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l'Amirauté, dans les matieres de leur compétence font en droit conformément au préfent article, de faire défenfes de fe pourvoir & plaider ailleurs que pardevant eux, fur peine de telle amende. Il ne leur appartient pas néanmoins de faire défenses en même temps aux Juges, devant qui l'affaire a été portée d'en connoître, s'ils ne font Juges fubalternes, encore moins d'ajouter la peine d'amende. Ce feroit s'attribuer fur eux un droit de fupériorité qu'ils n'ont pas. Il en eft de même de tous Juges autres que Souverains; & encore ceux-ci ne peuvent-ils ufer de défenfes qu'à l'égard de leurs inférieurs, relevant d'eux.

Il n'eft pas plus permis aux Commiffaires, aux Intendans ni aux Commiffaires Ordonnateurs de la marine, d'entreprendre de connoître d'aucune affaire de l'Amirauté. Ordre de M. le Comte de Toulouse du 6 Juillet 1715, aux Officiers de l'Amirauté d'y veiller.

Le Commentateur fait mention fur cet article d'une Déclaration du Roi du mois de Janvier 1682 contre l'ufage de prononcer des amendes pour transport de Jurifdiction.

Cette Déclaration eft celle que l'on trouve dans le recueil de Neron, tom. 2, fol. 162, en date du 28 Janvier 1682. Elle a véritablement abrogé cet ufage: mais l'on pourroit obferver à ce fujet, 1°. qu'elle n'exprime que le cas où deux parties fe pourvoyent pour un même fait en deux différentes Cours indépendantes l'une de l'autre, & où elles font refpectivement prononcer la nullité de l'exploit de l'autre partie, avec amende de part & d'autre pour tranfport de Jurifdiction. 2°. Qu'elle paroît ne concerner que les Juges ordinaires & nullement les Juges de privilege, autorifés par une loi particuliere, à connoître de certaines matieres à l'exclufion de tous autres Juges, avec pouvoir de défendre aux parties de fe pourvoir ailleurs que devant eux fur peine d'amende, tels que font les Juges de l'Amirauté par la difpofition de cet article, & les Juges des Eaux & Forêts par l'art. 14, titre 1 de l'Ordonnance de 1669. Avec la même diftinction, l'on pourroit écarter également l'autorité de l'Arrêt de réglement du Parlement de Paris en date du 7 Août 1698, rapporté par le continuateur de Bornier fur l'art. 2, tit. 2 de l'Edit du commerce de 1673, pag. 753, édition de 1729, & inféré dans le cinquieme tom. du Journal des audiences, puifqu'il n'a été rendu qu'entre le Prévôt de Paris & les Juge & Confuls de la même ville; à quoi l'on pourroit ajouter, qu'à fuppofer que les défenfes qui y font faites au Prévôt de Paris & à tous autres Juges de prononcer aucunes condamnations d'amende, pour diftraction de Jurifdiction tant contre les parties que contre les Huiffiers & Sergens qui auront donné ou fait donner des affignations devant les Juge & Confuls, fuffent extenfibles naturellement aux autres Juges en général; elles ne regarderoient point, en les Juges de l'Amirauté fondés dans la difpofition du préfent article, attendu que cet Arrêt n'auroit pas eu le pouvoir d'y déroger; encore moins pour ordonner l'exécution de l'art. 15, tit. 12 de l'Ordonnance de 1673, au préjudice de ce même article de notre Ordonnance qui, dans les défenfes qu'il contient, y foumet nominativement les Juge & Confuls.

tout cas,

Cependant lorfqu'on réfléchit fur les motifs de la Déclaration du Roi cideffus citée du 28 Janvier 1682, on ne peut fe difpenfer de reconnoître que l'intention du légiflateur a été de profcrire indiftinctement l'ufage de prononcer des amendes, pour tranfport ou diftraction de Jurifdiction.

Ces motifs en effet, ont été de remédier à l'inconvénient résultant des condamvations d'amendes prononcées contre les parties par différens Juges, fe prétendant refpectivement fondés à connoître de la même affaire; d'où il arrivoit que ces amendes étant exigibles de la part du Fermier du Domaine contre les deux parties, celle qui avoit raifon étoit obligée de payer par provifion l'amende qui lui étoit infligée, tout comme celle qui avoit tort, & qui fuccomboit dans l'inftance en réglement de Juges.

Or cet inconvénient étant comme inévitable, parce qu'en laiffant subsister l'ufage de condamner à l'amende la partie qui ne voudroit pas reconnoître la compétence du Juge qui prononceroit le premier l'amende, l'autre Juge, qui fe croiroit compétent de fon côté, ne manqueroit pas de condamner tout de même à l'amende l'autre partie qui refuferoit auffi de le reconnoître pour Juge; il eft naturel de conclure, que l'abolition ou fuppreffion de cet ufage, regarde abfolument tous les Juges; ceux de privilege comme les Juges ordinaires, & par conféquent ceux de l'Amirauté; d'autant plutôt que la Déclaration du Roi étant poftérieure à la préfente Ordonnance, elle eft cenfée y avoir dérogé de plein droit en cette partie, les raifons de l'abrogation de l'ufage étant les mêmes, auffi-bien à l'égard des Juges fondés dans une loi particuliere à prononcer de pareilles amendes, que de ceux qui n'avoient pour eux que le fimple ufage.

Ainfi il paroît vrai de dire avec l'auteur du Nouveau Commentaire fur l'Ordonnance de 1673, art. 15, tit. 12; pag. 266 & 207, qu'à l'égard des Juges & Confuls, lorfqu'ils retiennent des caufes qui ne font pas de leur compétence, ce qui ne leur eft que trop ordinaire, il n'y a pas d'autre voye à prendre que celle de fe pourvoir par appel de leurs fentences comme de Juge incompétent, & qu'il n'eft plus permis aux Juges qui fe prétendent fondés à connoître des causes portées en la Jurifdiction Confulaire, de prononcer aucunes amendes, foit contre les parties, foit contre les Huiffiers pour diftraction de Jurifdiction; encore moins d'évoquer ces caufes, fauf à les revendiquer par le ministere public, & à fe pourvoir enfuite en réglement de Juges, en cas de déni de renvoi. Et ce qui eft dit ici par rapport aux Juges & Confuls, est applicable tout de même à tous autres Juges non fubordonnés à ceux qui ont droit d'évoquer.

Au refte la révendication a lieu de la part du Procureur du Roi ou du Seigneur, auffi-bien dans le cas où les deux parties confentent de plaider en la Jurifdiction Consulaire ou toute autre non compétente, que dans celui où le défendeur a requis fon renvoi; par la raifon qu'il n'est pas libre aux parties de fe donner les Juges qu'il leur plaît de choifir, & d'en reconnoître d'autres que ceux qui ont droit de les juger.

Tout ceci néanmoins, n'empêche pas ce femble, le miniftere public qui revendique une caufe, de prendre des conclufions contre les parties pour fe voir faire défenfes de plaider, pour raifon du fait en queftion, ailleurs qu'en fa Jurifdiction fur peine de telle amende, pourvu qu'il s'abstienne de faire déclarer l'amende encourue. Et c'eft ainfi qu'il en a toujours été ufé à l'Amirauté de cette ville, en conformité des inftructions données aux Officiers de cette Jurifdiction de la part de M. l'Amiral.

Par-là en effet, l'ordre établi par la Déclaration du 28 Janvier 1682 n'est

point troublé : c'est seulement préparer la voye aux condamnations d'amende & autres peines que cette même Déclaration veut qui foient prononcées contre ceux qui fe trouvant mal fondés, auront donné lieu mal-à-propos au Réglement de Juges; ce qui regarde les Juges comme les parties. C'eft auffi à quoi l'on ne fauroit trop exactement tenir la main, pour diminuer par la crainte de l'événement, le nombre des entreprises que font certains Juges fur la Jurifdiction d'autres, par orgueil, par jaloufie & par efprit d'indépendance ; entreprise auxquelles ils ne fe porteroient pas fi volontiers, s'ils avoient à appréhender, en fuccombant dans le conflit de Jurifdiction, de supporter en plein la peine que méritent les téméraires plaideurs.

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Des Lieutenans, Confeillers, Avocats & Procureurs du Roi aux Sieges de l'Amirauté.

L eft question ici des qualités & conditions requifes pour la réception des Officiers de l'Amirauté, le leurs privileges, de leurs devoirs & obligations.

Dans les Amirautés générales, le premier Officier a droit de prendre le titre de Lieutenant-Général, de même qu'aux Tables de Marbre; mais dans les Amirautés particulieres, il ne peut fe qualifier que de Lieutenant feulement, ou de Lieutenant Particulier.

ARTICLE PREMIER.

Es Lieutenans, Confeillers, & nos Avocats & Procureurs aux être

reçûs qu'ils ne foient Gradués, n'ayent fréquenté le Barreau pendant le temps porté par nos Ordonnances, & ne foient âgez, fçavoir les Lieutenans des Sieges Généraux, de vingt-fept ans & ceux des autres Sieges, & nos Avocats & Procureurs de vingt-cinq.

?

JUfqu'à ce que les Officiers de l'Amirauté, euffent été faits Officiers Royaux, l'Amiral les nommoit & inftituoit à fon gré, qu'ils fuffent lettrés ou non. Dépuis l'érection de ces Offices en Offices Royaux, il a bien confervé le droit de les nommer & préfenter au Roi, avec faculté de recevoir au ferment par fes Officiers aux Tables de marbres, ceux des Amirautés particulieres qui en relevent mais depuis l'Edit du mois de Mars 1551, & l'Ordonnance de Blois de 1579, art. 107, il n'a pu faire choix que de fujets graduez, âgés de 25 ans & ayant fréquenté le Barreau pendant trois ans.

Le Parlement de Rouen lors de l'enregistrement de cette Ordonnance de Blois, ordonna fur cet art. 107, qui ne parle que des Confeillers, qu'il

auroit lieu tout de même, pour les Avocats & Procureurs du Roi, & cela a fervi de regle dans la fuite.

Auffi notre article en cette partie, ne met-il aucune différence entre les Lieutenans & Confeillers & les Avocats & Procureurs du Roi.

Il n'y en a qu'à l'égard des Lieutenans des Sieges Généraux, qui doivent avoir 27 ans accomplis, au lieu qu'il fuffit de 25 ans à ceux des autres Sieges, de même qu'aux Confeillers Avocats & Procureurs du Roi, des uns & des autres Sieges.

Dans le temps de cette Ordonnance en conféquence de plufieurs Edits & Déclarations du Roi, pour être reçu Confeiller en quelque autre Jurifdiction que ce fût, il falloit 27 ans. Ainfi cet article admettoit une exception en faveur des Amirautés; mais par l'Edit du mois de Novembre 1683. Il a été établi pour regle générale conformément à l'Ordonnance de Blois que l'âge de 25 ans, fuffiroit déformais pour être reçu Confeiller même aux Cours fouveraines.

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Dire qu'il faut être gradué & avoir fréquenté le Barreau, c'eft dire qu'il faut néceffairement être Avocat ; car ce n'eft qu'à ce titre qu'on eft cenfé fréquenter le Barreau. Au furplus il eft décidé par quantité d'Edits & Déclarations que nul ne pourra être pourvû d'un Office de judicature qu'il n'ait été reçu Avocat. On a même prétendu, il y a quelques années qu'il falloit avoir été reçu Avocat en Parlement; mais feu M. le Chancelier Dagueffeau, décida que la qualité d'Avocat fuffifoit en quelque Tribunal qu'on eût été reçu.

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pas

Aux termes de notre article ce n'eft affez encore d'être Avocat ; il faut de plus avoir fréquenté le Barreau pendant le tems porté par les Ordonnances; ce qui fe rapporte à l'art. 107 de l'Ordonnance de Blois, qui a fixé ce tems à 3 ans.

, y

L'Edit du mois de Mai 1711, portant création de plufieurs Offices dans les différentes Amirautés du Royaume, en confirmant la regle par rapport aux Lieutenans Criminels Commiffaires Enquêteurs & Examinateurs, & aux Confeillers dans les Sieges Généraux ès Tables de Marbre donna atteinte pour les Offices de Confeillers des Sieges particuliers; à l'égard defquels, il fut permis à tous marchands Négocians & gens entendus au fait du commerce & de la navigation, de les acquérir & exercer fans aucune incompatibilité.

Je ne fçai fi dans les autres Sieges ces charges ont été levées par des négocians ici cela n'eft point arrivé; il n'y en a eu même aucune de levée en conféquence de l'Edit, le Lieutenant de l'Amirauté les ayant toutes réunies à la fienne, fuivant la faculté qui lui en étoit accordée par le même Edit. A Marseille, le Lieutenant a réuni tout de même ; mais ces charges de Confeiller, qui font les feules qu'on y connoiffe, n'en font pas moins exercées féparément par des fujets qu'il préfente à cette fin, auxquels M. l'Amiral donne des commiffions, en vertu defquelles ils entrent en fonction, fans qu'il foit befoin d'obtenir des provifions du Roi, ni de reception au Parlement. au lieu qu'à la Rochelle il n'y a point à l'Amirauté d'autre charge de confeiller exercée à part, que celle qui avoit été créée long-temps avant cet Edit, c'est-à-dire par un précédent Edit du mois d'Avril 1691. Celui qui en

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