la parcourant dans fa longueur & dans fa largeur. Sure & perambula terram in longitu- Genef. 13.17. dine & in latitudine fua: quia tibi daturus fum eam. Enfin dans une autre apparition il lui marqua diftinctement les bornes du pays qu'il lui deftinoit pour heritage; & ces bornes font d'un côté le fleuve qui fepare la Palestine de l'Egypte, & de l'autre l'Euphra

te à fluvio Egypti ufque ad fluvium ma- Genef. 13. 19+ gnum Euphratem.

4. Il ne s'agit pas ici du fens figuré & fpirituel qu'on doit donner à la terre promife à Abraham, & qui devoit être fon heritage & celui de fa veritable pofterité. Ce fens qui a été expliqué par faint Paul dans l'Epître aux Hebreux, ne peut avoir de Heb. 11. 9. lieu qu'en fuppofant la venue de J. C. & l'é- & 10. tabliffement de la nouvelle alliance fondée fur

Ja promeffe des biens futurs & de l'heritage

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