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des lettres patentes avec les formalités usitées dans le royaume, ne puisse y avoir force de loi, cependant on peut la considérer sous deux différens objets. Par rapport aux peines qu'elle prononce contre les délinquans, c'est une loi de police qui doit avoir son exécution sur des personnes qui sont immédiatement soumises à la jurisdiction du pape : c'est une loi étran→ gère à notre égard. Mais nous ne pouvons trop res→ pecter la décision de Sa Sainteté sur le fond de la matière, et nous devons en conclure avec fondement ce qui a été déjà dit ci-dessus, que les dispenses doivent être fondées sur de justes causes; qu'il n'est jamais permis d'altérer ou de déguiser la vérité des faits; et que les ordinaires des lieux qui procèdent à la fulmination, et auxquels sont adressées les dispenses pour les mettre à exécution, doivent examiner avec soin la vérité de l'exposé, et n'avoir aucun égard à la dispense, lorsqu'ils trouvent qu'il y a obreption ou subreption.

La treizième cause est, lorsque les parens qui demandent à s'épouser, sans en être venus jusqu'au dernier crime, ont vécu dans une familiarité qui les désho-, nore, et qui a donné lieu à de mauvais soupçons ; en sorte que, si elles ne s'épousent pas, la fille ne pourra trouver de parti convenable, et restera par conséquent dans un état dangereux : nimia partium familiaritas; on, comme disent d'autres infamia sine copula. Au reste, cette diffamation doit être grave, et aller jusqu'à faire croire que la personne ne trouvera vraisemblablement qui que ce soit de sa condition, qui veuille la prendre pour épouse. Une fille qui a de grands biens, est communément beaucoup moins exposée qu'une autre, à passer ses jours dans le célibat; et

que

c'est pour cela l'infamie dont nous parlons, ne suffiroit pas toujours pour lui faire obtenir dispense. Enfin, la quatorzième et dernière cause regarde les mariages déjà contractés, et qu'on ne peut rompre sans

faire tort aux enfans, et sans scandaliser le public. Alors les parties doivent exprimer, si elles ont connu l'empêchement dont elles demandent dispense; si elles ont fait publier leurs bans ; si, supposé qu'elles aient ignoré T'empêchement lorsqu'elles se sont mariées, elles ont vécu comme frère et sœur, aussitôt qu'elles en ont eu connoissance; si elles n'ont commencé par le crime, que dans l'intention d'obtenir dispense.

Ajoutons à tout ce que nous venons de dire, 1. que, quoique les motifs que nous venons d'exposer soient les plus communs, il peut s'en trouver d'autres qui seroient suffisans, et sur lesquels il faut s'en rapporter au jugement des supérieurs. 2. Que plus la loi est importante, plus les motifs doivent être considérables; ainsi, ce qui suffit pour dispenser de l'honnêteté publique, ne suffira pas pour dispenser de la parenté au troisième degré; ce qui suffit pour dispenser de celle-ci, ne suffira pas pour dispenser de l'alliance spirituelle, inter levantem et levatum, dont on ne dispense guère que quand le mauvais commerce des parties les expose au danger d'être tuées par leurs parens: et cette dernière raison, toute forte qu'elle est, ne suffiroit pas pour obtenir dispense de l'empêchement du crime, utroque, vel alterutro machinante, puisque la daterie n'en a encore jamais voulu accorder.

Tout ce que nous avons dit sur cette matière, suffit pour faire connoître l'excès de l'aveuglement de ceux qui obtiennent des dispenses de mariage, sans alléguer au pape aucune raison qui soit véritable; et qui se croient en sûreté de conscience, quand elles en ont obtenu quelqu'une sur des raisons qui sont selon le style de la cour de Rome, mais qui ne sont pas conformes à la vérité par rapport à elles. Nemo, dit le concile de Cologne de 1536, sibi de dispensatione apostolicá blandiatur, cujus conscientiam divina sententia tenet alligatam.

EN quel cas cessent les Dispenses de mariage qui ont été obtenues.

Nous allons examiner, 1. si une dispense cesse par la cessation des motifs pour lesquels elle a été obtenue; 2. si elle finit par la mort ou la déposition de celui qui l'a accordée.

Pour bien entendre la première difficulté, il faut voir dans quel temps la cause de la dispense doit être vraie. On distingue quatre temps dans l'affaire des dispenses : le premier est, quand on envoie à Rome, pour les obuenir; le second, quand le pape, ou le vice-légat en son nom, les accorde; le troisième, quand l'official les entérine; et le quatrième, quand les parties se servent de la grâce qui leur a été faite. Les théologiens et les canonistes sont partagés sur cette matière. Voici ce qui nous paroît le plus sûr à suivre dans la pratique.

1. La cause finale d'une dispense doit être véritable, ou au moins on doit la croire véritable, dans le temps qu'on envoie à Rome, pour demander la dispense : si elle étoit fausse, et qu'on le sût, la dispense seroit nal, suivant les principes d'Innocent III. parce qu'alors les parties voudroient en imposer au pape.

2. La cause d'une dispense doit être vraie dans le temps que le pape accorde la dispense, en fait expédier des lettres, et les sigue: il ne suffit pas qu'elle soit vraie dans la suite. C'est même la décision de Boniface VIII. (C. Si eo tempore, de Resc. in 6. ); et cela paroît par les formules de dispenses, que le pape n'accorde que parce que la cause est vraie pour lors: si ita est, et non pas, si ita fuit, aut erit, dispensa. Il s'ensuit de là que celui qui, en demandant dispense d'épouser sa parente, auroit allégué pour cause de l'obtenir, la nécessité de légitimer l'enfant qu'il auroit eu de sa parente, ne

pourroit plus profiter de cette dispense, si l'enfant étoit mort lorsque le pape a accordé la grâce. Mais cette dispense seroit bonne, quoique la demande en eût été faite avant la naissance, si l'enfant étoit né lorsque le pape l'a accordée.

pape n'a

3. La cause de la dispense doit être vraie, dans le temps que l'ordinaire, commis pour la fulminer, la fulmine; il ne suffit pas qu'elle l'ait été auparavant. Si elle devient fausse alors, l'ordinaire, commis pour la fulmination, ne peut mettre cette dispense en exécution. Si ita est, si preces veritate nitantur, dispensa: ce sont les termes de la formule. La raison est, que la dispense n'est parfaite que quand elle est fulminée; jusque-là elle n'est pas censé accordée; et elle ne s'accorde par l'ordinaire, au nom du pape, qu'à condition que la cause se trouve encore véritable. Ainsi, quand la cause n'est pas vraie dans l'un de ces trois cas, la dispense est nulle defectu consensus: le pas intention de l'accorder alors. 4. Si la cause de la dispense, ayant été vraie, lorsque la dispense a été demandée, lorsqu'elle a été accordée, et lorsqu'elle a été fulminée, cesse de l'être après la fulmination, la dispense est toujours bonne et valable. La raison en est, 1. que, selon une des règles du droit, un acte légitime doit toujours subsister, quoique dans la suite les choses viennent à un état par où l'acte n'auroit pas pu commencer validement: factum legitimè retractari non debet, licèt casus posteà eveniat, à quo non potuit inchoari. 2. Une obligation qui a été éteinte absolument, ne revit pas dans la suite: or, l'empêchement qui a fait demander la dispense, a été éteint par une autorité légitime, et il a été éteint absolument, puisqu'on n'a point encore vu de dispense, accordée sous cette condition, qu'elle deviendroit caduque en cas que la cause pour laquelle on l'accordoit, vînt à ne subsister plus après la fulmination. Sur ce principe, on regarde comme valide, la dispense obtenue par Paul,

par exemple, pour épouser sa cousine; parce que, eu égard à la modicité de sa dot, elle ne pouvoit trouver d'époux qui lui convint, lorsque la dispense a été demandée, accordée, signée, et fulminée, quoique depuis la fulmination elle soit devenue héritière et riche. D'où il s'ensuit, que Paul peut, dans ces circonstances, profiter de la dispense, et épouser cette cousine. Cependant nous croyons devoir remarquer, qu'il seroit à propos de conseiller à ces personnes de ne pas contracter ce mariage: leur respect pour les lois de l'Eglise devroit les engager à suivre ce conseil. Il pourroit même y avoir des occasions où un confesseur dût leur défendre de se marier: ce seroit, par exemple, si cette personne devenue riche, ou le parent qui a demandé à l'épouser, avoit prévu ce changement de fortune lorsqu'ils ont demandé la dispense: car alors il y auroit, non-seulement cessation de cause de dispense, mais encore de la mauvaise foi dans la demande qui en auroit

été faite.

Il ne faut donc pas mettre les dispenses de mariage au nombre de celles qui cessent, dès que la cause cesse en quelque temps que ce soit par exemple, si celui qui a obtenu dispense de l'abstinence et du jeûne pendant le carême, vient à se bien porter dans le cours du carême il ne peut plus profiter de sa dispense; parce que la cause cesse. Mais on ne doit pas juger d'une dispense de mariage, comme de celle de l'abstinence pendant le carême: celle-ci ne s'accorde que tant que la maladie. durera; l'usage même apprend que c'est l'intention de celui qui dispense; les dispenses de mariage, au contraire, s'accordent ordinairement pour toute la vie, et sans condition. Nous disons ordinairement; parce que la dispense du vou de chasteté, accordée pour se marier, ne vaut que pour le mariage pour lequel elle est accordée, ainsi que nous l'avons remarqué quand nous en avons parlé en sorte que celui qui l'avoit obtenue, est obligé de nouveau à observer son vœeu,

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