Page images
PDF
EPUB

DERNIER DOCUMENT HISTORIQUE

Annoncé dans la note de la page 86.

[ocr errors]

MALGRÉ son inflexible sévérité dans le procès de Louis XVI, Michel Lepeletier travaillait avec zèle encore dans ce moment à faire abolir la peine de mort du Code criminel de nos lois; cette idée philanthropique occupait autant sa pensée que son institution sur l'éducation publique, égale et obligée pour la jeunesse, depuis l'âge de cinq ans jusqu'à douze,

Le 20 janvier, le jour même où il fut assassiné et une heure avant le crime de Pâris, Michel Lepeletier avait remis à l'imprimerie nationale un manuscrit intitulé: De l'abrogation de la peine de mort; il était précédé de cet avertissement:

Beaucoup de bons esprits ayant manifesté, dans la Convention, leurs vœux pour l'abrogation de la peine de mort, et cette question importante pouvant étre traitée durant le cours de nos travaux, j'ai cru devoir faire réimprimer les réflexions suivantes; je les avais présentées à l'Assemblée constituante ; on hésita alors, et la majorité pensa que le moment n'était pas encore venu d'opérer cette grande in

novation.

Puissions-nous ne pas laisser cette gloire à nos

successeurs !

J'offre celle base imparfaite à la méditation de mes collègues; leurs lumières ajouteront facilement

tout ce qui peut manquer aux vues que je leur

soumets.

Ce document est entre les mains de M.FélixLepeletier; il ne l'a pas fait entrer dans les œuvres de son frère; c'eût été reproduire ce qui se trouve presque entièrement, comme il le dit lui-même, dans son rapport sur le Code pénal à l'Assemblée constituante. Mais l'existence de cet écrit dont on consigne ici la déclaration, est tellement remarquable à cause de l'époque où Michel Lepeletier s'occupait encore de l'abrogation de la peine de mort, que l'on y joint, pour plus d'authenticité, la note de M. Baudouin, imprimeur de la Convention, qui se trouve à la fin, et auquel il avait donné le manuscrit.

Ce manuscrit m'ayant été remis le 20 janvier par Michel Lepeletier, une heure avant le crime qui priva l'humanité d'un soutien bienfaisant et consolateur, et enleva à la république un de ses plus zélés défenseurs, je crois devoir, en le publiant, rendre un dernier hommage à sa mémoire.

Signé BAUDOUIN.

POSTFACE.

Si je n'avais craint de charger démesurément de pièces et de documens historiques, ces archives, que je place près du monument funéraire de mon frère, je pouvais faire imprimer encore à la suite, (malgré les soustractions qui m'ont été faites, particulièrement de lettres originales, par les polices des divers gouvernemens, qui différentes fois m'enlevèrent mes papiers, avec ou sans scellés), je pouvais faire imprimer, dis-je, encore trois volumes de pièces toutes relatives à sa mort. Ce sont des adresses des départemens, des districts, des villes, des villages, des sociétés populaires, des quarantehuit sections de Paris, de divers comités ou associations, de bataillons aux armées; ou des récits de fêtes funèbres célébrées pour lui; des lettres, des hommages en vers et en prose, dont il fut l'objet. Son nom, qui laissera des fondemens solides pour la cause de la liberté, m'a toujours paru produire des effets puissans sur tous les gens de bien.

En voici un exemple entre mille; je le choisis. Il y a trois ans environ, le général Foy entra chez un de ses amis où je me trouvais. Il ne me connaissait pas; on me nomma. A l'instant il me parle de mon frère, m'interroge sur quelques détails; puis avec l'accent de cette âme qu'on lui connut, et me serrant le bras, il me dit: Nom cher à la patrie!!

Quelle impression il me fit!..... Ces deux citoyens français eussent été heureux de se connaître...... Peut-être se sont-ils rencontrés dans les champs de l'éternité?

Je ne puis m'empêcher de transcrire ici le beau passage de Cicéron du songe de Scipion. Mon père le citait souvent à ses enfans.

Jeunes Français, méditez-le bien.

Sed quo sis, Africane, alacrior ad tutandam rempublicam, sic habeto : omnibus, qui patriam conservarint, adjuverint, auxerint, certum esse in cœlo definitum locum, ubi beati œvo sempiterno fruantur. Nihil est enim illi principi Deo, qui omnem hunc mundum regit, quod quidem in terris fiat, acceptius, quam concilia cœtusque hominum jure sociati, quæ civitates appellantur. Harum rectores et conservatores hinc profecti, huc

revertuntur. >>

FIN.

« PreviousContinue »