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ignore. Il peut arriver alors, et il arrive fréquemment, sans doute, qu'on l'oblige à salarier, avec le fruit de ses sueurs et de ses fatigues, nonseulement des hommes qui ne lui ont jamais rendu et qui ne lui rendent encore aucun service, mais encore des hommes qui lui ont fait et qui continuent à lui faire beaucoup de mal, des hommes toujours prêts à soutenir l'administra tion dans les mesures les plus désastreuses, et à l'approuver dans ses dépenses les plus désordonnées. Qui sait si, dans la multitude de ceux qu'il paie, il ne s'en trouve pas en grand nombre de l'une et de l'autre sorte. Deux raisons l'autorisent à tout soupçonner à cet égard; d'une part la clandestinité des pensions : «<leur ac>> croissement est d'autant plus redoutable, di» sait, à la chambre des députés, le rapporteur » de la commission chargée de l'examen du budget, leur accroissement est d'autant plus » redoutable, qu'il se cache davantage; les » mêmes individus, sur le même fondement ou » sous les mêmes prétextes, obtiennent plu>>>sieurs pensions qui, sans inscription publi» que, se paient obscurement sur des caisses » diverses. » Certes, il est permis au public de croire que les individus qui reçoivent ainsi des pensions en cachette, en sont complètement indi

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gnes. D'une autre part, la somme exorbitante à laquelle la masse des pensions s'élève, ne lui permet guère de douter que, dans la multitude d'hommes entre lesquels elles se partagent, il ne se trouve un très-grand nombre d'intrigans et de mauvais sujets d'après les calculs du rapporteur, dont nous venons de citer les paroles, les pensions civiles, ecclésiastiques et militaires, en joignant à ces dernières les pensions de retraite, les traitemens de réforme et les demisoldes, se portent ensemble à plus de 93 millions (1): « elles absorbent, disait-il, plus » d'un sixième des revenus ordinaires de la » France, et elles augmentent, chaque jour, » dans une telle proportion, qu'il devient aussi » pressant qu'indispensable d'arrêter le cours de

(1) Cette somme se compose des pensions qui se paient au trésor, et de celles qui se paient au ministère de la guerre. Celles qui se paient au trésor s'élèvent à la somme de 24,100,000 francs, savoir:

En pensions civiles, à..

En pensions ecclésiastiques, à..

En pensions accordées non encore ins

2,400,000 fr.

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15,000,000

crites, à..

1,200,000

En pensions de 3000 fr. et au-dessus aux

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» leur accroissement qui menace d'envahir la » fortune publique.

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Quelque scandaleux que pût paraître au milieu des besoins de toute espèce qui nous assiégent, l'établissement d'une telle masse de sions, et quelqu'onéreux que le paiement dût én être à la France, la commission chargée de l'examen dú budget, tout en reconnaissant que la masse de ces pensions excédait d'environ jo millions la somme à laquelle il eût été conve

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En secours aux réfugiés Égyptiens, Espagnols et Portugais, à.

1,900,000

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En pensions sur la caissé des invalides de la marine, à.'

4,410,000

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Notez que dans ces 93,410,000 fr. ne sont pas comprises les pensions accordées sur les fonds des ministères et sur diverses autres caisses, pensions dont le montant n'est pas encore connu.

nable de la porter (1), tout en reconnaissant que cette énorme quantité de faveurs et de grâces, était, en ce moment, la plus grande plaie de l'état, tout en reconnaissant que beaucoup de pensions étaient illégitimes, puisqu'elle disait que les mêmes individus en recevaient plusieurs, qu'ils les recevaient sans titres apparens, et qu'elles leur étaient payées obscurément sur des caisses diverses, la commission, disonsnous, n'a point proposé de les soumettre à une révision générale; elle a avancé que cette mesure aurait plus d'inconvéniens politiques que d'avantages pour le trésor, et cette proposition n'a pas trouvé dans la chambre un seul contradicteur.

Mais voici quelque chose de mieux. Si la commission n'a pas voulu revenir sur les désordres qui lui paraissaient avoir eu lieu dans la distribution des pensions, elle a voulu du moins mettre un terme à ces désordres et empêcher qu'ils ne se renouvelassent à l'avenir. Les mesures qu'elle a proposées pour cela ne tendaient point à réduire les faveurs déjà accordées, elles avaient

(1) Elle a proposé de fixer le maximum, pour les pensions civiles, à 3 millions, et pour les pensions mi litaires, à 20 millions.

simplement pour objet d'empêcher qu'on ne les 'prodiguât encore. La commission demandait que toutes les pensions qui se paient dans les 'différens ministères fussent inscrites au trésor public, et payées sur les fonds généraux affectés à la dette publique; elle demandait que l'inscription fit connaître la date et la nature de l'acte constitutif de chaque pension; elle demandait que nulle pension ne fût inscrite, ni payée au-delà du maximum fixé par les lois; elle demandait enfin qu'à l'avenir aucune pension ne fût inscrite au trésor qu'en vertu d'une ordonnance, dans laquelle les motifs et les bases légales seraient établies, et qui aurait été insérée au Bulletin des lois.

Il ne semblait pas que des mesures si simples, -si sages, si indispensables, pussent être combattues; elles l'ont été très-violemment cependant, et elles l'ont été précisément par les défenseurs d'un parti auquel le ministère de la guerre était accusé d'avoir prodigué les pensions et les grâces; elles l'ont été par des hommes dépendans de ce ministère. MM. Tabarié et Sartelon ; MM. les généraux Augier, d'Ambrugeac, Ernouf; MM. Cor net d'Incourt, de Villèle, Benoît, Bruyères de Chalabres, se sont récriés très-fortement, chacun à leur tour, contre la centralisation des pensions, et ce n'a été qu'avec une peine extrême.

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