Page images
PDF
EPUB

» Cet

moyens de droit résultant d'un prétendu alibi, et d'exercer la faculté de former à la première audience une inscription de faux; qu'en combinant ainsi les dispositions de l'article 12 de la loi du 9 floréal an VII avec les règles générales et nécessaires, conservatrices des droits des parties défenderesses, le jugement attaqué n'a ni faussement interprété, ni violé cette loi'. arrêt, qui ne fait qu'appliquer en matière de douanes une règle déjà commune aux contributions indirectes et aux eaux et forêts, doit évidemment fixer la jurisprudence. Dès que les prévenus des délits de douanes peuvent former opposition aux jugements par défaut rendus contre eux, il est clair que leur opposition doit avoir tous les effets que la loi lui accorde, c'est-à-dire qu'elle doit faire considérer le jugement comme non avenu et restituer au prévenu tous les droits de sa défense. Or, l'inscription de faux est l'un de ces droits, et il suffit que la loi ne l'ait pas formellement enlevé au prévenu défaillant, pour qu'il ne puisse en être privé 2.

:

1483. Le dépôt des moyens de faux est une formalité qui doit suivre la déclaration dans un délai qui n'est pas uniformément déterminé. Les articles 3 et 4 de la déclaration du 25 mars 1732 portaient « Le même jour que les inscriptions de faux auront été faites, les inscrivants seront tenus de passer et signer lesdites inscriptions au greffe de la juridiction où ils procéderont et de déclarer par le même acte les noms, qualités et demeures des témoins dont ils entendent se servir, faute de quoi ils demeureront déchus de leur inscription. En cas d'inscription de faux faite dans la forme ci-dessus, les moyens en seront fournis par les inscrivants et mis au greffe dans les vingt-quatre heures, faute de quoi les moyens ne pourront plus être admis. » La législation nouvellé a conservé ces formes, en modifiant seulement la durée du délai. L'article 12 de la loi du 9 floréal an VII porte : « Il devra, dans les trois jours suivants, faire au greffe du tribunal le dépôt des moyens de faux et des noms et qualités des témoins qu'il voudra faire entendre. L'article 40 du décret du 1er germinal an XIII répète cette disposition. L'article 179 du Code forestier laisse au tribunal la fixation du délai : « Au jour indiqué pour l'audience,

1 Arr. cass. 23 août 1830, ch. req. (J. P., tom. XXIII, p. 770). 2 Conf. M. Mangin, n. 51.

le tribunal donnera acte de la déclaration et fixera un délai de trois jours au moins et de huit jours au plus, pendant lequel le prévenu sera tenu de faire au greffe le dépôt des moyens de faux et des noms, qualités et demeures des témoins qu'il voudra faire entendre. L'article 56 de la loi du 15 avril 1829 reproduit cette disposition, en substituant au délai qu'elle fixe un délai de huit jours au moins et quinze jours au plus.

Ces formalités, qui doivent être observées à peine de déchéance de l'inscription de faux, sont clairement indiquées par la loi et ne peuvent donner lieu à une difficulté sérieuse. Le délai, soit dans les cas où il est fixé par la loi, soit dans les cas où il est fixé par le juge, doit être maintenu dans les termes de la disposition qui le détermine; ainsi, il est clair que le délai de trois jours expire à la fin du quatrième jour, en partant du jour de la déclaration et que le délai de huit jours expire à la fin du neuvième jour, en partant du jour où le tribunal a donné acte de la déclaration. La Cour de cassation a d'ailleurs jugé : 1° Que le dépôt au greffe des moyens de faux est une formalité rigoureusement prescrite par la loi et qui ne peut être suppléée par une enquête présentée au tribunal, dans laquelle le prévenu articulerait ses moyens de faux'; 2° que la loi n'impose point à l'inscrivant l'obligation de faire ce dépôt en personne ou par un fondé de pouvoir spécial devant notaire, et qu'un avoué a caractère pour l'assister ou le représenter ; 3° que la loi exige à la fois l'indication des moyens de faux et l'indication des témoins qui doivent faire la preuve; que l'omission de l'une ou de l'autre de ces conditions emporte la déchéance de l'inscription '.

1484. Lorsqu'une contravention a été commise par plusieurs individus et qu'un seul formule une inscription de faux contre le procès-verbal, ou remplit, après l'inscription formée, les formalités légales, cette inscription régulièrement faite et suivie profite-t-elle à ses coprévenus? L'article 181 du Code forestier a résolu cette question en ces termes : « Lorsqu'un procès-verbal sera rédigé contre plusieurs prévenus, et qu'un ou quelques-uns d'entre eux seulement s'inscriront en faux, le procès-verbal con

1 Arr. cass. 23 nov. 1810 (J. P., tom. VIII, p. 656). 2 Arr. cass. 1er juin 1827 (J. P., tom. XXI, p. 493). 3 Arr. cass. 19 avril 1811 (J. P., tom. IX, p. 269).

tinuera de faire foi à l'égard des autres, à moins que le fait sur lequel portera l'inscription de faux ne soit indivisible et commun aux autres prévenus. » Ainsi, cet article, répété par l'article 46 de la loi du 15 avril 1849, distingue si le fait est commun à tous les prévenus ou personnel à celui qui l'invoque : dans le premier elle cas, l'inscription de faux profite à tous; dans le deuxième, ne profite qu'à celui qui l'a formée. Cette règle, qui ne se retrouve ni dans la loi du 9 floréal an VII, ni dans le décret du 1er germinal an XIII, doit-elle être étendue par voie d'analogie aux matières des douanes et des contributions indirectes? On a dit pour la négative que cette disposition est une exception à la règle générale qui ne permet de suspendre les effets des procès-verbaux et d'en contredire les énonciations que par la voie de l'inscription de faux, et que cette exception doit se renfermer dans la matière dans laquelle elle a été introduite. Mais il ne s'agit point d'attaquer le procès-verbal par une autre voie que par l'inscription de faux; il s'agit uniquement de régler les effets de cette inscription. Or, lorsqu'elle a pour résultat ou de détruire le procèsverbal en prouvant l'omission d'une formalité requise pour sa validité, ou de détruire la contravention elle-même en prouvant la fausseté des faits qui la constituent, est-il possible d'opposer encore aux prévenus qui ne se sont pas inscrits un procèsverbal radicalement nul, ou de leur appliquer une peine à raison d'une contravention qui n'existe pas? Comment diviser un moyen de défense qui est de sa nature indivisible, puisqu'il attaque la base même de l'action? Comment diviser une nullité qui fait tomber le procès-verbal, un fait qui à l'égard de tous cesse d'être punissable? Il est vrai qu'une seule des législations spéciales étend ce moyen de défense à tous les prévenus; mais faut-il donc induire de là que la même règle n'est plus applicable dans les autres? Cette règle n'appartient-elle pas au droit commun? et, dès lors, ne suffit-il pas que ces lois spéciales n'y aient pas dérogé pour qu'elle doive s'appliquer aux matières qui en font l'objet aussi bien qu'à toutes les autres? La loi forestière n'eût pas rappelé cette règle qu'elle n'aurait pas moins régi la matière des délits forestiers; car c'est la raison elle-même qui veut que le fait justificatif s'étende à tous les prévenus et non pas seulement à

1 M. Mangin, n. 43.

celui qui l'invoque, lorsque ce fait a pour effet soit d'abolir le délit lui-même, soit d'anéantir l'action.

1485. Les formalités qui viennent d'être exposées ne s'appliquent-elles qu'aux matières des eaux et forêts, des contributions indirectes et des douanes, ou doit-on les étendre en même temps à la matière des octrois? L'article 8 de la loi du 27 frimaire an VIII porte que les procès-verbaux des préposés des octrois feront foi jusqu'à l'inscription de faux, mais il n'a point réglé les formes de cette inscription. « Il résulte de là, dit M. Mangin, qu'on doit suivre dans la procédure les règles générales prescrites par le Code de procédure civile et le Code d'instruction criminelle'. » Cet auteur paraît puiser cette solution, qu'il ne justifie pas autrement, dans un arrêt de la Cour de cassation du 29 août 1811 qui décide qu'il n'y a aucun délai fatal pour faire la déclaration d'inscription de faux contre un procès-verbal des préposés de l'octroi. Il semble difficile d'admettre cette interprétation. On peut l'appuyer sans doute sur les articles 2 du décret du 17 mai 1809 et 121 de la loi du 8 décembre 1814, qui placent les octrois dans les attributions municipales, et sur les articles 165 et 127 du même décret et de la même loi, qui maintiennent l'application des règlements concernant les octrois; mais on ne doit pas perdre de vue qu'à côté de ces dispositions se trouvent les articles 165 du décret du 17 mai 1809 et 88 de l'ordonnance du 9 décembre 1814, qui continuent d'attribuer à l'administration des contributions indirectes la surveillance générale de la perception et de l'administration des octrois ; que le titre 9 de l'ordonnance du 9 décembre 1814 n'a fait que reproduire, en le modifiant sur quelques points, le décret du 1er germinal an XIII; et que les mêmes règles dirigent en général les préposés des deux services. N'y a-t-il pas lieu de penser que si l'ordonnance n'a pas parlé de l'inscription de faux, c'est qu'elle s'est référée sur ce point au décret? L'inscription de faux contre les procèsverbaux est soumise à des formes promptes, parce qu'il importe que les contraventions fiscales soient jugées dans un bref délai ; cette règle a été appliquée à toutes les matières où les procèsverbaux font foi jusqu'à inscription de faux; comment supposer 1 Mangin, n. 222.

2 Journ. du Pal., tom. IX, p. 611.

que la loi a voulu faire une exception en matière d'octroi? Est-ce que les formes lentes et compliquées tracées par les articles 215 et suivants du Code de procédure civile conviennent au jugement de ces contraventions? Puisqu'il s'agit des mêmes actes auxquels la loi a conféré les mêmes effets, puisque les formes de la poursuite sont à peu près les mêmes, n'y a-t-il pas lieu d'appliquer les mêmes règles à l'inscription de faux? Au reste, la Cour de cassation paraît être revenue à cette opinion, puisqu'elle a appliqué l'article 42 du décret du 1er germinal an XIII à une inscription de faux formulée contre un procès-verbal dressé en matière d'octroi '.

1486. Lorsque les formalités nécessaires pour la validité de l'inscription ont été accomplies, il appartient au tribunal, en appréciant les moyens de faux, d'admettre ou de rejeter l'inscription.

Ce droit appartient au tribunal correctionnel saisi de l'action principale résultant du procès-verbal; car l'inscription de faux est ici une exception à l'action qui naît du procès-verbal, et il est de règle générale, et cette règle sera ultérieurement développée que le juge saisi d'une poursuite criminelle a le droit de connaître de l'exception opposée à l'action, sinon à l'effet de l'instruire et de la juger, au moins à l'effet d'en apprécier la pertinence et l'admissibilité".

L'article 179 du Code forestier porte, en conséquence : « A l'expiration de ce délai et sans qu'il soit besoin d'une citation nouvelle, le tribunal admettra les moyens de faux, s'ils sont de nature à détruire l'effet du procès-verbal, et il sera procédé sur le faux conformément aux lois. Dans le cas contraire, ou faute par le prévenu d'avoir rempli toutes les formalités ci-dessus prescrites, le tribunal déclarera qu'il n'y a lieu à admettre les moyens de faux, et ordonnera qu'il soit passé outre au jugement. » La même disposition se retrouve, en d'autres termes, dans l'article 42 du décret du 1" germinal an XIII et dans l'article 9 de l'arrêté du 4o compl. an XI.

er

Il suit de ces textes que le tribunal doit examiner, d'abord, si les formalités prescrites par la loi ont été remplies, ensuite, si 1 Cass. 12 oct. 1838 (Bull., no 331).

2 Arr. cass. 24 mars 1809 (J. P., tom. VIII, p. 464).

« PreviousContinue »