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vertu qu'autant qu'il plaira à Dieu de leur en donner? pour récompenser la foi de ceux qui en useront avec le respect qu'on doit avoir pour les choses bénites et sanctifiées par les prières de l'Eglise.

2. Nous entendons encore par le mot bénédiction, les prières que l'Eglise fait, au nom de Jésus-Christ, sur certaines choses, pour sanctifier l'usage que nous en faisons pour les besoins de la vie. Elle demande à Dieu, par ces prières, qu'il révoque la malédiction què le péché du premier homme a attirée sur les créatures; qu'il leur rende la bénédiction dont il les honora, Lorsqu'elles sortirent de ses mains tontes-puissantes; que celles qui sont destinées à nos usages, ne nuisent pas à la santé de nos corps; qu'elles ne soient pas un obstacle à notre salut; qu'elles ne servent pas de matière pour nourrir notre ambition, entretenir notre avarice, allumer en nous le feu de la concupiscence; mais qu'elles soient pour nous des occasions de le loner, de le remercier, et de le mieux servir. Voilà l'intention de l'Eglise, quand elle bénit non-seulement ce qui se mange, ce qui se boit, mais encore les maisons, les navires, les bateaux, l'eau des rivières, de la mer, les champs, les vignes, les drapeaux, les étendards, les armes, les habits, etc. Les hommes doivent user de toutes ces choses pour la gloire de Dieu; et l'Eglise, par sa bénédiction et ses prières, veut obtenir de Dieu qu'il daigne rendre inutiles tous les efforts que le démon fait pour engager les hommes à en abuser.

Saint Paul nous apprend que le démon abuse des créatures pour nuire aux hommes, lorsqu'il dit que

toutes les créatures même inanimées et insensibles sont assujetties à la vanité malgré elles; qu'elles sont dans un état violent lorsqu'elles contribuent au déreglement auquel la cupidité des hommes et la malice des d'mous les fait servir; que ce n'est qu'à regret et contre leur inclination, qu'elles se soumettent à l'usage qu'en font les passions des hommes; qu'elles soupirent après leur

délivrance de cet asservissement à la corruption, attendant avec impatience le temps heureux de la liberté et de la gloire des enfans de Dieu, et gémissant dans cette attente comme si elles étoient dans le travail de l'enfantement. Vanitati enim creatura subjecta est non volens, sed propter eum qui subjecit eam in spe. Quia et ipsa creatura liberabitur à servitute corruptionis in libertatem gloriæ filiorum Dei. Scimus enim quod omnis creatura ingemiscit et parturit usqué adhuc.

C'est donc pour cela que l'Eglise bénit les créatures inanimées ces prières sont très-anciennes ; l'usage en étoit déjà établi du temps de saint Paul. Tout ce que Dien a créé est bon, comme dit ce grand apôtre : il ne faut rien rejeter des choses que nous recevons de sa main avec action de grâces, parce qu'elles sont sanctifiées par la parole de Dieu et parole de Dieu et par la prière. Saint Paul approuvoit par-là la coutume des chrétiens qui bénissoient les viandes dont ils vouloient user. Il vouloit dire qu'on n'en devoit rejeter aucune comme mauvaise par sa nature, parce que tout ce qui vient de Dieu est bon; et que, si le péché a été la cause de l'abus que le démon et les hommes font des créatures, la parole de Dieu et la prière que l'on fait à Dieu de répandre sa bénédiction sur elles, les sanctifie, c'est-à-dire, les met dans l'ordre pour lequel elles ont été créées.

Cette coutume de bénir les choses inanimées, dont les fidèles se servent pour les usages ordinaires, paroit avoir toujours subsisté, par les Eucologes et les Rituels les plus anciens et les plus modernes de toute l'Eglise, tant latine que grecque et orientale.

L'Eglise fait un ou plusieurs signes de croix sur toutes les choses qu'elle bénit, pour faire comprendre, par ces signes, que, depuis le péché, ce n'est que par les mérites de Jésus-Christ et par la vertu de sa croix, que les créatures peuvent être bénies de Dieu.

Le péché de l'homme avoit mis une confusion entière

dans la nature. Les démons abosoient de toutes les créatures; et les hommes, dominés par les démons, en abusoient aussi pour satisfaire leurs cupidités. Ce n'est que par les mérites de Jésus-Christ,et par la vertu de sa croix, que les créatures peuvent être délivrées de cet assujettissement à la vanité, dont parle saint Paul; parce que ce n'est que par la grâce que JésusChrist a méritée aux hommes qu'ils peuvent user des créatures selon Dieu; et que le pouvoir du démon sur elles est lié. C'est dans cette vue que saint Paul dit encore que toutes choses ont été rétablies, ré– parées, renouvelées par Jésus-Christ dans le ciel et sur la terre instaurare omnia in Christo, quæ in

cælis et in terra sunt.

C'est pour cela aussi que l'Eglise, voulant bénir quelque créature, et la sanctifier pour l'usage de la Religion commence sonvent par faire sur elle des exorcismes avant que de la bénir car le pouvoir du démon sur les créatures, quoique lié, ne laisse pas d'être grand, Dieu le permettant ainsi, pour exercer les hommes et les porter à la vigilance.

C'est pour la même raison que l'Eglise jette de l'eau bénite sur toutes les choses qu'elle bénit. L'aspersion de l'eau bénite est une espèce d'exorcisme, comme il paroît par les prières que l'Eglise emploie en bénissant

cette eau.

L'Eglise se sert aussi d'encens dans plusieurs de ses bénédictions, pour demander à Dieu que les prières qu'elle fait pour attirer sa bénédiction sur toutes les créatures qu'elle bénit, s'élèvent jusqu'à son trône, comme un parfum d'agréable odeur: dirigatur, Domine, oratio mea, sicut incensum in conspectu tuo.

Enfin l'Eglise emploie, aux consécrations, l'onction des saintes huiles et du saint chrême, pour demander à Dieu qu'il daigne répandre l'onction du Saint-Esprit sur ces choses, afin d'obtenir, par la vertu de cet Esprit saint, les effets pour lesquels on les bénit et on

les consacre. La grâce du Saint-Esprit est appelée onction dans plusieurs endroits du nouveau Testament, et Jésus-Christ est appelé Christ, c'est-à-dire, Oint par excellence; parce que, comme il le dit lui-même après le prophète Isaïe: l'Esprit du Seigneur s'est reposé sur moi; c'est pourquoi il m'a consacré par son onction Spiritus Domini super me; propter quod unxit me.

DES Bénédictions réservées et de celles qui ne le sont pas.

LA bénédiction est un acte d'autorité; et celui qui la reçoit est, comme dit saint Paul, inférieur à celui qui la donne. Pour observer donc, dans l'Eglise, l'ordre et la subordination convenable, cette fonction est réservée à ceux qui y tiennent les premiers rangs, savoir: aux évêques et aux prêtres, en sorte même que, quelques bénédictions qui se rapportent à une fin plus relevée, sont tellement réservées aux évêques, que les prêtres ne peuvent les faire, s'ils n'en ont une commission spéciale. Il y a encore d'autres bénédictions réservées aux évêques, que l'on n'accorde pas aux prêtres la permission de faire, et dont nous ne dirous rien ici..

Il est donc du devoir des prêtres de bien connoître quelles bénédictions ils peuvent faire, et celles qui sont réservées de droit aux évêques; de peur que, par témérité ou par une inconsidération criminelle, ils n'encourent les peines canoniques portées par les ecclésiastiques qui excèdent leurs pouvoirs.

On trouvera dans chaque rituel quelles sont les béné dictions réservées aux évêqnes, et quelles sont celles qu'on appelle sacerdotales, que les prêtres peuvent faire. Nous observerons seulement encore ici, que c'est pour empêcher les abus que cette réserve est établie. Îl est du bon ordre, par exemple, de ne pas souffrir qu'on

se serve, dans le ministère sacré, d'ornemens qui ne soient de l'étoffe, de la qualité et de la forme convenables; de linges qui ne soient décens; que les tabernacles et les ciboires qui doivent être bénits, soient faits en la manière qu'ils doivent l'être, soit pour la matière, soit pour le dedans ou le dehors; qu'on n'expose pas publiquement des reliquaires, des croix, des images, où il y auroit des choses contraires à la bienséance; que les églises, les chapelles, les cimetières, ne soient batis et bénits que quand ils sont dans l'ordre où ils doivent être; que l'on ne bénisse aucune cloche sur laquelle on auroit gravé quelque chose d'indécent en la fondant, et qui ne soit de la grosseur et de la qualité convenables au besoin et à la situation des lieux. Les évêques sont les juges de tout cela. Afin donc qu'il n'arrive jamais de surprise, et qu'on ne bnisse et n'ex pose publiquement rien qui ne soit dans la bienséance requise, l'Eglise réserve la béné– diction de toutes ces choses aux évêques qui en jugent eux-mêmes auparavant; on qui commettent ce jugement et ces bénédictions à des prêtres instruits et expérimentés, capables de décider, au nom de l'évêque sur le bon ou mauvais état de ce qu'on demande à faire bénir.

Entre les bénédictions qu'il est permis aux prêtres de faire, les unes se font avec solennité et avec chant: telles sont, la bénédiction des cierges, le jour de la fête de la purification, ceile des cendres, celle des rameaux, le dimanche qui en porte le nom, et la bénédiction des fonts baptismaux, la veille de la fète de pâques et de celle de la pentecôte. Les autres bénédictions se font avec moins de solenuité. Nous ne parlerons ici que des dernières, et nous renvoyons pour les autres au missel, où le chant et les cérémonies qui doivent s'y observer sout marqués.

Au reste, les prêtres doivent bien se donner de garde, de faire aucune bénédiction des choses qu'ils prévoient,

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