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tre la procédure. On ne sait que trop quelle en fut l'issue. Le 8 novembre 1817, un jugement condanna l'évêque à la dé-portation, et l'on affecta d'afficher l'arrêt sur un poteau entre deux voleurs exposés pour leurs méfaits. Mais un tel procédé produisit l'effet contraire à celui que l'on attendoit; il révolta les catholiques, et accrut l'intérêt qu'excitoit un prélat justement respecté. On peut voir le Mémoire qu'il adressa, sous le titre de Réclamation respectueuse aux souverains alors réunis à Aix-la-Chapelle. Cette pièce, qui est datée du 4 octobre 1817, et qui a été imprimée depuis, est un monument important pour l'histoire de la religion dans les Pays-Bas en ces derniers temps; elle donne de tristes détails sur le. sys'tême suivi dans cette contrée relativement aux affaires ecclésiastiques, et sur l'attention constante avec laquelle on y fatiguoit les catholiques, et surtout le clergé, dans le moment même où l'on favorisoit ouvertement, tantôt le protestantisme, tantôt l'indifférence et l'incrédulité.

M. de Broglie, depuis 1817, a vécu constamment en France; il résidoit tantôt à Beaune, tantôt à Paris, toujours en proie à des infirmités, que les traitemens exercés envers lui ou envers son clergé, n'étoient pas propres à adoucir. Il recevoit chaque jour de sinistres nouvelles de l'état de son diocèse. Un de ses grands-vicaires exilé, deux autres mis en jugement, des chanoines expulsés du chapitre, des cures privés de traitement, une inquisition sévère exercée contre les prêtres, de pauvres religieuses inquiétées jusque dans l'asile où elles croyoient s'être soustraites au monde, la religion catholique entravée dans ses droits comme dans ses pratiques, les efforts faits pour ôter au prélat l'exercice de sa juridiction, toutes ces circonstances étoient autant de coups portés à la sensibilité de M. de Broglie, et n'ont pas peu contribué sans doute à ruiner une santé foible et fatiguée par tant d'épreuves.

Attaqué, vers la fin de juin, d'une nouvelle maladie, M. de Broglie montra, dès les premiers jours, la vivacité de sa foi; il reçut, le 25 juin, les sacremens de l'Eglise, qui lui furent administrés par M. le curé de Saint-Sulpice. Il aimoit qu'on l'entretînt des choses de Dieu, et prioit avec ferveur. Visité par sa famille et par ses amis, il a constamment été pour eux un sujet d'édification. Il a succombé, le vendredi 20 juillet, à une heure du matin, à l'âge de 54 ans et

10 mois. Tous ceux qui ont connu ce prélat savent quelle étoit la droiture de son ame, la noblesse de son caractère l'amabilité de son esprit. Chez lui un cœur excellent s'allioit à une imagination vive; mais ce qui lui donne surtout des droits à l'estime et aux regrets, c'est son attachement à l'Eglise, son zèle pour la défendre, sa piété tendre, son courage dans les traverses. M. de Broglie sera compté parmi les plus honorables victimes de la tolérance philosphique. Proscrit dès sa jeunesse par la révolution, mis en prison par Buonaparte, déporté depuis sous un gouvernement dont il ne devoit pas attendre ces rigueurs, il a pu apprécier mieux que personne les douceurs des régimes modernes, et la réalité de cette liberté des cultes dont on n'a jamais moins joui que sous les constitutions passées, qui l'avoient si solennellement promise et décrétée.

Le corps de M. l'évêque de Gand, après avoir été embaumé et déposé dans un double cercueil de plomb et de chêne, est resté plusieurs jours dans une chapelle ardente: Le dimanche soir, le clergé de Saint-Sulpice s'y rendit, en cortège, pour y jeter de l'eau bénite. Le 24, les obsèques ont été célébrées à Saint-Sulpice, comme nous l'avons dit. M. le coadjuteur de Paris a officié et fait les absoutes. M. le nonce de S. S., des prélats, des pairs, des députés, et autres personnes de distinction y assistoient. M. le prince Amédée de Broglie frère du défunt, étoit à la tête de la famille. Le corps a été déposé dans un caveau de l'église, situé sous le chœur. Chaen se retirant, songeoit à la triste situation d'un pays si renommé par son attachement à la religion. Il ne reste plus aujourd'hui que deux évêques dans toute la Belgique ; et même dans ce territoire vaste et couvert d'une nombreuse `population, qui s'étend d'Ostende à Cologne et à Mayence, et qui autrefois comptoit douze siéges, on ne compte plus que deux prélats, arrivés l'un et l'autre à un âge avancé.

cun,

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Mercredi 1" août 1821.)

(N°. 728.)

Les Martyrs de la Foi pendant la révolution françoise; M. Aimé Guillon. IV. volume.

par

SECOND ARTICLE.

:

Parmi les prêtres immolés par les ennemis de la religion, M. G. en nomine quatre qui avoient écrit contre les innovations de l'assemblée constituante ce sont MM. Menuret, Mouffle, Pottier et Rougane. On cite du premier un écrit intitulé la Prétendue Constitution civile du clergé convaincue d'erreur et de schisme; et nous-mêmes nous l'en avons désigné comme autenr, d'après ce qu'on lit dans les Annales catholiques, tome jer. • page 231; mais nous devons ajouter, qu'ayant fait depuis des recherches sur ce sujet, nous n'avons point trouvé d'écrit contre la constitution civile du clergé qui portât précisément ce titre, et nous soupçonnons qu'il y a eu quelque erreur dans cette indication. L'abbé Mouffle, premier vicaire de Saint-Merry, à Paris, avoit d'abord fait le serment; mais il le rétracta la même année, et publia en conséquence une Lettre de 32 pages, datée du 20 décembre 1791, où il rend compte de ses motifs. M. G. ne fait point mention de cet écrit, et recule la rétractation de l'abbé Mouffle jusqu'en juillet 1792; la date de la Leure fait voir qu'il se trompe. Il ne fait pas mention non plus des écrits de M. Pottier, Eudiste, et supérieur du grand séminaire de Rouen; nous en connoissons trois de cet ecclésiastique, qui d'abord avoit fait aussi le serment, et qui le rétracta Tome XXVIII. L'Ami de la Relig. et du Ror. A a

quelques jours après. Ces écrits sont : Adresse aux Vierges chrétiennes, in-8°. de 18 pages; Adresse aux vrais Catholiques de France, 1791, in-8°. de 45 pages (cette Adresse porte en tête le nom de M. Pottier); le Cri du Cœur, ou Rétractation motivée de M. P., fonction naire public à R., in-8°. de 16 pages; car nous croyons pouvoir lui attribuer cet écrit, et nous sommes même persuadés qu'il en a composé d'autres sur les mêmes matières. L'article Rougané est moins incomplet dans les Martyrs; M. G. n'a pas cru devoir citer de cet ecclésiastique les écrits que nous avons indiqués, t. XXVI, p. 136; mais il ajoute des détails sur un autre écrit de Rougane en faveur du serment de Jiberté, et sur la fin de ce curé, qui ne fut point massacré après le 10 août, comme nous l'avions dit d'après l'abbé Barruel, mais qui fut condamné à mort par le tribunal révolutionnaire, le 17 mai 1794.

M. G. a consacré à Pie VI un article fort étendu, et qui n'est pas sans intérêt; mais il y a mêlé bien des choses qui ne se lioient guère à son sujet. C'est la manière de l'auteur; il prodigué les notes et les citations, et il enchevètre son récit d'accessoires qui l'entraînent par fois assez loin. On voit qu'il n'est pas fâché de faire montre d'érudition. Ainsi il calcule que Pie VI a occupé le siége de Rome plus long-temps que saint Pierre, qui n'y fut assis que vingt-quatre ans cinq mois et douze jours. Cette fixation de jours paroît un peu hasardée pour des temps dont la chronologie est si peu précise; elle ne se concilie pas rigoureusement avec les vingt-cinq ans que la chronique d'Eusèbe donne au pontificat de saint Pierre à Rome. M. G. auroit pu encore supprimer, sans inconvé– nient, de cet article, tout ce qui nous concerne,

puisqu'il devoit nous adresser, à la fin de son volume, une réponse si longue et si vive. Toutefois, en blamant ses digressions fréquentes, nous nous sentons disposé à lui pardonner celle où il s'étonne que l'on ait conservé à une des rues de Paris le nom de ce Duphot, qui fut tué, à Rome, à la fin de 1797, en dirigeant une révolte des patriotes; il semble en effet que ce nom révolutionnaire auroit dû disparoître surtout depuis la restauration.

L'article de l'abbé de Rastignac, massacré à l'Abbaye, en septembre 1792, auroit pu n'être qu'instructif et édifiant; mais l'auteur l'a surchargé de notes, dont trois sont dirigées contre nous. En parlant des écrits de l'abbé de Rastignac, nous avions dans les Mémoires cité la Lettre synodale de Nicolas, patriarche de Constantinople; à l'imprimerie, les ouvriers mirent Nicolaï pour Nicolas; M. G. a mieux' aimé nous attribuer cette erreur; c'est une remarque qu'il a empruntée à la bienveillance d'un autre écrivain, dont nous parlerons plus tard. Un autre reproche qu'il nous fait de lui-même est moins fondé encore, et M. G. a été puni ici, par une forte méprise, de l'envie qu'il avoit de nous harceler, et de son penchant à s'écarter de son sujet. A propos de l'abbé de Rastignac, il remonte au prélat du même nom, mort archevêque de Tours, en 1750, et il prétend que la famille Rastignac n'a pu, sans indignation, le voir dénigré dans ces Mémoires. D'abord je n'ai point denigré M. de Rastignac ; j'ai dit que ce prélat, dans sa vieillesse, s'étoit laissé surprendre par les appelans, et avoit adopté plusieurs de leurs écrits. Mais cette foiblesse, qui est assez connue, est un tort qui n'a rien d'injurieux pour la famille Rastignac, et les arrière

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