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a dit quelque part qu'elles mettaient un siècle à faire une lieue; c'est ce que nous voyons encore tous les jours pour les prairies artificielles, pour la culture des fourragesracines, etc.

Si nous voulons comparer l'effet de ce régime sur les chevaux à celui de la pomme de terre, nous devons dire qu'avec le seigle cuit nos chevaux sont mieux entretenus et ne suent point aussi facilement. Il y a sans doute moins d'économie, mais aussi il y a moins de main-d'œuvre et moins de cuisson.

Quant à l'économie qu'apporte le régime du seigle cuit dans notre pays, l'avoine, dans le courant de l'été, époque où ce mémoire a été rédigé, valait 10 fr. et le seigle 13 fr. l'hectolitre; or, un hectolitre de seigle équivaut à trois d'avoine; on remplace donc 30 fr. par 13, où si l'on veut par quatorze, en mettant 1 fr. pour frais de cuisson, l'économie est donc de 16/30 ou 8/15; par conséquent, pour les chevaux qui reçoivent de six à dix litres de grain par jour, elle sera moyennement de 168 fr. par an. Cette valeur relative du seigle et de l'avoine est fixée d'après une moyenne depuis plusieurs années, et nous avons vu que chez M. Guènié le prix du seigle était encore relativement plus bas; aujourd'hui cette économie serait moindre avec le seigle à 16 fr. et l'avoine à 9 fr. 20 centimes l'hectolitre; mais nous sommes dans ce moment sous l'influence exceptionnelle, soit d'un prix élevé des grains qui servent à la nourriture de l'homme et particulièrement du seigle, soit encore d'un prix faible pour l'avoine provenant d'une récolte abondante.

Toutefois l'exemple de M. Guènié n'est pas resté sans prosélytes. Dans le voisinage de Saint-Brix, le maître de poste de Vermanton a adopté avec plein succès ce régime

pour ses chevaux; celui d'Autun l'emploie aussi depuis quelque temps et il s'en applaudit beaucoup; ses chevaux cependant, hors de chez lui, mangent de l'avoine, mais ne reçoivent que du seigle cuit dans ses écuries. Il trouve que l'avoine donnée ainsi par intervalles produit d'autant plus d'effet.

Ces faits répétés dans plusieurs localités, sur un grand nombre d'animaux et toujours avec le même succès, ne sont donc plus seulement des expériences, mais bien des résultats qui semblent offrir toute la certitude désirable; et puis ils ont perdu ce vernis de nouveautés qui souvent fait illusion. Depuis plus de 3 ans, M. Guènié a adopté cette méthode et il s'en loue de plus en plus; et nous-mêmes, depuis plusieurs années d'expériences, nous n'avons rencontré aucun inconvénient et avons recueilli tous les avantages que nous pouvions espérer.

Dans l'intérêt du pays que nous habitons, nous croyons devoir insister ici sur l'observation faite par M. Guènié de la disparition dans ces écuries de la fourbure, des indigestions, mais surtout des maux d'yeux ou fluxions périodiques; les chevaux de notre pays, en raison de leur tête chargée, de leur grosse ganache et en raison peut-être du climat, sont sujets aux maux d'yeux; ce serait pour nous un bien grand avantage de voir disparaître ou du moins diminuer ces cruels accidens, qui alors même qu'ils n'ôtent pas la vue, affaiblissent l'organe et rendent la vente du cheval difficile et peu avantageuse. Un quart peut-être des jeunes élèves éprouvent cet accident, et il est rare que ceux qui les ont éprouvés ne perdent pas plus tard un œil au moins; devenus adultes, jusqu'à l'âge de 7 à 8 ans et quelquefois au-delà, beaucoup de nos chevaux conservent la vue tendre et sont attaqués de fluxion. Nous trouverions

donc un grand avantage pour nos chevaux jeunes et vieux à adopter le régime du grain cuit; si le seigle était un peu cher, le maïs y suppléerait utilement, surtout pour les jeunes chevaux, puisque c'est avec le maïs cru qu'on met en état les jeunes élèves qu'on vend au milieu de l'hiver.

D'ailleurs, cette méthode de cuisson des alimens ne doit point rencontrer d'obstacles pour son adoption dans notre pays, puisque les engrais de bestiaux, qui sont le principal produit de nos fermes, se font déjà avec la nourriture cuite.

M. A. PUVIS.

(LE CULTIVATEUR, juin 1840, 12. Année, 6e, cahier, volume XVI.)

Des divers moyens de remédier à la Disette des fourrages.

La mauvaise récolte des prairies, une sécheresse presque continue qui fait craindre que les céréales soient peu productives en paille, le prix élevé des grains et des racines doivent éveiller vivement la sollicitude des agriculteurs.

Dans ces circonstances, le comité central d'agriculture du département de la Côte-d'Or a cru devoir consacrer plusieurs séances à la recherche des moyens les plus importans pour remédier à la disette des fourrages.

Parmi les plantes dont les semailles tardives peuvent offrir de grands avantages, le maïs est une de celles qui doivent occuper le premier rang.

Les feuilles vertes, et même les feuilles desséchées produisent un fourrage dont on ne connaît pas assez généra

lement l'importance; lorsqu'il est coupé avant la sortie des fleurs mâles, aucune plante n'est autant du goût des bestiaux, et ne les nourrit mieux à dose égale; aussi doit-on éviter de leur en donner à discrétion, dans la crainte d'accident, surtout lorsque l'on n'a pas pris la précaution de le laisser faner après l'avoir coupé.

Le maïs est rafraîchissant, il augmente le lait des vaches et lui donne un bon goût. Dans le Midi, la partie supérieure de la plante, ainsi que les feuilles lorsqu'elles n'ont pas été récoltées en vert, sont macérées dans l'eau pure, ou légèrement salée; les tiges sont écrasées, hachées et humectées; dans cet état elles contiennent encore 74 pour 100 de parties nutritives.

On sème le maïs pour fourrage, épais, à la volée, depuis la fin d'avril jusqu'au milieu de juillet, par petites parties, de quinze en quinze jours; on se ménage ainsi pendant trois ou quatre mois une ample récolte de l'un des meilleurs fourrages verts.

Il peut rendre de 300 à 400 quintaux de fourrage par hectare, et 100 kilog. de fourrage vert donnent environ 16 kilog. de fourrage sec.

Le millet ou panis, et principalement l'espèce appelée moha ou millet de Hongrie, produit, deux mois après la semaille, une belle récolte de fourrage. Il réussit mieux sur les fonds légers et substantiels, de nature sableuse, que dans les terres calcaires. Il faut 12 à 13 kilog. de graines par hectare. La paille du millet récolté en grains est aussi une excellente nourriture pour les bœufs.

Le sarrasin qui, par sa végétation tardive, offre de grands avantages, doit être donné en vert avec précaution; il peut causer des vertiges, principalement aux moutons; il leur fait enfler la tête, et leur occasione des boutons

dans cette région du corps. Plusieurs agriculteurs ont depuis peu constaté ces graves inconvéniens. Son emploi en dragée (1) est cependant fort usité dans les départemens de Saône-et-Loire et de l'Ain : ce qui ferait penser que, mélangé à d'autres plantes, il perdrait ses qualités nuisibles. Le sarrasin doit être fauché en fleur; il faut environ un hectolitre et demi de semence par hectare, et celle-ci doit être enterrée très-profondément.

La vesce fournit un très-bon fourrage; elle peut être semée jusqu'à la fin de juin, mais elle redoute un terrain trop sec. Si l'on veut donner la vesce en vert à l'étable, il faut prendre les précautions recommandées dans l'emploi de la luzerne. Pour transformer la vesce en foin, on doit la couper au moment de l'épanouissement des dernières fleurs, parce qu'alors elle contient le plus de parties nutritives. La quantité de semence est de 24 à 26 décalitres par hectare il est bon de semer avec les vesces un peu d'avoine et de seigle pour les soutenir et les ramer.

La lentille et le lentillon, dont les fanes sont très-nourrissantes, ont la précieuse propriété de résister aux sécheresses et de prospérer dans des terrains calcaires fort médiocres. Leur paille est considérée comme préférable aux meilleurs foins. Leurs tiges fines et grimpantes ont besoin d'être soutenues par un peu de seigle ou d'avoine, comme celle des vesces. Un hectare emploie 12 décalitres de

semence.

Les fèves donnent un bon fourrage; soit coupées en fleurs, soit lorsque leurs gousses sont formées, elles entrent très-bien dans la composition des dragées et des hivernages; la petite espèce appelée feverolle, est celle adoptée

(1) On appelle ainsi dans certaines localités une réunion de pois, vesces et autres plantes semées pour la nourriture des bestiaux.

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