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par l'humble disciple qu'il s'était donné. Cette circonstance intervertit les rôles, mais elle ne fit rien perdre à Thomas de son humilité première. Une dissertation de Thomas étant tombée aux mains d'Albert vint confirmer les pressentiments

que Thomas, âgé de dix-neuf ans, venait de soutenir au milieu des témoignages d'admiration d'un nombreux auditoire, le maître, ne pouvant retenir l'excès de sa joie, s'écria, avec un accent prophétique : « Nous l'appelons le bœuf muet, mais il poussera dans la doctrine un tel mugissement que le monde en retentira. « (Nos vocamus istum bovem mutum, sed ipse talem dabit in doctrinâ mugitum, quod in tolo mundo sonabit.) Ce fut vers ce même temps, au rapport des historiens, que le docteur angélique composa son Traité de la morale d'Aristote.

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Témoins de ses étonnants progrès, les Pères du chapitre général tenu à Cologne en 1245 décidèrent que le maître et l'élève iraient à Paris, le premier pour prendre le degré de docteur et remplir l'une des deux chaires que l'ordre de

ereur honore la maison d'Aquin ; elle multiplie | sa grande surprise, tiré de peine et d'embarras s caresses, joint les larmes aux prières, et a douleur de voir échouer toutes ses tentatives evant l'attitude calme et modeste du jeune ovice. Offensée de tant de résistance, elle donne que son fils soit étroitement renfermé; n lui donne des gardes, il ne lui est plus per-favorables de ce docteur. A l'issue d'un examen is que de s'entretenir avec ses sœurs, qui sont pécialement chargées du soin de vaincre ses ésolutions. Là, les rôles changent bientôt, celui u'on voulait convertir voit se modifier à sa voix es sentiments des jeunes filles appelées à le déourner de la vie religieuse. Il devient leur diecteur de conscience, et leur communique une oi, un amour de la doctrine évangélique qui ne loivent jamais s'effacer. D'un autre côté, il eut combattre vivement pour résister aux procé lés blessants dont usaient ses frères. Ne pouvant lui ôter de force son habit de religieux, on e mit en lambeaux; on ne craignit pas même l'exposer sa jeunesse à la plus dangereuse des séductions. Une courtisane belle et joyeuse fut amenée dans la chambre du jeune religieux; elle mit tout en usage pour corrompre l'innocence de Thomas d'Aquin. Mais lui, ne pou-Saint-Dominique occupait dans cette université,. vant ni fuir ni éviter la vue d'un objet qui ne cessait de le poursuivre, arma sa main d'un tison enflammé, et força ainsi cette malheureuse à se retirer avec précipitation. » — Au bout d'une année, les supérieurs de l'ordre de Saint-Dominique crurent devoir s'adresser au pape et à l'empereur pour qu'il fût mis un terme aux ri-dait que son élève l'accompagnerait pour le gueurs exercées contre leur novice. Thomas suppléer dans son enseignement. Lorsque, quafut en conséquence rendu aux dominicains de tre ans plus tard, Thomas revint à Paris pour y Naples, et le pape Innocent IV, l'ayant examiné, professer et pour prendre ses degrés à son unilui-même confirma sa profession.— Enlevé pour versité, il avait déjà donné à l'Allemagne la plus toujours aux obsessions de sa famille, Thomas haute idée de son génie, « et, dit un ancien aud'Aquin fut, en 1244, envoyé à Cologne pour teur, égalé les mérités d'Albert le Grand. » — Ce étudier sous Albert le Grand la philosophie et la fut à saint Thomas que son ordre confia, en 1256, théologie. Ce qui mérite d'être remarqué, c'est le soin de défendre devant le pape Alexandre IV que la modestie et le recueillement extrème de les ordres mendiants, attaqués par Guillaume de Thomas d'Aquin, son amour pour la retraite et Saint-Amour, docteur de Sorbonne et chanoine le silence, le firent regarder tout d'abord par de Beauvais, dans son livre intitulé les Périls ses condisciples comme un esprit assez médio- des derniers temps. C'est à tort qu'on a placé cre. C'est ainsi qu'il leur arriva de l'appeler le le voyage de saint Thomas en Italie sous le ponBœuf muet, ou, comme il est porté dans le tificat de Clément IV. Ce ne fut pas en 125, procès de sa canonisation, le Grand bœuf de mais en 1257, c'est-à-dire après avoir retardé de Sicile (Bos magnus Siciliæ). Un jeune religieux, deux ans sa réception, par suite des différends attribuant au défaut de pénétration et de moyens qui divisaient les docteurs séculiers et les régule silence qu'il gardait habituellement, s'offrit liers, que l'université de Paris conféra le titre pour lui servir de répétiteur. L'offre fut accep- de docteur à Thomas d'Aquin. Pendant qu'il tée avec la plus parfaite humilité; cela toutefois professait à Paris en qualité de docteur, il pune devait durer qu'un temps. Le jeune profes-blia la Somme de la foi catholique contre les seur, se trouvant un jour arrêté par les difficultés Gentils. On le vit, sous le pontificat de Clédont il cherchait vainement la solution, se vit, à ment IV (1265), refuser l'archevêché de Naples.

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l'autre pour y continuer ses études de théologie dans le collège de Saint-Jacques, maison soumise à la règle des frères prêcheurs. Dès 1248, Thomas achevait ses études, et le chapitre général de l'ordre, en désignant Albert pour remplir la première chaire dans l'école de Cologne, déci

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cette parole justement célèbre : Tot fecit miracula quot scripsit articulos (Il a fait autant de miracles qu'il a écrit d'articles et décidé de questions). Le même pontife a dit de Thomas d'Aquin en plein consistoire : « Lui seul a répandu plus de lumières dans l'Église que tous les autres savants. » Aussi le pape Pie V crut-il devoir, en 1567, déclarer Thomas d'Aquin docteur de l'Église, et, depuis Jean XXII jusqu'à Clément XII, tous les pontifes ont rendu d'éclatants témoignages à la doctrine de l'ange de l'école que leurs bulles ne séparent pas de saint Augustin. Pour se faire une idée du mérite philosophique des œuvres de saint Thomas, l'on peut consulter avec fruit le sentiment d'Erasme. «Dans mon opinion, s'écrie-t-il, il n'existe point de théologien qui puisse entrer en comparaison avec Thomas d'Aquin, soit pour le soin qu'il met à ses ouvrages, soit pour sa rectitude d'esprit, soit enfin pour la solidité de sa doctrine. » C'est là sans doute ce qui portait Albert le Grand à proclamer son illustre disciple la fleur et l'ornement du monde chrétien. - Les ouvrages de Thomas d'Aquin, dont l'édition la plus estimée remonte à 1570, et comprend dixsept volumes in-fol., sont: 1o un commentaire philosophique sur presque tous les livres d'Aristote, dont la méthode était en grand honneur au XIIe siècle. On remarque dans l'argumentation du docteur angélique un asservissement sans doute inévitable, mais un peu trop rigoureux à la scolastique de son temps. Ces commentaires ne se rapportent qu'à cinquante-deux livres des écrits du philosophe grec. 2o Des œuvres théologiques comprenant la Somme de la foi catholique contre les Gentils, traité en quatre livres, et qui paraît avoir le même objet que la Cité de Dieu. Thomas d'Aquin était à peine

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Le pape étant mort en 1268, Thomas d'Aquin, | qui était resté quelques années auprès de lui, revint à Paris. Il entretint des relations suivies avec saint Louis. Il traita durant ces quelques années les diverses questions sur l'âme, sur la puissance de Dieu, etc., qui composent le huitième tome de ses œuvres. Grégoire X ayant convoqué le second concile général de Lyon pour le 1er mai 1274, Thomas d'Aquin, qui était regardé comme l'oracle de son siècle, reçut un bref du pape qui l'invitait à s'y rendre et à y apporter le traité qu'il avait autrefois composé contre les erreurs des Grecs. Le saint docteur, sentant sa fin approcher, partit de Naples, ne songeant pas même à s'excuser sur l'état de sa santé. Il se mit en chemin, et trouvant sur sa route le château de Magenza, il voulut dire un dernier adieu à sa nièce, Françoise d'Aquin. La fièvre, qui augmentait, le força de quitter cet asile, son vœu le plus sincère ayant toujours été de finir ses jours dans une maison de son ordre. Toutefois, et ne pouvant remplir ses désirs, il s'arrêta dans l'abbaye de Fosse-Neuve, célèbre communauté de l'ordre de Citeaux, dans le diocèse de Terracine. Là, après avoir édifié les religieux durant sa courte maladie par ses touchantes professions de foi et par des exposés pleins d'âme et d'onction, il expira le 7 mars 1274 dans sa quarante-huitième année. - Lorsqu'on lit avec attention les écrits de Thomas d'Aquin, on est frappé de la parfaite conformité de vues qui existe entre sa doctrine et celle d'Augustin. On dirait, à voir ces travaux renfermés souvent dans un même cadre, ces vérités successivement développées et mises en thèse, que le religieux de Saint-Dominique ne fait que continuer et compléter l'évêque d'Hippone. Cela est plus particulièrement frappant dans la Somme contre les Gentils, ouvrage qui rap-âgé de vingt-cinq ans lorsqu'il publia son prepelle par sa facture, son exposition nette et for tement accentuée, souvent même par le tour de l'argumentation, l'admirable discours de la Cité | de Dieu. L'on s'explique aisément après cela que les écrivains ecclésiastiques aient établi une sorte de parallèle entre ces deux hommes si dis-Saint-Dominique laissa inachevée une Somme tingués tous deux par la puissance de leur es- de théologie, ouvrage en trois parties, et que dut prit, par de grands travaux et par les éminents compléter un de ses disciples, le célèbre Pierre services rendus à la catholicité. Comme saint d'Auvergne. Cette œuvre immense, et qui conAugustin, le docteur angélique réduit tous les tient plus de trois mille articles, peut être condevoirs du chrétien à l'amour de Dieu; la cha- sidérée comme la plus belle et la plus riche protité, tel est, suivant lui, l'esprit de la nouvelle duction du génie de Thomas d'Aquin; c'est, à loi. Le pape Jean XXII rendit un rare témoi-proprement parler, le catéchisme de la foi cagnage en faveur de la doctrine de saint Thomas, lorsque, durant le procès de la canonisation de ce docteur, lequel eut lieu en 1525, il prononça

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mier ouvrage théologique; c'est une explication des quatre livres du maître des sentences, Pierre Lombard, évêque de Paris. Ce texte était alors regardé comme renfermant un grand nombre de difficultés insolubles. Le religieux de

tholique. La Somme de théologie était dès le XVIe siècle en une telle estime dans l'Église, qu'au concile de Trente elle fut placée sur une

table à côté de la Bible comme le plus sûr commentaire du texte sacré. Les autres écrits de saint Thomas comprennent, indépendamment d'un commentaire fort estimé sur l'Écriture sainte, plusieurs traités ou opuscules, parmi lesquels on distingue particulièrement une réfutation des erreurs d'Averrhoès, philosophe arabe, suivant lequel tous les hommes n'ont qu'un seul esprit; et le traité souvent cité du Gouvernement des princes. La Somme de théologie a été commentée par le cardinal Cajétan, et imprimée à Lyon en 1541. Il existe deux traductions de cette somme en français par Maraudé et Hauteville. La restitution du corps et du chef de saint Thomas aux dominicains de Toulouse eut lieu sous le pontificat d'Urbain V. La translation de ces restes précieux fut effectuée en grande pompe l'an 1369, c'est-à-dire 46 ans après la canonisation du docteur angélique. Jean XXII, qui proclama la sainteté de Thomas d'Aquin, est, avec Benoît XIII, un des quatorze papes qui ne firent point difficulté de placer Thomas d'Aquin à côté des docteurs de l'Église les plus éminents, saint Grégoire, saint Ambroise, saint Augustin et saint Jérôme. Il existe une Vie du docteur angélique fort estimée, et qui fut publiée en 1737 par le père Turoy de l'ordre des dominicains. P. Coq.

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que son Épître au peuple et son Ode sur le temps semblèrent lui assurer pendant les années suivantes le monopole des couronnes académiques. Cependant tous ces écrits, à l'exception du dernier, paraissent aujourd'hui assez peu dignes des louanges qu'on leur décerna à leur apparition. Sans doute la nouveauté des concours et l'espèce de vie qu'ils rendirent au corps académique, privé depuis longtemps de toute initiative un peu remarquable, ne contribuèrent pas médiocrement à en assurer le succès. C'est surtout dans ces premiers panégyriques que se retrouvent, plus que dans tous les autres, les défauts particuliers au talent de Thomas, des idées fausses ou stériles cachées sous un luxe de phrases parasites, une profondeur affectée qui n'est qu'une pauvreté pompeuse, un style sententieux, rédondant, qui veut être majestueux et qui n'est que guindé, enfin ce style que Voltaire appelait méchamment du gali-Thomas au lieu de galimatias. Tous les Éloges de Thomas ne justifient pas heureusement la plaisanterie de Voltaire; ceux de Descartes, du dauphin, et surtout celui de Marc-Aurèle, l'ont placé parmi les bons prosateurs du XVIIIe siècle : il y a même dans ce dernier quelque chose de plus à louer qu'un style bien soutenu, exempt d'enflure et d'affectation; on y doit reconnaître certains traits vigoureux empreints d'une véritable éloquence, et qui atteignent presque le sublime. Le genre adopté par Thomas, genre longtemps exploité et tombé maintenant en désuétude, du moins quant à la forme, rentrait parfaitement dans les habitudes de son talent, toujours un peu professoral, académique, et assujetti aux règles de l'école alors même qu'il se sent le mieux inspiré. Son THOMAS (ANTOINE - LEONARD), naquit à Cler- Essai sur les éloges prouve combien il avait mont-Ferrand, le 1er octobre 1732. Après avoir étudié la matière à fond; les préceptes qu'il y fait de brillantes études à Paris, il entra chez développe sont bien tracés, et c'est sans conteste un procureur pour suivre la carrière du bar- le meilleur ouvrage que nous ayons sur ce reau à laquelle sa famille le destinait. Mais, dé-genre d'amplification qu'on doit regarder autourné bientôt par son goût des lettres de cette profession, il renonça à la brillante perspective qu'elle lui offrait pour remplir la place de professeur de 6 au collège de Beauvais, où déjà l'un de ses frères l'avait précédé. L'obscurité de ces humbles fonctions lui permit de pousser plus avant ses premières études, et de travailler à quelques ouvrages de littérature qui le firent distinguer. L'établissement des concours vint ouvrir une issue favorable à la nature de son mérite son Eloge du maréchal de Saxe lui valut le prix en 1759, et ceux de d'Aguesseau, de Duguay-Trouin, de Sully, de Descartes, ainsi

THOMAS BECKET, plus connu sous le nom de saint Thomas de Cantorbéry, archevêque de cette ville et primat d'Angleterre, né en 1119 et mort en 1170. Voy. BECKET (Thomas).

THOMAS A KEMPIS, chanoine régulier du mont Sainte-Aguès, près de Swoll et de Cologne, né en 1588 à Kempen, dans la Prusse rhénane, mort en 1471. Plusieurs critiques lui ont attribué l'Imitation de Jésus-Christ.

jourd'hui comme un exercice de style. Son Essai sur les femmes laisse plus à désirer; malgré de fort bonnes choses, et qui ont trait directement au plan choisi par l'auteur, le cadre manque de proportions, et se prète à une foule de discussions spirituelles, mais étrangères pour la plupart au sujet principal. Thomas s'exerça aussi, mais avec moins de succès, dans la poésie : le petit poème qu'il composa fort jeune sur Jumonville, officier assassiné en Amérique par les Anglais, est depuis longtemps oublié : celui qu'il écrivit sur le czar Pierre (lu Pétreide) mérite de l'être. On doit remarquer cependant son

Ode sur le temps, couronnée en 1762, et qui | à cette période que se rapportent diverses aurenferme de fort beaux vers inspirés par Platon, tels que ceux-ci :

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tres compositions de notre auteur: un Poëme à la mémoire de Newton, un autre, sous le titre de Britannia, inspiré par le mouvement national que la lutte des intérêts commerciaux dans l'Amérique du Nord excitait alors contre l'Espagne, enfin une tragédie de Sophonisbe, représentée avec quelque succès.

Vers la même époque, un de ses amis le recommanda au lord chancelier Talbot, qui devint son Mécène, et dont il accompagna le fils dans ses voyages sur le continent. Ses observations sur les États modernes comparés avec ceux de la Grèce et de Rome, l'avenir glorieux réservé aux institutions libres de la Grande Bretagne, tels furent les éléments de son poëme de la Liberté, qu'il mettait au-dessus de tous ses autres ouvrages. La postérité n'a point confirmé ce jugement, et le chant populaire de Rule Britanna a plus fait pour sa réputation de poëte pa

nous avons indiquées. Il travaillait encore à la seconde lorsque la mort, frappant coup sur coup lord Talbot et son fils, vint enlever à Thomson un élève chéri et un généreux protecteur. Une place de secrétaire, lucrative sinécure, qu'il devait au crédit du chancelier, fut perdue pour lui, et il se vit rejeté dans les embarras pécuniaires qui l'avaient accueilli lors de son arrivée à Londres. Il n'en sortit que grâce à la générosité de quelques amis, parmi lesquels il faut citer l'auteur Quin; aux bontés du prince Frédéric de Galles, et au produit de quelques pièces de théâtre Agamemnon, 1738; Edouard et Etéonore, qui fut refusée par la censure l'année suivante, et publiée par souscription; Tancrède et Sigismonde, 1745, qui est restée au courant du répertoire. Eufin, lord Lyttleton lui procura la place d'inspecteur général des Iles-sous-le-Vent, qui, sans le forcer à la résidence, lui assurait un revenu de 500 liv. st. Le dernier ouvrage que Thomson publia fut le Château de l'indolence ( 1746), imité du Cháteau du travail, d'Alexandre Barclay, mais où l'on retrouva le talent descriptif qui avait brillé d'un si vif éclat dans son poëme des Saisons. Il mettait la dernière main à une tragédie de Coriolan, lorsqu'une mort prématurée vint le frapper le 22 août 1748, à l'âge de 48 ans.

THOMSON (JAMES), un des meilleurs poetes descriptifs de la Grande-Bretagne, naquit dans le comté de Roxburg en Écosse, le 11 sept. 1700. Son père, ministre de la paroisse d'Ednam, destinait son fils à la même profession. En consé-triote que les deux grandes compositions que quence, celui-ci, après avoir terminé ses études à l'université d'Édimbourg, suivit des cours de théologie dans la même ville. Mais l'imagination avait été de bonne heure sa faculté dominante. Très-jeune encore, il composait des vers qu'il brûlait régulièrement à la fin de chaque année, non sans consigner dans une pièce de poésie les motifs de leur condamnation. Un ecclésiastique du voisinage l'encourageait secrètement dans ces dispositions, et certain poème de l'Hiver, produit inconnu de sa muse, eut l'honneur de suggérer à Thomson l'idée de son plus bel ouvrage. Car dès lors il voyait la nature en poëte. et le ciel, pour nous servir des expressions de Johnson, lui avait donné, pour la peindre, le génie qui sait embrasser l'ensemble et descendre aux détails. Ces inclinations s'accordaient mal avec l'austérité du ministère presbytérien. C'est ce dont ses professeurs et lui-même ne tardèrent pas à s'apercevoir, et un beau matin le jeune homme, alors orphelin et sans fortune, disant adieu à la théologie, s'achemina vers Londres, le point de mire de tout Ecossais nécessiteux. Si l'on en croyait l'auteur de la Vie des poètes anglais, le besoin d'une paire de souliers aurait été pour notre jeune enthousiaste le premier rappel aux réalités de la vie. Il y a de l'exagération dans cette manière de présenter les faits. Une lettre de Thomson, publiée depuis, nous apprend qu'à cette époque, s'il avait des dettes, il ne manquait pas de crédit. On voit par le même document qu'il s'occupait déjà de son poëme des Saisons, dont les 4 chants parurent séparément de 1726 a 1750. C'est aussi

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Les OEutres de Thomson, avec sa Vie, par Murdoch, ont eu plusieurs éditions, 1762, 2 vol. in-49; 1788 et 1805, 5 vol. in-8°. Pickering a publiée en 1850 une nouv. éd. de ses OEuvres poetiques, 2 vol. in-8o, avec une notice, des lettres et des poésies inédites. Les Saisons

ont été plusieurs fois traduites en français, et | livres, et Cetti de mille et au delà. Il nage avec de plus imitées par Saint-Lambert. RATHERY. la plus grande rapidité, et suit volontiers les THOMSONITE. Substance minérale blanche, vaisseaux, autant pour jouir, selon Commerson, vitreuse, transparente ou au moins translucide, de l'ombre qu'ils répandent que pour profiter d'une dureté médiocre et facile à casser; s'offrant des restes de la cuisine qu'on jette à la mer. Il sous la forme de prismes plus ou moins modifiés se nourrit de poissons, principalement de ceux par des facettes sur les bords et sur les angles, qui vivent en troupes, comme les maquereaux et et susceptibles de clivage dans trois directions les harengs. Selon l'opinion commune, le thon perpendiculaires entre elles. La forme primitive entre dans la Méditerranée au printemps, et de ces cristaux est, suivant Beudant, un prisme n'en sort qu'en automne, quoiqu'il ait déposé droit à bases carrées, et, selon Brooke, Haidin- son frai immédiatement après son arrivée. Ceger et Philips, un prisme droit rhomboïdal de pendant il est très - probable que l'immense 90' 40'; le clivage parallèle aux pans est d'une majorité ne fait, à l'époque de son apparition, grande netteté; la cassure est inégale; son éclat | que sortir des profondeurs de cette mer pour est vitreux et passe à l'éclat nacré. La thomso-parcourir ses rivages. On en a observé quelquenite est fragile; sa dureté est supérieure à celle fois de grandes quantités en hiver sur les côtes de la chaux fluatée et presque égale à celle de la de la Sardaigne. Dans l'Océan, même entre les chaux phosphatée; sa pesanteur spécifique est tropiques, on n'en voit que rarement dans cette de 2,37. Elle se boursouffle au chalumeau, et saison. - Si la pêche du thon procure de grands donne de l'eau par la calcination; par un feu bénéfices à quelques-unes de nos villes maritiprolongé, elle devient opaque et d'un blanc de mes, elle en donne encore de plus considérables neige sans se fondre. Elle est soluble en gelée à la Sardaigne, où elle est évaluée annuellement dans l'Acide nitrique. Elle a été analysée par à 45,000 têtes. Cette pèche se fait dans cette île Thomson et par Berzélius. L'analyse de ce der- avec plus d'appareil qu'en France. nier chimiste a donné silice, 38,50; alumine, 30,20; chaux, 15,50; soude, 4,50; oxyde de fer, 0,40; eau, 15,10. La thomsonite se présente ordinairement en cristaux prismatiques, implantés par une de leurs extrémités sur leur gangue. Souvent ils se réunissent en rayonnant autour d'un centre, et composent ainsi des groupes flabelliformes ou des masses bacilaires, à structure radiée; on la trouve aussi en masses amorphes passant à la variété précédente. On n'a encore observé la thomsonite que dans une seule localité à Kilpatrick en Écosse, dans les roches trappéennes; elle y est accompagnée.de | prehnite.

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DR..Z.

THON, poisson du genre scombre, qu'on trouve dans toutes les mers, qui parvient à une grandeur considérable, dont la chair est d'un excellent goût, et qui fait sur quelques rivages l'objet d'une pêche de première importance. Son corps a la forme d'un fuseau aplati, c'est-àdire qu'il est plus épais aux deux tiers de sa lorgueur, et qu'il s'amincit vers la tète et plus encore vers la queue. Sa tête est petite et se termine en pointe émoussée; sa bouche, large, garnie de petites dents pointues; ses yeux, grands; son dos, gris d'acier; son ventre, argentin, l'un et l'autre couverts d'écailles minces qui se détachent aisément; ses nageoires, bleuatres, jaunes, grises et noires. Le thon a ordinairement deux ou trois pieds de long; on en pèche quelquefois de sept à huit. Pennant en cite du poids de 460

La chair du thon est blanche, savoureuse, très-saine. Dans l'antiquité, elle était recherchée pour les tables les plus délicates. Les Romains estimaient surtout la tête et le dessous du ventre. Ce sont encore aujourd'hui les parties les plus recherchées. Cette chair varie en qualité; elle est molle ou tendre, ressemble au veau ou au bœuf, suivant la partie du corps où on la coupe. On mange le thon frais ou mariné. Les moyens qu'on emploie pour le saler sont à peu près les mêmes que ceux en usage pour la morue; lorsqu'on veut le mariner, après l'avoir retiré de la saumure, on le met dans de petits barils, ou des vases de terre, que l'on achève de remplir d'huile. En pressant les thons pour les saler, on en fait sortir une huile qui est employée par les corroyeurs, mais qui, fabriquée à la sortie du poisson de la mer, pourrait être nuisible. — C'est principalement en Italie, en Espagne, en Turquie, qu'on vend le thon salé; on n'en consomme guère que du frais et de mariné en France. ALBERT DEVILLE. THORAX (Anatomie), du latin, thorax, du grec thorax, synonyme de poitrine.

THORITE. Substance minérale qui a été trouvée dans l'ile de Loeven, près de Brevig, en Norwége, disséminée dans une syénite. Sa couleur est le brun noirâtre, qui passe au jaune par la calcination; sa pesanteur spécifique est 4,8; elle raye le verre; l'éclat de sa cassure est vi| treux; elle est composée, selon Berzélius, de

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