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de la cession. Cette garantie ne peut être que personnelle, parce que la solidarité ne se présume point, et qu'ici elle n'a pas été expressément stipulée. Enfin, lorsque deux personnes s'obligent envers quelqu'un, chacune d'elles n'est censée avoir promis que sa part virile. Nadal ne doit donc garantir Magnes qu'à concurrence de la moitié des sommes demandées. A l'appui de ce système, on invoquait M. Toullier, tom. 6, pag. 628 et 629; la loi 11, § 2, ff. de Duob. reis; la nov. 99, et l'art. 1202 C. c.

ARRÊT.

LA COUR; Attendu qu'il a été établi par les actes du procès qu'avant les premiers actes faits par Me N...., sous le nom de Magnes, celui-ci avait cédé ses droits aux sieurs Neutre et Nadal, auxquels tous les titres de la créance avaient été remis; que si lesdits Neutre et Nadal ont poursuivi sous le nom de Magnes, et non en leur propre nom, la cession n'étant pas notifiée, il ne s'ensuit pas moins que Magnes n'était pas le mandant réel de Me N...., mais bien lesdits Neutre et Nadal, propriétaires de la créance; que, dès-lors, si M• N.... a dû intenter l'action directement contre Magnes, en nom au procès, il ne doit pas, pour cela, obtenir une condamnation contre lui, attendu que Neutre et Nadal étant les véritables mandans de Me N....., le mandat a été donné par eux dans un intérêt commun; que, dès-lors, ils sont tenus solidairement, aux termes de l'art. 2002 C. C., et que, se trouvant en cause, Me N.... peut prendre des conclusions directes contre eux;

Attendu que Nadal ayant cédé ses droits à Neutre, celui-ci lui doit la garantie;

Par ces motifs, relaxe le sieur Magnes des conclusions contre lui prises par Me N....; condamne Nadal et Neutre solidairement lui payer la somme de ......" pour solde des deux mémoires de frais dont il s'agit, avec les intérêts à dater de l'ajournement introductif d'instance; condamne Neutre et Nadal solidairement à tous les dépens envers Laurent et Magnes; déclare, moyennant ce, n'y avoir lieu de statuer sur la demande en garantie formée par le sieur Magnes; disant droit sur la demande en garantie de Nadal contre Neutre, condamne ce dernier à relever Nadal des condamnations prononcées contre lui en capital, intérêts et frais, aux termes de leurs accords.

Du 15 novembre 1831.. 1re chambre.

OBSERVATIONS.

Nous devons nous empresser de le déclarer: en fait, les circonstances de la cause ont pu singulièrement influer sur la décision qu'on vient de lire; il a pu apparaître aux magistrats, des pièces et documens du procès, la preuve positive que M. N... avait connu les cessionnaires et non le cédant; et alors, en équité, la Cour a pu décider que l'action contre le cédant n'était pas recevable.

Mais, en règle générale, l'officier ministériel ne devrait pas être privé de son recours contre son client primitif, parce que ce

dernier aurait, pendant le procès, cédé ses droits à des tiers, à moins qu'il n'eût accepté ces tiers comme seuls débiteurs. Dans l'espèce, les cessionnaires repoussaient la demande de M° N... en soutenant qu'il n'avait connu que leur cédant. Cette prétention ́venait bien à l'appui de la demande de M° N... contre son premier mandant; mais elle ne l'empêchait pas de poursuivre simultanément ceux qui paraissaient avoir eu seuls un intérêt réel au procès. Abstraction faite de toutes circonstances particulières, la Cour a donc, selon nous, mal apprécié la position de l'avoué demandeur. Dans l'ignorance de la cession, Me N... avait dû agir contre Magnes seul pour le paiement de tous les frais; et apprenant cette cession et les intérêts de Neutre et Nadal sur la demande en garantie de Magnes, il avait eu le droit de prendre contre tous des conclusions, parce qu'en réalité, c'était dans l'intérêt de tous qu'il avait prêté son ministère.

Et si quelque partie eût pu être écartée du litige au regard de Me N... ce ne devait pas être Magnes, son véritable mandant. Les conséquences de l'arrêt de la Cour de Toulouse pourraient être très-graves contre les officiers ministériels qui, ne se chargeant de la direction et de la suite d'une affaire que par la confiance que leur inspirerait le premier intéressé, se verraient, par suite d'une cession faite à des insolvables et restée sans notification, privés d'une action utile pour le recouvrement de tous leurs frais.

Pour qu'une cession de cette nature puisse avoir son effet contre l'officier ministériel, il faut qu'il accepte formellement les cessionnaires pour débiteurs, sans même se réserver son recours pour les frais déjà faits contre son mandant primitif. Une renonciation à des droits acquis ne se présume pas aussi légèrément.

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Les avoués ont-ils concurremment avec les huissiers caractère pour faire et certifier les copies de pièces signifiées avec les exploits du ministère de ces derniers, soit qu'il y ait ou non instance judiciaire pendante. (Art. 28, 72 et 89 du décret du 16 février 1807.) (1)

(1) Cette consultation a été produite devant la chambre des requêtes sur le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour de Metz (Bourgerie, J. A., t. 40, p.5), pourvoi qui a été admis le 17 janvier 1832; cependant l'honorable confrère n'a examiné la question qu'en thèse générale, et s'est surtout attaché à combattre l'arrêt de la chambre des requêtes du 24 août 1831. (J. A., t. 41, p. 573.)

La question est si grave, que, malgré le développement que nous lui avons donné dans notre Commentaire du Tarif (t. 1, p. 77 à 115, no 45), nous croyons devoir reproduire tout ce qui s'écrit de vraiment propre à l'éclairer.

Dans la consultation qu'on va lire, on retrouve tout le talent de M. de Vatimesnil; et si nous ne partageons pas son opinion d'une manière absolue

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Le Conseil soussigné, consulté sur la question de savoir si les avoués ont concurremment avec les huissiers caractère pour faire et certifier les copies de pièces signifiées avec les exploits du ministère de ces derniers, soit qu'il y ait ou non instance judiciaire pendante;

» Est d'avis que la solution affirmative de cette question résulte des textes ci-après du décret du 16 février 1807 :

» 1o Art. 28. Pour les copies de pièces qui doivent être données avec l'exploit d'ajournement et autres actes par rôle contenant vingt lignes à » la page et dix syllabes à la ligne, ou évalué sur ce pied, à Paris 25 c., » partout ailleurs 20 c., le droit de copie de toute espèce de pièces et de » jugemens appartiendra à l'avoué quand les copies de pièces seront faites » par lui; l'avoué sera tenu de signer les copies de pièces et de jugemens, » et sera garant de leur exactitude. Les copies scront correctes et lisibles, » à peine de rejet de la taxe. »

2o Art. 29. Cet article renferme l'énumération d'une multitude d'actes du ministère des huissiers, et il se termine par cette énonciation générale : a de tout exploit contenant sommation de faire une chose ou opposition à ce » qu'une chose soit faite, protestation de nullité, et généralement de tous actes simples du ministère des huissiers, non compris dans la seconde partie » du tarif, à Paris 2 f., partout ailleurs 1 fr. 50 c.; pour chaque copie le quart de l'original, indépendamment des copies de pièces qui n'auraient » pas été faites par les avoués et qui seront taxées comme il a été dit ci» dessus. »

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» 3o Art. 72

a Les copies de pièces qui seront données avec les défenses ou qui pour» ront être signifiées dans les causes, seront taxées, à raison du rôle de vingtcinq lignes à la page et de douze syllabes à la ligne, ou évaluées sur ce » pied, à Paris 30 c., dans le ressort 25 c. Les copies de tous actes ou juge» mens qui seront signifiés avec les exploits des huissiers appartiendront à » l'avoué si elles ont été faites par lui, à la charge de les certifier véritables » et de les signer. »

» Ces dispositions sont claires; elles s'appliquent d'une manière générale à toute copie d'acte signifiée avec un exploit d'huissier. Le décret de 1807 ne distingué pas qu'il y ait ou qu'il n'y ait pas instance, que les significations se rattachent ou non à un litige existant, les avoués peuvent, concurremment avec les huissiers, faire et certifier les copies de pièces ; et lors. qu'ils les ont faites et certifiées, ils doivent en recevoir l'émolument.

Cette disposition facultative est conforme à l'usage et à la raison :

A l'usage, car la concurrence dont nous venons de parler existait avant le décret du 16 février 1807, et a continué, dans la pratique, de subsister depuis ce décret;

» A la raison, car la partie peut accorder sa confiance directe, soit à l'avoué, soit à l'huissier, et il est même vrai de dire qu'en général elle l'ac

nous ne pouvons nous empêcher d'admirer la logique d'un adversaire aussi redoutable.

Lorsque nous rapporterons l'arrêt de la chambre civile qui va être incessamment rendu, nous soumettrons encore de nouvelles observations à nos

ecteurs.

corde plus fréquemment au premier qu'au second. Or, toutes les fois que l'avoué est investi de la confiance directe de la partie, c'est lui qui a la conduite de l'affaire; c'est dans son étude que se rédigent tous les actes de procédure auxquels cette affaire donne lieu; c'est là que sont déposés les titres qui se rattachent aux intérêts dont il est chargé; c'est là, par conséquent, que doivent être faites les copies de ces titres, lorsque la signification en est nécessaire; c'est done à l'avoué qu'il appartient naturellement de certifier ces copies.

» Si les copies devaient être faites et certifiées par l'huissier, il faudrait déplacer les titres pour les remettre entre les mains de ce dernier. Or, ce déplacement pourrait, dans divers cas, présenter de graves inconvéniens.

» Par exemple, lorsqu'il y aurait lieu de faire une signification à une grande distance du lieu où l'avoué exerce ses fonctions, on serait obligé d'envoyer ces titres à l'huissier pour qu'il pût les copier et certifier la copie.

Et lorsqu'il faudrait procéder à plusieurs significations dans des arrondissemens différens et éloignés les uns des autres, il deviendrait nécessaire de faire voyager ces titres d'un lieu à l'autre, avec un grand danger de les égarer, et avec une grande perte de temps.

» La loi a obvié à toutes ces difficultés. Elle a dit : L'avoué et l'huissier seront également aptes à certifier la copie des pièces, et elle a ajouté (ce qui était une conséquence naturelle) : Celui de ces officiers qui aura fait et certifié la copie en touchera l'émolument.*

Nous nous bornerions à ces courtes réflexions, si l'opinion contraire à la nôtre n'avait pas en sa faveur une imposante autorité, celle d'un arrêt de la chambre des requêtes de la Cour de cassation, en date du 24 août 1831. Mais nous oserons dire que nous connaissons assez les honorables et savans magistrats de cette Cour, pour être certain que leur première décision ne les empêchera pas d'examiner avec un soin consciencieux les nouvelles raisons qui leur seront soumises. Plus d'une fois la Cour suprême, après de mûres délibérations, a renoncé à des opinions qu'elle avait d'abord adoptées grande leçon par laquelle elle a appris aux autres tribunanx que le devoir du magistrat est de s'élever au-dessus de l'amour-propre, comme au-dessus de tout autre sentiment qui pourrait enchaîner sa conscience.

Nous ne craindrons donc pas de discuter les motifs sur lesquels repose l'arrêt du 24 août, et nous ne doutons pas que la Cour ne trouve, dans la liberté même avec laquelle nous le ferons, une preuve du respect que nous inspirent son zèle pour la justice et son amour pour la vérité.

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L'arrêt du 24 août 1831 repose sur trois propositions:

» La première, que les textes ci-dessus transcrits du tarif de 1807 ne décident pas la question;

» La seconde, que la copie devant avoir un caractère authentique, la règle générale est que le droit de la certifier appartient à l'huissier ;

» La troisième, que ce n'est que par exception que ce droit à été accordé aux avoués, et qu'il doit être restreint aux actes signifiés pendant le cours du procès.

» Nous allons examiner successivement ces trois propositions, et sur chacune d'elles nous rapporterons les termes mêmes de l'arrêt.

I. Attendu, porte l'arrêt, que les trois articles invoqués du tarif étant » exactement analysés, se réduisent à dire que le droit de copies de pièces,

» c'est-à-dire l'émolument qui y est attaché, appartient à l'huissier ou à >> l'avoué, selon que cette copie a été faite par l'un ou par l'autre, en sorte >> que la question à résoudre, qui est celle de savoir dans quel cas l'avoué »>a qualité pour faire ces copies de pièces, ne peut pas être éclairée par » ces articles, et doit être résolue par les principes dérivant de la nature » des choses. »

» Qu'il nous soit permis de dire, au contraire, que les trois articles du tarif nous paraissent décisifs, c'est-à-dire qu'ils accordent à l'avoué le droit de certifier les copies, non-seulement quand il s'agit de significations faites pendant le cours d'un procès, mais encore quand il est question de significations qui ne sont pas faites dans le cours d'un procès.

»Prenons d'abord l'art. 28.

Il commence par ces mots : Pour les copies de pièces qui doivent élre données avec l'exploit d'ajournement et tous autres actes. Ces termes sont généraux ; ils embrassent tout: l'exploit d'ajournement, et tous autres actes, c'est-à-dire les significations quelconques. L'article fixe ensuite la quotité de la rétribution, puis il continue ainsi : « Le droit de copie de toute espèce » de pièces et de jugemens appartiendra à l'avoué quand les copies de pièces > seront faites par lui. L'avoué sera tenu de signer les copies de pièces et de » jugemens, et sera garant de leur exactitude, etc. » Ainsi, la première partie de l'article s'applique à toutes sortes de significations sans distinction; la seconde a évidemment la même généralité; d'abord, parce que ces expres. sions : « de toute espèce de pièces et de jugemens, » ont la plus grande latitude possible; ensuite, parce qu'il est de principe que les diverses parties de toute disposition législative se réfèrent les unes aux autres, et qu'ainsi, quand la seconde partie de l'article parle de copies de pièces, c'est dans le sens de la première partie; en sorte que, dans l'une comme dans l'autre, il s'agit des copies qui doivent être données avec l'exploit d'ajournement et autres actes. Tenons donc pour constant que l'art. 28 n'exclut rien; qu'il s'applique à tous les exploits possibles, et aux copies de toute nature données avec les exploits. Or, cet article dit en termes formels : « que le droit de copie appartiendra à l'avoué quand les copies seront faites par lui, et que » l'avoué sera tenu de signer ces copies.» Un pareil texte ne permet aucune distinction. L'avoué est indéfiniment appelé à faire toute copie, à la certifier, et à toucher les émolumens, quelle que soit la nature de la signification.

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» Pour que le droit de l'avoué fût restreint, ainsi qu'on le prétend, il faudrait que l'article, au lieu d'exprimer cette condition unique : quand les copies seront faites par lui, exprimât cette double condition : quand il y aura instance pendante et que les copies seront faites par lui. Mais, nous ne craignons pas de le dire, aucun tribunal ne peut introduire dans la loi une condition restrictive qui ne s'y trouve pas. Il faut entendre et appliquer l'article 28 tel qu'il est : il comprend, sans distinction, toute espèce d'exploit; il parle sans distinction de toutes sortes de copies à donner avec l'exploit; il confère, sans distinction, à l'avoué, la faculté de faire, de certifier ces copies et d'en toucher les émolumens. La question est donc déjà décidée par cet article; mais s'il pouvait rester encore quelques doutes, ils seraient levés par les articles 29 et 72.

L'article 29, comme nous l'avons déjà remarqué, est relatif à un grand nombre d'exploits de diverses natures. Il fixe les émolumens de ces ex

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