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pelés des membres des premières autorités de l'état. Si ce n'était qu'un faux semblant, c'était une louable apparence, qui devait parfois être utile. Il faudrait que cet appel fût à tour de rôle ; autrement les ministres n'appelleraient guère que les hommes connus pour n'avoir pas d'avis qui leur soit propre.

La grâce n'a point d'effet rétroactif; elle suppose délit et culpabilité jugée; et ne fait que réintégrer le condamné dans ses droits politiques, civils, utiles et honorifiques, à compter depuis qu'elle est accordée.

Il ne faut pas confondre l'amnistie avec la grâce. Généralement, l'amnistie est un acte législatif, comme la grâce est un acte du pouvoir royal, de la personne du monarque, soit qu'il agisse de luimême, soit qu'il s'entoure de conseils, soit qu'il ait égard à des pétitions.

CHAPITRE XII.

Conseil-d'État.

399. Il n'y a point de conseil-d'état selon la Charte. Il y a de fait un conseil-d'état ; il y a même plusieurs conseils-d'état sous des noms divers; il y a plusieurs branches luxuriantes du plus nom

1 Voy. l'Appendice no vitt.

breux des conseils-d'état. Mais toutes ces institutions ne doivent leur origine qu'à des ordonnances du roi, ou, si l'on veut, à la constitution de l'an 8, et à des actes du gouvernement consulaire et du gouvernement impérial, ou enfin au régime royal détruit il y a trente ans. Elles ne peuvent donc être tout au plus que des établissemens provisoires, si on leur suppose de l'autorité dans le royaume.

Le conseil-d'état, selon les ordonnances, n'a de juridiction établie ou reconnue d'une manière légale, et postérieurement à la Charte, que la juridiction très-anti-constitutionnelle relative à l'exercice des droits d'électeur ou d'éligible, et fondée sur l'art. 6 de la loi des élections du 5 février 1817, qu'il n'est pas tems de réformer.

Comme tribunal du contentieux de l'administration, de la validité des prises maritimes, des appels comme d'abus, de la vérification des bulles, de la mise en jugement des agens exécutifs, en un mot comme cour judiciaire, le conseil-d'état, dans tous ses genres et dans toutes ses espèces, est donc extra-légal comme il est anti-constitutionnel.

Les ordonnances qui l'ont recréé, selon l'ancien régime, ou qui l'ont modifié, sont en date des 29 juin 1814, 23 août, 21 septembre 1815, et 19 avril 1817.

Sous un gouvernement représentatif, il ne peut y avoir d'autorités judiciaires légitimes, que celles qui sont fondées en loi, et qui n'ont rien de con

traire à la Charte constitutionnelle; il ne peut y avoir de juges amovibles à volonté.

Considéré comme assemblée consultante, appelé habituellement et accidentellement par le roi ou les ministres, pour donner de simples avis; pour préparer même des travaux législatifs, ou des réglemens, ou des décisions, tout conseil-d'état est extra-constitutionnel, et, jusqu'à présent, extralégal, mais nullement contraire à l'esprit de la Charte. Seulement, pour éviter des abus déjà trop manifestes, un tel conseil-d'état doit être, en définitive, à la charge de la liste civile.

Le conseil des ministres est nécessaire, et le seul conseil constitutionnel du monarque; il faut que le prince puisse consulter; et il faut bien que les ministres confèrent entre eux, pour qu'il y ait unité de pensée et d'action ministérielles.

FIN DU LIVRE TROISIÈME.

LIVRE QUATRIÈME.

RÉVISION DE LA CHARTE.

J'AURAIS voulu publier ce quatrième livre, y développer les avantages de notre constitution, ses imperfections, ses lacunes, proposer un mode de révision, indiquer le tems et les formes, et les additions et les corrections qui peuvent sembler convenables; mais je suis forcé de m'arrêter en ce

moment.

La nation pense, avec les publicistes les plus éclairés, et l'expérience, plus éloquente que tous les écrits du monde, lui a prouvé que notre monarchie constitutionnelle a besoin de calme et de fixité pour s'établir et pousser des racines. La nation répète, aujourd'hui même, avec son roi: L'avantage d'améliorer est à côté du danger d'innover. >>

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Encore une fois, le 5 mars 1819, notre pays et notre constitution viennent d'être mis par le roi à l'abri des attaques de leurs ennemis, quoique l'on

ait essayé d'y confirmer les majorats et les lois d'exception.

1

Je ne peux mieux finir qu'en répétant les vœux de tous les bons Français:

Qu'ils tombent les derniers voiles épars sur l'édifice constitutionnel! Que les derniers restes des lois odieuses d'exception, de proscription, d'exclusion, disparaissent dès à présent! Plus de bannis du royaume, plus d'exclus de la pairie, sans jugement! Que les juges d'assises et les jurés ne soient plus des commissaires choisis! Que l'on voie briser enfin les dernières entraves de la liberté de la presse! Que des jurés, tirés au sort, connaissent des abus de cette liberté, et généralement des délits et des crimes! Que les administrateurs locaux soient élus ou désignés par le peuple! Que la garde nationale soit organisée pour le maintien de nos libertés, qu'elle recouvre le choix de ses officiers, et qu'elle soit affranchie des taxes arbitraires! Que tous ces justes vœux s'accomplissent, et les bénédictions de tous les citoyens, remontant vers le trône, l'environneront sans cesse de reconnaissance et d'amour.

FIN DE L'ESSAI SUR LA CHARTE.

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