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les faits articulés comme moyens de faux sont pertinents et admissibles.

Il doit examiner si les formalités ont été remplies, car lors même qu'à la précédente audience il aurait donné acte de la déclaration, cet acte donné n'équivaut pas au jugement de sa validité et réserve aux parties ainsi qu'aux juges le droit de la contester et de l'apprécier 1.

Il doit examiner ensuite si les moyens de faux sont pertinents et admissibles; car il est évident que le juge ne peut surseoir à statuer et que le cours de la justice ne peut être suspendu sur la simple allégation d'une exception qui n'aurait aucun fondement, Il faut que l'exception se justifie elle-même; il faut qu'elle apporte la preuve de son existence: le juge ne doit s'y arrêter et surseoir qu'après l'avoir constatée. C'est pour cela que l'acte de dépôt des moyens de faux doit contenir les faits, les actes et les circonstances par lesquels l'inscrivant entend prouver la fausseté des faits consignés au procès-verbal : cette énonciation est nécessaire pour que les parties puissent les discuter ou les réfuter, et pour que les juges puissent les apprécier. Il a été jugé en conséquence: « Que l'article 40 du décret du 1er germinal an XIII, prescrivant à celui qui veut s'inscrire en faux d'en faire d'abord la déclaration à l'audience, et lui accordant ensuite un délai de trois jours pour faire au greffe du tribunal le dépôt des moyens de faux et des noms et qualités des témoins qu'il se propose de . faire entendre, indique assez que l'inscrivant ne doit pas se borner à une dénégation pure et simple des faits retenus au procès-verbal argüé de faux; que le Code de procédure civile, article 229, veut en effet que les moyens de faux contiennent les faits, circonstances et preuves par lesquels le demandeur prétend établir le faux; que pour se conformer aux règles du droit commun comme aux lois de la matière, l'inscrivant est donc tenu d'articuler avec précision ces moyens de faux et de manière à faire ressortir des faits et circonstances dont la preuve est offerte la fausseté des faits rapportés dans le procès-verbal argüé; qu'autrement ils ne peuvent être considérés comme moyens justificatifs, et ne remplissent pas les conditions exigées par l'article 42 du décret du 1er germinal an XIII 2. »

1 Arr. cass. 3 déc. 1812 (J. P., tom. X, p. 855).

2 Cass. 21 nov. 1831 (Bull., no 490); 28 mars 1857 (no 134).

1487. Si le tribunal reconnaît que l'inscription n'est pas régulière ou que les moyens ne sont pas pertinents, il doit rejeter l'inscription et déclarer qu'il sera passé outre au jugement du fond. Il doit la rejeter encore si les faits déniés peuvent être contestés autrement que par la voie de l'inscription de faux, s'il s'agit, par exemple, non d'un fait matériel, mais d'une simple opinion, écrite par le rédacteur, et qui peut être appréciée par les parties et par les juges, car la preuve contraire suffit alors pour détruire cette énonciation'. Il a été décidé, au surplus, qu'un jugement qui rejette une inscription de faux n'est pas un jugement préparatoire, mais un jugement définitif sur la question de savoir si l'inscription de faux devait ou non être admise; que le pourvoi en cassation contre un tel jugement est donc recevable avant le jugement définitif sur le fond3. »

S'il juge, au contraire, que l'inscription est régulière et s'il admet les moyens de faux, il doit indiquer ceux de ces moyens dont la preuve est autorisée. L'article 233 du Code de procédure civile porte, en effet : « Les moyens de faux qui seront déclarés pertinents et admissibles seront énoncés expressément dans le dispositif du jugement qui permettra d'en faire preuve, et il ne sera fait preuve d'aucun autre moyen. »

1488. La conséquence de l'admission de l'inscription de faux est qu'il doit être sursis au jugement de la contravention jusqu'après le jugement définitif du faux dénoncé. En effet, l'inscription élève une question préjudicielle qui doit être vidée avant qu'il puisse être statué sur la contravention. Telle est aussi la disposition formelle de la loi. L'article 460 du Code d'instruction criminelle porte : « S'il s'agit de crimes, délits ou contraventions, la cour ou le tribunal saisi est tenu de décider préalablement, et après avoir entendu l'officier du ministère public, s'il y a lieu ou non à surseoir. » L'article 240 du Code de procédure civile porte également : « Il sera sursis à statuer sur le civil jusqu'après le jugement du faux. » Enfin, l'article 9 de l'arrêté du 4 complémentaire an XI, appliquant cette règle aux matières spéciales, dispose que : « Il sera sursis au jugement de la contravention jusqu'après le jugement de l'inscription de faux. »

1 Arr. cass. 1er févr. 1834 (J. P., tom. XXVI, p. 115).

2 Arr. cass. 18 mars 1836 (Bull., no 81).

1489. Le sursis doit être immédiatement suivi d'une instruction; cette instruction est criminelle ou civile. Elle est criminelle, lorsqu'il y a lieu de poursuivre les auteurs du faux. L'article 460 du Code d'instruction criminelle est ainsi conçu : « Si la partie qui a argüé de faux la pièce soutient que celui qui l'a produite est l'auteur ou le complice du faux, ou s'il résulte de la procédure que l'auteur ou le complice du faux soit vivant, et la poursuite du crime non éteinte par la prescription, l'accusation sera suivie criminellement. » L'inscription se trouve dès lors convertie en plainte de faux principal, et il est procédé sur cette plainte, non plus devant le tribunal saisi, mais devant le juge d'instruction et selon les formes ordinaires. Le tribunal qui procéderait à quelque acte d'instruction sur le faux commettrait un excès de pouvoir 1.

L'instruction a lieu par la voie civile, au contraire, et le tribunal qui a admis l'inscription de faux demeure compétent pour la suivre, lorsque l'action publique est éteinte ou paralysée par quelque obstacle légal, ou que la juridiction criminelle, en renvoyant le prévenu de la poursuite, ne s'est pas expliquée sur la vérité ou la fausseté du procès-verbal. Il faut alors recourir à la procédure établie par les articles 234 et suivants du Code de procédure civile; le procès est instruit contre la pièce argüée de faux, indépendamment de la culpabilité des auteurs du faux. Telle est la règle posée par l'article 459 du Code d'instruction criminelle, portant : « Si la partie déclare qu'elle entend se servir de la pièce, l'instruction sur le faux sera suivie incidemment devant la cour ou le tribunal saisi de l'affaire principale. »>

:

Que faut-il décider si le conseil d'État refuse l'autorisation de mettre en jugement les préposés contre lesquels est dirigée l'inscription de faux? Nous avons déjà examiné cette question (voy. n° 944) le refus du conseil d'État ne peut avoir pour effet que de mettre l'agent inculpé à l'abri de la poursuite, mais il ne peut anéantir l'exception et enlever au prévenu un moyen de défense que la loi lui donne; il doit donc, dans ce cas, être procédé incidemment sur la demande en inscription de faux conformément à l'article 459 du Code d'instruction criminelle.

1 Arr. cass. 6 janv. 1809 (J. P., tom. VII, p. 300).

CHAPITRE QUINZIÈME.

POUVOIRS DE LA POLICE JUDICIAIRE DANS LES CAS DE FLAGRANT DÉLIT.

1490. Objet de ce chapitre. Pouvoirs extraordinaires des officiers de police judiciaire en cas de délit flagrant.

§ I. Définition du flagrant délit.

1491. Définition du flagrant délit dans l'ancien droit.

1492. Ses conséquences et ses effets dans l'ancienne procédure.

1493. Dispositions de l'ordonnance de 1670 et de la jurisprudence sur les cas de flagrant délit.

1494. Dispositions sur les mêmes cas de la loi du 16-29 septembre 1791 et du Code du 3 brumaire an IV.

1495. Motifs et discussion du Code d'instruction criminelle.

1496. Textes de ce Code et conséquences qu'on doit en tirer.

1497. Il y a flagrant délit quand le crime se commet actuellement ou vient de se com

mettre.

1498. Il y a encore flagrant délit lorsque le prévenu est poursuivi par la clameur publique ou est trouvé saisi d'armes ou d'effets dans un temps voisin du crime, ou enfin dans le cas de réquisition d'un chef de maison.

1499. Il n'y a flagrant délit dans le sens de la loi que dans le cas où le fait est de nature à emporter une peine afflictive ou infamante.

§ II. Attributions générales des officiers de police judiciaire
en cas de flagrant délit.

1500. Attributions des procureurs impériaux.

1501. Attributions des juges d'instruction.

1502. Attributions des officiers auxiliaires du procureur impérial.

1503. Dans quels cas ces attributions leur sont conférées. Cas de flagrant délit.

1504. Que doit faire l'officier de police judiciaire si des doutes s'élèvent sur l'état flagrant du fait incriminé.

1505. Que doit-il faire si des doutes s'élèvent sur le véritable caractère du fait? 1506. Les officiers de police judiciaire sont-ils tenus de se transporter sur les lieux dans tous les cas où ils ont connaissance d'un crime flagrant?

1507. Ils doivent cesser leurs opérations aussitôt que le procureur impérial ou le juge d'instruction se présente.

1508. Quels sont les actes auxquels ils peuvent procéder.

§ III. Du transport sur les lieux en cas de flagrant délit.

1509. Quelles mesures l'officier de police judiciaire peut prescrire lorsqu'il se transporte sur les lieux.

1510. Il reçoit les déclarations des témoins du crime.

1511. Formes de l'information préparatoire.

1512. Dans quels cas l'officier de police peut appeler des experts ou des médecins,

1513. Règles pour la rédaction du procès-verbal,

§ IV. De l'arrestation des inculpés dans les cas de flagrant délit.

1514. Dans quels cas il est permis de procéder à l'arrestation.

1515. Règles qui doivent être observées dans toutes les arrestations.

1516. Mesures de précaution qui peuvent précéder l'arrestation,

1517. Droit d'arrestation provisoire considéré comme mesure de police et conféré aux agents de la force publique.

1518. Droit de saisir les inculpés et de les conduire devant le magistrat. Dans quels cas ce droit peut être exercé.

1519. S'il y a lieu de distinguer entre les cas de flagrant délit et les cas assimilés au flagrant délit.

1520. L'article 106 suppose dans ces deux cas la condition formelle que le fait est passible d'une peine afflictive ou infamante.

1521. Examen de l'objection tirée de la nécessité du service de la police.

1522. Application de l'article 106 dans le cas où le caractère du fait est douteux. 1523. L'article 106 n'exige aucune réquisition.

§ V. Des visites domiciliaires dans les cas de flagrant délit.

1524, Dans quels cas les officiers de police judiciaire sont autorisés à faire des visites domiciliaires.

1525. Ces visites ne peuvent être faites que dans le seul domicile du prévenu.

§ VI. Des saisies en cas de flagrant délit.

1526. Dans quels cas il y a lieu à saisir, et caractère de cette mesure.

1527. La saisie doit être faite à charge et à décharge.

1528. Formes des saisies.

§ VII. Réquisitions d'un chef de maison.

1529. Conditions nécessaires de la compétence des officiers de police judiciaire au cas de réquisition d'un chef de maison.

1490. Nous arrivons aux actes les plus importants de la police judiciaire. Nous n'avons examiné jusqu'ici que les attributions qui sont communes à tous les officiers de police ces attributions consistent dans le droit de rechercher les délits ou contraventions dont la surveillance est déléguée à chacun d'eux et dans le droit de constater ces délits et contraventions par des procès-verbaux. Ces droits s'étendent, en faveur des officiers de police judiciaire seulement, dans le cas de flagrant délit.

Ces officiers, à l'exception des gardes forestiers et des gardes champêtres, sont alors investis par la loi, à raison de l'urgence des circonstances, de quelques unes des fonctions qui, suivant les règles communes de la compétence, n'appartiennent qu'au procureur impérial ou au juge d'instruction; ils procèdent à des actes d'information ou de poursuite; ils décernent des mandats contre les inculpés; ils saisissent la justice.

Ce sont ces actes extraordinaires de la police judiciaire qui vont être l'objet de ce chapitre : nous rechercherons successivement quels sont les cas de flagrant délit ou assimilés au flagrant délit,

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