Page images
PDF
EPUB

les cas d'enlèvement d'arbres. Il est donc nécessaire qu'elles soient constatées, puisque leur omission rendrait cette peine inapplicable.

Le procès-verbal doit, par la même raison, énoncer les instruments qui ont servi à commettre le délit, si les bois ont éte enlevés avec des charrettes ou des bêtes de somme, s'ils ont été coupés avec la scie; en effet, les articles 194 et 201 du Code forestier font de l'usage de ces instruments la base d'une aggravation de la peine.

Le procès-verbal doit encore spécifier la personne et le nombre des délinquants. S'il ne contenait pas cette désignation, il ne ferait évidemment foi contre aucun prévenu et ne pourrait motiver aucune condamnation. La Cour de cassation a déclaré, dans une espèce où le procès-verbal était muet sur ce point: « Que le procès-verbal sur lequel était fondée l'action de l'administration forestière constatait bien un délit, mais ne constatait pas quels étaient les auteurs ou les complices, et que, dans cet état, les tribunaux ont pu, sans violer la foi due au procès-verbal, déclarer que les prévenus n'étaient ni les auteurs ni les complices de ce dėlit'. » Cependant, il peut être suppléé à la désignation personnelle des délinquants, soit par des indications qui servent à les faire reconnaître, soit par des renseignements ultérieurement fournis par le garde rédacteur à titre de témoignage. Ces deux points ont été consacrés par la jurisprudence. La Cour de cassation a décidé le premier dans un arrêt portant: « Qu'il était constaté par un procès-verbal qu'un chêne, futaie ancienne, dont les dimensions en grosseur et longueur sont consignées au procèsverbal et portant une fourchure dont une des cuisses était moins grosse que l'autre, avait été coupé en délit dans un bois communal, et enlevé sur une charrette attelée de deux chevaux; que les traces de la charrette avait conduit au moulin de Chozard; que là on avait trouvé cet arbre vert et vif, tout récemment équarri, portant les mêmes dimensions en grosseur et longueur que le chêne coupé en délit et ayant la même fourchure; que de cette identité absolue entre l'arbre coupé en délit et celui trouvé chez Chozard résultait évidemment la preuve que Chozard était l'auteur ou le complice du délit, preuve qui ne pouvait être détruite

1 Arr. cass. 23 mars 1811 (J. P., tom. IX, p. 207).

[ocr errors][merged small]

que par l'inscription de faux'. » La Cour a encore jugé, dans une autre espèce: « Que les gardes ne sont point assujettis à nommer les délinquants, et qu'il suffit, pour remplir le vœu de la loi, que ces délinquants, dont les gardes peuvent, d'ailleurs, ne pas connaître les noms et les prénoms, soient désignés d'une manière spéciale qui ne permette pas de les méconnaître; qu'il était constaté, dans l'espèce, que des bêtes à laine avaient été trouvées en délit dans un bois communal, et qu'elles y étaient sous la garde du fils de la veuve Roget, du fils de la veuve Thierry, etc.; ce qui spécifiait suffisamment les personnes des délinquants *. » Enfin, et sur le deuxième point, la Cour a reconnu « qu'aucune loi n'a exclu les rédacteurs d'un procès-verbal faisant foi jusqu'à inscription de faux d'être entendus comme témoins sur les faits qui ne sont pas suffisamment désignés dans ce procès-verbal, sauf à avoir, en jugeant le fond, tel égard que de raison à leurs dépositions; que ces principes sont surtout applicables lorsque, comme dans l'espèce, la preuve offerte, sans altérer en rien la vérité des faits constatés par un procès-verbal, tend à établir l'identité d'un délinquant que le garde n'a pu indiquer par son prénom au moment de la rédaction de son procès-verbal, prénom dont il n'a acquis la connaissance positive que depuis le jugement de première instance 3. »

Enfin, le procès-verbal doit énoncer, dans le cas où il y a eu saisie, quels objets ont été frappés par cette mesure, la nature des moyens de transport, la qualité et le nombre des bestiaux, l'essence et les dimensions des bois qui s'y trouvent compris. Il importe que toutes les choses saisies soient minutieusement décrites, car il s'agit d'établir leur identité. Ainsi, en cas de saisie de bestiaux, le procès-verbal doit contenir la désignation détaillée des animaux et l'indication soit des personnes qui en sont propriétaires, si elles sont connues, soit de tous les renseignements qui ont été recueillis et qui peuvent conduire à la découverte de ces personnes. En cas de saisie de bois, le procèsverbal doit déterminer et spécifier tous les signes matériels qui ont conduit les gardes à reconnaître l'identité de ces bois *.

1 Arr. cass. 20 févr. 1812 (J. P., tom. X, p. 133).
2 Arr. cass. 26 janv. 1816 (J. P., tom. XIII, p. 245).

3 Arr. cass. 21 juillet 1820 (J. P., tom. XVI, p. 55).

4 Arr. cass. 15 déc. 1808, 12 oct. 1809, 4 mai 1820 (J. P., à leur date).

1428. Telles sont les principales énonciations que doit recueillir le procès-verbal. Mais si les rédacteurs de cet acte en ont omis quelques-unes, si quelques-unes des circonstances nécessaires pour l'appréciation du délit ne s'y trouvent pas, quel sera l'effet de cette omission? Il est évident que le silence du procès-verbal sur telle ou telle circonstance ne suffit pas pour en entraîner la nullité, car si le vœu et même la prescription formelle de la loi sont que toutes les énonciations soient complètes, il ne peut résulter de l'omission d'une seule que le procès-verbal, d'ailleurs régulier dans sa forme, cesse de faire foi à l'égard des autres. Tout ce qu'on doit inférer de cette omission, c'est que, en ce qui concerne le fait omis, le silence du procès-verbal peut être suppléé par une autre preuve relativement à ce fait, il n'y a point de procès-verbal; les juges peuvent chercher en dehors de cet acte leurs moyens de conviction.

§ V. Procès-verbaux des préposés des contributions indirectes.

1429. Indépendamment des formes générales qui s'appliquent à tous les procès-verbaux, et qui ont été rappelées dans les premiers paragraphes de ce chapitre, des formes particulières sont imposées aux procès-verbaux des préposés des contributions indirectes: nous allons les exposer.

Ces formes particulières consistent: 1° dans le nombre des. préposés qui doivent concourir au procès-verbal; 2° dans les énonciations spéciales de cet acte; 3° dans les mesures qui se rattachent à la saisie; 4o enfin dans la lecture ou l'affiche qui doit en être faite.

Le procès-verbal doit être dressé et signé par deux employés au moins. L'article 84 de la loi du 5 ventôse an XII porte: « Les procès-verbaux signés de deux d'entre eux feront foi en justice jus qu'à inscription de faux. » L'article 25 du décret du 1er germinal an XIII ajoute : « Les procès-verbaux seront affirmés au moins par deux des saisissants... » La présence et le concours de deux préposés sont donc nécessaires soit pour la rédaction, soit pour l'affirmation d'un procès-verbal. Comme cet acte fait foi jusqu'à l'inscription de faux, il a paru indispensable de lui donner l'appui d'un double témoignage. Il suit de là: 1° que tout procèsverbal en matière de contributions indirectes qui n'est pas signé et

affirmé par deux préposés est nul et ne peut avoir aucun effet; 2° que tout procès-verbal en cette matière n'est régulier qu'autant qu'il énonce les noms, qualités et demeures des saisissants, car il ne peut justifier de leur concours que par cette énonciation. La Cour de cassation a jugé, en ce qui concerne la demeure: « Que l'article 21 du décret du 1er germinal an XIII veut que le procèsverbal énonce les qualités, noms et demeures des saisissants, mais que, par ce mot demeure, l'on ne peut entendre que la résidence, et que l'on ne peut soumettre les employés à indiquer jusqu'à la rue et le numéro de la maison qu'ils habitent; que lorsque, dans leurs procès-verbaux, ils ont clairement désigné le lieu de leur résidence, ils ont suffisamment satisfait à l'obligation qui leur est imposée d'énoncer leur demeure 1. »

1430. Les énonciations spéciales du procès-verbal consistent : 1° dans la mention de l'employé chargé des poursuites; 2° dans la constatation des causes de la saisie. L'article 21 du décret du 1" germinal an XIII veut que le procès-verbal énonce les nom, qualité et demeure de l'employé chargé des poursuites : les préposés satisfont à cette disposition en énonçant qu'ils agissent à la requête soit du directeur de l'administration générale, soit du directeur du département, et ils indiquent suffisamment la demeure de cet employé en désignant la ville où il réside 3. Quant à l'énonciation des causes de la saisie, elle doit comprendre l'exposé complet des faits qui constituent la contravention et des circonstances qui ont amené sa constatation : le procès-verbal doit « exposer le genre de fraude, la manière dont elle a été découverte, les circonstances essentielles qui l'ont accompagnée et les preuves qui la constatent, tirées soit des circonstances mêmes, des réponses et aveux des parties saisies ». Si la cause de la saisie est le faux et l'altération des expéditions, le procès-verbal doit énoncer le genre de faux, les altérations et surcharges. Tous ces faits doivent être clairement relatés, puisque cette relation est le titre de la poursuite et la base de la condamnation; il faut que le juge y trouve tous les éléments de la contravention.

3

1 Arr. cass. 24 sept. 1830 (J. P., tom. XXIII, p. 804).

2 Arr. cass. 12 avril 1811 (Bull., p. 106).

3 Traité des droits d'aydes, p. 234.

4 Décr. 1er germ. an XIII, art. 22.

soit

1431. Le procès-verbal doit contenir ensuite plusieurs énonciations qui sont relatives à la saisie et qui ont pour objet de la constater. Ces énonciations sont les suivantes :

1° Il doit indiquer, en premier lieu, l'espèce, poids ou mesure des objets saisis. Cette prescription de l'article 21 du décret du Jer germinal an XIII a pour objet d'assurer l'identité de ces objets et la responsabilité du gardien.

2o Il doit énoncer, en deuxième lieu, aux termes du même article, la présence de la partie à leur description, ou la sommation qui leur aura été faite d'y assister. Il s'agit, en effet, d'un procès-verbal qui fait foi jusqu'à inscription de faux; il faut donc qu'il énonce les explications de la partie, ou qu'elle a été mise en demeure de les fournir: il faut qu'il soit fait contradictoirement, afin que les faits puissent être contredits'. Par suite de la même règle, si la saisie est motivée par l'altération des expéditions, les pièces altérées, signées et paraphées des saisissants, sont annexées au procès-verbal, qui doit contenir la sommation faite à la partie de les parapher, et sa réponse.

3o Le procès-verbal doit indiquer le nom et la qualité du gardien, s'il y a lieu. Il est nécessaire que la partie saisie puisse veiller à la conservation de la chose; et si, par une circonstance quelconque, le gardien ne peut être désigné au moment même de la rédaction, cette désignation doit lui être notifiée ultérieurement. La Cour a reconnu « que la nullité d'un procès-verbal de saisie avait été légalement prononcée, parce que ce procès-verbal ne faisait aucune mention des nom et qualité du gardien entre les mains de qui les vins saisis avaient été déposés3».

4o Le procès-verbal doit mentionner l'offre de donner mainlevée des moyens de transport saisis. L'article 13 porte : « Il sera offert mainlevée sous caution solvable ou en consignant la valeur des navires, bateaux, voitures, chevaux et équipages saisis pour autre cause que pour importation d'objets dont la consommation est défendue, et cette offre, ainsi que la réponse de la partie, sera consignée au procès-verbal. » Il est évident que l'administration n'a aucun intérêt à retenir des moyens de transport qui peuvent être utiles non-seulement au prévenu, mais au com

1 Arr. cass. 14 juin 1834 (J. P., tom. XXVI, p. 636).

2 Décr. 1er germ. an XIII, art 22.

3 Arr. cass. 23 oct. 1807 (J. P., tom, VI, p. 328).

« PreviousContinue »