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sion des crimes, des délits et des simples contraventions.

Les lois d'administration viennent se ranger, selon leur sujet, parmi les lois ou politiques, ou civiles, ou criminelles.

130. Les droits, dans le sens de facultés, sont ou naturels, ou constitutionnels, ou ordinaires, autrement secondaires; ou politiques, ou civils, ou de droit criminel, selon la nature des lois dont ils dérivent.

131. Les droits politiques sont proprement ceux qui nous font participer à la formation ou à l'action des grands pouvoirs publics, des pouvoirs qui influent sur la confection des lois, ou qui sont chargés de cette exécution, en vertu de la constitution.

L'on comprend dans cette classe, d'abord le droit d'être nommé l'un des représentans ou héréditaires, ou électifs de la nation; ensuite le droit de voter dans les assemblées électorales, de concourir à y nommer des colégislateurs, des administrateurs, des juges. Ce sont aussi des droits politiques, ceux d'être nommé ministre, ou magistrat, ou juré. Les droits civils sont tous les autres droits qui appartiennent aux citoyens, tels qu'ils sont réglés par les lois ou par les usages.

Dans les états bien gouvernés, il faut avoir au moins les droits civils pour y être administrateur ou fonctionnaire public avec autorité.

132. Les pouvoirs publics constitués sont in

compétens pour déroger, par aucun acte, aux lois constitutionnelles. Ces lois établissent ce qu'on appelle, par excellence, le droit public constitutionnel, supérieur aux actes de toutes les autorités qui n'exercent pas le pouvoir constituant.

Il y a des lois et conséquemment des droits qui ne sont ni constitutionnels, ni politiques, mais qui sont appelés publics', c'est-à-dire, qui appartiennent à l'ordre public, qui l'intéressent à tel point, que nul ne peut valablement y déroger par aucune convention, par aucun acte.

Ces lois sont d'abord toutes les lois qui concernent les fonctionnaires publics, les règles et les formes à suivre dans les actes publics; voilà le droit public intérieur de chaque état. Le droit naturel appliqué aux intérêts des nations entre elles, les traités et les usages concernant ces mêmes intérêts, forment le droit public extérieur, le droit international, jus inter gentes.

1 Voy. page 119, no 142.

CHAPITRE II.

Droits politiques et civils des Français, avant la Charte de 1814.

Pacta servanda.

133. CE chapitre serait tout-à-fait inutile, si la flatterie et les passions ne s'efforçaient pas sans cesse de tout obscurcir, et de contester ce qu'il y a de plus certain.

Il s'est glissé dans le préambule de la Charte, et dans le discours ministériel, pour annoncer qu'elle était mise sous les yeux du sénat et du corps législatif, des locutions inexactes, qui ont semé la défiance dans les cœurs, et n'ont et n'ont que trop favorisé l'entreprise de mars 1815.

:

On a dit la Charte n'est qu'un acte libre, ou arbitraire et révocable du pouvoir royal, un pur octroi, un don que le prince peut retirer, une ordonnance de réformation, que l'on pourrait miner sourdement, puis révoquer au jour favorable, comme l'édit de Nantes. On l'a dit; et le trône royal a été renversé une seconde fois. Des ex-privilégiés l'ont vu, l'ont souffert comme les autres ; et, après la seconde restauration, ils ont renouvelé ces mêmes attaques, se fondant sur l'équivoque, sur des formules vicieuses, affectant de mé

connaître les intentions certaines, l'acquiescement national, la vérité, la substance des choses.

134. Dans les mêmes textes, dont l'esprit de parti abuse depuis quatre années, sont aussi des aveux précieux, qu'il faudrait concilier avec ces locutions mal sonnantes. On y lit que la Charte maintient nos droits : elle ne les a donc pas créés? Que la Charte est l'expression d'un besoin réel; qu'elle est appropriée aux désirs, aux besoins, à la situation respective des hommes et des choses: il n'existe donc rien de plus juste et de plus stable, et de plus nécessaire que cette institution? Qu'elle est comprise parmi les engagemens entre sa majesté et son peuple: elle n'est donc pas un établissement précaire, un acte arbitraire du pouvoir royal? Elle n'est donc ni susceptible d'être abrogée comme une loi ordinaire, ni révocable comme une ordonnance.

135. C'est une faute sans doute et un malheur, que l'on n'ait pas écarté, par des formes plus rassurantes et des expressions mieux choisies, les sophismes de quelques personnes. Mais on ne peut douter sérieusement, qu'avant le 4 juin 1814, les Français n'eussent des droits politiques autant et plus étendus que maintenant, et des droits civils semblables à ceux que leur assure la Charte. De droit, leur législation fut toujours nationale; leurs lois et leurs contributions, et certains actes de haute administration, durent toujours être le résultat de délégations consenties dans les assemblées de la

nation bien ou mal représentée. Ce fut le principe de la convocation des derniers états généraux, qui dans une constitution jurée par le roi, et au fond assez peu différente de la Charte de 1814, donnèrent un vrai gouvernement représentatif, plus libre que celui de la Charte ; et, ce qui est plus important, par d'immenses travaux, mirent de suite en harmonie avec cette constitution toutes leurs lois secondaires.

Jamais, depuis 1791, ils n'ont perdu en droit leur gouvernement constitutionnel et représentatif, quoiqu'ils l'aient vu souvent suspendu, violé, obscurci, comme ils ont vu la Charte, depuis qu'elle existe, en partie violée, suspendue, obscurcie par des lois exceptionnelles, ou par des ordonnances illégales.

Et quant à leurs droits civils reconnus par la Charte, on ne peut contester qu'ils les avaient aussi en 1814. Tous ces droits dérivent clairement des plus saintes lois de la nature; ils demeurent immuables comme elle, et les protéger, ces droits précieux, est l'unique but pour lequel existent les gouvernemens légitimes, le seul moyen de maintenir les gouvernemens quelconques.

Les lois et les ordonnances exceptionnelles accusent les gouvernans, sans pouvoir détruire les droits politiques, ni les droits civils des gouvernés. C'est ainsi que la morale subsiste dans toute sa force, malgré les déréglemens journaliers du genre humain.

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