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c'est en son nom que le rapport est rédigé; il faut donc que cet acte soit complet, et il ne peut l'être que par la signature du garde. La seconde différence est que la loi exige formellement cette signature au pied du procès-verbal même. Le deuxième paragraphe de l'article 165 dispose que si le procès-verbal est seulement signé du garde, mais non écrit en entier de sa main, l'officier qui en reçoit l'affirmation doit lui en donner préalablement lecture. Il faut donc que le procès-verbal soit signé avant de commencer l'acte de l'affirmation, puisque l'officier doit en donner lecture préalablement à cet acte. Or, il ne peut donner lecture que d'un acte complet et par conséquent signé. Il suit de là qu'en matière forestière les deux actes ne doivent pas être contenus dans le même contexte, que ce sont deux actes distincts qui doivent être placés à la suite l'un de l'autre, mais séparément, et qui, par conséquent, doivent l'un et l'autre réunir les formes nécessaires pour leur validité.

§ VI. De la date du procès-verbal.

1396. Les procès-verbaux doivent être datės. La date est en général une formalité nécessaire à la perfection des actes; elle fait partie des formes que la loi prescrit aux procès-verbaux. Elle constitue l'une des énonciations que ces actes doivent constater comme l'un des éléments de l'appréciation du fait; le jour où ce fait a été découvert, signalé à l'officier de justice ou constaté, peut être une circonstance importante, un indice, et dès lors doit être énoncé. Le procès-verbal ensuite est un acte d'instruction qui peut interrompre la prescription du délit ; il est donc utile que l'époque où il intervient soit exactement précisée. Enfin, la clôture de cet acte sert de point de départ au délai prescrit pour l'affirmation et l'enregistrement; il faut donc que la date de cette clôture soit indiquée. Car, comment reconnaître, si elle ne l'était pas, que ces formalités ont été régulièrement accomplies? Il est de principe que tout procès-verbal doit porter en lui-même la preuve que toutes les formes que la loi a prescrites pour sa validité ont été remplies; or, la preuve que les délais que la loi a mesurés pour l'accomplissement de telle ou telle forme ont été observés est tout entière dans la date de cet acte.

1397. Dans les matières spéciales la date est donc une forme

essentielle des procès-verbaux. Quelques lois en stipulent expressément l'énonciation : l'art. 3 de la loi du 9 floréal an VII, l'art. 21 du décret du 1er germinal an XIII, l'article 75 de l'ordonnance du 9 décembre 1814 portent que les procès-verbaux des préposés des douanes, des contributions indirectes et des octrois énonceront la date du jour où ils ont été rédigés. L'article 34 de l'ordonnance du 1er août 1821 prescrit, dans le modèle qu'il donne des rapports des gardes du génie, l'énonciation formelle de la date. D'autres lois supposent cette énonciation sans la stipuler l'article 165 du Code forestier et l'article 44 de la loi du 15 avril 1829 disposent que les gardes affirmeront leurs procèsverbaux au plus tard le lendemain de leur clôture, L'article 41 de l'ordonnance du 17 avril 1839 dispose que les vérificateurs des poids et mesures dressent ces mêmes actes dans les vingtquatre heures de la contravention par eux constatée, et les affirment au plus tard le lendemain de la clôture. L'article 19 du décret du 16 septembre 1811 porte encore que les portiersconcierges doivent affirmer leurs procès-verbaux dans les vingtquatre heures de leur rédaction. Il paraît évident que, relativement à tous ces actes, la date est une forme nécessaire de leur validité, soit qu'elle soit textuellement prescrite, soit qu'elle soit le point de départ d'un délai qui lui-même constitue une formalité essentielle; soit, en d'autres termes, qu'elle soit considérée comme une forme du procès-verbal ou seulement comme la preuve des formes qui sont imposées à cet acte.

1398. Mais, en dehors des matières spéciales, si la date ne cesse pas de constituer une formalité qui doit être commune à tous les procès-verbaux, il est plus douteux que son omission puisse entraîner la nullité de ces actes. La raison en est que la loi ne l'a pas prescrite, ni comme forme intrinsèque, ni comme point de départ des autres formes. Les articles 11 et 16 du Code d'instruction criminelle veulent que les procès-verbaux constatent les circonstances, le temps, le lieu des délits; ils ne font aucune mention des formes matérielles de ces actes, et par conséquent de leur date. Sans doute, si le procès-verbal n'est pas daté, il ne fera aucune preuve relativement aux circonstances qui se rattacheraient à sa date; sans doute il sera loisible au prévenu de soutenir, s'il y a intérêt, que cet acte a été dressé tel jour

plutôt que tel autre. Mais, si le procès-verbal est d'ailleurs régulier, s'il émane d'un officier compétent, s'il est signé, s'il constate le temps, le lieu, les circonstances du délit, il serait difficile de le rejeter par cela seul que la date y serait omise. Cette mention est de la nature de l'acte, mais elle ne tient pas à sa constitution; elle a le caractère de toutes les énonciations que le procès-verbal doit contenir; son omission affaiblit l'autorité de l'acte, elle ne le détruit pas.

§ VII. De l'affirmation des procès-verbaux.

1399. L'affirmation est l'une des formes essentielles des procès-verbaux; mais la loi, soit à raison de la minimité de certaines contraventions, soit à raison de la position de certains officiers, pas étendu cette formalité à tous ces actes.

n'a

Elle en a exempté les procès-verbaux 1° des officiers de police judiciaire, sauf les gardes champêtres et forestiers, lorsqu'ils agissent dans la sphère des attributions qui leur ont été conservées par le Code d'instruction criminelle. Aucune disposition de ce Code ne soumet, en effet, les actes de ces officiers à cette condition, et l'article 18 n'en fait mention que relativement aux gardes forestiers et champêtres. Ainsi, il a été reconnu, par exemple, que les procès-verbaux des commissaires de police ne sont pas soumis à cette formalité 1; 2o des agents forestiers, gardes généraux et gardes à cheval, autres que les gardes forestiers et sauf le cas où le procès-verbal porte saisie'; 3° des sous-officiers de la gendarmerie, brigadiers et gendarmes. Une loi du 17 juillet 1856 est ainsi conçue : « A l'avenir les procès-verbaux dressés par les brigadiers de gendarmerie et les gendarmes ne seront dans aucun cas assujettis à la formalité de l'affirmation3» ; 4o des gardes du génie ; aucune disposition, soit de la loi du 29 mars 1806, soit de l'ordonnance du 1er août 1821, ne prescrit cette forme; 5o des employés des postes : les règlements qui les concernent n'en font également aucune mention; 6o des agents voyers: l'article 11 de la loi du 2 mai 1836 est muette à

1 Arr. cass. 15 nov. 1839 (Bull., no 349); 12 mai 1864 (Bull., no 126). 2 Art. 166 et 167 du C. for.

3 Arr. cass. 24 mai 1821 (J. P., tom. XVI, p. 625); 18 mars 1854 (Bull., no 78); 12 nov. 1856 (Bull., no 371).

cet égard '; 7o enfin de tous les agents, tels que les agents de la police sanitaire, de la pêche maritime, de la police des ports ou des rivières, auxquels la loi n'a pas formellement imposé cette mesure. En effet, l'affirmation est une forme qui ne peut être suppléée, car si elle ajoute à la force du procès-verbal, elle impose en même temps à son existence une condition que la loi seule peut prescrire. Ainsi, partout où la loi est restée muette, partout où elle ne s'est pas positivement expliquée sur l'affirmation, cette formalité n'est pas nécessaire, l'acte en est affranchi.

La loi a formellement assujetti à l'affirmation les procès-verbaux des gardes forestiers, des gardes champêtres des communes et des particuliers, des gardes de la pêche, des préposés des contributions indirectes, des octrois, des douanes, des conducteurs des ponts et chaussées, cantonniers et autres agents de la grande voirie', des préposés des ponts à bascule 1o, des gardemines"; des gardes du génie 1, des agents de surveillance et gardes assermentés des chemins de fer 13, des agents de surveillance des lignes télégraphiques, des agents de la navigation 15, des portiers-concierges des places fortes 1, des vérificateurs des poids et mesures".

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1400. Cela posé, nous allons rechercher quels sont les caractères de l'affirmation, quels officiers sont compétents pour la

1 Arr. cass. 5 janv. 1838 (Bull., no 3).

2 Arr. cass. 24 mai 1821 (J. P., tom. XVI, p. 625).

3 C. for., art. 165.

4 L. 30 avril 1790, art. 10; L. 28 sept. 1791, sect. vII, art. 6; L. 28 floréal

an X.

5 L. 15 avril 1829, art. 44.

6 L. 1er germ. an XIII, art. 25.

7 L. 7 frim. an VIII, art. 8.

8 L. 9 flor. an VII, art. 10.

9 L. 21 avril 1810, art. 94; Décr. 18 août 1810, art. 1 et 2; L. 16 déc. 1811,

art. 112.

10 Décr. 23 juin 1806.

11 L. 14-22 juillet 1856, art. 16.

12 Décr. du 10 août 1853, art. 40.

13 L. 15 juillet 1845, art. 24.

14 Décr. 27 déc. 1851, art. 11.

15 L. 29 flor. en X, art. 2, et Décr. 18 août 1810, art. 2.

16 Décr. 16 sept. 1811, art. 19.

17 Ord. 17 avril 1839, art. 41.

recevoir, quelles sont ses formes, et enfin dans quels délais elle doit avoir lieu.

L'affirmation est, en général, la déclaration faite devant un officier public par le rédacteur d'un procès-verbal que les faits consignés dans cet acte sont vrais. Mais quel est le caractère de cette déclaration? Doit-elle être faite sous la foi du serment, ou n'est-elle qu'une simple réitération devant l'officier public des déclarations écrites dans le procès-verbal?

Dans notre ancien droit, l'affirmation, considérée comme le récolement des dispositions contenues dans le procès-verbal, consistait dans le serment prêté devant le juge que le rapport était sincère '; et il y a lieu de présumer que cette formalité est née de l'usage, qui s'est longtemps maintenu, de faire les rapports verbalement: l'agent, après avoir rapporté le fait devant le juge, prêtait serment de sa vérité. Notre législation nouvelle, en maintenant l'affirmation, lui a-t-elle maintenu ce caractère? La Cour de cassation l'a pensé, car elle a déclaré dans plusieurs arrêts: « Que, dans son acception légale, le mot affirmer signifie déclarer avec serment, et que le procès-verbal qui n'a pas été affirmé ni implicitement ni explicitement avec serment, n'étant pas revêtu des formes voulues par la loi, ne pouvait faire foi3. » D'autres arrêts ont même défini l'affirmation « le serment prêté sur la sincérité du procès-verbal 3».

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1401. On pourrait objecter à cette doctrine que la loi n'a point défini l'affirmation; que cette expression, dans son sens ordinaire, ne signifie qu'une déclaration qui maintient la vérité d'un fait; que, dans le droit civil, elle signifie tantôt une déclaration pure et simple, tantôt une déclaration avec serment *; que c'est, par conséquent, ajouter aux termes de la loi que d'y joindre nécessairement la condition du serment. On pourrait faire remarquer encore que si le procès-verbal est un témoignage, et que s'il est juste, dès lors, qu'il ait pour base le serment du témoin, ce serment est l'une des conditions de la compétence du rédacteur de cet acte, que cet agent

1 Denisart, vo Affirmation; Ferrières, eod. verbo.

2 Arr. cass. 29 févr. 1812, 20 mars 1812, 3 juillet 1812, etc.

3 Cass. 20 févr. 1862 (Bull., no 56).

4 Art. 1456 et 1781 du C. civ.; 534, 571, 671 et 943, no 8, du C. de procédure civ.; 413 et 507 du C. de comm.

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