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Ferrieres, en 1575, voulant faire renouveler fon terrier, obtint des lettres de chancellerie. Le lieutenant-général de Montdidier auquel elles étoient adreffées, rendit une premiere ordonnance, portant que tous les habitans de Ferrieres & villages en dépendans euflent à comparoître dans 40 jours au-devant de la principale porte du château. Cette ordonnance fut publiée aux prônes & devant la porte des églifes. Au jour marqué, le lieutenant-général, affifté de fon greffier, s'eft tranfporté au château.

Les habitans ayant comparu, le juge leur fit faire lecture des lettres à terrier. Alors le bailli de Ferrieres, fondé de la procuration du feigneur, comparut & propofa tous les droits qu'il prétendoit appartenir au feigneur, qui font ceux détaillés plus haut.

Les habitans reconnurent la plus grande partie de ces droits, & que le feigneur étoit en poffeffion immémoriale de les percevoir; ils en contefterent quelques

uns.

Le juge ordonna que les habitans fourniroient leurs titres d'exemption, & donna un délai.

Quelque temps après, le bailli ayant requis le lieutenant-général de Montdidier de lui délivrer copie des précédentes vacations, pour fe pourvoir contre les habitans qui avoient contefté les droits, le juge rendit une ordonnance portant que les habitans feroient de nouveau interpellés de déclarer s'ils entendoient perfifter à refufer les droits, & notamment tels & tels que le juge fpécifia), & qu'à cet effet, le préfent acte feroit publié aux prônes, afin que les habitans, tant en général qu'en particulier, euffent à faire leur réponse devant le notaire commis à la confection du terrier.

En conféquence, le notaire fe tranfporte, le 18 mars 1576, devant l'églife; fait de nouveau lecture des droits prétendus par le feigneur, qui étoient les mêmes que ceux déclarés dans la premiere vacation, à l'exception d'une petite réforme dans celui d'épaulage qu'il demandoit d'abord fur chaque menu bétail, & qui étoit reftreint à chaque porc..

« Tous lefquels habitans (eft-il dit) concordamment enfemble, après avoir entendu ladite lecture de mot à mot, ont volontairement & agréablement, tant en voix & confentement commun, & général qu'en particulier, reconnu, confeffé, & approuvé ez nom, & profit dudit feigneur, & acceptant par ledit Boulle, baillif préfent, & par nous notaires ftipulans pour eux, tous & chacun lefdits droits, & par le fpécial, ledit droit bannal, tant du moulin que des preffoirs de Ferrieres, enfemble ledit droit d'épaulage, tel & felon qu'ils font exprimés & déclarés ez-dits articles, à tous lefquels ils fe font foumis & obligés, promettant les tenir entiérement, fans jamais y contre-venir en quelque forte, & maniere que ce foit, fous l'obligation de leurs biens & héritages, & ceux de leurs hoirs préfens & à venir, renonçant à toutes choses à ce contraires ».

Nonobftant un titre auffi précis, MM. de la feconde chambre des enquêtes ont penfé que de pareils droits n'étant pas in recognitionem dominii pouvoient tomber en prescription. Et par un arrêt du 9 août 1769, ils ont ordonné la preuve de la poffeffion des droits conteftés au marquis de Ferrieres,

Sur le vu de l'enquête, la chambre, par un autre arrêt du 20 août 1777, a confirmé le marquis de Ferrieres, & les fieur & dame Lecamus, dans la poffeffion des droits dont il avoit juftifié être en pof feffion, & les a déboutés de leur demande, à fin du droit de vitrilage qu'ils ne percevoient pas depuis plus de 30 ans : Aux Jugés, vu la minute, no 6,

La note de cet arrêt nous a été remife par M. Dupré de Saint-Maur, rapporteur.

9. Seconde quefiion. Le vaffal peut-il prefcrire la quotité des droits feigneuriaux?

Ce point ne peut fouffrir aucune difficulté. L'article 124 de la coutume de Paris le décide expreffément par rapport au cens, quoique la même coutume déclare le fond même du droit abfolument imprescripti→ ble, même par la poffeffion centenaire, comme étant de l'effence de la mouvance roturiere. « Se peut la quotité du cens prefcrire par 30 ans, entr'âgés, & non privilégiés »,

privilégiés», porte l'article cité; & cette décifion fait la loi générale.

Mais l'efpace de 30 ans, fixé par cet article pour le cens, reçoit-il fon application à l'égard de tout droit feigneurial? Il faut diftinguer entre les droits dont la perception eft annuelle, ou même plus fréquente, & ceux qui ne s'ouvrent qu'à des époques incertaines. On doit appliquer à tous ceux de la premiere claffe la décifion de la coutume, parce qu'il y a même raifon. Quant à ceux dont l'exercice fe réitere plus rarement, le fentiment commun eft qu'il faut au moins trois actes, & qu'ils rempliffent ensemble un espace de 30 ou 40 ans. Pour que le vaffal ou le cenfitaire puiffe fe prévaloir du taux auquel les paiemens ont été faits, il eft néceffaire qu'ils aient été uniformes. S'il y avoit eu des variations, quoique toujours à un taux moindre que celui qui eft prétendu par le feigneur, il ne pourroit y avoir de prefcription, parce qu'on ne pourroit pas préfumer une nouvelle convention.

10. Troifieme queftion. Le vaffal peut-il prefcrire l'efpece ou les acceffoires du paie

ment?

Un grand nombre d'auteurs tiennent que l'efpece en laquelle un droit feigneurial a été établi, ne peut être changée par la prefcription. On cite à l'appui de cette décifion, plufieurs arrêts rapportés par Brodeau, fur Paris, art, 12. On peut voir auffi l'arrêt que nous avons rapporté à l'article Cens, § III, n° 7, tom. 4, pag. 352.

Nous ne croyons pas néanmoins que l'on puiffe tirer une regle générale de la décifion de ces arrêts:

1° Il eft généralement reconnu, ainfi que nous l'établirons à l'article Mouvance, que l'on peut, par la prefcription, changer la tenure de l'héritage, & convertir un fief en roture, & vice verfa. Cependant cette converfion ne peut s'opérer qu'en changeant l'efpece de la redevance.

2° L'efpece en laquelle la redevance doit être acquittée, n'appartient pas à l'effence, ni même à la nature de la féodalité, au moins pour l'univerfalité des droits feigneuriaux. Le cens, par exemple, n'est pas plus, par fa nature, une redevance en grains qu'en argent.

Tome VII,

3° On ne peut tirer argument de la diminution qui pourroit réfulter de cette converfion dans la quotité du droit, puisqu'il eft reconnu que la quotité peut être diminuée par la prescription.

II. Quant aux acceffoires du paiement, tels que font l'époque, le lieu, & la forme en laquelle il doit être fait, il femble qu'il faut diftinguer ce qui, dans ces acceffoires, eft établi par la loi, de ce qui dérive feulement de la convention. Ainfi, le cens ne peut ceffer d'être portable par la prescrip tion ordinaire, parce qu'il eft tel par le droit commun; mais rien n'empêche qu'il ne puiffe fe faire à une époque différente de celle qui eft d'ufage dans le canton. Cet objet, au refte, eft ordinairement de peu d'intérêt pour le vaffal.

12, Quatrieme queftion. Les droits échus font-ils prescriptibles?

Il eft unanimement reçu qu'ils font tous prefcriptibles par l'efpace de 30 ans; tant ceux qui font feulement cafuels, que ceux dont l'échéance fe renouvelle à des époques fixes. La raifon pour laquelle il n'y a point lieu de diftinguer, à cet égard, entre les différens droits, eft qu'auffitôt l'échéance, l'objet dû forme une créance perfonnelle féparée du droit en lui-même, & qui ne peut avoir plus de durée que l'action perfonnelle.

Il y a même des pays où les droits échus fe prefcrivent par un efpace beaucoup moindre; en Bourgogne, par exemple par cinq ans.

SECT. 3. De la poffeffion d'un feigneur contr'un autre feigneur,

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cenfuels peut-il être poursuivi. Priviléges leur ménage pendant leur abfence des moudes feigneurs à cet égard.

1. Diverses actions font accordées aux feigneurs, fuivant la nature de leurs droits. Ainfi, le défaut de port de foi donne genéralement lieu à la faifie féodale; & dans plufieurs coutumes, le défaut de paiement des lods & ventes dus fur les rotures, donne ouverture au droit de faifie cenfuelle. L'article 74 de la coutume de Paris permet au feigneur cenfier, faute de paiement du cens, de faifir & brandonner les fruits pendans par les racines fur l'héritage qui en eft chargé. L'article 86 de la même coutume permet au feigneur cenfier de procéder par fimple gagerie, (c'eft à-dire, fans pouvoir tranfporter les meubles du débiteur hors de fa maison) fur les meubles étant dans la ville, fauxbourg & banlieue de Paris, pour le paiement de trois années d'arrérages du cens. Ces difpofitions s'appliquent également aux rentes feigneuriales, champart, &c; mais la coutume n'accorde que l'action fimple pour les lods & ventes. Au refte, dans l'ufage, cette faifie ne fe peut faire qu'en vertu de l'ordonnance foit du juge du feigneur, lorfqu'il a juftice, foit de celui qui a la jurifdiction ordinaire fur le territoire.

En 1778 s'eft élevée la queftion de favoir, fi un feigneur peut obliger fes fujets banniers à affirmer s'ils ont été réguliérement moudre au moulin bannal.

Toutes les terres du feigneur Dherly font réunies en un feul fief appelé le fief Dherly. Sur ce fief font conftruits deux moulins l'un à vent, l'autre à eau.

Ces moulins font bannaux. Les feigneurs Dherly ont le droit & la poffeffion de bannalité: ils y ont été maintenus par arrêts des 14 avril 1609, 23 août 1635, & 31 janvier 1755.

Pour arrêter des contraventions multipliées, le feigneur Dherly, fit affigner en 1778, neuf habitans au bailliage de Roye, & conclut contr'eux à ce qu'ils fuffent condamnés en l'amende & à la reftitution des moutures, pour tout le temps qu'ils s'étoient abfentés des moulins, & qu'ils fuffent renus de fe purger par ferment fur la quantité de grains qu'ils avoient confommée dans

lins.

Ses moyens confiftoient à dire, que la bannalité eft un traité ou contrat entre le poffeffeur & les particuliers; que, quoique la preuve par témoins de la contravention foit admife par l'article 14 de la coutume de Roye, & par une jurifprudence conftante, confirmée par arrêts, il y avoit pourtant impoffibilité phyfique de connoître tous les délits par la voie des témoins. De-là, ajoutoit-il, il fuit qu'il n'y a que la déclaration affirmative des habitans. On ne leur fait aucun tort, en les rendant juges dans leur propre caufe. Le ferment décifoire peut être déféré fur quelqu'efpece de conteftation, & dans quelqu'efpece d'inftance civile que ce foit, fur le poffeffoire comme fur le péritoire, dans les caufes fur une action perfonnelle, comme dans celles fur une action réelle. Jufjurandum & ad pecunias & ad omnes res locum habet, dit la loi 34, ff de jure jur.

Le feigneur Dherly citoit en fa faveur l'article 387 de la coutume de Bretagne, qui permet au feigneur d'avoir le ferment des fujets, dedans l'an feulement, qu'ils ont bien fervi le moulin dudit feigneur. Il citoit encore des arrêts rapportés par Brillon, dans fon Dictionnaire, au mot Bannalité, & un arrêt rapporté par Jacquet, dans la coutume de Montdidier.

Sur ces moyens fentence contradictoire en faveur du feigneur Dherly, le 7 feptembre 1778; appel en la cour: arrêt rendu en 1779, infirmatif de la fentence.

3. Nous avons établi à l'article Complainte, § II, n° 4, tom. 5, pag. 22, que cette action pouvoit être employée par un feigneur, pour raifon de tous les droits de fa terre, de fa terre, de quelque nature qu'ils fuffent, & nous avons cité, à l'appui de cette décifion, un arrêt rendu le 15 juillet 1732, entre la dame Colombet & conforts, propriétaires de la terre de Buffy-le-Château, & les habitans de la paroiffe de Chippe. Nous allons donner un extrait des principes pofés à l'occafion de cette affaire par M. l'avocat-général Gilbert qui y portoit la parole.

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«En général on peut intenter complainte pour tous droits réels... A l'égard

des droits incorporels, il y a deux cas qui ne doivent pas être confondus. L'un eft le cas où le droit incorporel en lui-même n'eft point contefté, où il eft conftant qu'il exifte, & où il ne s'agit que de favoir à qui il appartiendra; en ce cas, nul doute que la complainte ne foit recevable.... Mais il y a un autre cas qui fait plus de difficulté: c'eft celui où l'existence même du droit eft conteftée par le débiteur. Il fembleroit qu'alors la complainte ne peut être reçue; car avant qu'on décide qu'un droit a été poffédé, il faut favoir qu'il exifte; & le cas de la complainte, à l'égard des droits incorporels, doit être le même que pour les droits corporels. Or quant à ceuxci, le cas de la complainte eft toujours entre deux perfonnes qui fe difputent la poffeffion d'un héritage exiftant.... ".

D'ailleurs on ne peut imaginer que deux raisons qui aient fait introduire la complainte. L'une eft l'importance de la poffeffion, qui fait préfumer la propriété.... La feconde eft le defir d'empêcher les voies de fait & la violence... Or ces raisons n'ont pas la même force, quand il ne s'agit que de favoir fi une perfonne doit une redevance à une autre. A quoi on peut ajouter que l'interdit uti poffidetis des Romains, d'où eft dérivée notre action de complainte, n'étoit que pour les immeubles réels, & non pour les droits incorporels. Nonobflant toutes ces raifons, nous voyons que la complainte a été admife en France pour les droits incorporels, non-feulement quand l'existence en eft certaine, mais même contre le débiteur qui nie l'exiftence du droit. C'est ce qui nous eft attefté par tous nos anciens praticiens ».

«Nous avons même plufieurs coutumes qui en difpofent expreffément pour ce cas... telles font Bourbonnois, Grand-Perche, Chaumont... : & cette difpofition eft fondée en raison. En effet, fi un cenfitaire pouvoir arrêter par provifion la perception, en niant l'exiftence du droit, il arriveroit que pendant la durée des procès fur le pétitoire.... le feigneur feroit privé de fon droit, & pourroit même perdre une partie des arrérages, par l'infolvabilité des débiteurs ».

"On s'eft renfermé, de la part des har

bitans, dans une diftinction entre les droits réels, & les droits perfonnels; mais nous penfons que cette diftinction, dans le cas dont il s'agit, ne doit être d'aucune confidération. En effet, qu'il s'agiffe de droits qui fe prennent fur les perfonnes, ou de droits qui fe prennent fur les chofes, il n'en eft pas moins vrai que ces droits font partie du revenu & de la confiftance d'une terre; ainfi ce font toujours des droits qui font partie de l'immeuble, & qui, par cette raifson, peuvent donner lieu à la complainte ».

M. l'avocat-général admit enfuite une exception à ces principes, dans le cas où la queftion s'éleveroit dans une coutume allodiale; ce qui eft fondé sur ce qu'alors, le feigneur ne pouvant prétendre des droits qu'en vertu de titre, il ne peut s'exempter, par la poffeffion annale, de l'obligation de les produire: Journal MS. de MM. Delambon & Maffon.

4. L'action du feigneur, pour le paiement des droits feigneuriaux, eft perfonnelle contre le poffeffeur & fes héritiers, & en même temps elle eft hypothécaire & privilégiée fur l'héritage. Le feigneur peut toujours l'exercer contre le détenteur, fans être obligé de difcuter le débiteur perfonnel.

Le parlement l'a ainfi jugé par arrêt rendu le 23 février 1722, en faveur du baron de Milly, contre le fieur Guittard; dont l'efpece fera rapportée au mot Quint: Aux Jugés, fol. 303, coté 883.

5. L'article 3 du titre 9 de l'ordonnance de 1667 porte, que « ceux qui feront demande de cenfive par action, feront tenus de déclarer dans leur exploit les te→ nans & aboutiffans ». Cette difpofition a donné lieu à la queftion de favoir file feigneur y étoit foumis dans tous les cas?

Le procès-verbal de l'ordonnance, fur cet article, apprend que l'efprit de la loi n'a été d'y affujétir le feigneur, que dans le cas où la conteftation eft entre deux feigneurs prétendant une même cenfive. On y voit que M. Puffort avança qu'un seigneur n'eft point obligé à des vues & montrées, & que M. le premier préfident répartit que cela étoit bon entre le feigneur & le tenancier,

mais que l'intention de fa propofition étoit entre des feigneurs qui prétendoient une même cenfive. Il paroît donc certain qu'un feigneur n'eft point obligé à indiquer les tenans & aboutiffans des héritages fur lefquels il demande le cens, lorfqu'ils font fitués dans l'étendue de fa mouvance, & que la demande e dirigée contre le te

nancier.

6. Quant au juge pardevant lequel le feigneur peut porter les contéftations qu'il a avec fes tenanciers, relativement aux droits feigneuriaux, on a douté long-temps file juge du feigneur pouvoit connoître des conteftations entre le feigneur & fes jufticiables. L'ordonnance de 1667, au titre des récufations de juges, porte à ce fujet : «Nentendons exclure les juges de feigneurs de connoître de tout ce qui concerne les domaines, droits ou revenus ordinaires, o cafuels, tant en fief que roture, de la terre, même des baux, fous baux & jouiffances, circonftances & dépendances, foit que l'affaire fût pourfuivie à la requête du procureur fifcal, ou à celle du feigneur; & à l'égard des autres actions, où le feigneur fera partie ou intéreffé, le juge n'en pourra connoître ».

Il résulte clairement de la difpofition de cet article, que le feigneur peut porter devant fon juge la demande qu'il forme pour raifon de fes droits feigneuriaux.

Ce droit des feigneurs eft aujourd'hui fi conftant, que les vaffaux ne pourroient s'y fouftraire pour raifon de committimus comme nous l'avons établi au mot Committimus, § III, n° 2, tom. 4, pag. 686. «Quel que puiffe être le privilége des nobles & des eccléfiaftiques, dit M. le préfident Bouhier, fur la coutume de Bourgogne, chap. 52, il ne fauroit avoir lieu quand ils font affignés pour droits feigneuriaux. Car, en ce cas, ils ne feroient pas reçus à décliner la jurisdiction des juges des feigneurs ».

«Le privilége de fcolarité, de garde gardienne, dit Brodeau fur Louet, lett. R, fomm. 36, eft auffi infuffifant pour obtenir le renvoi d'une caufe dans laquelle il feroit mention d'une rente féodale & feigneuriale, ou autres droits feigneuriaux & féodaux, laquelle, nonobftant le privilége,

doit être traitée pardevant le juge du feigneur ». Il cite des arrêts à l'appui de ce fentiment.

Mais cette décifion doit être reftreinte au cas où le droit en lui-même eft reconnu, & où il ne s'agit que de faire prononcer une condamnation en paiement. Si, au contraire, il eft dénié par le vaffal ou le cenfitaire, ou qu'on le foutienne moins confidérable que celui qui eft demandé, la conteftation devra être portée devant le juge ordinaire, c'eft-à-dire, devant celui qui a la jurifdiction ordinaire fur les parties, indépendamment de leur qualité de feigneur & de vaffal. Ceft ce qui a été jugé par arrêt du 12 août 1712, rapporté au Journal des audiences, tom. 16. C'eft auffi ce que décide d'Argentré, fur la coutume de Bretagne, art. 45, no 9: « Cum lis inter duos inflituitur, & is qui reus eft negat fe vaffallum effe, cum alter contra intendat, putant ordinarii esse jurisdidionem; quod verum eft n.

Il nous femble cependant, d'après les difpofitions des articles 28, 41 & 42 de la coutume de Bretagne, que l'efprit de cette coutume eft de donner feulement, en ce cas, au vaffal ou au cenfitaire, le droit de décliner la juftice du feigneur; mais que le juge de ce dernier n'eft point abfolument incompétent.

7. Nous avons dit que le vaffal ou le cenfitaire affigné pour raifon des droits feigneuriaux, ne pouvoit porter l'affaire devant le juge de fon privilége. En eft-il de même du feigneur?

L'article 24 du titre, 4 de l'ordonnance femble décider expreffément pour la négative, en rejetant généralement les committimus par rapport aux demandes pour paffer déclaration ou titre nouvel de cenfives, ou pour paiement des arrérages qui en font dus. Cependant l'application de cette difpofition paroît être reftreinte, dans la pratique, au vaffal & au cenfitaire ; & l'on voit affez fouvent des feigneurs porter pareilles demandes devant le juge de leur privilége. On dit, pour appuyer cette interprétation, qu'il ne doit pas dépendre d'un tenancier de fe fouftraire à la juris diction de fon feigneur, & que tel ett le motif de la loi; mais que ce motif e&

de

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