Page images
PDF
EPUB

mesure, soit qu'ils aient été trompés au moment de la vérification par de fausses expéditions, soit qu'ils aient trouvé une résistance qui a paralysé leur surveillance. Est-ce que, dans ces différentes circonstances, les témoignages des préposés et le procès-verbal qui les rapporte ne peuvent pas fournir une preuve suffisante de la contravention? Est-ce que le défaut de la saisie doit être un obstacle invincible à la répression? Il faudrait, pour admettre cette solution, que la loi l'eût formellement autorisée; or, il est douteux, si l'on se pénètre de l'esprit fiscal qui l'anime, qu'elle ait voulu créer au droit commun une exception qui n'aurait d'autre effet que de compromettre les intérêts du fisc.

Cette doctrine a été consacrée par la Cour de cassation. Nous trouvons d'abord dans l'un de ses arrêts cette règle générale : « Qu'aucune loi ne dispense du payement de l'amende lorsque, les contraventions ayant été constatées, les objets trouvés en contravention n'ont pas été saisis1. » Nous trouvons ensuite l'application de cette règle dans une première espèce où la saisie n'avait pas eu lieu par suite des fausses expéditions produites par les redevables. La Cour a jugé : « que les réclamants ne peuvent pas se prévaloir des règles établies pour la simple contravention, et exciper du défaut de saisie et de procès-verbal, dès que cette omission a été l'effet de la fraude par eux pratiquée; que la régie ne pouvait être tenue de faire une saisie de marchandises qui ont été introduites à la faveur de faux certificats. » Dans une autre espèce, où les préposés des contributions indirectes n'avaient pu opérer une saisie, à raison de la résistance du conducteur, la Cour a encore jugé : « Que si un procès-verbal de saisie est nécessaire pour prononcer la confiscation, il suffit que la saisie ait été déclarée dans le procès-verbal, sans qu'elle ait été effectuée, lorsque les préposés de la régie en ont été empêchés par la résistance des contrevenants; qu'exempter les contrevenants de toute peine lorsqu'ils sont parvenus à empêcher, par des menaces et des violences, la saisie des objets en contravention, ce serait encourager et récompenser la résistance; que l'arrêt attaqué a débouté la régie de ses demandes et exempté le prévenu non-sculement de la confiscation des objets trouvés en contravention, mais encore de l'amende par lui encourue, quoique la contra1 Arr. cass. 19 févr. 1807 (J. P., tom. V, p. 686). 2 Arr. cass. 19 déc. 1806 (J. P., tom. V, p. 594).

vention eût été légalement constatée et, par conséquent, a violė la loi '. » Dans une troisième espèce, les préposés, trouvant un báril de vin sans expédition, s'étaient bornés à déclarer la saisie sans l'opérer, et la Cour a cassé un arrêt qui avait refusé d'appliquer les peines attachées à la contravention : « Attendu qu'il n'importe nullement que les employés n'aient pas saisi le baril de vin par mainmise réelle; qu'il suffit qu'ils en aient déclaré la saisie et qu'ils aient énoncé dans leur procès-verbal la présence de la partie, l'espèce et la mesure de l'objet saisi 2. » Les articles 5 et 6 du décret du 18 octobre 1810 et l'article 1er du dêcret du 11 mars 1811, relatifs aux matières de douanes, ont consacré la même disposition dans les cas d'exportation ou d'importation à main armée ou par entreprise.

Ainsi, la saisie, considérée comme moyen de répression, est nécessaire pour que la confiscation puisse être prononcée; mais, considérée comme moyen de preuve, elle n'est pas indispensable, si la contravention peut être constatée par un procès-verbal régulier, à la condamnation aux peines portées par la loi. La formule point de saisie, point d'action, ne doit donc s'appliquer qu'à la poursuite de la confiscation; le texte et l'esprit de la loi la renferment dans cette limite; étendue au delà, elle trahit la pensée du législateur, elle devient inexacte.

1344. L'article 16 du Code d'instruction criminelle déclare que les gardes champêtres et les gardes forestiers « suivront les choses enlevées dans les lieux où elles auront été transportées, et les mettront en séquestre ».

Cette disposition doit être complétée, d'une part, par l'article 12 du titre II de la loi du 28 septembre-6 octobre 1791, et d'une autre part, par l'article 161 du Code forestier. Le premier de ces articles porte que : « Le propriétaire qui éprouvera des dommages aura le droit de saisir les bestiaux, sous l'obligation de les faire conduire, dans les vingt-quatre heures, au lieu du dépôt qui sera désigné à cet effet par la municipalité. » L'article 161 du Code forestier dispose également que : « Les gardes sont autorisés à saisir les bestiaux trouvés en délit et les instruments, voitures et attelages des délinquants, et à les mettre en séquestre. Ils sui1 Arr. cass. 19 févr. 1807 (J. P., tom. V, p. 686). 2 Arr. cass. 10 juin 1826 (J. P., tom. XX, p. 564).

vront les objets enlevés par les délinquants jusque dans les lieux où ils auront été transportés, et les mettront également en séquestre."

Ces textes prévoient et autorisent deux saisies: l'une obligatoire, la saisie des choses enlevées; l'autre, seulement facultative, la saisie des bestiaux et les instruments, voitures et attelages des délinquants. Dans le premier cas, il importe de mettre immédiatement sous la main de la justice les produits du délit; dans le second, le procès-verbal, par la description qu'il fait des bestiaux et des instruments, peut, dans la plupart des cas, et surtout lorsque les délinquants sont connus, suppléer à la saisie. On avait pensé que les articles 146 et 198 du Code forestier, qui prononcent la confiscation des instruments du délit, devaient avoir pour effet de rendre leur saisie obligatoire; mais il ne faut pas confondre la saisie et la confiscation de ces instruments; la confiscation peut être prononcée lors même que la saisie n'en aurait pas été faite.

Aux termes de l'article 12 du titre II de la loi du 28 septembre6 octobre 1791, des articles 39 et 40 du décret du 18 juin 1811 et des articles 168 et 169 du Code forestier, les objets saisis ne peuvent demeurer en matière forestière plus de cinq jours, en matière ordinaire plus de huit jours en séquestre. Le juge de paix peut en accorder la mainlevée provisoire moyennant caution et le payement des frais de fourrière et de séquestre. S'ils ne sont pas réclamés, ou si les conditions de la mainlevée ne sont pas remplies, la vente en est ordonnée au marché le plus voisin. Le produit de la vente est versé dans la caisse du receveur de l'enregistrement pour en être disposé suivant qu'il en est ordonné par le jugement définitif.

Il résulte implicitement des art. 161, 194, 198, 199 et 201 du Code forestier, que les procès-verbaux doivent contenir la description des objets saisis; nous renvoyons l'examen de cette règle au chapitre XII, qui traite de la rédaction des procès-verbaux.

1345. En matière de pêche fluviale, la loi du 15 avril 1829 a établi quelques règles particulières. L'article 39 porte que : « Les gardes sont autorisés à saisir les filets et autres instruments de pêche prohibés, ainsi que le poisson pêché en délit. » Les art. 41 et 42 ajoutent : « Les filets et engins de pêche qui auront été saisis

[ocr errors]

comme prohibés ne pourront, en aucun cas, être remis sous caution; ils seront déposés au greffe et y demeureront jusqu'après le jugement pour être ensuite détruits... Art. 42. Quant au poisson saisi pour cause de délit, il sera vendu sans délai dans la commune la plus voisine du lieu de la saisie, à son de trompe et aux enchères publiques, en vertu d'ordonnance du juge de paix ou de ses suppléants, si la vente a lieu dans un chef-lieu de canton, ou, dans le cas contraire, d'après l'autorisation du maire de la commune; ces ordonnances ou autorisations seront délivrées sur la requête des agents ou gardes qui auront opéré la saisie et sur la présentation du procès-verbal régulièrement dressé et affirmé par eux. Dans tous les cas, la vente aura lieu en présence du receveur des domaines et, à défaut, du maire ou adjoint de la commune ou du commissaire de police. »

1346. Les saisies opérées par les préposés des contributions indirectes portent sur les objets suivants :

1o Les boissons, les tabacs, les cartes à jouer qui sont transportées, fabriquées ou déposées en contravention aux lois de la matière 1;

2o Les chevaux, voitures, bateaux et autres objets servant au transport';

3° Les ustensiles, mécaniques, chaudières non scellées à demeure et autres instruments servant à la fabrication 3.

Les préposés qui reconnaissent la déclaration doivent déclarer au prévenu la saisie qu'ils opèrent et procéder en sa présence, ou après l'avoir sommé d'y assister, à la description des objets saisis. Ils doivent encore offrir mainlevée sous caution solvable, ou en consignant la valeur des navires, bateaux, voitures, chevaux et équipages saisis, quand la saisie est motivée pour autre cause que pour importation d'objets dont la consommation est défendue'. Nous reprendrons ces formalités, qui tiennent à la rédaction même des procès-verbaux, quand nous nous occuperons de cette rédaction.

1 L. 5 vent. an XII, art. 45 et 76; L. 28 avril 1816, art. 46, 96, 106, 129, 166, 216, 223.

2 L. 5 vent. an XII, art. 76; L. 28 avril 1816, art. 216 et 223.

3 L. 28 avril 1816, art. 129 et 223.

4 Décr. 1er germ. an XIII, art. 21.

5 Ibid., art. 23.

Si la saisie est déclarée régulière et fondée, la vente des objets saisis et consignés par jugement est opérée publiquement, s'il n'y a pas d'appel dans la huitaine de la signification de ce jugement, et cinq jours après une affiche apposée tant à la porte de la maison commune qu'à celle de l'auditoire du juge de paix'.

Si la saisie est déclarée mal fondée, l'administration peut être condamnée non-seulement aux frais du procès et à ceux de fourrière, mais encore à une indemnité proportionnée à la valeur des objets dont le saisi a été privé pendant le temps de la saisie jusqu'à leur remise ou l'offre qui lui en a été faite; toutefois, cette indemnité ne peut excéder un pour cent par mois de la valeur desdits objets. Si, par l'effet de la saisie, les objets ont dépéri, l'administration peut être condamnée à payer leur valeur ou l'indemnité de leur dépérissement 3.

1347. En matière d'octroi, ces formalités sont simplifiées. L'article 79 de l'ordonnance du 9 décembre 1814 porte: « Les objets saisis par suite des contraventions aux règlements d'octroi sont déposés au bureau le plus voisin, et si la partie saisie ne s'est pas présentée dans lesdits jours, à l'effet de payer la quotité de l'amende par elle encourue, ou si elle n'a pas formé, dans le même délai, opposition à la vente, la vente desdits objets sera faite par le receveur, cinq jours après l'apposition à la porte de la maison commune et autres lieux accoutumés d'une affiche signée de lui, et sans aucune autre formalité.» Néanmoins l'apposition peut être faite jusqu'au jour de la vente. Mais si les objets saisis sont sujets à dépérissement, la vente peut être autorisée avant l'échéance des délais, par une simple ordonnance du juge de paix sur requête ".

1348. En matière de garantie d'or et d'argent, la saisie porte : 1o sur les faux poinçons; 2° sur les ouvrages et lingots qui en seraient marqués; 3° sur les ouvrages achevés et dépourvus de marque; 4° sur les ouvrages dont la marque est aussi soudée et contre-tirée en quelque manière que ce soit ". Ces poinçons, ou1 Décr. 1er germ. an XIII, art. 28 et 33.

2 Ibid., art. 29.

3 Ibid., art. 30.

4 Ord. 9 déc. 1814, art. 80.

5 lbid., art. 82.

6 L. 19 brum. an VI, art. 101 et 108.

III.

19

« PreviousContinue »