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10 septembre 1807, n'était pas soumise à toutes les formalités exigées pour l'emprisonnement, à peine de nullité, par le Code de procédure civile; et qu'il s'ensuit, que, dans le cas dont il s'agit, l'emprisonnement provisoire de Williams Prior ne peut être déclaré nul et irrégulier;

Considérant qu'on doit accorder acte aux parties de leurs soutiens ou méconnaissance, sauf à la cour à les apprécier ;- Considérant qu'il n'y a pas de motifs suffisans pour demander, dans le cas dont il s'agit, au ministère des relations extérieures, des renseignemens sur la législation anglaise, sur les points de droit sur lesquels la cour doit statuer; Considérant qu'un étranger peut être traduit devant les tribunaux français pour les obligations par lui contractées en pays étranger envers des Français (art. 14 C. C.) ; — Considérant que les lettres de change et les billets à ordre sont des effets de commerce qui obligent l'accepteur, nonseulement envers celui avec lequel il a contracté directement, mais encore envers ceux au profit desquels la lettre de change ou le billet à ordre ont été régulièrement endossés de manière à leur en transmettre la propriété; Considérant que l'accepteur est dès-lors réputé s'être obligé envers le tiers porteur de la même manière que s'il avait traité directement avec lui ;-Considérant que les effets de commerce sont par leur nature destinés à être négociés, et que celui qui les a souscrits doit s'attendre à devenir le débiteur d'individus qui lui sont inconnus et qui peuvent être étrangers au pays où l'obligation a été signée ; — Considérant qu'il est vrai qu'en France, lorsque le débiteur est en état de faillite, les créanciers ne peuvent plus individuellement exercer contre lui la contrainte par corps, mais que cela n'est applicable qu'à ceux qui se sont soumis aux formalités imposées au failli par le Code de commerce; Considérant qu'effectivement celui qui n'a pas rempli les formalités exigées, et qui a soustrait sa personne et ses biens, ne peut, à l'égard de chacun de ses créanciers, invoquer les dispositions introduites en faveur du commerçant malheureux et de bonne foi, et qu'alors chacun d'eux peut avec plus de raison user contre lui de la contrainte par corps à laquelle il avait droit;-Considérant qu'il est suffisamment établi que la législation anglaise est conforme sur les points qu'on vient d'examiner à la législation française, et que la raison indique que la faveur due au commerce veut qu'il en soit ainsi;Considérant, en fait, que le billet à ordre de 500 liv. sterling dont il s'agit a été accepté à Londres, au mois d'octobre 1830, par Williams Prior, anglais, au profit de Hesketh, aussi anglais, et payable en janvier 1831 en Angleterre ; - Considérant qu'un endossement régulier dans la forme annonce que la propriété de ce billet à ordre a été transmise le 8 janvier 1831 à Bloqué, qui est français;-Considérant que, d'après les principes ci-dessus exposés, si la négociation n'est pas simulée, Bloqué, dernier

-

propriétaire du billet à ordre, a eu le droit de traduire Williams Prior devant les tribunaux français, et de profiter de la loi du 10 septembre 1807;-Considérant que la faillite de Williams Prior, arrivée en décembre 1830, ne peut être un obstacle aux poursuites de Bloqué, parce que tout concourt à établir que Williams Prior n'a pas rempli les obligations que les lois anglaises imposent, comme les lois françaises, aux faillis, et qu'il s'est soustrait aux poursuites de ses créanciers, puisqu'il est passé en France immédiatement après sa faillite, sous le faux nom de Williams Peter; Considérant d'ailleurs que s'il avait rempli les formalités qui auraient empêché qu'il ne fût considéré comme félon, suivant la loi anglaise, ce serait à lui à le prouver, ce qu'il ne fait pas; - Considérant en effet que l'état de failli qu'il invoque étant une exception, c'est à lui qu'il incombe de fournir la preuve qu'il a fait ce qui était nécessaire pour en profiter; - Considérant qu'il est certain que le billet à ordre dont il est question avait été présenté à la commission des faillites en Angleterre avant la date donnée à l'endossement au profit de Bloqué, ainsi que cela résulte du vu daté qui se trouve sur ce billet; Mais considérant, d'après ce qui a été dit précédemment, que si la faillite fixe les droits des créanciers entre eux, chaque créancier conservant ses droits et actions contre le failli de mauvaise foi, qui, au lieu de se soumettre aux devoirs qui lui sont imposés, a soustrait sa personne et ses biens, le créancier Hesketh a pu valablement négocier son billet à ordre par voie d'endossement, après la faillite et après avoir présenté ce billet à la commission de faillite, de la même manière que si la faillite n'avait pas eu lieu, parce que, si quelqu'un avait droit de s'en plaindre, il n'y a que les créanciers, et non pas Williams Prior, qui ne peut se faire un titre de sa conduite déloyale pour ne pas acquitter une obligation qui n'était même pas exigible à la date donnée à l'endossement, s'il n'y avait pas eu de faillite; -Considérant que l'endossement consenti par Hesketh doit dès-lors produire, au profit de Bloqué, les mêmes effets contre Williams Prior que s'il n'y avait pas eu de faillite;

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Mais considérant que Williams Prior a un intérêt légitime à soutenir que la négociation du billet consenti à Bloqué est simulée, puisque, sans cette négociation, les tribunaux français ne seraient pas compétens, et l'arrestation provisoire n'aurait pu être ordonnée;-Considérant que l'époque à laquelle l'endossement a dû avoir lieu, et la non-garantie qui y est stipulée, peuvent faire douter de la sincérité de la négociation; Considérant que, d'après les faits de la cause, on doit ordonner, avant de statuer au fond ainsi que sur les dommages-intérêts et les dépens, la preuve des faits articulés qui sont concluans et admissibles;-Par ces motifs, etc.

Du 12 janvier 1832. 1" chambre.

OBSERVATIONS.

La première et la deuxième questions jugées par cet arrêt n'offraient pas de difficulté. Il est maintenant constant qu'un étranger a trois mois pour appeler de l'ordonnance de référé qui autorise son arrestation provisoire (Voy. J. A., t. 8, p. 66, v° Contrainte par corps, no 174, et t. 18, p. 782, vo Référé, no45.) D'un autre côté, il est certain que le président peut renvoyer à l'audience en état dé référé toutes les questions qui lui sont soumises, si leur gravité l'exige. - La Cour de Caen a-t-elle bien jugé la troisième question qu'on lui présentait? Nous eroyons que, d'après les faits de la cause, elle ne pouvait juger autrement; l'étranger qui demandait à être conduit en référé devant le président était déjà emprisonné. Le procès-verbal d'écrou était rédigé ; l'huissier devait donc lui refuser de le mener devant le magistrat. Les termes des art. 785, 786 et 788 C. P. C. démontrent que l'officier ministériel ne peut déférer à une pareille demande du débiteur qu'autant qu'elle lui est faite avant la consommation de l'emprisonnement. Nous pensons donc que sous ce rapport la décision de la Cour de Caen est à l'abri de toute critique. Mais nous ne croyons pas que le motif tiré de ce que les formalités du Code de procédure ne s'appliquent point à l'arrestation des étrangers soit approuvé par tous nos lecteurs. Ce motif suppose constant un point excessivement controversé (Voy. J. A., t. 8, p. 687, v° Contrainte par corps, no 193, et t. 37, p. 26). Quant aux deux derniers points jugés par la Cour royale, le premier est loin d'être fixé (Voy. l'état de la jurisprudence et nos observations, J. A., t. 39, p. 306, à la note). Mais il est de toute évidence que le deuxième a été bien jugé. Car la preuve testimoniale est admise dans tous les cas en matière de commerce, et l'équité voulait que la Cour de Caen y admît l'étranger quí l'invoquait pour se soustraire à la compétence des tribunaux français, et surtout à la contrainte par corps.

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L'étranger qui obtient l'autorisation d'établir son domicile en France peut être arrêté provisoirement, en vertu de la loi du 10 septembre 1807, si, au lieu de s'y établir réellement en vertu de cette autorisation, il se crée un domicile fictif pour se soustraire à la contrainte par corps.

(Trudin Roussel C. Creswell.)-ARRÊT.

La Cour, Considérant que, pour échapper à l'application de l'art. 2 de la loi du 10 septembre 1807, l'étranger qui ne sc trouve dans aucun des autres cas d'exception déterminés par cette même loi, doit justifier qu'il est domicilié en France au moment de l'exigibilité de ses dettes; Que l'ordonnance du

roi qui l'autorise à établir son domicile en France ne le dispense pas de cette justification;

Qu'il faut qu'il l'ait exécutée en prenant réellement son domicile; -Que cette ordonnance ne préjuge rien à cet égard, et laisse entière la question de savoir si l'étranger, profitant de l'autorisation qu'il a obtenue du gouvernement, a établi en France un domicile sérieux et réel à l'effet d'y jouir des droits civils, ou si au contraire il veut en abuser pour se créer un domicile fictif, dans le but de se soustraire à la contrainte par corps dont il est menacé ;-Que cette question reste dans le domaine exclusif des tribunaux, appelés à décider si l'arrestation provisoire doit être ordonnée ou refusée ;-Que toutes les circonstances de la cause prouvent que Creswell n'a jamais eu l'intention de se fixer à Boulogne; que la maison qu'il a achetée, les campagnes qu'il a louées et qu'il a somptueusement meublées, le luxe qu'il a affiché n'ont été pour lui que des moyens d'éblouir sur sa véritable position, et de faire plus aisément des emprunts;

Mais qu'en réalité la maison a été achetée sous le nom de sa femme et de ses enfans, le riche mobilier a été cédé à l'un de ses gendres, et qu'au moment des poursuites dont il a été l'objet, à raison des dettes considérables qu'il avait contractées, il était bien le débiteur non domicilié en France, dont parlait le conseiller d'état chargé d'exposer au Corps législatif les motifs de la loi de 1807, c'est-à-dire l'étranger qui d'un moment à l'autre pouvait disparaître sans laisser après lui aucune trace de son séjour;-Met l'appel au néant.

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Du 9 déc. 1829.-1 chambre.

NOTA. Il est évident que cet arrêt a bien jugé en droit et en équité. La loi du 10 septembre 1807 veut que, pour échapper à l'arrestation provisoire, l'étranger soit domicilié en France. Il ne lui suffit donc pas d'avoir le droit d'y prendre domicile. Or, n'en a que le droit, lorsqu'une ordonnance royale l'a autorisé à le faire, et qu'il n'a pas mis à profit cette autorisation. Mais, si au lieu de s'établir réellement dans le royaume, il y prend un domicile fictif, et y achète des immeubles sous le nom d'un tiers, pour se soustraire à la contrainte par corps, les tribunaux doivent déjouer une pareille manoeuvre et le déclarer passible de l'arrestation provisoire, comme n'ayant aucun domicile et pouvant quitter d'un moment à l'autre le territoire français. C'est ce qu'a fait avec grande raison la Cour royale de Douai.

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1o Un acte en reprise d'instance est soumis non-seulement à la péremption, mais encore à la prescription trentenaire;

2° Une instance peut être déclarée prescrite à l'égard de certains cohéritiers, et non prescrite à l'égard d'autres. (Art. 2249 C. C.) (1) 3° Une Cour royale n'a pas besoin de donner de motifs sur un moyen présenté lors d'un arrêt interlocutoire et non représenté lors de l'arrêt définitif. (Art. 7, L. 20 avril 1810.)

(De Marconnay C. la Villedieu.)

La Cour, Attendu qu'indépendamment de la péremption qui est une espèce de prescription particulière aux instances, les actes de procédure 'restent soumis à la loi générale de la prescription trentenaire, qui fait cesser tous les droits, toutes les actions et tout l'effet des actes d'interruption qui remontent à plus de trente ans ; d'où il résulte qu'alors même que la péremption n'a pas été déclarée, cette prescription peut être opposée à une assignation en reprise d'instance s'il s'est écoulé plus de trente ans depuis le dernier acte de la procédure; que, dans l'espèce, les défendeurs avaient excipé de la prescription trentenaire; qu'en appréciant cette exception, la Cour royale, qui n'était pas liée par les motifs de son arrêt interlocutoire du 28 mars 1828, n'a pas eu à s'occuper des effets de l'indivisibilité de l'instance relativement à la péremption, et qu'en déclarant que l'instance, pour l'exécution de l'arrêt de 1785, ne pouvait être reprise que par ceux des demandeurs à l'égard desquels la prescription n'avait pas été accomplie, cette Cour a fait une juste application de l'art. 2249 C. C.;-Par ces motifs, rejette.

Du 23 nov. 1831.-Ch. civ.

COUR ROYALE DE POITIERS.

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1o Appel. - Enquête. Contre-enquête. — Jugement. — Acquiescement. 20 Expertise. Tribunal.- Experts. Nomination. Nombre.

1o Une partie ne peut appeler du jugement ordonnant une enquête, après avoir assisté, sans protestations ni réserves, à cette opération et procédé à une contre-enquête (2).

2o Le tribunal ne peut, sans le consentement des parties, ordonner qu'il sera procédé à une expertise par un seul expert. (Art. 303, 305 C. P. C.) (3)`

(De Rochebrune C. Valerien.) — Arrêt.

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La Cour, En ce qui concerne la fin de non-recevoir proposée contre l'appel du jugement interlocutoire:- Considérant que la partie de M° Grellaud a acquiescé à ce jugement en ne contestant pas la pertinence et l'admissibilité des faits articulés

(1) Il en serait autrement de la péremption de l'instance. Voy. J. A., t. 40, p. 117 et la note.

(2) Voy. sur ce point incontestable J. A., t. 11, p. 70, vo Enquête, no 40. (3) Voy. l'état de la jurisprudence, J. A., t. 12, p. 698, vo Expertise, n° 38, et la note. Voy. aussi l'arrêt suivant,

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