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question d'étal, spécialement sur une recher che de maternité naturelle, qui se produit sous

la forme d'une demande en mainlevée de l'opposition à la continuation des opéra

père, la maternité peut être établie sans l'aveu de la mère et contre sa volonté ? Donc la limitation du commencement de preuve par écrit aux seuls actes émanés de la mère directement est contraire à l'esprit de la loi. Je pourrais ajouter qu'en réalité, elle va même jusqu'à supprimer le droit que son texte consacre. Car enfin, des deux cas dans lesquels l'art. 323 permet que la filiation légitime soit établie par témoins, l'art. 341 en maintient un au moins en faveur de la filiation naturelle c'est celui du commencement de preuve par écrit. Or, mettez-y la limitation proposée, et, en fait, ce cas est supprimé pour ainsi dire aussi complètement que l'autre, puisqu'il peut se faire que la mère ait succombé en donnant le jour à son enfant, ou peu de temps après; puisque, survivante, elle peut être absolument il

comment pourrait-on dire raisonnablement, l'art. 324 étant ainsi entendu et expliqué par ses auteurs eux-mêmes, qu'il a été dérogé à cet article par le chapitre relatif à la filiation naturelle. Et pourquoi y aurait-il été dérogé? Si la filiation naturelle ne doit pas créer des liens de famille s'étendant aux parents du père ou de la mère, il n'en est pas moins vrai, quant à présent, que l'enfant naturel va trouver dans ces parents, à défaut de la mère, ses véritables adversaires dans cette action en recherche de la maternité qu'il engage; ce sont là incontestablement les personnes directement intéressées à contester sa réclamation. En sorte que la situation, à cet égard, étant exactement celle en vue de laquelle l'art. 324 a disposé, on ne voit pas pourquoi le législateur aurait établi, quant au commencement de preuve par écrit et à ses caractères, une différence quelcon-lettrée; puisque, même capable d'écrire, son inque entre celui que l'art. 323 demande à l'enfant légitime et celui que l'art. 341 exige de l'enfant naturel. Aussi a-t-il entendu n'en établir aucune; et la preuve à cet égard encore paraît bien résulter de l'exposé des motifs de la loi. Là, l'orateur du gouvernement, M. Bigot-Préameneu, s'expliquant sur ce dernier article, s'est borné à dire : « On ne présume pas qu'un enfant ait été mis au monde sans qu'il y ait par écrit quelques traces, soit de l'accouchement, soit des soins donnés à cet enfant (Fenet, ibid., p. 156); formule compréhensive qui, n'excluant pas plus les écrits émanés de la famille dont la mère a pu être entourée 'que les écrits de la mère elle-même, montre que, loin de se départir, pour ce cas, des explications dont l'art. 324 avait été l'objet, les rédacteurs de l'art. 341 s'y sont virtuellement référés.

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Ainsi, ramené à mon point de départ par l'examen et la discussion des objections proposées, je naintiens que ni par l'art. 341 ni par aucun autre article du chapitre relatif aux enfants naturels, il n'a été dérogé, soit directement, soit même indirectement, à l'art. 324. Par là-même l'applicabilité de cet article à la filiation naturelle se trouverait déjà justifiée.

Mais ce qui complète la démonstration, c'est impossibilité d'arriver à une application exacte et concordante de l'art. 1347. Aussi n'y a-t-il guère qu'arbitraire et divergence dans les solutions de ceux qui ont cru devoir faire appel à cet article (lequel, comme l'observation en a été faite, n'existait même pas lorsque le titre de la Filiation était discuté et promulgué).

D'un côté, on en conclut, et c'est l'avis de la majorité, que le commencement de preuve par écrit, dans le cas de l'art. 341, doit émaner directement de la femme elle-même à laquelle la maternité est attribuée.-A cela, on pourrait opposer d'abord que c'est méconnaître la pensée de cet article lui-même. En effet, il a expressément autorisé la recherche de la maternité. Qu'est-ce à dire, sinon qu'à la différence de la paternité dont la recherche est interdite (art. 340) et à l'égard de laquelle aucune preuve ne peut suppléer la reconnaissance authentique et toute volontaire du

térêt propre, son honneur, l'honneur de la famille
lui commanderont de s'abstenir de tout ce qui
pourrait mettre sur la trace de sa faute, et de
prendre, au contraire, les précautions les plus i
propres à en assurer le secret. Mais je n'insiste
pas et je me place sur le terrain de l'art. 1347)
dont il s'agit uniquement en ce moment de discu-
ter l'application. Or, exiger que le commence-
ment de preuve par écrit émane directement de
la femme elle-même à laquelle la maternité est
attribuée, est-ce donc appliquer exactement cet ar-
ticle? Oui sans doute, si la mère est en cause, si
c'est contre elle personnellement que la maternite
est recherchée, mais si, comme dans l'espèce ci-
dessus, le débat, au lieu d'être engagé avec la
mère, est établi avec des parties qui ne la repré-
sentent même pas, c'est tout bonnement l'arbitraire
substitué à la règle de l'art. 1347, puisque, d'a-
près cet article, le commencement de preuve par
écrit ne s'entend que de l'acte emané de celui
contre lequel la demande est formée ou de celui qu'il
représente.

D'un autre côté, et dans un autre système, soutenu notamment par MM. Aubry et Rau, loc. cit., on admet que le commencement de preuve peut résulter aussi bien d'écrits étrangers à la mère que des écrits de la mère elle-même; mais on distingue. Les écrits sont-ils étrangers à la mère, on s'en tient rigoureusement à l'art. 1347, en ce sens que ces écrits seront opposables à ceux-là seuls qui en sont les auteurs; et par là on arrive à ce résultat au moins bizarre que, dans cette matière essentiellement indivisible de l'état des personnes, l'enfant naturel, si, comme dan l'espèce ci-dessus, il plaide par exemple contre dix-neuf défendeurs dont un seul a fourni un commencement de preuve par écrit, pourra faire la preuve de son identité contre celui-là, et ne la pourra pas faire contre les dix-huit autres ! Les écrits émanent-ils de la mère elle-même, ils seront, comme s'il s'agissait d'un acte de reconnaissance, opposables à toute personne indistinctement, en sorte que, le débat sur la question d'état fût-il engagé avec d'autres que la mère, le commencement de preuve par écrit, nonobstant l'art. 1347

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tions de compte et partage de la succession d'une femme décédée, formée par une personne qui se prétend enfant naturel de cette femme, alors qu'il n'existait, avant la demande en mainlevée, aucune instance judiciaire en pétition d'hérédité ou de partage (1). (Décr. 30 mars 1808, art. 22.)

(Hérit. Duval C. Levesque.)

Il y a eu pourvoi en cassation par les héritiers et légataires Duval contre l'arrêt rendu en audience solennelle par la Cour impériale de Paris le 4 fév. 1867 (P.1867.446.-S. 1867.2.97). Le pourvoi était fondé sur les quatre moyens suivants :

1er Moyen. Violation de l'art. 22 du décret du 30 mars 1808, en ce que la Cour de Paris a statué en audience solennelle sur la question de filiation soulevée par la demoiselle Levesque, incidemment à une question principale de mainlevée d'opposition, de la compétence de la Cour siégeant en audience ordinaire, introduite par les héritiers Duval le 13 nov. 1865. Il est certain en droit et constant en jurisprudence, disaient les demandeurs, que les Cours impériales ne doivent juger en audience solennelle les contestations relatives à l'état civil des citoyens, qu'autant que ces contestations sont introduites par action principale et ont pour objet direct de fixer cet état; et que, lorsque la question s'élève incidemment à une demande de la compétence de la Cour siégeant en audience ordinaire, et en défense à cette demande, elle doit être jugée également en

dont il n'y avait plus à tenir compte en ce cas, serait opposable, comme tel, à tous les défendeurs et à chacun d'eux individuellement !

Certes, rien mieux que ces discordances et ces sortes de transactions à propos d'un texte dont la rédaction pourtant est nette et précise, ne saurait montrer qu'il faut laisser la disposition de l'art. 1347 à la matière des obligations en vue de laquelle elle a été écrite ; qu'appliquée à la preuve de la filiation même naturelle, cette disposition est détournée de son objet véritable; et qu'à cet égard, la règle est dans l'art. 324, qui seul et en toute hypothèse pourra être appliqué exactement, complétement, sans distinction 'ni compromis.

Reste la question subsidiaire de savoir si, étant donné le commencement de preuve par écrit, les juges peuvent se dispenser d'ordonner la preuve testimoniale, et admettre de plano la preuve par présomptions graves, précises et concordantes. Quoique discutée dans l'espèce, cette question n'a pas été directement résolue par la Cour de cassation. Cependant le rejet du pourvoi dirigé contre l'arrêt de la Cour de Paris qui précisément avait procédé ainsi, implique la solution affirmative. Cette solution, d'ailleurs, est parfaitement exacte. A la vérité, l'art. 341 n'autorise explicitement que la preuve par témoins comme complément du commencement de preuve par écrit. Mais la disposition en doit être complétée par celle de

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audience ordinaire, en vertu de la règle que le juge de l'action est le juge de l'exception. Il est de même certain que la compétence, loin d'être facultative, appartient exclusivement au juge désigné par la loi; en sorte qu'une question d'état qui lorsqu'elle s'élève incidemment est du ressort des Cours impériales en audience ordinaire, ne saurait être concurremment et facultativement du ressort de ces mêmes Cours en audience solennelle. Les décisions de la Cour de cassation sont très-nombreuses en ce sens, et les arrêts déclarent en outre « que les règles relatives à la compétence sont d'ordre public et que la nullité résultant de leur inobservation ne peut être couverte ni par le silence ni même par le consentement formel des parties.» (V.suprà, note 4). Or, dans l'espèce, il résulte des qualités de l'arrêt attaqué que la question qui formait la base du litige était la demande en mainlevée de l'opposition formée par la demoiselle Levesque aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession Duval, laquelle demande était de la compétence de la Cour impériale séant en audience ordinaire. La question d'état élevée par ladite demoiselle Levesque n'était qu'une demande reconventionnelle incidemment formée à l'appui d'une défense à l'action des demandeurs en mainlevée de l'opposition. Elle devait suivre la demande principale et ne pouvait changer la juridiction. La Cour impériale en audience solennelle n'était donc pas compétente, et le moyen peut être invoqué pour la première fois devant la Cour de

l'art. 1353, suivant lequel les présomptions graves, précises et concordantes sont admissibles dans les cas où la loi admet la preuve testimoniale. Et il ne faudrait pas dire qu'il y a contradiction ou contrariété de vues, d'une part à introduire cet article dans la matière de la paternité et de la filiation, et d'une autre part à en écarter l'art. 1347. C'est qu'en effet on trouve dans ce titre une définition spéciale du commencement de preuve par écrit, laquelle se substitue, pour cette matière spécialement, à celle de l'art. 1347, tandis qu'on n'y voit aucune disposition qui, de près ou de loin, touche à la règle générale de l'art. 1353 et y déroge.

PAUL PONT.

(1) Il a été décidé par de nombreux arrêts que la question d'état soulevée incidemment, à une autre de nature à être jugée en audience ordinaire, doit aussi être jugée en audience ordinaire comme l'action principale. V. notamment Cass. 26 juill. 1865 (deux arrêts) (P.1865.1041 et 1045.-S.1865.1.393 et 395); 13 mai 1868 (P.1868.893.-S.1868.1.338). L'arrêt ci-dessus ne contredit pas cette jurisprudence. Il se combine et se concilie, au contraire, avec elle, en ce qu'il constate qu'il n'y avait pas d'action, pas d'instance judiciaire engagée à laquelle pût être rattachée la question d'état, au moment où cette question a été soulevée par la demande en mainlevée d'une opposition qui affirmait l'état réclamé.

cassation, puisqu'il est d'ordre public. Du reste, il importe peu que la prétention de la demoiselle Levesque soit qualifiée demande reconventionnelle. Elle n'est pas moins une exception, une demande incidente à la demande principale. Or, il est de règle que « le juge compétent par rapport à une demande est par là même compétent pour prononcer sur la question incidente, bien qu'il ne put en connaître si elles lui étaient proposées comme demandes principales.» (BerriatSaint-Prix, t. 1, p. 37, note 64, 4°).

SO

si l'on comprend très-bien l'attaque et la critique contre l'audience ordinaire alors qu'on a dù être jugé en audience solennelle, on ne comprend pas la critique et l'attaque centre l'audience solennelle sous prétexte que l'audience ordinaire aurait sufli. Encore une fois, nul ne saurait raisonnablement se plaindre d'avoir obtenu un surcroit de garantie.

2 Moyen. Fausse interprétation de l'art. 341, C. Nap., et aussi des art. 56, 57 et 386, même Code, en ce que l'arrêt attaqué a décidé qu'en matière de filiation naturelle, l'acte de naissance fait preuve complète de l'accouchement de la femme qui y est dénommée, encore bien qu'il ait été fait sans son con

cours.

La défenderesse répond à ce moyen que la doctrine en est condamnée par les arrêts de la Cour de cassation des 1er juin 1853 (P. 4855.1.455.-S.1853.1.481) et 19 nov. 1856 (P.4837.496.- S.1857.1.97), lesquels décident que les actes de l'état civil font pleine foi des faits déclarés à l'officier de l'état civil, dans les conditions déterminées par la loi, et par les personnes à qui elle a imposé le devoir de faire ces déclarations; et spécialement, que l'acte de naissance d'un enfant naturel, dressé sur la déclaration de la sage-femme qui assistait à l'accouchement, et contenant indication par celle-ci des nom et domicile de la mère, fait foi de l'accouchement, c'està-dire du fait même de la maternité. Or, dit la défenderesse, ces principes ont été purement et simplement appliqués par l'arrêt attaqué, qui, précisément, constate que l'acte du 20 juill. 1814 (l'acte de naissance de la demoiselle Levesque) a été dressé selon les formes prescrites par la loi et sous la garantie des sanctions par lesquelles elle a assuré la sincérité des décla rations qu'il renferme.

En répondant à ce moyen, la défenderesse opposait d'abord une fin de non-recevoir. Les héritiers Duval, disait-elle, n'ont pas contesté, en appel, la compétence de l'audience solennelle. Donc le moyen est nouveau et non recevable devant la Cour de cassation, suivant la règle générale. Il est fait excepainsi protion à cette règle, quand le moyen posé est d'ordre public. Mais à supposer que l'audience solennelle ne dût pas être saisie dans l'espèce, en quoi l'ordre public serait-il atteint par l'attribution à l'audience lennelle d'un procès grave, et touchant à l'état civil? Et qui serait fondé à se plaindre du surcroît de garantie que les plaideurs trouvent dans la solennité du dérecevable.pas bat? Le moyen n'est donc En tous cas, ajoutait la défenderesse en abordant le fond, le moyen ne serait pas tondé. L'art. 22 du décret du 30 mars 1808 dit que les contestations sur l'état civil des citoyens seront portées aux audiences solenneiles. Or, quelle était la question du procès? Précisément et uniquement une question d'état. Le débat s'engage par l'opposition de la défenderesse aux opérations de liquidation, en sa qualité de fille naturelle de la dame Duval, et par conséquent d'ayant droit à la succession de cette dernière. Les héri3 et 4 Moyens. 1° Fausse application de tiers Duval forment une demande en mainlevée de cette opposition, en prétendant l'art. 324, C. Nap., fausse interprétation des art. 341 et 1347, même Code, en ce que que l'opposante n'est pas fille naturelle de l'arrêt a admis que le commencement de la dame Duval. La seule question qui soit soulevée est donc celle de savoir si la défenpreuve exigé par l'art. 341 pour être admis à deresse est ou n'est pas la fille naturelle de prouver par témoins sa filiation naturelle, la dame Duval. C'est une contestation sur pouvait résulter de lettres émanées du frère de la mère réclamée et non de celle-ci; et. l'état civil, la demande en mainlevée n'étant qu'une conséquence du point à juger. Il en en ce qu'il a appliqué à la filiation naturelle était tout autrement dans les espèces sur l'art. 324 spécial à la filiation légitime, au lieu de l'art. 1347 qui est de droit commun: lesquelles sont intervenus les arrêts invo20 Violation de l'art. 7 de la loi du 20 avri qués par le pourvoi. Ce n'est pas une question d'état qui se dégageait, comme point 1810, pour défaut de motifs.-D'après la Cou unique de contestation, des demandes mulde Paris, disaient les demandeurs à l'appui tiples à débattre dans ces espèces. La con- de ces moyens, le commencement de preuve testation sur l'état était réellement incidente, par écrit dont parle l'art. 341 peut résulter comme on peut s'en convaincre à la lecture de pièces autres que celles émanées de la des arrêts. Le pourvoi ne peut donc se pré-mère dont on recherche la maternité, et spé valoir des décisions qu'il invoque. Et, au contraire, la défense en peut tirer avantage. En effet, la plupart de ces arrêts rejettent des pourvois fondés sur ce que le procès avait été jugé en audience ordinaire, alors qu'il contenait dans les divers points à débattre une contestation sur l'état civil. C'est l'inverse qui a lieu dans l'espèce actuelle. Et

cialement de lettres écrites par le frère de la femme dont l'enfant se prétend issu. En d'autres termes, la définition du commencement de preuve par écrit serait ici, non pas dans l'art. 1347, placé au titre des Obligations conventionnelles, mais dans l'art. 324, lequel, écrit dans le chapitre relatif aus preuves de la filiation des enfants légitimes.

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dispose que « le commencement de preuve pléer le commencement de preuve par écrit par écrit résulte des titres de famille, des re- (Cass. 28 mai 1810; V. aussi Toullier, t. 2, n. gistres et papiers domestiques du père ou de 944; Merlin, Rép., v° Légitimité, § 3, n. 3, la mère, des actes publics et même privés et Quest., vo Maternité, p. 294; Duranton, émanés d'une partie engagée dans la contes- t. 3, n. 237; Demolombe, t. 5, n. 502; Dutation, ou qui y aurait intérêt si elle était vi- caurroy, 1. 1, n. 500; Zachariæ, t. 2, p. 81; vante. » C'est là une erreur manifeste. Le Demante,t. 1, n. 323); d'une autre part, celles chapitre auquel appartient l'art. 341, chapitre suivant lesquelles la possession d'état, qui intitulé « des enfants naturels » est complet prouve la filiation légitime, ne prouve pas par lui-même ; et il n'y a pas à y reporter la filiation naturelle (Bourges, 2 mai 1837, P. des dispositions empruntées au chapitre pré- 1838.1.193.-S. 1838.2.5); comp. et rappr. cédent relatif aux enfants légitimes. Or, l'art. Cass. 13 mars 1827 et Limoges 27 août 1811. 341 indique lui-même les caractères que doit V. aussi Proudhon, t. 2, p. 143; Toullier, t. avoir le commencement de preuve par écrit 2, n. 970 et 971; Loiseau, p. 474, 527 et dont il parle; tout au moins ces caractères 528; Duranton, t. 3, n. 238; Zachariæ, t. 4, s'induisent de la nature même des choses. La p. 14; Marcadé, art. 340; Ducaurroy, t. 1, reconnaissance d'un enfant naturel ne peut n. 399; Bonnier, Preuves, p. 144).-L'arrêt avoir lieu valablement que par un acte authen- attaqué se refuse à faire à l'espèce l'applicatique émané du père ou de la mère de l'enfant, tion de l'art. 1347 sous le prétexte que cet à l'exclusion même de tous parents qui cepen- article n'était pas encore rédigé au moment dant pourraient avoir intérêt à la reconnais- où fut édicté l'art. 1341. Mais l'objection sance. Dès lors, il est naturel d'exiger de l'en- n'est pas sérieuse. D'abord, le sens de l'art. fant qui recherche la maternité à la faveur d'un 341 peut être fixé par l'esprit et l'économie commencement de preuve par écrit, que le de la section dans laquelle il est placé; et, de document, la pièce dont il excipe émane de lui-même, il se précise dans le sens de l'art. la mère qu'il réclame, d'elle seule et non art.1347, sans qu'il soit nécessaire de recourir pas d'un parent. Comprendrait-on que le à ce dernier article. D'une autre part, cet art. parent auquel il n'est pas permis de faire va- 1347 ne contient pas une disposition exceplablement la reconnaissance par acte au- tionnelle, ou exclusivement applicable à la thentique, pùt la faire indirectement en matière des obligations ou des contrats: il créant un commencement de preuve par suffit qu'il n'ait pas été dérogé à la règle écrit propre à permettre d'établir ensuite la qu'il consacre pour que cette règle doive être filiation par témoins? Ce serait là tourner la suivie. Enfin, le Code Napoléon est une œuvre loi, et ouvrir la voie à des collusions et à des générale et d'ensemble; il ne saurait être fraudes que l'on prévient en s'en tenant ri- morcelé comme le suppose la considération goureusement à la disposition de l'art. 1347. à laquelle s'est arrêté l'arrêt de la Cour de L'assimilation entre la filiation naturelle et Paris. Il est donc vrai qu'il y a eu dans l'esla filiation légitime que l'arrêt attaqué met pèce une fausse application de l'art. 324.à la place de ce dernier article est contraire D'ailleurs, il y a à se demander, en outre, à l'esprit de la loi expliqué par la jurispru- si l'art. 341 qui autorise la preuve par tédence. Elle est contraire à l'esprit de la loi, moins n'est pas spécial à la matière; et si, car lorsqu'il s'agit de la filiation légitime, en dans les termes où il est conçu, il n'est pas vue de laquelle dispose l'art. 324, on com- exclusif de la preuve par présomptions qui, prend qu'il ne soit pas indispensable que le dans l'espèce, a été admise de plano par Commencement de preuve invoqué pour ar- l'arrêt attaqué, lequel aurait aussi, sous ce river à la preuve de filiation émane du père rapport, faussement interprété l'art. 341. — ou de la mère, et qu'il puisse être l'œuvre En tout cas, continuaient les demandeurs, 'd'un parent, puisqu'alors il y a un lien de l'arrêt a violé l'art. 7 de la loi du 20 avril famille même à l'égard des parents. Mais ce 1810, en ce sens qu'il y a dans ses disposilien n'existe pas entre l'enfant naturel et les tions une insuffisance de motifs sur un point parents du père ou de la mère; et dès lors essentiel en notre matière. Le commenceon concevrait difficilement comment on at- ment de preuve par écrit exigé par l'art. tribuerait une valeur quelconque à des écrits 341 doit réunir certaines conditions légales. émanant de ces parents. L'assimilation Il faut donc, pour qu'on puisse apprécier si est contraire à la jurisprudence, car la Cour ces conditions sont remplies, qu'on conde cassation considère, désormais sans hé- naisse le commencement de preuve par siter, comme parfaitement distinctes, même écrit, surtout lorsque l'arrêt établit par de comme inconciliables entre elles, les dispo- simples présomptions, et pas même par une sitions relatives aux enfants naturels et celles enquête, la filiation naturelle d'un enfant. qui concernent les enfants légitimes. Entre Il eût été nécessaire, dans l'espèce, que la les solutions nombreuses qui établissent ce Cour de Paris fit connaître ce commencepoint, il convient de citer: d'une part, celles ment de preuve qui sert de base à son ard'après lesquelles les présomptions graves rêt, et qu'elle justifiât son appréciation, en suffisent pour autoriser l'admission de la expliquant comment ce commencement de preuve testimoniale en matière de filiation preuve par écrit porte sur l'identité exigée légitime, tandis qu'en matière de filiation natu- par la loi. Or, on ne trouve, ni dans les quarelle, elles sontinsuffisantes et ne peuvent sup-lités, ni dans l'arrêt, rien qui fasse connaître

les lettres de Pierre Lévesque et puisse justitter l'appréciation de la Cour sur leur caractère légal. Il y a donc défaut de motifs sur ce point important.

La défenderesse répondait ainsi à ces moyens Aux termes de l'art. 341, l'enfant qui réclame sa mère est tenu de prouver qu'il est identiquement le même que l'enfant dont elle est accouchée; et il n'est reçu à faire cette preuve par témoins, que lorsqu'il a déjà un commencement de preuve par écrit. La question est de savoir ce qu'il faut entendre par les mots « un commencement de preuve par écrit » qui terminent l'art. 341. Cet article fait partie du titre du Code qui traite de la Paternité et de la filiation. C'est donc à ce titre, pris en son entier, et à ses textes, qu'il faut demander la solution des difficultés qui peuvent se produire et l'explication des termes employés par le législateur. Or,précisément les mots «commencement de preuve par écrit» sont expliqués et définis dans l'art. 324, qui fait partie de ce titre. «Le commencement de preuve par écrit, ditil, résulte des titres de famille, des registres et papiers domestiques du père ou de la mère, des actes publics et même privés émanés d'une partie engagée dans la contestation, ou qui y aurait intérêt si elle était vivante.»> C'est la justification de l'arrêt attaqué, qui a trouvé le commencement de preuve par écrit dans une série de lettres écrites par Pierre Levesque, frère de la dame Duval, mère de la défenderesse, son héritier direct au moment où il écrivait ces lettres, et partie dans la contestation engagée sur, la question d'état. L'arrêt précise cela dans les termes les plus explicites; et cela répond au moyen tiré du prétendu défaut de motifs. Mais, dit le pourvoi, l'art. 324 n'a trait qu'à la filiation légitime. Le chapitre spécial à la preuve de la filiation naturelle est complet par luimême, et se réfère au droit commun pour les définitions. L'arrêt attaqué, répondant luimême à l'objection, fait remarquer qu'à l'époque où le titre de la filiation était discuté et promulgué, le titre des obligations n'existait pas encore, n'ayant été édicté qu'un an plus tard. Donc, quand le législateur employait, dans l'art. 341, l'expression même de l'art. 323, définie dans l'art. 324, il ne se reportait assurément pas à l'art. 1347 qui n'existait pas encore. I est, d'ailleurs, inexact de prétendre que le chapitre de la filiation naturelle se suffit à lui-même, et que toutes les dispositions contenues dans le chapitre de la filiation légitime sont inapplicables à la filiation naturelle. C'est là une erreur dont on est revenu depuis longtemps. On distingue, en effet, entre les dispositions spéciales et les dispositions générales: si celles-ci sont écrites dans le chapitre relatif à la filiation légitime, c'est uniquement parce que ce chapitre précède l'autre ; mais il y a une corrélation nécessaire entre les deux chapitres, et le second emprunte au premier toutes les dispositions sans lesquelles la loi

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relative à la filiation naturelle serait incomplète. Ainsi en est-il pour les art. 325, 326, 327, 328, 329 et 330; ainsi en doit-il être pour l'art. 324. C'est ce que l'arrêt attaqué a établi par des considérations décisives contre la doctrine du pourvoi. L'art. 1347, dit-il, forme une règle spéciale aux obligations. Et comment assimiler la preuve d'une obligation que le créancier peut toujours s'assurer par lui-même, à la preuve de la maternité dont les éléments n'ont jamais été à la disposition du réclamant? L'enfant qui vient au monde ne peut se défendre contre les fraudes qui l'entourent; il ne saurait s'assurer les moyens de faire reconnaître son droit. S'il fallait que, conformément à l'art. 1347, le commencement de preuve par écrit émanât à son profit de la mère exclusivement, comment pourrait-il l'obtenir jamais si la mère était morte en lui donnant le jour, ou, si ayant survécu, elle était illettrée? Ainsi la loi aurait donné à l'enfant naturel un droit qu'il ne pourrait pas exercer ! Cela ne saurait être, et il faut dire que le commencement de preuve exigé par l'art. 341 est celui qui résulte des titres et papiers dont parle l'art. 324. En définitive, il s'agit ici de la filiation; c'est donc dans les textes relatifs à la filiation qu'il faut chercher l'explication et la définition des expressions employées par la loi. Si le législateur, en écrivant l'art. 341, avait eu la pensée d'exiger un commencement de preuve autre que celui qu'indique l'art. 324, il n'eût pas manqué de le dire. Ainsi a pensé justement la Cour impériale de Paris. Et quant au grief tiré de la prétendue fausse interprétation de l'art. 341, en ce que l'arrêt, au lieu d'autoriser la preuve par témoins dont seulement il est question dans cet article, a admis de plano la preuve par présomptions, il tombe devant le principe général de l'art. 1353, duquel il résulte que les juges peuvent admettre les présomptions graves, précises et concordantes, dans les cas où la preuve testimoniale est admissible.

ARRÊT (après délib. en ch. du cons.). LA COUR; Sur le premier moyen: Attendu qu'aux termes de l'art. 22 du décret du 30 mars 1808, les contestations sur l'état civil des personnes doivent être jugées en audience solennelle de la Cour impériale;- Attendu que le débat, dans l'espèce, s'est engagé à propos de l'opposition de la défenderesse à ce qu'il fût procédé hors sa présence au partage de la succession Duval; que cette opposition était formée par la défenderesse en la qualité par elle alléguée de fille naturelle de la femme Duval, et par conséquent d'ayant droit à la succession de cette dernière; que la demande en mainlevée introduite par les héritiers et légataires de Duval, n'a été que la négation de l'état affirmé par la défenderesse; qu'en l'absence de toute instance judiciaire en pétition d'hérédité ou de partage, les juges saisis par cette demande ont eu

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