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registre particulier sur lequel ils inscrivent les noms, l'âge et le
domicile de ces gardes champêtres.
Article 311. Les officiers
et sous-officiers de gendarmerie s'assurent, dans leurs tournées,
si les gardes champêtres remplissent bien les fonctions dont ils
sont chargés; ils donnent connaissance aux sous-préfets de ce
qu'ils ont appris sur la conduite et le zèle de chacun d'eux. »
L'ordonnance du 29 novembre 1820 modifie les formes de leur
nomination « Article 1er. Le choix des gardes champêtres sera
fait par les maires et sera approuvé par les conseils municipaux.
Le sous-préfet de l'arrondissement leur délivrera une commission.
Article 2. Le changement ou la destitution des gardes cham-
pêtres ne pourra être prononcé que par le sous-préfet, sur l'avis
du maire et du conseil municipal du lieu ; le sous-préfet soumettra
son arrêté à l'approbation du préfet. » Enfin l'article 13 de la loi
du 18 juillet 1837 porte: « Le maire nomme les gardes cham-
pêtres, sauf l'approbation du conseil municipal. Ils doivent être
agréés et commissionnés par le sous-préfet; ils peuvent être sus-
pendus par le maire; mais le préfet peut seul les révoquer. »
Telle est la législation sur les gardes champêtres des communes.

1192. Les gardes particuliers n'ont donné lieu qu'à une seule disposition législative. L'article 4 de la loi du 20 messidor an III reconnaît leur institution en ces termes : « Tout propriétaire aura le droit d'avoir pour ses domaines un garde champêtre ; il sera tenu de le faire agréer par le conseil général de la commune et confirmer par le district. » Ce droit s'applique au fermier aussi bien qu'au propriétaire '. L'article 40 du Code du 3 brumaire an IV reproduit cette disposition, en ajoutant seulement : « Il sera tenu de le faire agréer par l'administration municipale. » La Cour de cassation a déclaré, après quelque hésitation, que cette dernière disposition avait été modifiée par l'article 9 de la loi du 28 pluviôse an VIII, ainsi conçu: « Le sous-préfet remplira les fonctions exercées maintenant par les administrations municipales.» Les motifs de cette décision sont : « Que si, par la loi du 3 brumaire an IV, les particuliers qui usaient du droit de nommer des gardes champêtres pour la conservation de leurs propriétés étaient tenus de les faire agréer par l'administration municipale, 1 Arr. cass. 27 brum. an XI (J. P., tom. III, p. 54). 2 Arr. cass. 21 août 1823 (J. P., tom. XVIII, p. 134).

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cette attribution, faite aux administrations municipales, a été transférée par l'article 9 de la loi du 28 pluviôse an VIII aux sous-préfets créés par cette loi; que les gardes champêtres et forestiers des particuliers, ainsi nommés et agréés, ont les mêmes droits et les mêmes attributions que les gardes des communes, après avoir prêté le serment prescrit par l'article 5, section VII, de la loi du 28 septembre et 6 octobre 1791; que, comme eux, ils sont agents de la force publique et officiers de police judiciaire; que l'ordonnance du 29 novembre 1820 n'est point applicable aux gardes particuliers, mais seulement aux gardes des communes nommés par les maires '.'» Cette décision devrait-elle être la même sous l'empire de la loi du 18 juillet 1837, qui a restitué à l'autorité municipale une partie de ses attributions et notamment le droit de nommer ses préposés et ses gardes? Ne pourrait-on pas décider, conformément à l'article 13 de cette loi, et en revenant à l'article 4 de la loi du 20 messidor an III, que les gardes des particuliers doivent être agréés par le conseil municipal et confirmés par le sous-préfet?

1193. Cela posé, quelles sont les attributions des gardes des communes et des gardes des particuliers? Ces attributions, il importe de constater ce point avant tout, sont les mêmes pour les uns et pour les autres : l'article 16 du Code d'instruction criminelle les comprend tous dans ses dispositions et leur confère les mêmes droits; il n'y a donc lieu de faire aucune distinction entre eux quant à la nature de leur compétence, la différence ne s'élève qu'en ce qui concerne le territoire auquel cette compétence s'applique : le garde de la commune exerce ses fonctions dans toute l'étendue du territoire communal, le garde particulier n'exerce les siennes que dans les limites des propriétés confiées à sa surveillance 2.

Ces fonctions sont définies par l'article 16 du Code d'instruction criminelle, qui dispose que « les gardes champêtres, considérés comme officiers de police judiciaire, sont chargés de rechercher, chacun dans le territoire pour lequel ils auront été assermentés, les délits et contraventions de police qui auront porté atteinte aux propriétés rurales et forestières » .

1 Arr. cass. 8 avril 1826 (J. P., tom. XX, p. 351).
2 Arr. cass. mars 1828 (J. P., tom. XXI, p. 1239).

Il faut que les gardes champêtres soient assermentés. C'est la prestation de leur serment qui est la base de leur caractère public; c'est cette prestation qui peut seule assurer l'efficacité légale de leurs procès-verbaux : ils ne sont officiers de police judiciaire, ils ne peuvent exercer un acte quelconque de leurs fonctions qu'à partir du moment où ils ont accompli cette solennelle formalitė. Avant le décret du 1er mars 1848, ils étaient soumis à un double serment; et le serment politique aholi par ce décret ayant été rétabli par l'article 14 de la constitution du 14 janvier 1852, ils doivent le prêter encore ainsi que le serment spécial : « De veiller à la conservation de toutes les propriétés qui sont sous la foi publique et de toutes celles dont la garde leur aura été confiée par l'acte de leur nomination. » Ce serment, dont la formule est écrite dans l'article 5, section VII, de la loi du 28 septembre6 octobre 1791, est commun aux gardes des communes et des particuliers.

Les gardes champêtres, qui sont institués pour assurer les propriétés et conserver les récoltes, recherchent les délits et les contraventions qui auront porté atteinte aux propriétés rurales et forestières. Or, quels sont ces délits et ces contraventions? Les délits et contraventions qui portent atteinte aux propriétés rurales sont prévus par le titre II de la loi du 28 septembre6 octobre 1791, par les articles 444-462 du Code pénal, et par les paragraphes 8, 9, 10, 13 et 14 de l'article 471; 9 et 10 de l'article 475; 10, 11 et 12 de l'article 479 du même Code. Les délits et contraventions qui portent atteinte aux propriétés forestières sont prévus soit par le Code pénal, soit par le Code forestier.

1194. Mais, à l'égard de cette dernière catégorie d'infractions, une question de compétence s'élève, Les gardes champêtres des communes ont-ils le droit de rechercher les délits forestiers commis sur le territoire de leur commune, même dans des bois soumis au régime forestier? Il est certain que l'article 16 du Code d'instruction criminelle contient une disposition générale, que les gardes champêtres et les gardes forestiers sont concurremment appelés à rechercher à la fois les délits ruraux et les délits forestiers, et que les uns et les autres, quoiqu'ils soient principalement affectés par leur mission spéciale à rechercher, les premiers, les délits ruraux, les autres, les délits forestiers, ont néanmoins

une compétence accessoire en ce qui concerne les faits qui ne font pas l'objet de leur principale attribution. C'est, d'après cette interprétation, qui est fondée sur les termes explicites de la loi, que nous avons reconnu, dans le paragraphe précédent, aux gardes forestiers le droit de constater les délits ruraux. Il est donc à nos yeux hors de doute que les gardes champêtres ont le droit réciproque de constater les délits forestiers; mais le doute s'élève lorsqu'il s'agit de poser la limite dans laquelle ce droit peut s'exercer. Peuvent-ils l'étendre sur tout le territoire de la commune, lors même qu'il s'y trouve des bois de l'État? leur compétence s'étend -elle même dans ces bois? La législation fournit, non des textes, mais deux considerations graves qui conduisent à une solution négative. La première est que les gardes champêtres n'ont jamais eu le pouvoir, avant le Code d'instruction criminelle, de rechercher les délits forestiers dans les bois de l'État. Les articles 5, 6 et 7 de la section VII de la loi du 28 septembre-6 octobre 1791, qui établissent leurs pouvoirs et leur responsabilité, les restreignent à la recherche et à la constatation des délits de police rurale. L'article 38 du Code du 3 brumaire an IV dispose également que l'objet de leur institution est la conservation des récoltes, fruits de la terre et propriétés rurales de toute espèce, et l'article 39 explique le sens de ces termes en instituant des gardes forestiers pour la conservation des bois et forêts. Or, l'article 16 de notre Code n'a point exprimé l'intention d'innover et de modifier ces lois antérieures; s'il réunit dans une désignation collective, comme l'avait fait l'article 41 du Code de l'an IV, les gardes champêtres et les gardes forestiers, et s'il attribue aux uns et aux autres une compétence en général commune, il n'efface point les différences que leur mission distincte élevait antérieurement entre eux et ne change point les limites que leur compétence respective avait reçues. En second lieu, ni la loi du 15-29 septembre 1791 sur l'administration forestière, ni le Code forestier, qui déterminent les agents chargés de la surveillance des bois de l'État, n'ont appelé les gardes champêtres à ce service; les bois et forêts soumis au régime forestier sont régis d'après des règles spéciales; les agents qui concourent à leur surveillance sont assujettis à des conditions et à une responsabilité qui ne pèsent point sur les gardes champêtres; il у donc lieu de conclure que ces gardes doivent demeurer en dehors

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d'un service spécial qui exige une aptitude qu'ils n'ont pas, et que leur compétence, en ce qui concerne les délits forestiers, se borne à ceux de ces délits qui sont commis dans les bois des particuliers. C'est dans ce sens que cette question a été résolue par la Cour de cassation'.

1195. Au surplus, la règle générale de cette matière est que la compétence des officiers de police judiciaire doit être strictement restreinte dans les termes de la loi; car, comme le dit nettement l'arrêt qui vient d'être cité, « toute délégation d'un pouvoir public ne peut valablement résulter que d'une disposition expresse de la loi ». C'est d'après cette règle que la Cour de cassation a reconnu que les gardes champêtres n'ont aucun pouvoir pour constater une contravention à un règlement de police sur le balayage : « Attendu qu'ils ne sont chargés, selon l'article 16, que de rechercher les délits et les contraventions qui auront porté atteinte aux propriétés rurales; que les procès-verbaux par eux dressés, en matière de police urbaine, ne peuvent donc pas faire foi des faits qui s'y trouvent énoncés, jusqu'à preuve contraire, conformément à l'article 154. » Il a été également déclaré par un autre arrêt «que les gardes champêtres et les gardes forestiers n'ont d'autre pouvoir, comme officiers de police judiciaire, que de constater les délits et les contraventions de police qui auront porté atteinte aux propriétés rurales et forestières; qu'ils ne sont pas chargés de constater les contraventions relatives à la police urbaine; que, dans l'espèce, il ne s'agissait pas d'une contravention ayant porté atteinte à une propriété rurale, mais seulement d'une contravention de police urbaine; que, dès lors, le garde champêtre était sans caractère légal pour la constater, que le juge de paix, en refusant force probante à son procèsverbal, n'a commis aucune violation de la loi3». Il importerait peu que le maire eût spécialement délégué le garde champêtre de la commune pour constater les contraventions à un règlement de police, car une telle délégation ne peut émaner que de la loi. La Cour de cassation a encore reconnu ce point en déclarant : Que la loi des 16-22 juillet 1791, titre Ier, article 46, donne

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1 Arr. cass. 13 janv. 1849 (Bull., no 10).

2 Arr. cass. 7 mai 1840 (Bull., no 127).

3 Arr. cass. 2 déc. 1848 (Bull., no 306).

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