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PFM 33154

HARVARD COLLEGE LIBRARY DEXTER FUND

Mar 5, 1931

D'ANGERS

Mon cher abbé,

Vous m'avez demandé un mot d'encouragement pour la Revue des Facultés catholiques de l'Ouest, qui commence sa troisième année. J'ai eu beau alléguer mon incompétence, mes occupations et toutes sortes d'autres raisons excellentes : vous avez insisté avec une bonne grâce si persuasive que je cède à votre désir.

En fondant ce recueil, vous tentiez une entreprise hardie et qui pouvait passer pour téméraire. Une Revue de plus dans un pays où les Revues foisonnent! Une Revue de province, comme s'il était permis d'avoir de l'esprit hors de Paris et de sa banlieue! Une Revue de ces Facultés catholiques de l'Ouest, qu'on a souvent représentées comme des créations chétives, dues au caprice d'un évêque autoritaire et à l'infatuation d'un chef-lieu de département ambitieux! Votre succès a donné tort aux pronostics lugubres. Après avoir parcouru toute la collection et lu le plus grand nombre des articles, je vous déclare sincèrement, et sans flatterie, que la Revue des Facultés catholiques de l'Ouest égale les plus rantées, par la solidité, la variété et l'agrément de sa rédaction. La littérature y domine; mais la science y est représentée par des travaux qui m'ont paru excellents, quoique écrits en français intelligible. A côté des doctes dis· sertations de MM. Hy, Couette, Maisonneuve, Henry et

Baugas, des poésies d'une inspiration pure et élevée brillent comme des fleurs écloses entre les pierres d'un cloître béné dictin. Vous avez défendu les classiques avec une ardeur qui vous a attiré du papier timbré. Il ne faut pas avoir trop raison. Je pense comme vous que les difficultés de la question sociale ne tiennent point à Homère ni à Virgile, et qu'ils ne sont pour rien dans la grève des mineurs du Nord. Cependant il aurait peut-être mieux valu épargner douze francs cinquante et un gros chagrin à un excellent homme qui charge sur les anciens avec une conviction sincère et prêche nos contemporains avec un zèle digne de respect. Ce qui m'a particulièrement intéressé, ce sont vos études historiques et vos récits de voyage. M. Dedouvres raconte la jeunesse et les études d'un religieux plus célèbre que connu, le P. Joseph, sur lequel beaucoup de gens instruits ont dit tout ce qu'ils savent, en l'appelant l'Eminence grise. Puisse M. Dedouvres passer bientôt à l'âge mûr et publier le grand ouvrage qu'il prépare sur ce sujet! Vous-même, cher abbé, vous avez analysé de la manière la plus judicieuse et la plus agréable les mémoires encore inédits du général d'Andigné, immortalisé en Anjou par un monument de Bonassieux que j'ai eu le plaisir d'admirer il n'y a pas longtemps. D'autres personnages des guerres de Vendée ont donné lieu à des travaux sérieux. Notre éminent doyen des lettres, M Pasquier, a esquissé la vie d'une sainte de nos jours, la mère Euphrasie Pelletier, fondatrice du Bon Pasteur, dont il nous doit la biographie complète. Avec lui encore nous visitons le vieil Oxford, cette relique du moyen âge malheureusement profanée par la Réforme. M. Martin nous mène en pèlerinage à Notre-Dame d'Héas, et M. Bazin nous guide de Venise à Schio. A propos de M. Bazin, ne pourriezvous pas, puisque nous sommes en temps de chasse, lui demander de tuer une seconde Sarcelle bleue, pour en régaler vos lecteurs?

C'est à vous, cher abbé, que revient principalement la gloire du succès de votre œuvre. C'est vous qui en êtes le Brunetière et le Lavedan; et je suis bien heureux de ratifier les éloges que vous donnait mon illustre prédécesseur, en

rous proclamunt l'un des écrivains qui marqueront avec le plus d'éclat dans la littérature chrétienne de notre temps. » Que Dieu bénisse vos efforts et ceux de vos dévoués collaborateurs! Qu'il rende de plus en plus prospère cette chère Université catholique, qui n'a que le défaut d'être modeste comme l'est toujours le vrai mérite, et pauvre comme l'est souvent le génie lui-même! Elle a justifié son existence par la foule d'hommes distingués qu'elle a formés. Grâce aux catholiques de l'Ouest, à la protection de leurs évèques, aux bénédictions et à l'appui du Souverain Pontife, elle grandira encore, espérons-le, et démentira les prophètes de malheur qui annonçaient sa ruine et pleuraient déjà sur elle avec charité, une charité dans laquelle il entrait peut-être un peu trop d'espérance.

Agrées, mon cher abbé, avec mes félicitations pour le passé et mes vœux pour l'avenir, l'assurance de mon affec tueux dévouement.

FRANÇOIS-DÉSIRÉ.

Évêque d'Angers,

Chancelier des Facultés catholiques de l'Ouest.

A M. l'abbé Alexis CROSNIER, professeur à l'Université catholique

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