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procès-verbaux ; pourquoi celte prescription, si le droit de verbaliser sortait tout entier de l'article 1er de ces deux règlements? Pourquoi cette énumération si longue des délits et des contraventions qui tombent sous leur surveillance, si tous les délits et toutes les contraventions sont compris implicitement dans ce même article 1er? Il nous paraît donc que le texte invoqué par les arrêts cités ne serait pas suffisant pour attribuer aux gendarmes le droit de constater par des procès-verbaux valables les contraventions prévues par le Code pénal ou par les règlements de police. Toutefois nous devons ajouter que le décret du 1er mars 1854 nous semble décider la question dans le sens de la jurisprudence. En effet, d'une part, l'article 488 porte que la gendarmerie dresse procès-verbal des crimes, délits et contraventions de toute nature qu'elle découvre; et d'une autre part, l'article 498 déclare sans aucune distinction que ses procès-verbaux font foi jusqu'à preuve contraire. Ainsi, à côté de la délégation spéciale de certaines contraventions confiées à sa surveillance, le décret semble lui attribuer une délégation générale pour toutes les contraventions qu'elle découvre.

Tous les procès-verbaux faits par la gendarmerie doivent être établis en double expédition dont l'une est remise dans les vingtquatre heures à l'autorité compétente, et l'autre est adressée au lieutenant de l'arrondissement. (Ordonn. du 29 oct. 1820, art. 187, et décr. du 1er mars 1854, art. 495 et 497.)

CHAPITRE SIXIÈME.

DES AGENTS DE POLICE ET DES AGENTS DE LA FORCE PUBLIQUE.

§ I. Des agents de police.

1261. Caractère et pouvoirs des agents de police, appariteurs ou inspecteurs de police. 1262. Distinction faite par la jurisprudence entre ces agents et les officiers de police

judiciaire. ́

pas

des officiers publics

1263. Les officiers de paix et sergents de ville de Paris ne sont et leurs rapports ne sont que de simples renseignements. 1264. La même règle s'applique aux adjudicataires des bacs et bateaux, aux cantonniers à l'égard des faits en dehors de la grande voirie, aux conducteurs des voitures publiques et inspecteurs des halles et marchés.

1265. Elle s'applique également aux simples citoyens qui dénoncent les crimes et délits

dont ils sont les témoins.

§ II. Des agents de la force publique.

1266. Quels sont les agents de la force publique.

1267. Leurs attributions sont de prêter main-forte et d'agir sur les réquisitions des autorités civiles.

1268. Dans quels cas les officiers de police judiciaire doivent-ils requérir la force armée? 1269. Les agents de la force publique procèdent à l'exécution des mandats de justice.

§ Ier. Des agents de police.

1261. Tous les agents qui viennent d'être énumérés dans le chapitre précédent tiennent de la loi, outre un droit de recherche, un droit de constater par des procès-verbaux certains délits ou certaines contraventions.

Nous arrivons maintenant à une classe d'agents qui sont investis du droit de rechercher seulement et non du droit de constater les délits et les contraventions au lieu de les constater, ils se bornent à les dénoncer. Leurs rapports et leurs procès-verbaux, s'ils en dressent, ne font aucune preuve ; ils ne valent que comme simples renseignements. Leur concours même, enfermé dans ces limites, est utile encore à la police judiciaire; mais son efficacité, nous le croyons du moins, est subordonnée à la condition de maintenir soigneusement le cercle que lui a tracé la loi.

Les agents de police, désignés successivement sous les noms d'appariteurs, d'inspecteurs ou de sergents de ville, avaient été investis par la loi du 19-22 juillet 1791 du droit de constater par des procès-verbaux les contraventions de police. L'article 12, titre Ier, de cette loi, portait : « Les commissaires de police, dans les lieux où il y en a, les appariteurs et autres agents assermentés dresseront, dans leurs visites et tournées, le procès-verbal de contravention en présence de deux des plus proches voisins. »> Cette disposition n'a été reproduite ni par le Code du 3 brumaire an IV, ni par le Code d'instruction criminelle, qui, l'un et l'autre, ont organisé la recherche et la constatation des contraventions de police. Ne faut-il pas en conclure que l'attribution qu'elle avait établie n'existe plus? Puisque la loi nouvelle n'a appelé à cette fonction que les commissaires de police et les maires et adjoints, ne suit-il pas que les agents subalternes de la police, s'ils ont encore le droit de rechercher les contraventions comme agents de l'autorité municipale, n'ont plus le droit de les constater? N'est-il pas évident que la loi leur a dénié le caractère qui donne

aux actes de la police judiciaire leur force et assure leurs effets? L'article 77 du décret du 18 juin 1811 les a rangés, à la vérité, parmi les agents de la force publique; ils peuvent donc en cette qualité prêter aide et main-forte aux officiers aux actes de justice; mais ils ne peuvent ni remplacer ces officiers, ni procéder à aucun acte: la loi n'a voulu déposer les pouvoirs de la police judiciaire, quelque limités qu'ils soient, qu'à des mains sûres; un procèsverbal, pour faire preuve, doit commander la confiance du juge; il ne doit donc émaner que d'agents que leur position rend dignes de cette confiance.

1262. La Cour de cassation a défini le caractère légal de ces agents, en déclarant : « « Que la loi reconnaît et consacre l'existence d'individus qui, sous le nom d'appariteurs ou agents de police, sont institués par l'autorité municipale pour exercer, par ses ordres, la surveillance qu'elle croit devoir leur confier sur les diverses parties du ́service; qu'à la vérité, les lois postérieures à celles du 22 juillet 1791 ont retiré à ces agents le droit de dresser des procès-verbaux faisant foi en justice; que leurs rapports n'ont d'autorité devant les tribunaux que lorsqu'ils sont appuyés par des preuves légales; mais que ces rapports sont regardés comme des éléments de poursuites, comme des documents utiles aux investigations de la justice; que l'article 77 du règlement du 18 juin 1811 assimile les agents de la police aux agents de la force publique, et leur impose les mêmes obligations; qu'il résulte de la combinaison, d'une part, de cet article 77, et de l'autre, des articles 16 et 19 de la loi du 17 mai 1819, que les agents de la police peuvent être considérés sous un double rapport: 1° comme agents de la force publique, lorsqu'ils agissent en exécution de l'article 77 du décret du 18 juin 1811; 2° comme agents de l'autorité municipale publique, lorsque, par les ordres de l'autorité qui les a institués, ils exercent la surveillance que cette autorité leur a confiée 1. » De ce principe, la cour a déduit, dans une espèce, « Que le procès-verbal qui n'est dressé que sur le rapport d'un agent de la police administrative, lequel n'a pas la qualité ni le caractère d'officier de police judiciaire, ne peut

1 Arr. cass. 28 août 1829 (J. P., tom. XXII, p. 1422), et conf. 17 déc. 1841 (Bull., no 361), et 2 oct. 1847 (Bull., no 246).

1

servir de base à une condamnation », et dans une autre, « Que les agents de la police administrative ont un caractère public comme agents de surveillance et d'exécution; mais qu'ils ne sont pas officiers de police judiciaire, et qu'une loi seule pourrait donner à leurs rapports le caractère de procès-verbaux ayant soi en justice; que leur témoignage ne peut donc être invoqué que quand il est produit devant les tribunaux, sous la foi du

serment

1263. Faut-il faire une exception à l'égard des officiers de paix établis pour le service de la ville de Paris, par les lois des 21-29 septembre 1791 et 23 floréal an IV? La loi du 21-29 septembre 1791 avait institué vingt-quatre officiers de police, sous le nom d'officiers de paix, pour le service spécial de Paris. L'article 10 de la loi du 19 vendémiaire an IV abrogea cette loi en ces termes : « Les officiers de paix sont supprimés. » La loi du 23 floréal an IV les rétablit dans les termes suivants : « Art. 1er. L'article 10 de la loi du 19 vendémiaire dernier, en ce qui concerne la suppression des officiers de paix, est rapporté. - Art. 2. Les vingt-quatre officiers de police créés à Paris sous le nom d'officiers de paix sont rétablis avec les fonctions ci-après. Art. 3. Ils sont chargés de veiller à la tranquillité publique, de se porter dans les endroits où elle sera troublée, d'arrêter les délinquants et de les traduire devant le juge de paix. La question s'est élevée, d'après ce texte, de savoir quels sont les droits de ces agents relativement à l'arrestation des délinquants sur la voie publique. Les officiers de paix sont, comme les autres agents de police, agents de la force publique en même temps qu'officiers de la police administrative, et leurs droits sont, à cet égard, les mêmes que ceux de ces agents; nous les examinerons plus loin. Mais, comme officiers de police, ont-ils le droit de procéder à un acte de la police judiciaire, de constater un délit ou une contravention? Où puiseraient-ils ce droit? Non-seulement ils ne sont pas officiers de police judiciaire, mais aucune loi, aucun règlement ne leur confère une délégation quelconque pour

1 Arr. cass. 30 juin 1838 (Bull., nos 185 et 186), et conf. 7 août et 24 sept. 1829 (J. P., tom. XXII, p. 1334 et 1459).

2 Arr. cass. 14 juillet 1838 (Bull., no 218).

3 Arr. Paris 27 mars 1827 (J. P., tom. XXI, p. 300).

4 Voy. au chapitre du Flagrant délit.

procéder à un acte de constatation. L'article 3 de la loi du 23 floréal an IV, en admettant même que cet article n'ait point été modifié par la législation postérieure, n'attribue aux officiers de paix aucun pouvoir pour constater les délits ou contraventions ils ont un droit de surveillance; mais ce droit n'implique pas nécessairement le droit de constater, par un procès-verbal qui fasse preuve, les faits qui troublent la tranquillité publique '. Un dernier arrêt décide, conformément à ce qui précède, que les sergents de ville, bien qu'ils aient un caractère public', « ne sont pas des officiers publics; qu'ils sont investis du droit de rechercher et dénoncer, non de constater les contraventions, et que leurs rapports sont de simples renseignements n'ayant par euxmêmes aucune force probante 3».

3

1264. On doit ranger dans la même catégorie que les agents. de police et les officiers de paix tous les agents qui sont investis d'un droit de surveillance sans y joindre le droit de constater les contraventions qu'ils surveillent et qui se bornent à les dénoncer par des rapports qui ne sont que de simples renseignements.

Tels sont 1° les adjudicataires et nautonniers des bacs et bateaux. L'article 45 de la loi du 6 frimaire an VII porte : « Les adjudicataires et nautonniers maintiendront le bon ordre dans leurs bacs et bateaux pendant le passage et seront tenus de désigner aux officiers de police ceux qui s'y comporteraient mal ou qui, par leur imprudence, compromettraient la sûreté des passagers. 2° Les cantonniers, à l'égard des délits étrangers à la grande voirie. L'article 55 du décret du 16 décembre 1811 est ainsi conçu « Les cantonniers prêteront aide et assistance aux voituriers et voyageurs, et ils donneront avis aux maires et à la gendarmerie de tout ce qui pourrait intéresser la sûreté ou la tranquillité publique. Les maires seront tenus de faire au souspréfet de l'arrondissement le rapport des déclarations du cantonnier la gendarmerie devra en dresser procès-verbal sur-lechamp et sans déplacer, en la présence du cantonnier déclarant. » 3o Les conducteurs de voitures publiques et les postillons. L'article 35 de l'ordonnance du 16 juillet 1828 porte: «Les conducteurs

1

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Voy., dans un sens contraire, M. Mangin, Traité des procès-verbaux, no 77. 2 Cass. 4 déc. 1862 (Bull., no 261).

3 Cass. 3 mars 1865 (Bull., no 56).

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