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206

330.5
JO

ser.5,0.10 JOURNAL

DES

ÉCONOMISTES

LA CONCURRENCE

ENTRE LES

COMPAGNIES D'ASSURANCES SUR LA VIE AMÉRICAINES
ET LES COMPAGNIES FRANÇAISES

3

On sait que les Compagnies françaises d'assurances sur la vie se sont servies jusqu'ici, pour la plupart, de tables de mortalité établies à une époque déjà fort ancienne. Celle de Deparcieux remonte à la moitié du siècle dernier; quant à celle de Duvillard, elle est des premières années de notre siècle. Il y en avait bien une autre, plus récente, celle de Demontferrand, mais les Compagnies ne s'en sont que peu ou point servies.

En Angleterre, depuis longtemps, aux États-Unis, les tables de mortalité ont été modifiées de façon à être plus en harmonie avec les règles imposées par la pratique et l'expérience.

Récemment, quatre de nos principales Compagnies ont pris l'initiative d'apporter des modifications à leurs anciens tableaux. Elles s'étaient tenues trop éloignées des coefficients de mortalité réelle, car, avec les progrès de la science médicale, une observance mieux entendue des règles de l'hygiène, il y a eu augmentation de la vie probable à tous les âges, accroissement aussi de la vie moyenne dans l'ensemble de la population.

On se trouvait donc dans une sorte d'état d'infériorité vis-à-vis des Compagnies étrangères (des Compagnies américaines surtout) qui, elles, comme nous venons de le dire, avaient depuis longtemps procédé à des modifications reconnues nécessaires.

La Générale, la Nationale, le Phénix et l'Union, autrement dit les quatre Compagnies formant le comité, n'ont pas voulu demeurer en reste avec leurs émules. Elles ont puisé dans leurs archives et

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récolté assez de matériaux et d'éléments pour établir de nouvelles tables qui ne devaient pas tarder à recevoir l'approbation des autorités compétentes auxquelles elles ont été soumises.

Ces tables ont du reste figuré à l'Exposition de 1889, section de l'économie sociale et ont même été l'objet, croyons-nous, d'une haute récompense, car elles complétaient une partie des travaux de nos statistiques officielles. Il y a deux ans, elles ont même été encore revues en leur ensemble. Il ne restait donc, avec l'assentiment des Compagnies, qu'à les mettre en application. Mais c'est ici qu'ont commence les difficultés.

En effet, si l'adoption des nouvelles tabies de mortalité semblait ne pas devoir soulever beaucoup de discussions, il ne pouvait en être de même lorsqu'il s'agirait de fixer le taux d'intérêt à employer pour le calcul des primes.

Les tarifs actuels des Compagnies sont basés, on le sait, sur le taux de 4 0/0. Or, ce taux ne peut plus ètre obtenu que d'une façon exceptionnelle et pour ainsi dire anormale. Il devient très difficile de le maintenir sans paralyser dans leur fonctionnement les rouages de la machine administrative et sans porter aussi atteinte, en quelque sorte, au crédit même des Compagnies.

Sur ce point, aucun désaccord. Les divergences d'opinion ont apparu dans le choix du taux qu'on pourrait lui substituer. C'est là, il faut bien le dire, le nœud de la question, la difficulté sérieuse à résoudre, affaire bien plus importante que l'adoption de tables nouvelles de mortalité. Car si cette dernière mesure a pour but d'obtenir une répartition meilleure, plus équitable, entre tous les âges, des primes et des frais de « chargement », l'abaissement du taux de l'intérêt ne peut que produire une élévation correspondante de la prime.

Il est bien évident que, déjà, le public trouve les primes d'assurances par trop élevées; si on les élève encore, il est à craindre que la production ne s'en ressente, et même que les opérations d'assurances n'en reçoivent un coup fatal. Dans ces conditions, on le comprend, le problème à résoudre se complique singulièrement.

Cela suffit à expliquer les hésitations, les craintes et, pour tout dire, les tâtonnements et les lenteurs apportés à ce travail de revision.

D'autre part, on ne peut maintenir le statu quo sans s'exposer aux difficultés que nous signalions tout à l'heure. Les Compagnies, avec leurs tarifs actuels, obligées de contenter à la fois et leurs actionnaires et leurs assurés, ne savent déjà plus à quelles mesures s'arrêter. La participation aux bénéfices donne des résultats de plus en

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