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fait tous leurs efforts pour en déposter l'ennemi. Le maréchal Soult, avec trois divisions, devait attaquer le centre, et toute la garde impériale, en réserve, aurait frappé les derniers coups et décidé la victoire.

Les marches de chacun de ces corps d'armée au-delà de l'Ens, furent réglées d'une manière relative à l'exécution de ce plan; et d'abord le prince Murat poursuivit vivement, avec la cavalerie légère et le corps de grenadiers d'Oudinot, l'arrière-garde qui couvrait la retraite de l'armée russe sur la chaussée de Vienne. C'était ce même corps autrichien de Kienmayer, qu'il avait toujours poussé devant lui, depuis le passage de l'Inn. Mais après avoir passé le village de Stremberg, cette arrière-garde se replia sur un gros corps d'infanterie russe en position sur les hauteurs d'Amstetten, sous les ordres du prince Bagration. La position était forte; la cavalerie russe occupait la route qui était très-large dans cet endroit, et l'infanterie était à droite et à gauche avantageusement postée dans des bois de sapin. Après quelques char

ges que la cavalerie russe, bien appuyée sur les flancs, soutint avec fermeté, le prince Murat fit avancer la division de grenadiers; le général Oudinot forma ses bataillons en colonne, et malgré le feu meurtrier des Russes, il fit charger sur divers points à la baïonnette, pénétra dans les bois, et déposta cette infanterie qui se retira en désordre, laissant quatre cents morts ou blessés sur le champ de bataille, et autant de prisonniers. Les régimens de hussards (9° et 10°), qui poursuivirent l'ennemi au-delà d'Amstetten, ramenèrent plus de mille prisonniers.

Dans ce combat, où l'infanterie française et l'infanterie russe s'abordèrent corps à corps, les grenadiers d'Oudinot montrèrent la plus grande intrépidité; les Russes, un courage féroce: blessés, mutilés, ils combattaient avec fureur, jusqu'à ce qu'on les eût désarmés; les prisonniers même attaquaient leur escorte. Un canonnier français donna un exemple de fermeté très-remarquable. Un des généraux russes, profitant d'un moment d'avantage, chargea sur la chaussée à la tête

d'un gros de cavalerie, et s'engagea jusqu'à sabrer les canonniers qui servaient une pièce tirant à mitraille : l'un d'entre eux blessé, mais inébranlable à son poste, mit le feu à la pièce déjà entourée, renversa le général, presque tout le peloton qui le suivait, et rompit la colonne.

L'échec d'Amstetten accéléra la retraite; le prince Murat passa la rivière d'Ips, dont les ponts détruits furent promptement réparés, et arriva le 7 novembre avec ses premières avant-gardes jusque sous les murs de l'abbaye de Moelk, d'où l'empereur d'Autriche venait de partir.

L'obstination des Russes à défendre la position d'Amstetten, affermit l'empereur Napoléon dans l'opinion que le général Kutusow était décidé à recevoir la bataille à Saint-Poelten. Les divisions du maréchal Soult suivaient tête sur queue les troupes du prince Murat et du maréchal Lannes, et elles étaient de même suivies par toute la garde impériale. Ainsi de ce côté, sur la chaussée de Vienne, ces quatre corps, formant une

seule colonne, et n'ayant plus d'obstacle à franchir, étaient en mesure de se déployer devant la position de Saint-Poelten. Il n'en était pas de même pour ceux qui, destinés à tourner la gauche de la position, devaient suivre le chemin des montagnes, et déboucher par Annaberg et Lilienfeld. Non-seulement ce chemin était plus long, à cause des détours occasionnés par les arêtes de la chaîne de montagnes qui sépare l'Autriche de la Styrie; mais encore depuis Waydoffen, il était presque impraticable pour l'artillerie. Le corps du maréchal Davoust, qui s'y était engagé le premier, et qui devait y être immédiatement suivi par ceux du général Marmont et du maréchal Bernadotte, eut à surmonter d'aussi grandes difficultés qu'une armée en eût jamais rencontré aux divers passages des Alpes. L'ardeur et la constance des soldats furent admirables dans ces marches de douze et quinze lieues, qui se prolon geaient bien avant dans la nuit. On les voyait au milieu des glaces, à travers les torrens, s'exciter à l'envi, s'animer par des cris et

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par des chants de guerre, en travaillant à élargir des sentiers trop étroits pour l'artillerie.

Aussitôt que les difficultés de cette route furent connues de l'empereur Napoléon, il se hâta de changer la direction des corps d'armée de Marmont et de Bernadotte. Marmont, qui venait d'arriver à Steyer, au lieu de suivre le mouvement par Seitenstetten et Waydhoffen, reçut ordre de porter son corps à grandes marches sur Léoben, de prendre et culbuter tout ce qu'il aurait devant lui, en se faisant précéder par une avant-garde qui pousserait très-loin ses reconnaissances. Arrivé à Léoben, il devait établir des postes de communication sur la route de SaintPoelten par Mariazell. On lui recommandait aussi de se tenir toujours en mesure de rejoindre la droite de l'armée, pour prendre part, s'il y avait lieu, à la bataille générale. Ce mouvement avait le double but de tourner plus au loin la gauche de l'ennemi, qu'on supposait toujours concentré à SaintPoelten, et de s'établir plus en force sur la

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