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rapports plus ou moins rapprochés avec notre monarchie, pour y découvrir tel ou tel acte ayant trait à certaines transactions avec l'Autriche. Nos investigations ne s'arrêtèrent point aux publications officielles. Il nous fallait examiner les différents recueils d'actes publics paraissant à l'étranger qui, tout en étant comme le nôtre des travaux privés, ni émanés ni revêtus d'une autorité officielle, contiennent pourtant assez souvent des documents qui, soit par oubli soit par un motif quelconque ne sont point insérés dans les publications officielles.

Tout ce qui, en fait d'actes publics, se trouve déjà imprimé, soit par les gouvernements respectifs soit par les soins de particuliers, a passé à l'état de propriété publique et doit par conséquent avoir sa place dans un recueil consacré à rassembler des actes de cette nature.

Toutefois notre Recueil serait resté incomplet, s'il ne nous avait pas été donné d'étendre nos recherches jusqu'aux archives du ministère des affaires étrangères. C'est la libéralité éclairée et bienveillante de ce ministère, qui nous a mis à même d'enrichir les premiers six volumes de notre Recueil des documents les plus importants, et c'est à la même libéralité que nous sommes redevables d'avoir pu dans l'intérêt de la Nouvelle Suite de notre Recueil emprunter aux archives du ministère les actes les plus récents et les plus intéressants. Nous nous acquittons d'un vrai devoir en exprimant ici notre profonde reconnaissance pour la permission que le ministère a bien voulu nous accorder, et qui a contribué d'une manière si efficace à l'accomplissement de notre voeu et de notre tâche.

Il est presque superflu d'ajouter que ceux qui auront recours à notre Recueil trouveront indiquée au-dessous de chaque acte la source à la quelle nous avons puisé. Il reste d'ailleurs entendu, qu'à peu d'exceptions près, dictées par des vues d'utilité éminemment pratique, nous publierons les traités dans leur langue respective, ou en présence de deux textes, dans celle qui, de l'accord des parties contractantes a été déclarée être le texte original. Nous ne contestons nullement l'utilité, parfois même, lorsqu'il s'agit de l'exécution de certaines conventions de caractère administratif, la nécessité d'une traduction. Elle pourra même le cas échéant servir de moyen subsidiaire d'interprétation. Mais l'original restera toujours la base et la source princi

pale des droits et des obligations stipulés. Au surplus les langues, allemande, française, anglaise, italienne, les seules dans lesquelles presque tous les traités européens sont rédigés, sont des langues accessibles à tout le monde et comprises par tous ceux qui s'inté ressent aux affaires publiques.

Fidèles au système que nous avons observé dès le commencement de notre Recueil, nous avons pris à tâche, et cette tâche est suffisamment ardue, de publier les traités et les conventions conclus par l'Autriche avec les puissances étrangères. Nous n'avons reçu dans le cadre de notre travail des correspondances, des notes et autres documents diplomatiques, qu'autant qu'ils contiennent ou concernent des conventions publiques, ne seraient-ce même que de simples déclarations ministérielles, qui pourtant ne sont pas moins obligatoires que des actes revêtus des formalités les plus solennelles.

Nous nous sommes proposé de recueillir en un corps tous les actes publics de notre monarchie, relatifs au droit des gens proprement dit, et à cette partie du droit public, qu'on appelle le droit international privé, et dont l'importance grandit de jour en jour.

Nous livrons ces actes au public en entier, sans en retrancher la moindre partie, sans y ajouter aucun commentaire, aucune interprétation. Un extrait fait par un particulier dans un recueil non officiel comme le nôtre aurait aussi peu de valeur que des interprétations gratuites et purement théoriques. Quelle utilité pourraient done offrir des extraits? Quelles seraient les parties censées moins importantes qu'on voudrait retrancher? Ce système de mutilation n'en traînerait-il pas comme corrolaire la suppression de tous les actes réputés être d'un intérêt purement historique? Tel traité d'ailleurs, je l'ai dit dans la préface du premier volume du Recueil, qui à première vue ne paraît être d'aucune utilité pratique, devient quelquefois de la plus grande importance, quand il est invoqué par une des parties intéressées, ou se rattache à des traités de nature analogue.

On le déterre alors de l'oubli dans lequel il a été plongé, on le commente et en reproduit les dispositions principales. On s'en sert de modèle pour l'avenir, on le cite comme preuve à l'appui de l'usage du droit des gens.

Nous ferons enfin observer, qu'un recueil, rédigé dans les vues que nous venons d'exposer, est un vrai recueil de pièces justificatives

de l'histoire diplomatique et politique du temps qu'il est destiné à embrasser. L'utilité historique marche ici de pair avec l'utilité proprement dite on pratique. Les grands traités régulateurs du système politique de l'Europe ne sont que le résultat de l'évolution historique d'une époque donnée, et ils contiennent à leur tour les germes du développement ultérieur de ce système. L'historien futur des vingt années mémorables qui se sont écoulées depuis 1856, trouvera dans la Nouvelle Suite de notre Recueil des matériaux abondants pour écrire l'histoire des rapports internationaux de l'Autriche.

Quant à nous, nous n'empiétons nullement sur la tâche de T'historien. Nous recueillons comme dans un vaste réservoir toutes les sources qui viennent s'y déverser tout en prenant naissance dans des endroits éloignés les uns des autres.

Un jeune savant distingué Mr. Frédéric Martens, professeur à l'université impériale de St Pétersbourg, qui, marchant sur les traces de son célèbre Homonyme de Göttingue, a su par ses connaissances aussi étendues que profondes en matière de droit international, se concilier les suffrages de tous les hommes compétents, vient de publier par ordre et sous les auspices du ministère des affaires étrangères de la Russie le troisième volume d'une collection des traités de la Russie, et particulièrement des traités conclus par cette puissance avec l'Autriche. Un aperçu général servant d'introduction au premier volume développe l'histoire des rapports internationaux entre ces deux puissances depuis la fin du 17° siècle jusqu'à nos jours. Chaque traité est précédé d'un résumé ou sommaire historique tiré des correspondances diplomatiques conservées aux archives de l'État. Sans vouloir contester le grand mérite de l'éditeur, nous avons ici à faire à une collection officielle, annoncée comme telle dans le titre même de l'ouvrage. Mr. Martens se trouve dans une position plus favorable qu'un particulier réduit à ses propres forces. Le directeur des archives de Moscou lui a fourni des extraits précieux des actes diplomatiques qui s'y trouvent, et Mr. Martens était à même d'en constater l'exactitude en les comparant avec les originaux. Il travaille par ordre d'un grand gouvernement et secondé par ce gouvernement, agissant dans ses intentions, il pouvait à son gré élargir le cadre de son travail. Mais n'aurait-il pas mieux valu donner au public un livre consacré exclusivement à l'histoire diplomatique de la Russie,

au lieu de nous en donner des fragments détachés et sans liaison intérieure? Mieux vaut encore après tout le système adopté par Schöll dans son histoire des traités de paix, continuée depuis, mais avec moins de discernement critique par le Comte de Garden. Les documents y servent plutôt de commentaire au récit historique, pendant que la collection de Mr. Martens observe une marche inverse et moins complète. La partie historique dans cet ouvrage absorbe et inonde pour ainsi dire complètement celle qui, à notre avis devrait occuper la première place, c'est-à-dire les traités. Trois volumes in quarto nous donnent 98 traités et embrassent une époque plus que centenaire. Le premier volume de la Nouvelle Suite de notre Recueil contient à lui seul pour une époque biennale 76 documents publics. Loin de nous la pensée d'amoindrir le mérite du beau et consciencieux travail de Mr. Martens. Nous sentions seulement le besoin d'expliquer pourquoi il n'entrait pas, ni ne pouvait entrer dans notre idée de changer le plan de notre ouvrage, tel que nous l'avions conçu dès le principe.

Bien entendu que la Nouvelle Suite du Recueil tout en se rattachant au Recueil primitif, dont elle forme la continuation, ne laisse pas d'être par elle-même une collection indépendante, en particulier, surtout pour ceux qui ne prendront en considération que les dernières vingt années.

Aussi la table des matières qui se trouvera à la fin du sixième ou dernier volume de cette Nouvelle Suite du Recueil n'enregistrera-t-elle que les traités conclus depuis 1856 jusqu'à la fin de 1876. Cette table des matières sera dressée, à l'instar de celle qui termine Tancien Recueil, sur la base d'une triple division, dont la première partie spécifiera les traités etc. d'après l'ordre chronologique, la seconde d'après les différents États avec lesquels l'Autriche avait conclu des traités et des conventions, la troisième enfin d'après les matières formant l'objet, le contenu de ces accords internationaux.

A cette occasion nous ne pouvons pas nous dispenser de dire quelques mots sur le titre de notre Recueil. Ce Recueil de même que sa nouvelle suite porte en tête du livre le nom de l'Autriche, et il est destiné à rassembler les traités conclus par l'Autriche avec les puissances étrangères. Depuis 1867 a été adoptée la dénomination officielle d'Autriche-Hongrie. D'abord notre collection n'est pas offi

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cielle, nous l'avons dit plus haut. En second lieu des traités nombreux ont été conclus par notre monarchie avant 1867. Enfin cette dénomination glorieuse de l'antique monarchie et de l'illustre dynastie d'Habsbourg est consacrée par l'histoire et l'usage diplomatique des siècles. Tout récemment on n'a parlé que d'une alliance des trois Empereurs, sans que personne ait songé à vouloir déroger par cela aux droits de l'Empereur comme Roi d'Hongrie, ni à exclure la Hongrie de la monarchie, dont elle forme pour son bonheur et celui de la monarchie-même une partie intégrante et inséparable.

Pour revenir sur notre Recueil, nous rappellerons au bienveillant lecteur de cette préface, que le point de départ de notre travail originaire était la paix d'Hubertsbourg de 1763 et que nous l'avions conduit jusqu'au traité de Paris du 30 mars 1856. C'est presque un siècle rempli des guerres les plus sanglantes, de révolutions, d'usurpations, enfin des efforts des grandes puissances à remanier ou à reconstruire la carte de l'Europe, qui forment l'objet des six premiers volumes. Mais les vingt années qui succèdent à la paix de Paris du 30 mars 1856, comparées avec le siècle qui les précède, ne sont pas moins fécondes en grands événements qui commencèrent par ébranler et finirent par bouleverser l'oeuvre du Congrès de Vienne. Ce Congrès s'était proposé de reconstruire sur des bases indestructibles le système politique de l'Europe, dont les fondements avaient été sapés par les guerres de la révolution et de l'Empire français. A peine quinze ans étaient révolus, que commença le morcellement de l'oeuvre réputée impérissable de cette assemblée, la plus grande et la plus illustre depuis le Congrès de Westphalie. La branche aînée des Bourbons fut détrônée, celle d'Orléans occupa sa place. Bientôt la revolution de juillet trouva un retentissement dans celle de Bruxelles, et le Royaume-Uni des Pays-Bas, une des créations nouvelles du Congrès de Vienne, fut seindé en deux États. Les souverains et les diplomates qui avaient reconnu le Royaume de Belgique, eurent soin d'ajouter à l'acte de reconnaissance la clause suivante: c'est que l'érection du nouveau royaume ne porterait aucun préjudice à l'équi libre politique de l'Europe. Cette sollicitude pour le maintien de Téquilibre politique paraît touchante, pour ne pas dire naïve, lorsqu'on rapproche les dates de 1831, de 1856, de 1866 et de 1871, qui sont autant d'étapes dans la série des événements les plus récents

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