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je renonce aux décrets des conciles de Constance et de Bâle; peu m'importe qu'ils aient été célébrés avec toutes les formalités et conditions qui prouvent incontestablement leur écuménicité.

» 2o. Je préfère à la décision de Pie VII l'opinion des docteurs irréfragables qui ont le courage de se mettre au-dessus de Sa Sainteté, en obligeant les prêtres à des actes qu'elle n'a pas exigés ; qu'on m'accuse d'orgueil et de présomption, qu'on m'objecte que je manque de respect au chef de l'église, je m'en mets pen en peine,

» 3o. Je me garderai bien d'adopter la décision du S. Père concernant les biens nationaux. Loin de là, je m'éleverai contre de toutes mes forces. Les temps ont bien changé ! dans les premiers siècles, la pauvreté évangélique, pratiquée par les pasteurs, leur conciliait le respect et l'estime des fidèles; aujourd'hui nous vivrions dans l'humiliation et l'avilissement, si nous étions dépourvus de propriétés! Que la malignité se plaise à dire que nous voulons remplacer les vertus par les richesses; propos absurde et digne de mépris! Je ferai, à l'exemple de nos docteurs, tous mes efforts pour faire restituer les biens nationaux, sans avoir égard à la décision du pape.

» 4°. J'avoue avec componction que dans les malheureuses circonstances de la révolution, j'ai 'commis un crime abominable en aimant mieux

donner des secours spirituels à mes concitoyens, que de les en voir privés et exposés à la damnation éternelle. Je le dis avec regret ; j'étais persuadé que mon ministère m'obligeait de rester à mon poste, pour m'opposer aux entreprises des sectaires, aux progrès de l'irreligion et de l'immoralité, à l'infraction d'une des lois les plus respectables de la discipline ecclésiastique (le célibat des prêtres); il est fàcheux d'être tombé dans une erreur impardonnable, n'ayant d'autre intention que de faire le bien.

5. Je tiens pour authentiques les trois brefs attribués à Pie VI, et, en cas de besoin, les cinq autres cités plus haut, quoique la critique éclairée et judicieuse méprise et rejette les uns et les

autres.

» 6o. Je déclare, au mépris des maximes les mieux fondées du droit canonique, au mépris de la doctrine du clergé de France, et même du serment du légat, que je suis excommunié, schismatique, suspens et irrégulier.

»7°. Je reconnais que je me suis encore rendu coupable d'un crime énorme, d'avoir, après mon 'adhésion au concordat, reçu des pouvoirs d'un évêque constitutionnel, confirmé le par pape, parce que les fonctions de cet évêque étaient au moins illicites, malgré l'institution du S. Père, attendu qu'il ne s'était pas rétracté. Telle est la

,

décision de très-habiles docteurs, à laquelle je

souscris.

*

>>8°. Ainsi, j'ai prévariqué en recevant de lui des pouvoirs, en remplissant més fonctions, en lui présentant des chrétiens pour le sacrement de confirmation, puisqu'il ne pouvait fonctionner sans commettre un péché mortel. J'ai donc commis une faute très-grave de le solliciter à faire des œuvres illicites.

- 9o. Il est vrai que je me suis appuyé de l'exemple des prêtres rentrés qui ont adhéré au concordat. Les grands vicaires ont reçu sans scrupule des pouvoirs de cet évêque ; ils les ont communiqués à d'autres; les autres prêtres ont reçu les pouvoirs de la même source, des nominations à des paroisses qu'ils désservent encore en vertu de la même autorité. Que de crimes commis depuis l'époque de notre adhésion! J'en suis cons

terné.

» 10°. Dans les premiers momens, on ne s'en doutait pas, on n'en parlait pas; mais aujourd'hui on est plus éclairé, on se rappelle un prin cipe d'éternelle vérité, qu'on a prêché cent fois : qu'il n'est pas permis de faire un mal, même léger, pour qu'il en résulte un bien. Nous avons donc tous également tort; nous sommes tous dans la même catégorie, tous pécheurs, tous prévaricateurs; daigne le Dieu des miséricordes nous

inspirer la componction, avec un désir sincère de faire pénitence. Amen. »

Les journaux ont annoncé que l'éloquence des nouveaux prédicateurs avait produit un tel effet à Bourges, que plusieurs personnes, enflammées d'un saint zèle, avaient publiquement brûlé les OEuvres de Voltaire et de Rousseau. La pièce qui a produit ce prodige mériterait sans doute une place distinguée dans nos bibliothè ques, et il faut espérer qu'elle ne sera pas perdue; mais en attendant qu'on nous la donne, nous allons en rapporter un fragment qui fera juger du reste :

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« Oui, mes très-chers frères, s'est écrié l'éloquent prédicateur, s'il est parmi vous un pa÷ resseux, un menteur, un hypocrite, c'est un philosophe;

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» S'il est parmi vous un gourmand, un luxurieux, un ivrogne, un débauché, c'est un philosophe;

» S'il est parmi vous un usurier, un homme dur, impitoyable, c'est un philosophe ;

» S'il est parmi vous, enfin, un escróc, un voleur un homme sans honneur et sans foi,

c'est un philosophe.

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» Eh! mes très-chers frères, voulez-vous sa→ voir quels ont été les plus grands philosophes? c'est Rousseau, c'est Voltaire! »

QUI ONT EU LIEU À LILLE.

On a beaucoup parlé à Paris, il y a quelque temps, des désordres qui avaient eu lieu à Lille vers la fin d'avril, à l'occasion d'une représentation théâtrale, donnée par Talma, et des causes qui avaient provoqué ces désordres. Voici, à ce sujet, des détails qui nous viennent de bonne source. Nous croyons qu'ils méritent d'être mis les yeux du public.

sous

La représentation dont il s'agit, était annoncée dès le 23 avril; les officiers de la garnison, et notamment ceux du régiment des chasseurs de la Vendée, avajent manifesté hautement l'intention de siff Talma; ils s'étaient réunis et avaient concerté leur plan d'attaque. Ils voulaient voir dans Talma un personnage politique; les Lillois l'admiraient comme un grand acteur, et ne pensaient pas qu'ils dussent lui demander compte de ses opinions. Ce peuple est naturellement paisible, mais il est ferme, obstiné et fier; il supporte impatiemment toute violence, et veut être libre dans ses affections. Instruits du projet des officiers, ils n'en furent que plus décidés à

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