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On vient de terminer, à Lisieux, une mission qui duroit depuis cinq semaines. Tout ce que des feuilles mensongères ont débité sur les missionnaires est aussi absurde qu'odieux. Toute la ville de Lisieux dementiroit des imputations qui ne prennent leur source que dans la haine du bien. La ville a joui, pendant la mis sion, de la plus parfaite tranquillité. Les habitans, sans distinction d'état, se sont portés en grand nombre aux instructions, et la rigueur du froid n'a pas ralenti leur zèle. Des réconciliations, des restitutions, des secours distribués aux pauvres, des mariages bénis, des désordres cessés, des sujets d'édification, la croix triomphante et Dieu honoré, voilà le mal qu'ont fait les missionnaires; voilà ce que leur doit la religion, et voilà ce que leurs ennemis ne leur pardonnent pas.

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Il nous est revenu sur l'affaire de la mission de Croï quelques détails qui confirment les soupçons que l'on avoit conçus sur la cause secrète du fameux arrêté du 19 décembre. D'abord, on a profité de l'absence du maire, que l'on savoit n'être pas disposé à so prêter au petit manège qui se préparoit. Il ne restoit plus que l'adjoint, M. Vernier, prêtre et ancien religieux, dit-on, qui, pendant la révolution, avoit ou blié son état, et qui cependant ne se montroit pas ennemi de la mission. Mais c'étoit un homme foible, et il n'étoit pas difficile de l'effrayer. On a donc rédigé sans lui un arrêté minuté avec beaucoup de soin, et qui annonce évidemment des homines experts. On y dit que les processions extérieures ont été en plusieurs lieux l'occasion d'insultes à la religion; ce qui d'ailleurs n'est pas vrai; car à Brest, comme nous l'avons remarqué, il n'y avoit point encore eu de cérémonies extérieures : ensuite, Brest ne seroit pas plusieurs lieux., et enfin les gens de Croï, voire même M. Vernier, ne savoient peut-être pas un mot de l'affaire de Brest. Enfin on rappelle dans l'arrêté une loi de 1789, et une loi de l'an IV, époques de tolérance et de liberté, comme on

sait, et un article du Concordat; mais on n'y rappelle pas la Charte, qui pourtant étoit assez applicable à l'af¬ faire, et qui, étant plus récente et émanée du Roi, vaut bien les décrets de la convention. Quoi qu'il en soit, quand le thème a été ainsi fait, on l'a expédié; car M. G., en habile homme, ne vouloit pas se montrer d'abord, et se réservoit pour soutenir l'arrêté, en cas de besoin. L'arrêté est arrivé à Meaux, d'où il a été expédié bien vite à Croï, avec l'ordre à l'adjoint de le signer. L'adjoint ne savoit ce que cela vouloit dire; on lui parloit de prévenir à Croï des désordres et des mouvemens qui n'y existoient pas. Il a hésité, il a bataillé; mais les ordres étoient précis, et la lettre impérative: d'ailleurs l'heure étoit mal commode pour dispu ter; c'étoit la nuit, et M. Vernier vouloit se recoucher? Il a signé; l'exprès est retourné triomphant. L'arrêté est reparti pour Meaux, où M. le sous-préfet y a mis son visa, puis M. le préfet de Seine et Marne l'a approuvé. La pièce est revenue ainsi à M. G., qui a dû être bien satisfait de l'heureuse issue de son stratagême. C'est à de pareils traits que les hommes d'Elat reconnoissent; c'est par ces coups fourrés que les grands ministres parviennent à l'immortalité; c'est part là du moins que les gens tortuenx en viennent à leurs fins. Les missionnaires se montrent en plein jour, leurs loyaux ennemis les attaquent par des souterrains. Le parti étoit pris d'entraver la mission de Croï; la défendre en face eût été s'afficher. On a mis en avant un homme de paille, comme on dit vulgairement. Celle marche oblique a paru bien plus adroite, et tout aussi sûre. Voilà tout le mystère de l'affaire de Croï.

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Le jour de la fête de l'Epiphanie, M. l'abbé Bouchard, grand vicaire de Grenoble, a ouvert une mission à Touvet, dans le même diocèse. Il y a exercice soir et matin; tantôt des instructions familières, tantôt des discours. Les habitans de Touvet ne sont pas les seuls à s'y rendre; ceux des paroisses voisines y accou

rent, malgré les rigueurs de la saison et les incommodités des chemins. Déjà les prédications ont fait effer. Chacun songe à mettre ordre à sa conscience; le respect humain est foulé aux pieds, et les pratiques de la piété sont suivies avec assiduité. Touvet est redevable de cette mission au zèle de M. Col, son cúré, qui a obtenu des missionnaires pour ranimer l'esprit de religion dans sa paroisse. Là, comme ailleurs, ils ne prêchent qu'avec l'autorisation des pasteurs ordinaires.

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS, M. de Serre est parti de Paris pour Nice, le 26, à onze heures du matin. M: Sinréon, nommé sous secrétaire d'Etat au ministère de la justice, est chargé du portefeuille.

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Une ordonnance du 25, nomme M. Pichon conseiller d'Etat en service ordinaire auprès du comité de législation: -M. le prince de Broglie et M. Mechin sont chargés par la commission des pétitions de faire deux rapports à la plus prochaine séance de la chambre des députés.

On avoit répandu les nouvelles les plus alarmantes sur la tranquillité de l'Espagne. Cadix étoit au pouvoir des insurges, the revolte avoit aussi éclaté à Madrid, et le roi s'étoit enfui à Burgos ou à Vittoria; en un inot, tođi ce royaumé étoit en proie à une révolution déclarée. Heureusement tous ces bruits sont démentis par des lettres de Madrid, du 17 de ce mois; de Cordoue, du 13; de Rota, du 11, et de plusieurs autres villes. Elles apprennent que l'insurrection de l'armée expéditionnaire étoit sur le point d'être étouffée, que les insurgés avoient tenté deux fois de s'emparer de Cadix, et avoient été répoussés avec perte. La défection régnoit parmi eux. Le général Freyre, pensant qu'il pourroit rétablir l'ordre sans répandre de sang, serroit deurs troupes de si près, que les chefs de la révolte songeoient déjà à s'embarquer pour se soustraire a la punition que mérite leur attentat. La ville de Cadix n'a pas cessé d'être fidele au roi, Ces lettres annoncent aussi que le reste de l'Espagne, est parfaitement tranquille. Ainsi les libéraux en serout pour le triomphe prématuré

qu'ils avoient fait éclater. Déjà une de leurs feuilles parloit de la joie qui régnoit à Madrid après l'expulsion de Ferdiaand.

-La police a saisi les feuilles libérales qui ont publié la lettre de M. de Caulincourt, et les éditeurs responsables ont été cités devant le juge d'instruction. On dit que l'auteur de la lettre sera aussi mis en cause.

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Le Constitutionnel du 24, ayant cité, au sujet des missionnaires, de prétendus passages d'un discours prononcé, le 1er octobre 1765, par M. le Blanc de Castillon, avocat général, à la rentrée du parlement de Provence; M. le Blanc de Castillon, maître des requêtes, petit-fils de ce magistrat, croit devoir déclarer que son aïeul n'a jamais proféré les paroles qui lui sont imputées dans cette feuille, qu'il pronouça en effet un discours de reutrée: mais qu'on en répandit un faux extrait qui contenoit textuellement les passages cités par Je Constitutionnel, et qui fut condamné par le parlement de Provence, le 11 janvier 1766, à être lacéré et brûlé par l'exécuteur de la haute justice, comme contenant des propositions téméraires et scandaleuses, et des maximes séditieuses; il y eut des arrêts semblables des parlemens de Grenoble et de Paris, des 22 mars et 15 avril de la même année.

-L'administration des hospices de Paris est autorisée, par une ordonnance du 29 décembre dernier, à faire construire un bâtiment destiné à recevoir les pauvres vieillards et inalades, en attendant leur admission dans les hospices,

-Nous avons parlé de M. de Laserve, avocat à la cour royalé de Paris, et de son livre intitulé: de la Royauté selon les lois divines révélées, les lois naturelles et la Charte constitutionnelle; on dit que le corps de discipline des avocats instruit en ce moment contre lui..

Un article inséré dans le Constitutionnel du 6 de ce mois, assuroit que la liberté de la Suisse étoit en danger, et représentoit les autorités suisses elles-mêmes comme occupées d'infâmes intrigues, dans le but de livrer leur patrie à une domination étrangère. On écrit de Lucerne, du 15 janvier, que cet article est un tissu de fables et d'impostures; que personne en Suisse ne partage les inquiétudes absurdes dont parle le correspondant du Constitutionnel; mais qu'il eu troit sans doute dans ses vues d'essayer, par cette invention, de les faire naître.

Une pétition a été signée à Lisieux, pour le maintien de la loi des élections. M. le Moine, avocat, a signalé dans une lettre publiée les moyens employés pour obtenir des signatures. Sur 219 signataires, il n'y a que 67 électeurs; on trouve parmi les autres, des mendians et des prêtres apostats.

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Les membres du conseil de discipline des avocats, de Bordeaux, voulant repousser les imputations calomnieuses que les feuilles libérales dirigent sans cesse contre M. Laîné, leur ancien collègue, viennent d'adresser à cet honorable déune lettre dans laquelle ils le félicitent d'avoir, pendant la révolution, élevé la voix de l'humanité en faveur des ministres de la religion, livrés à des commissions militaires, et d'avoir, à la même époque, révendiqué hautement les biens et les droits des proscrits. On demande si cette conduite étoit aussi celle de ceux qui portoient alors le bonnet rouge.

Les officiers du régiment des chasseurs à cheval des Vosges, en garnison à Amiens, ont fait entr'eux une collecte pour secourir les pauvres de cette ville pendant ces derniers froids.

De grands désastres ont été causés en plusieurs endroits par la crue extraordinaire des eaux. Dans les environs de Cambrai et de Valenciennes, plusieurs paroisses sont sous les eaux ; des moulins et des maisons ont été emportés, et des familles sont réduites à la misère. Bruxelles a été inondé pendant plusieurs jours. Le 22', l'eau séjournoit encore dans plusieurs rues. On dit qu'à Verweyde, elle s'est élevée à la hauteur des maisons. A Liège, une partie du pont de l'Université a été entraînée par les flots. Les environs de cette ville ont beaucoup souffert. La route de Huy étoit toute couverte d'eau.

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- M. le prince de Metternich a adressé à tous les agens diplomatiques d'Autriche, une circulaire, datée du 28 dé cembre, dans laquelle il leur annonce que l'on commence à ressentir dans toute l'Allemagne les bons effets des arrêtés de la diète, du 20 septembre dernier; que les révolutionnaires sont contenus, et que le bon parti se ranime et grossit tous les jours. A cette occasion, il ajoute, que, si le gouvernement françois a la sagesse de profiter de ces conjonctures, rien ne pourra désormais s'opposer au triomphe complet de la cause des amis de l'ordre.

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