Page images
PDF
EPUB

CASS.-CIV. 16 mars 1869. SERVITUDE, SERVITUDE Oneris ferendi, En

TRETIEN.

L'art. 698, C. Nap., aux termes duquel les ouvrages nécessaires à l'exercice d'une servitude sont à la charge du propriétaire du fonds dominant et non à celle du propriétaire

[ocr errors]

ut

(1-2) Quelle que soit la généralité des termes dans lesquels est conçu l'art. 698, C. Nap., on a prétendu cependant que la servitude de support ou oneris ferendi, forme une exception à la règle d'après laquelle c'est le propriétaire de l'héritage dominant qui doit, à moins de convention contraire, faire les travaux nécessaires pour l'exercice de la servitude. Sic, M. Duranton, t. 5, n. 503.-Cette opinion s'explique historiquement. En droit romain, la servitude oneris ferendi avait un caraclère tout à fait particulier; elle formait une Exception aux servitudes ordinaires qui se réduiaient, comme dans notre droit actuel, à souffrir 'exercice du droit, sans obligation d'agir liquid patiatur. Le propriétaire du fonds serant était tenu ad faciendum, il devait entretenir on mur en état de supporter la surcharge. Telle tait la rigueur de cette obligation qu'elle se perétuait et se maintenait même après la ruine du ir assujetti au support. Dans cette dernière hyothèse, le propriétaire du fonds servant devait construire à ses frais le mur écroulé. Si ea que servit, et tuum onus ferret (dit la loi 3, in fine, D. de Servitut. prædior. urb.), trisset, alia in locum ejus dari debeat. S'il se fusait à cette reconstruction, il y avait une acon ouverte contre lui pour le contraindre à faire 8 travaux dans un délai déterminé. C'est ce e nous apprend la loi 6, § 2, D. Si servit. vin.: Actio nobis competit, ut onera ferat, el difcia reficiat ad eum modum, qui servitute immila comprehensus est. ▾ Après l'expiration de délai, le propriétaire de l'héritage dominant ait autorisé à faire reconstruire lui-même, sauf recourir contre le grevé de la servitude pour tenir le remboursement de ses dépenses. Un al moyen était laissé au propriétaire qui voulait affranchir de cette charge: il devait abandonner fonds assujetti: Hanc servitutem non homim debere, sed rem: denique licere domino rem relinquere (L. 6, § 2, in fine, D. Si servit. adic.).- est difficile d'expliquer le motif de s règles exceptionnelles relatives à la servitude eris ferendi. M. Duranton (loc. cit.) pense que mur servant à son propriétaire, il ne serait pas iste, dès lors, que ce fut le maître du fonds quel est due la servitude qui dût l'entrete

[ocr errors]

ou le refaire à ses frais. D'après MM. Deangeat (Cours élém, de dr. romain, t. 1, p. 92) et Ortolan (Explic, histor. des Instit. de ustinien, t. 2, n. 455), il faudrait rechercher la ison de ces différences dans la formule qu'on mployait pour constituer la servitude dont il s'a 1. Dans un fragment de Paul (L. 33, D. de ere. præd. urb.), on trouve, en effet, qu'il était usage d'établir la servitude oneris ferendi en joutant cette loi: Paries oneri ferendo, uti nunc ANNÉE 1869.-8e LIVR.

du fonds servant, s'applique à la servitude oneris ferendi, comme à toute autre servitude (1).

En conséquence, la commune qui a sur un mur une servitude oneris ferendi pour le soutien des terres d'un chemin, est seule obligée à faire les réparations que nécessite l'exercice de cette servitude (2). (Č.Nap., 698.)

est, ila sit (que le mur de soutènement reste toujours tel qu'il est), ce qui ne pouvait signifier autre chose, ajoute le jurisconsulte, sinon que le mur devait être entretenu dans son état actuel. -Comp. Maynz, Elém. de dr. romain, t. 1, n. 219, notes 22 et 23.-D'ailleurs, cette différence entre la servitude oneris ferendi et les autres servitudes paraît d'autant plus surprenante, qu'en droit romain, la validité d'une stipulation imposant au propriétaire du fonds assujetti une obligation de faire soulevait de vives controverses. Plusieurs jurisconsultes, entre autres Gallus, ne croyaient pas qu'on pût, en aucun cas, insérer une clause si manifestement contraire au caractère essentiellement passif des servitudes: Non posse ita servitutem imponi, ut quis facere aliquid cogeretur (L. 6, § 2, D. Si servit. vindic. ). Mais l'avis opposé de Servius, de Labéon et d'Ulpien, dans l'espèce particulière de la servitude oneris ferendi, prévalut au Digeste.-Quoi qu'il en soit, les règles du droit romain en matière de servitude. oneris ferendi passèrent dans notre ancienne jurisprudence. V. Davot et Bannelier, t. 2, p.658; Domat, Lois civ., liv. 1, tit. 12, sect. 4, n. 2; Poullain du Parc, Princ. du dr. franç., t. 3, liv. 2, ch. 17, p. 307; Cœpola, Tr. des servit., chap. 58.

Le législateur moderne s'est-il écarté sur ce point de la décision des lois romaines et de notre ancienne jurisprudence? C'est ce qui nous semble, malgré l'opinion contraire de M. Duranton, ne devoir faire l'objet d'un doute sérieux. Les termes absclus de l'art. 698 ne permettent, en aucun cas, de mettre à la charge du propriétaire du fonds assujetti les ouvrages nécessaires à l'exercice de la servitude, si le titre ne déclare pas qu'il devra les faire. V. en ce sens, Toullier, t. 3, n. 665; Solon, Servit., n. 572; Ducaurroy, Bonnier et Roustain, Comment. du C. civ., t. 2, n. 359; Demante, Cours analyt., t. 2, n. 555 bis; Taulier, Theor. du Cod. civ., t. 2, p. 456; Aubry et Rau, d'après Zachariæ, t. 2, § 253, p. 561 et note 6; Demolombe, Servit., t. 2, n. 874; Demangeat, Cours élém. de dr. romain, t. 1, p. 492, note 2.-Jugé, d'ailleurs, d'après ces principes, que l'existence d'une servitude de passage sur la chaussée d'un moulin n'emporte pas par ellemême, et en l'absence de titre, à la charge du propriétaire du fonds servant, l'obligation de faire au mur de coutènement de cette chaussée, dans l'intérêt du maître de la servitude, les travaux d'entretien nécessités par l'action corrosive des eaux du bief du moulin, cette action corrosive étant inhérente à la nature de l'héritage assujetti et ne pouvant être imputée à faute au propriétaire de cet héritage: Cass. 7 déc. 1859 (P.1861. 69.-S.1860.1.333).

55

(Ville de Bourganeuf C. Jouanny.)

Le sieur Jouanny, propriétaire d'un jardin situé en contre-bas d'un chemin public appartenant à la ville de Bourganeuf, et à la limite duquel existe un mur qui soutient les terres du chemin, avait fait pratiquer divers travaux sur sa propriété, à la suite desquels se manifesta un éboulement du chemin. De là action par la commune contre le sieur Jouanny à fin de réparation de la voie publique et d'exécution de tous travaux de consolidation et d'appuis nécessaires.

Le 26 janv. 1867, jugement du tribunal de Bourganeuf qui statue en ces termes : « Considérant que l'action de M. le maire de Bourganeuf à pour but de faire décider que la commune à une servitude d'appui sur le mur en litige, que le sieur Jouanny est propriétaire de ce mur, et qu'il était chargé de son entretien et de sa réparation; Considérant que le mur litigieux étant élevé de plusieurs inètres au-dessus du jardin du défendeur et soutenant un chemin public, il y a présomption qu'il appartient à la commune, mais que cette présomption n'est pas telle qu'elle ne doive céder devant des présomptions plus graves; Considérant qu'il y a déjà un certain nombre d'années, Jouanny a appuyé une écurie qu'il a fait bâtir sur une partie de ce mur, qui se trouve ainsi enserré dans ces constructions; que ce même mur semble avoir été réparé à l'angle de ladite écurie; que Jouanny a enlevé en cet endroit même le revêtement des grosses pierres qui le couronnent dans toute son étendue et qu'il jette là son fumier qui reste appuyé sur ledit mur; qu'il résulte de ces fails, de toutes les circonstances de la cause et de l'examen des lieux, qu'il en a toujours joui comme de chose lui appartenant et qu'il en est réellement propriétaire ; Considérant qu'il ne saurait être douteux que, depuis plus de trente ans, les terres du chemin dit des Prairies ne s'appuient sur le mur de Jouanny et qu'ainsi la commune a acquis par la prescription une servitude oneris tollendi;

-

Considerant qu'aux termes de l'art. 698, C. Nap., c'est le propriétaire du fonds dominant qui doit faire tous les travaux nécessaires pour user de la servitude et pour la conserver, à moins que le titre de l'établissement de la servitude ne dise le contraire;

Considérant que le Code Napoléon ne fait aucune distinction entre la servitude oneris toliendi et les autres servitudes; Considérant, en fait, que l'existence du mur litigieux est plus nécessaire à la commune qu'à Jouanny; qu'on peut se figurer le jardin de celui-ci défendu seulement par un talus, mais que le chemin dit des Prairies, très-fréquenté et où il passe journellement de gros fardeaux, ne saurait longtemps exister sans un mur de soutènement, et qu'on ne peut donc aucunement supposer que les parties aient jamais entendu miettre l'entretien et la réparation de l'ouvrage à la charge du pro

priétaire du fonds assujetti;- Considérant, dès lors, que si Jouanny est propriétaire dudit mur, c'est la commune qui est obligée à l'entretenir et à le réparer;-Par ces mo tifs, dit que le sieur Jouanny est propriétaire du mur établi dans son jardin et sur lequel s'appuient les terres du chemin appelé les Prairies; dit que la commune a une servitude d'appui sur le mur; dit que son entretien et sa réparation sont à sa charge; déclare M. le maire non recevable ni fondé dans sa demande, etc. »

Sur l'appel, et le 23 août 1867, arrêt de la Cour de Limoges qui confirme en adop tant les motifs des premiers juges.

POURVOI en cassation par le maire de Bourganeuf, pour fausse application de l'at 698, C. Nap., et violation des art. 60, 2228, 2229, 1382 et 1383. niême Code, en es que l'arrêt attaqué a attribué à la communt de Bourganeuf, malgré ses dénégations. droit de servitude que celle-ci n'a jamais songé à acquérir et dont le prétendu béné fice constitue une charge et un dommag évidents.

ARRÊT.

LA COUR; Attendu qu'il n'a jamais ce contesté que Jouanny ne fût propriétaire d mur de clôture de son jardin;-Que, d'autr part, il est déclaré par l'arrêt attaqué, con-i formément à la prétention que la ville dej Bourganeuf avait élevée dès le commence! ment de l'instance, que la commune a s le mur une servitude oneris ferendi pour le soutien des terres du chemin des Prairie,

---

Attendu, en droit, que le propriétaire da ¦ fonds servant n'est tenu à rien faire pot] l'exercice de la servitude, mais seulement & tolérer cet exercice; - Que c'est, dès lors, à bon droit que l'arrêt attaqué a décide q la commune seule était obligée à faire réparations nécessaires pour que la servitud. dont il s'agit puisse continuer à être exercis sur ledit mur; Rejette, etc. Du 16 mars 1869. Ch.reg. – MM. Bol jean, prés.; Caimètes, rapp.; P. Fabre, «fgén. (concl. conf.); Diard, av.

[ocr errors]

CASS.-REQ. 12 avril 1869.

DES PARTIES.

-

[ocr errors]

1o JUGEMENT, AUTHENTICITÉ, DÉCLARATIONS 2o VENTE, EVICTION, RANTIE, FRAIS ET LOYAUX COUTS. 1o La déclaration consignée dans les m tifs d'un jugement comme ayant été faite ar l'une des parties, peut n'être pas tenue af constante par le juge d'appel, lorsqu' n'en trouve aucune trace dans la procedure, qu'il n'en a pas été donné acte, et qu'elle est déniée par celui auquel le jugement l'attribue. ... Du moins en est-il ainsi quand la diclaration relevée par les premiers juges stitue, non un aveu judiciaire, mais offre non acceptée dont il appartient

con

[ocr errors]

juge d'appel de déterminer le sens et la portée (1). (C. Nap., 1356.)

9 L'acquéreur évincé, mais qui connaissait le danger de l'éviction lors de la vente, ne peut répéter contre le vendeur les frais et loyaux coûts du contrat, pas plus au cas où il n'a rien été stipulé quant à la garantie, qu'au cas où il y a eu stipulation de nongarantie (2). (C. Nap., 1629, 1630.) (Lachkar et Feuilloy C. Hamadou-ben-Aïssa.) Les époux Lachkar et le sieur Feuilloy se sont rendus adjudicataires, sur vente volon-il taire aux enchères publiques, de terrains appartenant à Hamadou-ben-Aïssa. Mais ces terrains étaient depuis longtemps saisis immobilièrement; les poursuites furent reprises et suivies d'adjudication. Les époux Lachkar et le sieur Feuilloy assignèrent alors Hamadou-ben-Aissa pour voir prononcer la nullité de ladite vente, et s'entendre condamner à rembourser aux demandeurs 1221 fr. 15 c. pour frais et loyaux coûts, et à leur payer, en outre, 2,000 fr. à titre de dommages-intérêts.

Le tribunal de Constantine a statué sur cette demande, par jugement du 27 fév. 1866, ainsi conçu : «Attendu qu'après affiches et publications, il a été procédé, le 23 janv. 1865, par-devant Vigneau, notaire, à la vente volontaire aux enchères publiques, et en plusieurs lots, d'une propriété connue sous le nom de ferme du 2e de ligne, appartenant à Hamadou-ben-Aissa; Que les époux Lachkar et Feuilloy sont demeurés adjudicataires de deux de ces lots; tendu que la demande est fondée sur ce qu'au moment de la vente ladite ferme se trouvait saisie immobilièrement, et sur ce que, postérieurement, l'adjudication a eu lieu à la barre de ce tribunal, en conséquence de cette

[ocr errors]

At

(1) Il résultat nettement de l'arrêt attaqué dans l'espèce que l'effet dévolutif de l'appel confere au juge du second degré le droit de nier l'existence de faits ou de déclarations énoncés par le premier juge comme s'étant passés ou ayant eu lieu devant lui, s'il n'en a pas été dressé procès-verbal, et non pas seulement d'apprécier différemment le sens et la portée de ces faits ou déclarations. La Cour de cassation maintient l'arret, mais sans aller peut-être aussi loin, et en se fondant sur des motifs qui peuvent paraître laisser quelque chose à désirer.

(2) L'art. 1629, C. Nap., qui dispense le vendeur de la restitution du prix (et à plus forte raison de la restitution des frais et loyaux coûts du contrat), ne statue que pour le seul cas où la vente contient stipulation de non-garantie. Or, il résulte de l'arrêt attaqué qu'il y avait, dans l'espèce, absence de toute stipulation à cet égard. Il est donc impossible d'admettre, avec la Cour de cassation, que cet arrêt ait pu faire une juste application de l'art. 1629 à un cas auquel il est complétement étranger, et qui se trouve régi luimême par une disposition toute spéciale, celle de

l'art. 1630.

Tous les auteurs sont d'accord

-

saisie; Attendu que, par suite de ces circonstances, les ventes faites aux demandeurs se trouvent effectivement nulles, aux termes de l'art. 686, C. proc. civ.; Attenda que Hamadou-ben-Aissa explique que la saisie qui frappait alors l'immeuble remontait au 19 septembre 1859 et avait été transcrite le 27 du même mois; que le créancier poursuivant avait été désintéressé, ainsi qu'il résulte d'un acte de mainlevée partielle, reçu Vigneau, notaire, le 18 nov. 1861; que cette saisie était abandonnée au moment où a cherché à vendre à l'amiable ladite propriété; qu'il a eu le tort, il est vrai, de ne pas avertir les acquéreurs de cette circonstance; que ceux-ci cependant auraient dû le mettre en demeure de rapporter la mainlevée définitive de ladite saisie, dès que l'existence de cette dernière est venue à leur connaissance lors de la transcription de leur contrat; Que, dans tous les cas, il se déclare prêt à restituer aux demandeurs le montant des frais et débours exposés par eux, avec intérêts du jour du paiement; protestant seulement contre tous dommagesintérêts, si ce n'est au moins pour une somme de 100 fr. comme prix de diverses plantations qu'il ne conteste pas; Attendu que Feuilloy et les époux Lachkar ne justifient d'aucun préjudice réel, en dehors de cette dernière somme; Par ces motifs, condamne Hamadou-ben-Aissa à payer aux époux Lachkar et à Feuilloy la somme de 1221 fr. 15 c., etc. >>

[ocr errors]

Appel principal par llamadou-ben-Aïssa, et appel incident par Feuilloy et les époux Lachkar.

24 janvier 1868, arrêt de la Cour d'Alger qui infirme et décharge Hamadouben-Aissa des condamnations prononcées

--

pour déclarer que si, dans le cas d'absence
de stipulation au sujet de la garantie, le ven-
deur est affranchi de l'obligation de garantie
Jorsque l'acquéreur connaissait, au moment de la
vente, le danger d'éviction, il n'en reste pas
moins obligé de restituer le prix. V, MM. Duran-
ton, t. 16, n. 263; Troplong, Vente, t. 1er, n.
481 et suiv.; Marcadé, sur l'art. 1629, n. 6;
Taulier, t. 6, p. 97; Zachariæ, Massé et
Vergé, t. 4, § 685, texte et note 30, p. 300;
Boileux, sur l'art. 1629. -
Reste-t-il également
obligé, en pareil cas, aux autres restitutions
énumérées dans l'art. 1630? Il faut répondre
négativement, non pas parce que l'art. 1629 serait
applicable, mais parce que les restitutions dont il
s'agit ne peuvent être ordonnées qu'à titre de
dommages-intérêts, et que la vente de la chose
d'autrui, d'après l'art. 1599, C. Nap., ne donne
lieu à aucuns dommages-intérêts lorsque l'ache-
teur savait, en achetant, que le vendeur n'était
pas propriétaire. V. en ce sens, Douai, 18 avr.
1853 (P.1855. 2.486.-S.1854.2.11); Pau, 26
fév. 1868 (P.1868.341.-S.1868.2.73); Aubry
et Rau, d'après Zachariæ, t. 3, § 355, p. 270;
Taulier, loc. cit.

[ocr errors]

contre lui: « Considérant tout d'abord,
en ce qui touche la déclaration attribuée par
les premiers juges à Hamadou-ben-Aïssa,
qu'on n'en trouve aucune trace dans les
écrits du procès, non plus que de l'acte qui,
certainement, en eût été donné, si elle eût
été faite, et qu'en présence des protestations
réitérées dudit Hamadou, en cause d'appel,
il n'est pas possible de tenir pour constante
une pareille déclaration; Que, dès lors,
les éléments de décision doivent être puisés
dans les autres faits et circonstances du pro-
cès;
Et considérant que si, en principe,
le vendeur est obligé, même en l'absence
de toute stipulation à ce sujet, ce qui est le
cas de l'espèce, à garantir l'acquéreur de
l'éviction qu'il souffre dans la totalité ou par-
tie de l'objet vendu, il en est tout autrement
lorsque l'acquéreur a eu connaissance, lors
de son acquisition, du danger de l'éviction;
qu'en pareil cas, il acquiert à ses risques et
périls, et qu'aucune garantie ne lui est due;

Que, dès lors, il n'a droit à demander contre le vendeur ni les frais et loyaux coûts du contrat, ni aucuns dommages-intérêts (art. 1629, C. Nap.); Considérant. que, dans l'espèce, Lachkar et Feuilloy connaissaient, lors de leur adjudication, non-seulement les nombreuses inscriptions qui grevaient l'immeuble, mais aussi la saisie dont il était frappé; Que cette connaissance résulte .... (suivent des appréciations de faits); Considérant qu'en pareille situation et d'après les principes ci-dessus exposés, l'action de Lachkar et Feuilloy n'est fondée ni en ce qui touche les frais et loyaux coûts du contrat, mis à leur charge par le cahier d'enchères, ni en ce qui touche les dommages-intérêts dans lesquels restent les impenses qu'ils peuvent avoir faites sur l'immeuble et qui, d'ailleurs, ne sont aucunement justifiées, ni enfin en ce qui touche les frais qu'ils ont exposés pour les formalités de purge, frais qu'ils n'avaient point à faire, puisque leur adjudication était frappée de nullité, qu'ils ont faits, en un mot, à leurs risques et périls, et ne peuvent donc, sous aucun rapport, répéter contre le vendeur ;Par ces motifs, etc. >>

POURVOI en cassation par les époux Lachkar et par Feuilloy. - 1er Moyen. Excès de pouvoir, violation de l'art. 1356, C. Nap., et des règles du contrat judiciaire. Les premiers juges, a-t-on dit, avaient constaté certaines déclarations faites devant eux par l'une des parties, et desquelles résultait tout à la fois un aveu et un contrat judiciaire. L'arrêt attaqué a refusé d'ajouter foi à cette constatation: 1° parce qu'on n'en trouvait aucune trace dans les pièces du procès; 2o parce qu'il n'en avait pas été donné acte; 3° parce que la partie à laquelle on l'attribuait protestait. Le premier de ces motifs n'a évidemment aucune force : l'aveu fait, le consentement donné en justice, n'ont pas besoin, pour produire leurs effets légaux, d'avoir été

[ocr errors]

mentionnés dans la procédure; il suffit qu'ils aient été reçus et constatés par le juge, une pareille constatation faisant pleine foi par elle-même, à raison de son authenticité.-Le second motif n'est pas moins inadmissible, car il n'y a pas de formule sacramentelle imposée au juge pour donner acte d'une re connaissance faite devant lui. L'affirmation du jugement qu'Hamadou-ben-Aissa se déclare prêt à restituer les frais et loyaux coûts, équivaut évidemment à un donné acte. Si, dans la pratique, on a le plus souvent recours au décerné acte pour se mettre à l'abri d'un oubli de la part du juge, aucun texte de loi n'a fait de ce mode de procéder une nécessité, en sorte que le témoignage du juge suffit toujours pour constater authentiquement les déclarations verbales qui viennent à se produire à l'audience, quelle que soit d'ailleurs la forme que revête ce témoignage, et quand bien même il serait consigné après coup dans les motifs de la décision, au lieu de saisir la déclaration au moment même où elle se produit, pour en faire l'objet d'un procès-verbal de décerné acte. C'est là un point sur lequel la jurispru dence et la doctrine sont d'accord. - Quant au troisième motif, il se heurte de front à l'art. 1356, C. Nap., aux termes duque! l'aveu judiciaire fait pleine foi contre celui qui l'a fait, et ne peut être révoqué, à moins qu'on ne prouve qu'il est le résultat d'une erreur de fait. Il n'est pas possible, en effet, de faire prévaloir la dénégation de la partie sur l'affirmation du juge.

2e Moyen. Violation de l'art. 1630, C. Nap., par fausse application de l'art. 1629 du même Code. L'arrêt attaqué constate, d'une part, qu'il n'a rien été stipulé quant à la garantie et, d'autre part, que les acquéreurs ont connu, lors de la vente, le danger de l'évic tion, d'où il conclut qu'il n'est dû à ceux-ci aucune garantie, et qu'ils ne peuvent récla mer au vendeur ni les frais et loyaux coûts du contrat, ni aucuns dommages-intérêts.!! y a là une méprise évidente, et il suffit de Lire la loi pour s'en apercevoir. Dès que le contrat ne contenait aucune stipulation de garantie, on se trouvait placé dans l'hypothèse prévue par l'art. 1630, et c'est cet article qui aurait dû être appliqué. Or, il dispose formellement que, si rien n'a été stipule quant à la garantie, l'acquéreur évincé a droit de demander contre le vendeur (outre la restitution du prix quand il a été payé) les dommages-intérêts, ainsi que les frais et loyaux coûts du contrat ». Et il ne distingue pas, à cet égard, entre le cas où la cause de l'éviction a été connue de l'acquéreur et celui où elle n'a pas été connue. Cette distinc tion n'existe que dans l'art. 1629, qui ne pouvait recevoir son application à la cause puisqu'il statue uniquement pour le cas e il y a stipulation de non-garantie.

-

ARRÊT.

LA COUR; Attendu qu'il est déclaré par les juges d'appel qu'on' ne trouve dans

[ocr errors]

dossement du 20 oct. 1860. Les traites ne furent pas acceptées par la maison Léoni, qui néanmoins se fit nommer consignataire des marchandises et en prit possesEn 1861, le sieur Petersson, qui n'avait pu se faire rembourser par de Ron, alors en état de faillite, a fait assigner la société Léoni devant le tribunal d'Oran, en paiement du prix des bois. Sa demande a été rejetée par jugement du 5 juill. 1861, et par un arrêt de la Cour d'Alger du 21 juill. 1864. Mais cet arrêt a été cassé, pour défaut de motifs, le 12 fév. 1867.

les pièces du procès « aucune trace de la dé-
claration attribuée par les premiers juges à
Hamadou-ben-Aissa, non plus que de l'acte
qui, certainement, eût été donné à son adver-
saire, si cette déclaration eût été faite ; qu'ension.
présence des protestations réitérées de Ha-
madou, en cause d'appel, il n'est pas possible
de tenir pour constante une pareille décla-
ration >> ;
Attendu que la déclaration pu-
rement verbale relevée par les premiers
juges ne constituerait pas un aveu judiciaire,
mais seulement une offre non acceptée dont
il appartenait aux juges d'appel d'interpréter
le sens et la portée; · Attendu qu'il est dé-
claré d'ailleurs souverainement et en fait,
que, lors de l'adjudication, Lachkar et
Feuilloy connaissaient l'existence, « non-
seulement des nombreuses hypothèques qui
grevaient l'immeuble, mais aussi de la saisie
antérieure dont il était l'objet »>; qu'en cet
état de faits dont les juges trouvaient la
preuve dans les actes mêmes du demandeur
en cassation, en déchargeant le vendeur de
la condamnation prononcée contre lui à
raison des frais et loyaux coûts de l'adjudica-
tion, l'arrêt n'a fait qu'une juste application
de l'art. 1629 et n'a aucunement violé l'art.
1630, C. Nap.;- Rejette, etc.

[ocr errors][ocr errors]

Du 12 avril 1869. Ch. req. MM. Bonjean, prés.; Anspach, rapp.; P. Fabre, av. gén. (concl. conf.); Mazeau, av.

CASS.-CIV. 31 mai 1869. CONNAISSEMENT, ENDOSSEMENT, PROPRIÉTÉ, FAILLITE.

Le tiers auquel un connaissement a été transmis par endossement régulier a le droit d'exiger de l'acheteur le prix du chargement, comme l'aurait pu le vendeur lui-même (1). (C. comm., 136, 281, 283.)

Il agit alors, non comme créancier du vendeur dont il exercerait les droits, mais bien comme créancier de l'acheteur, et celuici ne peut, en conséquence, exciper de ce que le vendeur serait tombé en faillite depuis la transmission du connaissement, si la validité de l'endossement n'a pas été attaquée par le syndic. (C. comm., 443.)

(Petersson C. veuve Léoni et comp.) En 1860, les sieurs de Ron et comp., de Stockholm, expédiaient deux chargements de bois de charpente à la maison veuve Léoni et comp., d'Oran, et faisaient traite sur elle pour la somme de 27,445 fr. 85 cent., leur restant due sur le prix qui s'élevait à 38,190 fr. 85 cent. Ils passèrent ces traites, ainsi que les connaissements des marchandises, à l'ordre du sieur Petersson, par en

(1) V. sur les droits du tiers porteur du connaissement, Aix, 31 mars 1865 (P.1866.203.S.1866.2.31), et les renvois. Adde M. Caumont, Dict. dr. marit., v° Connaiss., n. 1 et 15.

La Cour d'Aix, devant laquelle la cause a été renvoyée, a confirmé également le jugement de première instance, par un arrêt du 11 juill. 1867, ainsi motivé:—« Attendu que Petersson a reconnu, en plaidant, que la vente des cargaisons des navires San-Francisco et Fal-Bure avait été régulièrement faite à la maison Léoni avant de lui être faite à lui-même, et qu'il ne revendique plus dans ses conclusions la propriété des marchandises;-Attendu que l'endossement des connaissements dont il est porteur ne peut avoir eu pour effet de lui transférer une propriété déjà cédée à un tiers, ni même de lui assurer un nantissement sur des bois qui n'appartenaient plus à celui qui les lui aurait remis en gage-Attendu qu'il prétend vainement que l'effet de cet endossement a dû être de le rendre cessionnaire du prix; que la cession résultant de l'endossement d'un connaissement ne porte que sur les marchandises qui y sont désignées, et qu'un contrat ne saurait être substitué à un autre ; Attendu que vainement encore Petersson soutient-il qu'il a droit au paiement du solde des marchandises, comme ayant lui-même désintéressé les vendeurs de de Ron, et comme étant subrogé à leurs droits; que la pièce qu'il produit ne contient aucune subrogation; qu'il n'est dans aucun des cas de la subrogation légale; - Que fût-il subrogé aux droits des vendeurs de de Ron, il ne pourrait avoir plus de droits qu'eux; que ceux-ci n'étaient créanciers que de de Ron, et qu'en l'état de la faillite de ce dernier, ils u'auraient qu'une action en paiement d'un dividende dans cette faillite, et jamais une action en paiement de l'intégralité de la somme due, contre un débiteur de la faillite; Par ces motifs, etc. »>

[ocr errors]

POURVOI en cassation par le sieur Petersson, pour violation des art. 136, 281 et 283, C. comm., et fausse application des art. 95 du même Code et 1599, C. Nap., en ce que l'arrêt attaqué a jugé que l'endossement d'un connaissement n'a pas pour effet de transférer à celui qui en est le porteur le droit de réclamer en son nom le prix de la cargaison déjà cédée à un tiers. Cette doctrine, a-t-on dit, serait la négation du connaissement, car elle revient à dire qu'il ne peut s'appliquer qu'à des marchandises non vendues, ou plutôt n'appartenant à per

-

« PreviousContinue »