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dans le temps d'une extrémité aussi grande que celle de la peste?

Pour ce qui est de l'Extrême-Onction, le curé ou le prêtre se tenant au-dessus du vent, tâchera de faire apporter, s'il est possible, le malade à la porte de sa chambre ou de la cabane, ou de l'en faire approcher, s'il peut venir lui-même; et, ayant mis au bout d'une longue baguette, du coton ou de l'étoupe qu'il trempera dans les saintes huiles, il fera une seule onction sur une des parties du corps du malade, en prononçant en même temps la forme prescrite ci-dessus, en parlant de l'Extrême-Onction pour les cas où le danger de mort est pressant. Aussitôt après l'onction, il mettra le bout de la baguette dans le feu qui aura été préparé, et y fera brûler le coton ou les étoupes. Après quoi, si le temps le lui permet, il dira un mot de consolation au malade, et fera les prières marquées pour l'administration de l'Extrême-Onction, en pratiquant ce qui a été dit pour les cas du danger de mort

pressant.

Lorsque la contagion est enflammée, plusieurs rituels prescrivent pour l'administration du saint viatique et de l'Extrême-Onction, les précautions que nous venons de marquer. C'est un point de discipline sur lequel les évêques peuvent prescrire ce qui leur paroît le plus expedient. Ce qui a déterminé à indiquer aux prêtres de ce diocèse, cette manière d'administrer le viatique et l'Extrême-Onction en temps de peste, au lieu de s'en tenir à celle qui est usitée hors le temps de contagion, est, 1. pour le bien public, afiu de ne pas trop exposer les prêtres, dans le temps que leur ministère est si utile à tous les fidèles. 2. Nous suivons en cela la pratique ordonnée par plusieurs saints évêques. 3. Cette pratique n'est opposée, ni au respect dû aux Sacremens de l'Eucharistie et de l'Extrême-Onction, ni à la pratique ancienne de l'Eglise. A l'égard de la sainte Eucharistie, nous l'avons prouvé ci-dessus. Pour ce qui

est de l'Extrême-Onction, il y a beaucoup de diocèses où l'on ne fait jamais l'onction avec le pouce, mais avec la spatule, qui est une espèce de petit bâton d'argent ou d'étain. Que ce bâton soit plus ou moins long, et d'une manière ou d'autre, c'est une même chose.

Pour ce qui est du Sacrement de mariage, on ne l'administrera pas aux pestiférés.

Quand un prêtre s'est exposé en faisant les fonctions de son ministère, il faut qu'il porte à l'extérieur, la marque de suspicion dont nous avons parlé, pour faire connoître qu'i peut être suspect, afin qu'on ne s'approche pas de lui, excepté quand il portera le saintSacrement. Ses domestiques, en sortant, doivent aussi porter la marque extérieure de suspicion.

Les domestiques des ecclésiastiques suspects, doivent se tenir enfermés dans les maisons avec leurs maîtres, et ne pas paroître au dehors, tant que leurs maîtres n'y paroissent pas mais quand leurs maîtres, après s'être retirés quelques jours, voient qu'ils ne sont pas attaqués du mal, et qu'ils peuvent sortir sans risque pour les autres, les domestiques peuvent alors sortir comme leurs maîtres, sans porter la marque extérieure de suspicion, s'ils sont en santé comme eux.

Les prêtres qui sont au service des hôpitaux ou des autres lieux publics destinés pour la guérison des malades, doivent toujours porter cette marque extérieure.

Quand quelqu'un d'une communauté ecclésiastique ou régulière est attaqué de peste, ceux qui habitent dans la même maison, doivent tous, en sortant, porter la marque extérieure de suspicion. On doit avoir la précaution de faire loger dans des chambres séparées les unes des autres, ceux qui vivant en communauté, sont attaqués ou suspects; il est expédient, pour cet effet, de faire bâtir dans leur jardin avec des planches, des cabanes séparées. Il ne faut admettre dans ce tempslà aucune personne de dehors dans la maison, sans une absolue nécessité; mais on doit avoir soin que la com

munauté ne manque pas des choses nécessaires à ceux qui y demeurent. Si ces communautés sont très-nombreuses, ou qu'il ne soit pas possible, pour quelque cause que ce puisse être, de bâtir dans l'enceinte de la maison, des cabanes séparées, il faut que l'évêque, de concert avec les commandans ou magistrats, fasse sortir ceux de la maison qui se portent bien, pour les faire loger ailleurs dans d'autres communautés ou maisons non suspectes.

Les curés doivent avoir soin que tous ceux qui sont relevés de la peste ou qui s'en sont préservés, s'acquittent ensuite des devoirs du christianisme avec une nouvelle ferveur, pour reconnoître, autant qu'il sera en eux, la grâce que le Seigueur leur aura faite de leur avoir conservé la vie.

DES Devoirs des Magistrats pendant la Peste.

Iz est du devoir des magistrats, sur-tout en temps de peste, d'agir en toutes choses, de concert avec l'évêque et les curés ou autres prêtres, pour procurer le bien public en tout ce qu'ils peuvent, et pour empêcher le mal de faire du progrès.

Ils doivent avoir soin de faire fournir, au lieu où est la peste, tous les vivres qui sont nécessaires pour la subsistance des habitans, dans un temps où tout commerce avec le dehors leur est interdit.

Ils doivent tâcher d'empêcher la communication de ceux qui habitent dans des quartiers infectés, avec ceux qui ne le sont pas.

Ils doivent faire construire, aux frais publics, un trèsgrand nombre de cabanes hors du lieu où est la peste, pour y mettre les malades, les convalescens, ceux qui sont suspects, et pour faire faire quarantaine; le tout en des quartiers différens.

Ils doivent faire bâtir ces cabanes avec des planches,

et de manière qu'on puisse les faire tourner tantôt à un vent, tantôt à un autre.

Ils doivent avoir soin de faire venir dans le lieu où

est la peste, le plus grand nombre de médecins habiles qu'ils pourront trouver, et de concerter avec eux tout ce qu'il y a de mieux à faire pour le soulagement des malades, et la prompte extinction du mal, soit pour les remèdes, soit pour les autres expédiens. Il est à propos que tout cela soit concerté aussi avec l'évêque, afin qu'il puisse juger si les propositions qu'on fait, sont conformes en tout aux règles de la foi, de la Religion et de la charité chrétienne.

Ils doivent aussi faire en sorte que la ville ou paroisse infectée, soit suffisamment garnie d'habiles chirurgiens et apothicaires, pour agir sous les ordres des médecins, et qu'elle soit abondamment pourvue de toutes les drogues que les médecins jugeront nécessaires.

Ils doivent avoir soin que les rues soient toujours tenues dans la propreté, qu'elles soient nettoyées chaque jour, et qu'il y ait assez de tombereaux et d'autres charrois, pour emporter hors de la ville, toutes les immondices qui pourroient l'infecter.

Ils doivent destiner un certain nombre de charrois uniquement à porter les corps morts, pour être enterrés dans le cimetière, et avoir une grande attention à ce qu'on ne mette aucun corps encore vivant dans la même voiture que les morts.

Ils doivent se procurer un grand nombre de voitures on chaises, pour conduire les malades hors de la ville dans les cabanes, et faire en sorte que ces voitures soient toutes de bois sans être rembourrées, afin qu'elles ne puissent pas facilement être infectées par les pestiférés auxquels elles auront servi.

Ils doivent avoir soin que tous les meubles des malades et des morts soient enfermés, après en avoir fait un inventaire sommaire, pour être remis ensuite, en temps et lieu, à qui il appartiendra.

Ils

Ils doivent empêcher de tout leur pouvoir, les vols et autres crimes, que des scélérats ne craignent pas de commettre; comme il s'en est vu des exemples, de nos jours dans Toulon et dans les autres villes de Provence, lorsqu'elles eurent le malheur d'être affligées du mal contagieux.

Ils doivent avoir soin que les cabanes, destinées à enfermer les malades, soient garnies de tous les meubles nécessaires, suivant l'état et la condition de chaque malade; que chacun soit assisté à propos; qu'on donne, aux heures réglées, les alimens nécessaires; que les médicamens soient préparés exactement, suivant les ordonnauces des médecins, et qu'ils soient donnés aux heures prescrites; qu'on ait soin de nettoyer exactement les cabaues dans lesquelles les pestiferés ont demeuré ou sont morts, d'en ôter tous les meubles, et de purifier les cabanes même, en y faisant brûler de la paille avant que d'y mettre d'autres malades.

Ils doivent avoir soin que chaque cabane soit bien fermée en dehors et en dedans, afin que la plaie n'y pénètre pas, et qu'on en change souvent la paille, pour y en mettre de nouvelle.

Ils doivent avoir une attention particulière à ce que les prêtres et autres ecclésiastiques ou religieux, qui ont pris le mal au service des malades, soient soignés d'une manière particulière. Ils ne doivent pas souffrir qu'on les confonde avec le commun du peuple; mais ils doivent avoir égard à leur caractère et à la charité qui les a déterminés à s'exposer à la mort pour leurs frères. Ils doivent les faire conduire dans une voiture particulière, à la cabane qui leur est destinée. Les cabanes, destinées pour les prêtres et autres ecclésiastiques ou religieux, doivent être les plus commodes, soit pour T'emplacement, soit pour l'ameublement, soit pour la facilité d'être servis et d'avoir à propos les médecins et les remèdes nécessaires. On doit destiner des domestiques uniquement pour le service des prêtres malades, Tome II.

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